Résumé
Les polymorphismes génétiques expliquent une partie des accidents médicamenteux parce que certains variants alléliques de gènes codant pour des enzymes, des cibles ou des transporteurs intervenant dans le métabolisme des médicaments sont associés à des gains ou des pertes de fonction. Le métabolisme des médicaments a lieu essentiellement dans le foie et est sous le contrôle des enzymes de phase I, incluant de nombreuses isoformes du cytochrome P450, qui rendent les molécules plus polaires par hydroxylation, et des enzymes de phase II qui catalysent des réactions de conjugaison. Les cytochromes P450 assurent 80 % des réactions d’oxydation du fait de leur faible spécificité vis-à-vis de leurs substrats. Les polymorphismes les plus étudiés sont ceux des isoformes CYP2D6 et CYP2C9 parce qu’ils concernent un grand nombre de médicaments et affectent des fractions importantes de la population. A titre d’exemple, plusieurs variants du CYP2C9 réduisent l’activité de l’enzyme, ce qui entraîne chez ceux qui en sont porteurs des surdosages, comme c’est le cas pour les anti-vitamines K. La thiopurine méthyl transférase et la UDP-glucuronyl transférase sont des enzymes de phase II qui conjuguent, respectivement, les métabolites de la 6-mercaptopurine avec un radical méthyl et les métabolites d’un anti-cancéreux, l’irinotécan, avec un radical glucuronyl. Des mutations des gènes de ces enzymes produisent une inhibition et un surdosage en métabolites actifs avec risque d’aplasie médullaire. Les effets des anti-vitamines K dépendent aussi du polymorphisme de la vitamine K époxyde réductase qui est l’enzyme cible de cette vitamine. Dans le cas du méthotrexate, un antagoniste de l’acide folique, une mutation du gène de la méthylène tétrahydrofolate réductase diminue le pool de folates et accroît ainsi les effets du
Summary
Genetic polymorphisms can lead to drug adverse effects because certain allelic variants of genes that encode enzymes, targets or carriers involved in drug metabolism, are associated with an increase or a loss of function. Drug metabolism takes place essentially in the liver and is regulated by phase I enzymes (including several cytochrome P450 isoenzymes), the role of which is to make drug metabolites more polar by hydroxylation, and by phase II enzymes that catalyse conjugation reactions. Cytochromes P450 isoenzymes control 80 % of oxidative reactions, owing to their low substrate specificity. The most extensively studied polymorphisms are those of CYP2D6 and CYP2C9, which are frequent and affect the metabolism of many drugs. For example, several CYP2C9 gene variants are associated with lower activity of the corresponding enzyme, potentially leading to drug overdose. Thiopurine methyl transferase and UDP-glucuronyl transferase are phase II enzymes that conjugate respectively 6-mercaptopurine metabolites with a methyl radical and metabolites of irinotecan (an anti-tumour drug) with a glucuronyl radical. Mutations in the corresponding genes can, through a loss of function, lead to excessively high levels of active metabolites, with a risk of bone marrow aplasia. The action of vitamin K antagonists is influenced by polymorphisms of vitamine K epoxyde reductase, the target molecule of vitamin K. A mutation in the methylene tetrahydrofolate reductase gene diminishes the folate pool and thereby increases the effects of methotrexate, a folic acid antagonist. Resistance to the anti-platelet effect of aspirin can be due to polymorphisms that affect other platelet aggregation pathways. Genotyping results must be confirmed by phenotyping, which examines the rate of transformation of a drug into its metabolites and shows whether the increase or decrease in this rate is linked to a specific polymorphism. Somatic mutations in malignant tumours can modify the response to anticancer drugs, and should therefore be taken into account. The National Academy of Medicine recommends : — development of genomic analyses for frequent polymorphisms in patients warranting treatment with drugs that have severe adverse effects ; — collection of DNA samples from patients participating in drug trials in order to examine the possible relation between adverse effects and gene polymorphisms ; — creation of biological resource centers in hospitals for the storage and analysis of tissue specimens.
