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22 octobre 2019 - Cette séance est organisée par Xavier MARTIN, Président de l Académie natio- nale de Chirurgie et Bernard CHARPENTIER, membre de l Académie nationale de médecine.
Accès à la transplantation rénale et don du vivant Olivier BASTIE
La greffe rénale à partir de donneur vivant est une priorité du plan greffe, 16 % des greffes rénales étant actuellement réalisées selon cette modalité. Ce troisième plan greffe a tracé les orientations fortes avec un doublement de l activité de greffe rénale donneur vivant d ici fin 2021. La baisse significative de l activité donneur vivant constatée en 2018 a conduit à identifier les freins à cette acti- vité (complexité du processus, charge de travail) et à souligner la nécessité d une information large du public et d une formation du corps médical ou paramédical sur ses avantages.
Favoriser les bonnes pratiques est nécessaire; cela suppose des recommandations concernant l ins- cription si possible préemptive en liste d attente pour transplantation rénale, la mise en place des RCP à distance entre tous les acteurs, l éventuel développement du don croisé actuellement assu- jetti à des contraintes logistiques et réglementaires.
Une réflexion sur les modalités d une organisation optimale est en cours: la notion de centre expert et une organisation logistique lourde font émerger la nécessité de renforcer certains centres en terme de moyens dédiés spécifiques. Il est important pour assurer la confiance et la sécurité des patients de mieux assurer le suivi des donneurs vivants sur le long terme.
Greffe de rein d un donneur vivant. Bilan préopératoire. Suivi du donneur Yvon LEBRANCHU
Compte tenu des chances de survie à long terme du greffon (+15 % à 10 ans), la greffe de rein d un donneur vivant doit être évoquée en priorité chez tout insuffisant rénal chronique susceptible d être transplanté, particulièrement chez le sujet jeune. Le bilan préopératoire est une procédure longue n aboutissant à la greffe qu une fois sur trois; ses étapes sont successivement les suivantes:
prise de contact par appel téléphonique ; niveau I : bilan en externe associant biologie
et imagerie ; niveau II : bilan en hôpital de jour compre-
nant consultations et entretiens, bilans cardiaque et gynécologique ;
niveau III : bilans au CHU (contrôles sanguins et scintigraphie rénale) et en externe (contrôles cardiaque et gynécologique) ;
niveau IV : triple consultation (néphrologie urologie et anesthésie) ;
avis d un comité d expert ; enregistrement au Tribunal de Grande
Instance.
Ce bilan permet:
une étude de la faisabilité du prélèvement et de la greffe par l absence de toute contre-in- dication médicale, l analyse de la compatibilité des groupes sanguins et HLA du donneur et du receveur, la prise en compte des aspects chirur- gicaux, en particulier la recherche de variantes anatomiques (artères ou veines multiples) ;
l analyse des risques pour le donneur: risques à court terme péri-opératoires et risques à long terme dominés par l insuffisance rénale termi- nale car la néphrectomie entraîne une diminu- tion de 50% du débit de filtration glomérulaire.
Le donneur vivant de rein : pour une égalité d accès à la transplantation rénale.
SEANCE Académie nationale de chirurgie et Académie nationale de médecineOlivier BASTIEN, Yvon LEBRANCHU
Alois Alzheimer : une ou des maladies ?
SEANCE CommunicationsAcadémie nationale de pharmacie et Académie nationale de médecine Jean-Pierre MICHEL, Ronald MELKI, Denis LE BIHAN, Bruno VELLAS
19 novembre 2019 - Impact sociétal de la maladie d Alois Alzheimer Jean-Pierre MICHEL
Décrite en 1906 par le Dr Alois Alzheimer, cette maladie englobe aujourd hui toutes les formes de déclin cognitif liées à l âge. Qualifiée de maladie « la plus redoutée », elle est présente en France chez 50 à 70% du million de personnes atteintes de maladies démentielles et n est probablement diagnostiquée que chez deux sujets sur trois. Deux cas sur trois sont féminins. Son impact sociétal est immense à trois niveaux : Niveau individuel. Il s agit d une altération progressive des activités de la vie quotidienne, d une crise identitaire et d une altération de la qualité de vie ; Niveau des proches. Ils assurent l essentiel des soins au prix d un lourd impact physique, psychologique et financier (50% de l ensemble des coûts sont assurés par les familles) ; Niveau sociétal. Ces coûts ont été récemment estimés par le Gérontopôle de Toulouse entre 16 000 et 30 000 euros annuellement selon que la maladie est débutante ou sévère. Au total, ce sont 13 milliards d euros qui sont consacrés annuellement par la France à la prise en charge des malades atteints d Alzheimer ou de maladies apparentées.
Hypothèse infectieuse : Alois Alzheimer et autres maladies neuro-dégénératives Ronald MELKI
L apparition de dépôts intra- ou extra-cellulaires
de protéines dans le système nerveux central est le signe distinctif de plusieurs troubles neurodégéné- ratifs progressifs chez l homme. Les constituants protéiques de ces dépôts et les régions du cerveau touchées diffèrent d un trouble neurodégénératif à un autre. Jusqu à récemment, on pensait que le cercle vicieux constitué par l agrégation de proté- ines, leur propagation/multiplication et l accu- mulation dans le système nerveux central de ces agrégats était l apanage de la protéine prion PrP. De récentes données suggèrent que des agrégats de protéines constitués de protéines distinctes de la PrP se propagent et s amplifient dans le système nerveux central, entraînant différentes maladies. Dans la maladie de Parkinson et troubles appa- rentés, la protéine alpha-synucléine forme des amas mixtes protéiques et membranaires, appelés corps de Lewy et neurites de Lewy. Les agrégats de la protéine alpha-synucléine circulent entre les cellules, s amplifient en recrutant de l alpha-synu- cléine monomérique endogène et provoquent des synucléinopathies distinctes par un mécanisme qui demeure incertain. Les preuves expérimen- tales à l appui de la propagation des agrégats de l alpha-synucléine à la manière des agrégats de la protéine prion PrP sont présentées, ainsi que le mécanisme d agrégation de l alpha-synucléine et la manière dont cette agrégation peut conduire à des synucléinopathies distinctes. La protéine Tau, fortement impliquée dans la maladie d Alzheimer, se comporte comme l alpha-synucléine.
Des recommandations internationales précises (KDIGO) ont été établies en 2017 pour définir les conditions d autorisation du prélèvement selon le débit de filtration glomérulaire du donneur, évalué en fonction de la créatininémie, du sexe, de la race et éventuellement de l âge en cas de valeur limite. Tenant compte de ces précautions, le risque d insuffisance rénale terminale est très faible mais multiplié par dix par rapport à une population en bonne santé et majoré particuliè- rement dans les populations à risque (race noire, obésité, pré-diabète, sujet jeune). En fait, la survenue de l insuffisance rénale terminale chez le donneur n est pas due à un déclin progressif
de la fonction rénale du rein unique mais à une maladie intercurrente du greffon. Cela souligne la nécessité d un suivi à long terme du donneur sur les plans médical (consultation annuelle auprès d un néphrologue) et psychologique.
En conclusion, Bernard Charpentier souligne que 18 000 patients sont en attente d une greffe, le nombre ayant explosé ces dernières années, insiste sur la sécurité juridico-administrative que procure l Agence de la Biomédecine et indique l inégalité sur les donneurs vivants notamment selon l impor- tance de la famille, le groupe sanguin, et le typage HLA.
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