Les médicaments, même lorsqu’ils sont prescrits selon les règles , sont une cause importante de morbidité et de mortalité. Dans une étude présentée devant l’Acadé- mie nationale de médecine, Patrice Queneau et coll. [1] ont montré qu’environ 10 à 20 % des malades admis dans un service de soins d’urgence l’étaient pour ce type d’accident. Au total, 410 produits ont pu être incriminés, dont le plus souvent les psychotropes, les diurétiques et les anticoagulants. En 1999, un rapport de l’ « Institute of Medicine » intitulé : « L’erreur est humaine : construire un système de santé plus sûr » attribue aux médicaments 44 000 à 98 000 décès par an aux États-Unis [2]. À l’inverse, des médicaments très utilisés sont inactifs chez certains patients. Une telle variabilité de la réponse aux médicaments dépend de facteurs environnementaux (alimentation, interaction médicamenteuse, tabagisme), de l’état du malade (sévérité de la maladie, pathologies associées, âge), d’erreurs thérapeutiques, mais aussi de déterminants génétiques. La pharmacogénétique est l’étude des relations entre la variabilité du génome et la réponse thérapeutique. Elle a pour finalité d’optimiser les décisions thérapeutiques en fonction du génome de l’individu et de la molécule cible, ce qui devrait améliorer la prise en charge des malades et contribuer à diminuer les coûts croissants des dépenses en médicaments de l’assurance maladie. La génétique est maintenant également indispensable pour guider le traitement des cancers avec l’étude du rôle des mutations somatiques observées dans les tumeurs et des maladies infectieuses avec l’analyse du génome des agents infectieux. Cette branche de la pharmacologie s’est imposée il y a plus de 50 ans lorsqu’on a constaté que les hémolyses aiguës après la prise d’un anti-paludéen, la primaquine, survenaient chez les malades présentant un déficit héréditaire en glucose-6-phosphate déshydrogénase [3]. À l’inverse de la pharmacogénétique qui étudie l’influence du patrimoine génétique sur le sort des médicaments, la pharmacogénomique a pour objet l’étude des effets des médicaments sur le génome humain. Il est cependant fréquent que les deux termes soient utilisés indistinctement. Le médicament est un xénobiotique, c’est-à-dire un composé qui nous est étranger. Son introduction dans l’organisme est suivie de deux temps, un de transformation, souvent hépatique, et un deuxième d’effet sur la cible, dans un ordre variable. Ces deux temps sont précédés par une phase d’absorption intestinale pour les médicaments administrés par voie orale. Toutes ces étapes sont assurées par des transporteurs et des enzymes dont l’expression peut varier en fonction du polymorphisme du gène concerné. En outre, l’effet du médicament peut aussi être influencé par les variations de gènes étrangers au métabolisme et à la cible, intervenant dans la réponse de l’organisme. Après avoir défini la notion de polymorphisme génétique et indiqué quelles sont les techniques de génotypage, nous considérerons avec des exemples comment le polymorphisme génétique portant sur le génome constitutionnel intervient aux différentes étapes du devenir des médicaments dans l’organisme. Nous examinerons ensuite les incidences des mutations somatiques sur le traitement des tumeurs et terminerons en comparant l’information apportée par les études de phénotypage et de génotypage et en essayant de prévoir quelles sont les perspectives de prescription personnalisée qu’ouvrent ces travaux récents.
POLYMORPHISME GÉNÉTIQUE ET GÉNOTYPAGE
Plus de 99 % du génome est commun à tous les humains. La fraction restante, bien qu’infime, est essentielle parce que les variations dans la séquence des acides nucléiques qu’elle comporte influencent la susceptibilité aux maladies, leur expression clinique et leur évolutivité et également la réponse aux médicaments, lorsque ces variations sont localisées dans des zones critiques. Un individu porte deux allèles d’un même gène, identiques ou différents, définissant l’état constitutionnel du gène. Ces gènes peuvent présenter des variations de deux types : les polymorphismes de répétition et ceux atteignant un seul nucléotide. Les premiers qui sont les plus fréquents affectent le nombre des répétitions en tandem d’une même séquence nucléotidique, encore appelée minisatellite (dix à quinze nucléotides) ou microsatellite (un à quatre nucléotides) selon l’étendue de la répétition. Ce nombre est variable d’un individu à l’autre et se transmet héréditairement. Les polymorphismes affectant un seul nucléotide (« single nucleotide polymorphism » ou SNP) consistent en des variations de base dans un nucléotide, l’une remplaçant l’autre. Il s’y ajoute, beaucoup plus rarement, des délétions totales ou partielles du gène aboutissant à un défaut de fonction et des amplifications aboutissant à des gains de fonction. Les polymorphismes des enzymes du métabolisme et du transport des xénobiotiques permettent de distinguer, pour un même médicament, les métaboliseurs lents (défaut d’activité), rapides (activité normale en général) et ultra-rapides (activité excessive). Dans la définition du polymorphisme génétique, s’ajoute une notion de fréquence, l’allèle le moins fréquent devant être présent dans au moins 1 % de la population.
Identifier ces polymorphismes en routine repose sur la réaction de polymérisation en chaîne (PCR) et, également, sur des techniques plus récentes, mais en plein développement, analysant simultanément un grand nombre de sites. On a utilisé initialement le « dot blot » et le « Southern blot » qui se caractérisent, respectivement, par le dépôt ou le transfert sur membrane de fragments d’ADN dénaturés suivis de leur reconnaissance par hybridation à une sonde d’ADN marquée de séquence nucléotidique connue. Le plus souvent actuellement, les fragments d’ADN porteurs du polymorphisme sont amplifiés par PCR, puis déposés sur membrane et reconnus par hybridation à des oligonucléotides spécifiques de chaque allèle. La miniaturisation des méthodes d’hybridation permet aussi, par la technique des puces à ADN, d’examiner des milliers de molécules d’acide nucléique de façon simultanée sur des matrices solides de petite surface [4]. On peut ainsi rechercher des polymorphismes inconnus ou déterminer quels sont les allèles d’un polymorphisme connu sur un échantillon donné. La première étape est la fabrication de la puce par synthèse des sondes, qui sont des nucléotides de synthèse, soit in situ (sur le support lui-même), soit ex situ par greffe sur le support. Beaucoup de puces prêtes à l’emploi proviennent d’une firme américaine, « Affymetrix® ». Après hybridation d’un échantillon d’ADN ou d’ARN marqué par un fluorophore, la surface contenant plusieurs dizaines de milliers d’oligonucléotides est analysée par microscopie confocale et visualisée. La détection des polymorphismes nucléotidiques affectant un seul nucléotide (SNP) ou des variations du nombre de répétitions en tandem repose sur la haute spécificité de la puce à ADN pour distinguer une complémentarité parfaite d’une complémentarité imparfaite que cause le non appariement d’une seule paire de bases. La puce à ADN de génotypage contient donc des séquences spécifiques de chacun des allèles, mutés ou non. Les puces
à ADN de dernière génération ont la capacité de contenir et d’analyser environ 50 000 polymorphismes. La gestion de la masse d’informations obtenues repose sur des outils informatiques puissants permettant de collecter, traiter et archiver les signaux. Ces techniques sont en évolution constante vers l’amélioration de la sensibilité, l’augmentation de la capacité et de la rapidité, et la diminution des coûts.
Il faut cependant rappeler que la fiabilité du génotypage, qu’il porte sur l’ADN ou l’ARN, ne sera totale que lorsqu’une nouvelle génération de puces prendra en compte les SNP situés hors des régions codantes habituellement examinées, mais à l’origine d’épissages aberrants.
POLYMORPHISMES GÉNÉTIQUES PORTANT SUR LE GÉNOME CONSTITUTIONNEL
Variants des gènes du métabolisme et du transport des médicaments
Le métabolisme des médicaments dans le foie est assuré par deux types d’enzymes, ceux de phase I qui, comme les cytochromes P450, rendent les molécules plus polaires et donc plus hydrophiles par hydroxylation, et ceux de phase II qui catalysent des réactions de conjuguaison avec divers radicaux (glucuronate, sulfate, méthyle, acétyle, glutathion…) et renforcent ainsi le caractère hydrophile des médicaments et leur solubilité dans la bile et l’urine. Il s’ajoute à ces enzymes des protéines de transport de phase III assurant le transfert des métabolites dans la cellule ou hors de la cellule, par exemple la protéine P-gp et les protéines de la famille ABC (« ATP binding cassette ») [5].
Le métabolisme oxydatif des médicaments dépend des enzymes de la première phase qui, pour l’essentiel, appartiennent à une même famille d’hémoprotéines, les cytochromes P450. Chez l’homme une soixantaine de gènes ont été identifiés, mais seul un petit nombre des protéines, au nombre d’une vingtaine, codées par ces gènes (CYP1, CYP2 et CYP3) contribuent au métabolisme des médicaments [6].
Elles assurent environ 80 % des réactions d’oxydation parce que leur spécificité de substrat est relative et chevauchante. La conséquence en est la fréquence des interactions médicamenteuses ou alimentaires par compétition de substrats qui représentent un problème majeur dans l’optimisation des doses. Ces interactions peuvent aussi relever d’autres mécanismes comme l’induction ou la répression des gènes. Un des polymorphismes les plus étudiés porte sur le gène du CYP2D6. Ce polymorphisme est à prendre en compte pour deux raisons : — malgré sa faible expression dans le foie, l’enzyme reconnaît comme substrats de nombreux médicaments (β-bloqueurs, antidépresseurs tricycliques, anti-arythmiques de classe I, psychotropes…), au total 25 % des médicaments utilisés en pratique courante ;
— la fréquence des différents variants est loin d’être négligeable et est différente selon la population concernée. Par exemple, le CYP2D6*17 est trouvé essentiellement chez les noirs (20-35 % de la population), le CYP2D6*10 est commun dans l’Asie du Sud-Est (50 % de la population) et le CYP2D6*4 n’est pas rare chez les caucasiens (12-21 % de la population). Ces trois variants sont associés à une activité réduite ou nulle et donc à un métabolisme lent exposant à des surdosages [7] ou à des inefficacités thérapeutiques si l’enzyme transforme une prodrogue en médicament actif [8]. En revanche, le CYP2D6*2xn (plusieurs copies du gène) entraînant un gain de fonction est rencontré chez 10-16 % des éthiopiens et arabes saoudiens, et expose à un sous dosage ou l’inverse si, là aussi, il y a activation
d’une prodrogue. Le CYP2D6 a surtout été étudié dans le domaine des antidépresseurs et des anti-psychotiques. Ses variants associés à ceux du CYP2C19 expliquent nombre de réponses inappropriées à l’emploi des antidépresseurs et des antipsychotiques [9]. Il est conseillé d’adapter les doses en les diminuant pour les porteurs de mutations avec gain de fonction et en les augmentant pour ceux porteurs de mutations avec déficit de fonction. Une telle attitude permettrait d’affiner les prescriptions initiales sans attendre le suivi des concentrations plasmatiques du médicament. Un autre polymorphisme à considérer est celui du CYP2C9 dont plusieurs variants s’accompagnant d’une activité réduite atteignent des fractions notables de la population blanche : 20,4 % pour le CYP2C9*1/*2 et 11,6 % pour le CYP2C9*1/*3. Ce cytochrome reconnaît comme substrats environ une centaine de médicaments dont des anti-coagulants de la série des anti-vitamines K, des anti-diabétiques oraux, des anti-inflammatoires non stéroïdiens et des antagonistes de l’angiotensine II. Cette dernière classe de médicaments fournit un exemple de l’importance de bien connaître le métabolisme et les effets d’un médicament avant d’évaluer les conséquences du génotypage. En effet, le même polymorphisme de CYP2C9 conduit à une activité accrue du losartan dont les métabolites sont efficaces et à une inactivité accrue de l’irbesartan dont seule la forme intacte est active.
Les enzymes de la deuxième phase intervenant dans le métabolisme sont les transférases qui couplent le médicament ou son métabolite à un radical pour faciliter son élimination. Les polymorphismes reconnus ont, en général, des distributions plus étroites que celles des cytochromes ; mais leurs conséquences peuvent être dramatiques. Un des plus étudiés de ces polymorphismes est celui de la thiopurine méthyltransférase qui transfère un radical méthyl sur un métabolite de la 6-mercaptopurine [10]. Il existe trois mutations connues du gène. Les homozygotes (1/300 individus) n’expriment pas d’enzyme fonctionnelle ; 10 % de la population est hétérozygote et exprime des niveaux intermédiaires d’enzyme actif ; les 90 % restants, porteurs de deux allèles sauvages, ont une activité enzymatique normale.
L’absence d’enzyme fonctionnel chez les homozygotes conduit à l’accumulation de la 6-mercaptopurine avec risque d’aplasie sévère. Les hétérozygotes peuvent être traités, mais avec une posologie réduite. Un autre exemple de polymorphisme portant sur une transférase est celui de la UDP-glucuronosyltransférase UGT1A1, enzyme bien connue parce que son substrat endogène est la bilirubine. L’augmentation, de six à sept, des répétitions du tandem TA dans la séquence « TATA box » du promoteur du gène s’accompagne d’une diminution de l’expression de l’enzyme, caractéristique de la Maladie de Gilbert. Ce polymorphisme intervient également dans l’excrétion biliaire et urinaire du SN-38, métabolite actif de l’irinotecan qui doit, comme la bilirubine, être conjugué à un radical glucuronyl avant d’être éliminé. Le SN-38 s’accumule chez les malades porteurs de la mutation entraînant, par là même, leucopénie et diarrhée. Ainsi, selon le génotype, on peut prescrire une série de cures de chimiothérapie sans toxicité prévisible, ou on doit renoncer au traitement [11].
La phase III d’excrétion des médicaments hors de la cellules est assurée par la protéine P-gp codée par le gène MDR1 (« multidrug resistance »). Cette protéine, en modulant les concentrations plasmatiques et intracellulaires, influence la réponse au traitement par les médicaments qu’elle transporte, comme les antiprotéases utilisées dans le SIDA ou les immunosuppresseurs tel le tacrolimus. Il existe une mutation dans l’exon 26 du gène avec substitution d’une thymine à une cytosine en position 3435 (3435C>T). Le génotype TT s’accompagne d’une
augmentation des concentrations plasmatiques de ces médicaments et doit faire envisager une diminution de la posologie [12].
Variants des gènes cibles des médicaments en association ou non avec des variants des gènes du métabolisme
Il est relativement fréquent que les effets d’un médicament dépendent à la fois du polymorphisme des enzymes de son métabolisme et de ceux des enzymes cibles ou des récepteurs. Dans d’autres cas, seuls des polymorphismes de la cible ont été identifiés. Nous donnerons des exemples de ces diverses possibilités.
Le premier exemple est celui des antagonistes de la vitamine K tels les dérivés coumariniques (warfarine ou Coumadine® et acénocoumarol ou Sintrom®). Plus de 500 000 malades reçoivent en France ce type de traitement dont 17 000 sont hospitalisés pour accident hémorragique ou thrombotique, ce qui représente 13 % des hospitalisations pour accident iatrogène lié aux médicaments [13]. Les doses de warfarine pour obtenir un état de coagulation satisfaisant (« International Normalized Ratio » ou INR entre 2 et 3) vont de 7-10 à 50-60 mg par semaine. Le médicament est métabolisé dans le foie par le CYP2C9 et a comme cible la vitamine K époxyde réductase (VKORC1) dont le gène vient d’être récemment identifié [14].
Chacun des gènes de ces deux enzymes présente des polymorphismes faisant varier la réponse au médicament. La forme sauvage et prédominante du CYP2C9 est le CYP2C9*1/*1. Il existe, dans les populations caucasiennes, deux variants alléliques du CYP2C9, le CYP2C9*2 et le CYP2C9*3 à l’origine d’une diminution de l’activité de l’enzyme encore plus marquée dans le cas de l’allèle*3. Leur présence est associée à une augmentation du risque hémorragique, maximum chez les homozygotes *3/*3 et *2/*2, et observée également chez les hétérozygotes *2/*3.
Sachant qu’environ 30 % des américains sont porteurs d’au moins un de ces deux variants dont la présence double ou triple le risque d’accident hémorragique, il serait certainement utile de baser la première prescription de warfarine sur une analyse génétique. Le mécanisme de cette susceptibilité aux hémorragies provient du fait que le CYP2C9 métabolise l’énantiomère S de la warfarine beaucoup plus actif que le R, ces deux énantiomères étant présents dans le produit administré. La VKORC1 est l’enzyme clé du cycle de la vitamine K régénérant la forme réduite active à partir de l’époxyde. Cette forme réduite est un cofacteur indispensable à la γ-carboxylation des résidus d’acide glutamique présents sur de nombreuses protéines de la coagulation (prothrombine, facteurs VII, IX et X). Le gène VKORC1 situé sur le chromosome 16 est le siège de mutations associées à des cas de sensibilité ou de résistance à la warfarine. Cinquante pourcents de la variabilité individuelle de réponse à l’acénocoumarol sont liés à ces deux polymorphismes, l’un sur le gène de CYP2C9, l’autre sur celui de VKORC1 [15].
Un autre exemple est celui du 5-fluorouracil (5-FU), dérivé de l’uracile prescrit dans les cancers du sein et du colon. Le 5-FU est un pro-médicament qui est converti en 5-fluoro-2-déoxyuridine monophosphate (5-FdUMP), un inhibiteur de la thymidine synthétase. Cette enzyme est nécessaire à la synthèse de novo de la pyrimidine, et son inhibition entraîne la mort de la cellule. Plus de 80 % du 5-FU est métabolisé dans le foie par la dihydropyrimidine déhydrogénase (DPD). L’activité de la DPD est très variable selon les individus, et les malades à faible activité ne peuvent pas métaboliser le 5-FU ; d’où la survenue de phénomènes toxiques graves atteignant le système nerveux, la moelle osseuse et le tractus gastro-intestinal, et pouvant
conduire au décès. Il existe plusieurs mutations du gène de la DPD inactivant l’enzyme [16]. Les mutations hétérozygotes atteignent 3 % de la population et les mutations homozygotes 1/1 000. Elles imposent une diminution de la posologie pour les premières et sont une contre indication absolue au traitement pour les secondes.
Dans cet exemple aussi, le polymorphisme de l’enzyme cible, la thymidine synthétase intervient. Il existe plusieurs variants du gène caractérisés par un nombre différent de répétitions en tandem (deux ou trois) dans la région promotrice.
La présence de trois répétitions au lieu de deux augmente l’expression de l’enzyme et est donc associée à une plus grande activité thérapeutique et à un moindre risque de toxicité.
Dans le cas du méthotrexate, un antagoniste de l’acide folique largement utilisé dans les cancers ou les maladies auto-immunes comme la polyarthrite rhumatoïde, interviennent essentiellement des polymorphismes portant sur la synthèse de la molécule cible. Le méthotrexate pénètre dans les cellules grâce à un transporteur.
Il est ensuite transformé en métabolites actifs, les poyglutamates de méthotrexate qui inhibent la 5,10-méthylènetétrahydrofolate réductase (MTHFR), enzyme contrô- lant le pool des folates utilisés dans la synthèse des acides nucléiques et des protéines. Le gène de cette enzyme est le siège d’une mutation C→T sur le nucléotide 677 qui diminue encore plus l’activité de l’enzyme en présence de méthotrexate. Les individus homozygotes (TT) ou hétérozygotes (CT) représentant respectivement 10 et 40 % de la population ont plus fréquemment des accidents thérapeutiques du fait de la faible disponibilité en folates conduisant à un risque accru d’aplasie médullaire [17].
Variants de gènes étrangers au métabolisme ou à la cible cellulaire
Le système HLA, déjà connu pour son rôle dans la susceptibilité à diverses maladies, semble intervenir aussi dans l’amplitude de la réponse aux médicaments.
L’exemple en est l’abacavir, un inhibiteur de la transcriptase réverse du virus HIV-1 utilisée dans le traitement du SIDA. Environ 5 % des malades traités par ce médicament répondent par une réaction sévère d’hypersensibilité avec fièvre, éruption cutanée et troubles digestifs. L’arrêt du médicament fait régresser ces symptômes, mais une deuxième tentative peut être fatale. Les malades porteur de l’allèle HLA-B57 ont 11,4 fois plus de risques que les autres de développer ce type de réaction [18]. Un autre exemple est celui de la résistance à l’aspirine. L’enzyme cible est la cyclooxygénase qui est inhibée de manière irréversible par acétylation sur un résidu sérine. En fait, les polymorphismes génétiques intervenant dans la résistance à l’aspirine ne sont pas ceux de la cible, mais ceux de récepteurs affectant l’agrégation plaquettaire comme les récepteurs purinergiques de l’ADP et les glycoprotéines membranaires dont les ligands sont le fibrinogène et le collagène.
On peut penser que l’hyperactivité de ces récepteurs contrebalance l’inhibition de la synthèse du thromboxane par blocage de la cyclooxygénase.
MUTATIONS SOMATIQUES DU GÉNOME DE LA CIBLE ET RÉPONSE AUX MÉDICAMENTS
Dans le cas des tumeurs cancéreuses solides, des mutations du génome constitutionnel sont susceptibles, comme on l’a vu plus haut, de modifier la réponse aux
traitements, le 5-FU par exemple. Mais, en outre, des mutations dans le génome somatique de la tumeur peuvent aussi faire prévoir l’évolution de la maladie et la réponse aux traitements. On peut soit rechercher une mutation sur un gène donné soit analyser la totalité du transcriptome, ce qui fait connaître quels gènes sont surexprimés, réprimés ou restent inchangés. Le tout constitue « la carte d’identité » de la tumeur appelée ainsi du fait de sa spécificité. Cette carte d’identité est un élément essentiel à prendre en compte dans la décision thérapeutique. Ainsi, dans les cancers de la tête et du cou, se pose le problème de la chimiothérapie avant chirurgie. Lorsqu’il y a mutation inactivatrice de la protéine anti-tumorale p53, la chimiothérapie a cinq fois moins de chances d’être efficace qu’en l’absence de mutation. De même, la mise en évidence dans un cancer du sein du récepteur des oestrogènes associé ou non à celui de la progestérone conduira à proposer un traitement anti-hormonal comme le tamoxifène [19] et celle de l’expression de l’oncogène Her-2/neu, le traitement par l’Herceptin®, un anticorps dirigé contre cet oncogène [20]. Dans les liposarcomes, la co-amplification des gènes MDM2 et
CD14 ainsi qu’un degré élevé d’amplification de ces gènes sont observés plus fréquemment dans les tumeurs dédifférentiées que dans celles bien différentiées ou dans les tumeurs lipomateuses atypiques. On peut craindre dans le premier cas une résistance à la chimiothérapie et une diminution de la survie alors que dans le deuxième on peut espérer une bonne réponse à la chimiothérapie et une évolution favorable [21]. Un exemple récent est celui des mutations du récepteur du facteur de croissance épidermique (EGF-R) dans le cancer du poumon qui suggère un traitement par l’IRESSA®, un inhibiteur de l’activité tyrosine kinase de ce récepteur, ou par un anticorps spécifique [22]. L’analyse du génome tumoral est grandement facilitée par la création de centres de ressources biologiques dans les établissements de soins qui ont pour objet de regrouper dans une structure unique des échantillons provenant de patients atteints de la même maladie et, ainsi, de pouvoir apprécier dans une même étude l’influence des mutations sur l’efficacité des traitements. L’Académie nationale de médecine a consacré un rapport à ce sujet auquel on peut se référer [23].
PHÉNOTYPAGE ET GÉNOTYPAGE
Le phénotypage est possible lorsque la variation recherchée porte sur une activité enzymatique. Il est réalisé habituellement in vivo . Le sujet étudié ingère une dose du médicament, en général, inférieure à celle conseillée en thérapeutique. Des échantillons de sang et/ou d’urine sont ensuite recueillis à des temps choisis en fonction de la pharmacocinétique du produit. Dans ces échantillons, sont mesurées, habituellement par chromatographie, les formes intactes et métabolisées du médicament. On calcule le rapport métabolites/substrat qui permet de séparer métaboliseurs ultra-rapides, rapides, intermédiaires et lents en comparant les résultats à ceux obtenus sur une grande population. Le phénotypage est une méthode longue, astreignante, coûteuse et qui nécessite l’administration d’un médicament test. Elle est cependant indispensable dans un premier temps. En effet, le phénotypage est essentiel pour la connaissance précise du métabolisme du médicament et permet ainsi de définir quels sont les gènes candidats. Si l’étude des gènes a précédé celle des variations de l’efficacité thérapeutique, le phénotypage demeure indispensable pour valider les données du génotypage. Lorsque l’administration du médicament à des sujets sains est contre-indiquée du fait de sa toxicité (agents anti-tumoraux ou
immunosuppresseurs, par exemple), le phénotypage in vitro peut être tenté. Il suppose, condition rarement réalisée, que l’enzyme étudiée soit présente dans des tissus facilement accessibles comme les cellules sanguines.
PERSPECTIVES
La question posée est celle de l’individualisation des thérapeutiques en fonction du patrimoine génétique. Cette individualisation est admise dans le cas bien particulier de l’analyse du génome tumoral qui doit être développée du fait de son caractère prédictif, maintenant largement prouvé. Qu’en est-il de l’analyse du génome constitutionnel ? Il convient de distinguer en premier quelques cas particuliers, puis le problème général de la carte génomique individuelle et, enfin, celui de la prise en compte des données génétiques dans les essais thérapeutiques.
Il est des cas où l’analyse génomique préalable à la prescription paraît utile chaque fois qu’elle est possible. Il s’agit des polymorphismes touchant une proportion importante de la population et dont la méconnaissance peut conduire à des accidents graves. Les deux exemples types sont les chimiothérapies anticancéreuses et le traitement par les anti-vitamines K. On peut étendre l’indication du génotypage aux cas touchant une faible fraction de la population lorsque l’administration du médicament fait courir un risque vital comme la mutation homozygote de la dihydropyrimidine déhydrogénase dans le cas du traitement par le 5-FU.
La mise en œuvre d’une « carte génomique » générale semblable à celle dont nous disposons pour les groupes sanguins parait plus éloignée. Il faudrait y rassembler toutes les données génétiques susceptibles d’intervenir dans le choix d’une prescription et de sa posologie, et, éventuellement, soumettre ces données à un traitement bio-informatique qui conduirait à la décision, ce que l’on appelle un système « expert ». On est là encore, mais probablement pour un temps limité, dans le domaine de la médecine fiction. Allant dans cette voie, la « Food and Drug Administration (FDA) » des Etats-Unis vient de donner son agrément au premier test de laboratoire en pharmacogénomique analysant les polymorphismes des cytochromes CYP2C9 et 2D6, et destiné aux patients atteints de maladies cardiaques, psychiatriques et de cancers. Des sites internet voient le jour, qui renseignent le médecin ou le malade sur les accidents à craindre en fonction de l’alimentation, des autres médicaments reçus et des tests d’analyse génétique [24]. Des cartes permettant le génotypage des polymorphismes les plus courants et touchant les médicaments les plus utilisés sont à l’étude dans notre pays.
Un point encore à considérer est celui des essais thérapeutiques [25]. De tels essais ne tiennent pas, en général, compte du patrimoine génétique des sujets explorés.
On peut supposer qu’un large échantillon sera représentatif de la population et qu’on y retrouvera les mêmes proportions des variants génétiques si elles atteignent des niveaux suffisants. Mais, de nombreux problèmes subsistent. Si les enzymes intervenant dans le métabolisme du médicament ont été identifiées par les études préalables et si des essais de phénotypage ont pu être déjà réalisés chez des témoins permettant de savoir s’il existe dans la population des variations importantes du métabolisme, il convient alors de soumettre les patients participant aux essais à un génotypage préalable portant sur ces enzymes afin de relier l’efficacité thérapeutique et la survenue d’effets secondaires à l’existence d’éventuels polymorphismes. La FDA a diffusé récemment un guide de bonnes pratiques destiné à
l’industrie pharmaceutique et indiquant comment évaluer les données de la pharmacogénomique [26].
Pharmacogénétique et pharmacogénomique restent des disciplines en cours de développement. Les demandes d’examen ne sont encore qu’en petit nombre. Lors de leurs auditions devant la Commission consultative nationale en matière d’examen des caractéristiques génétiques à des fins médicales en mars 2002, Philippe Beaune et Rajogopal Krishnamoorthy que nous avons également entendus, donnaient des chiffres semblables de 100 à 150 examens par an pour l’Hôpital européen Georges Pompidou et l’Hôpital Robert Debré, portant essentiellement sur l’azathioprine et la 6-mercaptopurine. Ces examens sont réalisés en routine par leurs laboratoires chez des malades transplantés, ou atteints de maladies autoimmunes et de cancers [27]. On peut raisonnablement penser, vu leur utilité, que la pharmacogénétique et la pharmacogénomique vont monter en puissance et que le génotypage des enzymes et molécules cibles des médicaments sera disponible dans un nombre croissant de laboratoires.
RECOMMANDATIONS
Se basant sur cette analyse, l’Académie nationale de médecine formule les recommandations suivantes :
— La recherche de variations alléliques dans les gènes concernés doit, dès que possible, être la règle avant toute prescription d’un médicament à haut risque, c’est-à-dire à l’origine d’effets secondaires graves, lorsque sont en cause des polymorphismes génétiques connus touchant une fraction élevée de la population. C’est le cas, entre autres, des anti-vitamine K, de nombreuses chimiothé- rapies et des immunodépresseurs ; d’où la nécessité de rendre possibles ces examens en routine dans les laboratoires de génétique, pharmacologie ou biologie moléculaire des établissements de soins, tout particulièrement s’ils comportent des départements de traitement des tumeurs ou de transplantation d’organes.
— Il convient de valider systématiquement l’importance des polymorphismes découverts dans les gènes de molécules cibles ou d’enzymes du métabolisme des médicaments par l’étude du phénotypage et l’influence de ces polymorphismes sur l’efficacité thérapeutique et la survenue de complications.
— Des analyses de laboratoire couvrant les polymorphismes des enzymes du métabolisme et du transport des médicaments les plus courants devraient être disponibles dans notre pays et expérimentés dans des populations ciblées afin de savoir si un tel génotypage réduit le rapport coût / bénéfice.
— La découverte d’un polymorphisme à l’origine d’une réponse inappropriée (hypersensibilité, résistance ou effet secondaire grave) en cas de prise d’un médicament donné doit être communiquée au patient avec précaution et uniquement si elle a des conséquences pratiques (médicaments à éviter ou à utiliser sous surveillance ou associations à éviter). Cette découverte doit alors entraîner une enquête familiale afin de détecter et d’informer les sujets exposés.
— L’identification des voies métaboliques d’un médicament en cours d’étude par une firme pharmaceutique doit être systématique. Il conviendrait, en outre, de constituer des banques d’ADN des sujets exposés au nouveau médicament au
cours des phases I et II, ce qui permettrait de relier les variations éventuelles de l’effet observé à un génotype donné. Il faut enfin, si un polymorphisme génétique modifiant la réponse au traitement a été mis en évidence en phases I et II, essayer de réaliser en phase III des essais sur des populations ciblées en fonction de ce polymorphisme.
— Comme cela a déjà été recommandé par l’Académie nationale de médecine [23], il convient de poursuivre la création de centres de ressources biologiques où sont regroupés et étudiés les échantillons tumoraux, permettant ainsi d’établir les relations entre « carte d’identité » de la tumeur et efficacité comparée des diverses thérapeutiques. De tels centres devraient également recueillir les échantillons d’ADN des sujets inclus dans les études de pharmacoépidémiologie afin de pouvoir prendre en compte les variants alléliques dans la réponse aux médicaments.
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[27] Food and Drug Administration. Pharmacogenomic data submissions. En ligne dans http// :www.drugresearcher.com [28] Commission consultative nationale en matière d’examen des caractéristiques génétiques à des fins médicales. Rapport d’activité 200-2003. Ministère de la solidarité, de la santé et de la famille.
Liste des experts consultés
Alain Aurias, Institut Curie, 26 rue d’Ulm 75248 Paris cedex 05. Philippe Beaune, INSERM U 490, 45 rue des Saints-Pères 75270 Paris cedex 06.
Françoise Clerget-Darpoux, INSERM U 535, Hôpital Paul Brousse, 12-14 avenue Paul Vaillant-Couturier, 94804 Villejuif cedex. Alexandra Durr, INSERM U 289, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, 91 Bd. de l’Hôpital, 75634 Paris cedex 13. Patrice Jaillon, UFR St-Antoine, 27 rue Chaligny 75012 Paris. Xavier Jeunemaître, Collège de France, INSERM U 36, 11 Place Marcelin Berthelot 75005 Paris. Rajogopal Krishnamoorty, Inserm U 458, Hôpital Robert Debré, 48 Bd. Sérurier, 75019 Paris. Marie-Claude Potier, CNRS UMR 7637, ESPCI, 10 rue Vauquelin, 75005 Paris. Dominique Stoppa-Lyonnet, Institut Curie, 26 rue d’Ulm 75248 Paris cedex 05. Florent Soubrier, INSERM U 525, Faculté de Médecine Pitié-Salpétriêre, 91 Bd. de l’Hôpital 75634 Paris cedex 13.
DISCUSSION
M. Pierre DELAVEAU
Comment définissez-vous la pharmacogénomique ?
La pharmacogénomique est l’étude des relations entre génome et médicaments.
Elle couvre donc un champ plus large que la pharmacogénétique puisqu’elle concerne aussi les effets des médicaments sur le génome (induction, répression).
On doit cependant noter que dans la littérature américaine, les deux termes sont souvent utilisés indifféremment.
M. Jacques BATTIN
La pharmacogénétique est née dans les années 1960 avec les accidents des antipaludéens de synthèse ayant amené la découverte du déficit en G6PD et le dépistage des populations à risque. Pouvez-vous préciser l’utilisation des biopuces capables de déterminer sur une faible quantité d’ADN des milliers de mutations ?
Quel sera leur avenir en pratique thérapeutique ?
Les biopuces sont ou vont être utilisées comme méthode d’exploration d’un ensemble de gènes, par exemple pour rechercher les polymorphismes dans toutes les isoformes de la famille du CYP450.
M. Henri ROCHEFORT
Faut-il ajouter les mutations somatiques, la définition de la carte d’identité des tumeurs, qui sont plutôt du domaine de la physiopathologie et de la recherche de
nouvelles cibles thérapeutiques que des méthodes pour orienter les traitements ?
Pour les tumeurs solides, c’est l’étude des protéines par immunohistochimie qui oriente vers l’application d’un médicament ciblé ou non (ex. récepteur des estrogè- nes, herz/neu et herceptine). La pharmacogénétique ne concerne-t-elle pas surtout les médicaments existants et leur métabolisme ?
La carte d’identité des tumeurs inclut l’étude du transcriptome. Il parait important de pouvoir évaluer l’efficacité des traitements et le pronostic en se référant aux données de la génétique moléculaire.
M. Jean-Paul TILLEMENT
Il existe une autre cause pharmacogénétique de variabilité de réponse interindividuelle aux médicaments, celle des protéines de transport plasmatique. Le médicament lié à une protéine circulante ne peut franchir les membranes cellulaires, il est donc inactif (si l’on suppose un effet tissulaire). La capacité de liaison d’une protéine circulante conditionne et limite la distribution du médicament qu’elle fixe (liaison dite restrictive). Différents variants d’albumine et d’alpha — 1 glycoprotéine acide ont été décrits dont les capacités de liaison des médicaments sont différentes de celle de la protéine habituelle. Tous les variants d’albumine ont des capacités de liaison plus faibles. C’est probablement l’explication d’une partie de la variabilité de la réponse aux antivitamines K (fixation exclusive à l’albumine, liaison restrictive). Qu’en pensez-vous ? Les variants de l’alpha — 1 glycoprotéine acide ont des capacités de liaison des médicaments très différentes. Il en résulte des variations quantitatives de distribution auxquelles s’ajoute l’augmentation pathologique de ces variants lors d’états inflammatoires. L’ensemble de ces modifications de distribution rend nécessaire des ajustements de posologie.
Les polymorphismes des gènes codant pour les protéines de transport interviennent dans la réponse aux médicaments comme ceux codant pour les enzymes du métabolisme, les protéines cibles et les transporteurs transmembranaires.
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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 31 janvier 2006, a adopté le texte de ce rapport à l’unanimité.
Bull. Acad. Natle Méd., 2006, 190, no 1, 9-23, séance du 31 janvier 2006