Résumé
Le syndrome des ovaires polymicrokystiques (SOPMK) est une affection extrêmement fréquente, responsable de la majorité des infertilités par trouble de l’ovulation. L’hyperandrogénie, l’excès folliculaire et le blocage de la maturation folliculaire terminale jouent un rôle majeur dans la dysovulation, amplifié par l’obésité et plus encore par l’excès de tissu adipeux viscéral. L’hyperinsulinisme est le principal responsable de cet effet aggravant mais d’autres mécanismes encore mal élucidés interviennent. L’impact de l’obésité sur la fécondité féminine comprend aussi des phénomènes extra-ovariens, en particulier des effets négatifs sur l’endomètre responsables d’un défaut d’implantation et d’un taux nettement accru de fausse-couches.
Summary
Polycystic ovary syndrome (PCOS) is responsible for most cases of anovulatory infertility. Hyperandrogenism, follicle excess and follicular arrest play a fundamental role that is amplified by obsesity and particularly by visceral fat excess. Hyperinsulinism is the main culprit in this aggravation. The impact of obseity on female fertility also involves extraovarian phenomena, and particularly negative effects on the endometrium that can lead to implantation failure and miscarriage.
INTRODUCTION
Le syndrome des ovaires polymicrokystiques (SOPMK) alimente depuis de nombreuses années une littérature abondante et changeante au fil du temps, au gré des évolutions conceptuelles plus ou moins rationelles… L’un des points les plus discutés est certainement le rôle que joue l’obésité dans la physiopathologie complexe de cette affection et cela est particulièrement critique en ce qui concerne le potentiel reproductif des patientes. Il est capital de bien faire la part de ce qui revient au SOPMK per se et de ce qu’il faut réellement imputer à l’obésité.
La dysovulation du SOPMK : des mécanismes intra-ovariens complexes et indépendants de l’obésité
Épidémiologie et définitions
Le SOPMK est la cause la plus fréquente d’infertilité, de troubles du cycle et d’hyperandrogénie chez la femme. Sa prévalence dans la population générale est de 5 à 10 % [1].
L’infertilité, ou plutôt l’hypofécondité, liée au SOPMK résulte principalement d’un trouble de l’ovulation plus ou moins sévère pouvant confiner à l’anovulation chronique. L’expression clinique en est le plus souvent une oligospanioménorrhée (cycle J 45 jours ou moins de huit cycles par an), une aménorrhée secondaire ou parfois primaire mais les cycles peuvent être réguliers sans être pour autant ovulatoires [1]. Bien qu’étant la cause dominante, le SOPMK reste cependant un diagnostic d’élimination qui ne peut être retenu qu’après avoir éliminé les autres causes de dysovulation (insuffisance ovarienne primitive, hypogonadisme hypogonadotrope organique ou fonctionnel, hyperprolactinémie, dysthyroïdie) et d’hyperandrogénie (tumeur androgéno-sécrétante ovarienne ou surrénalienne, blocs enzymatiques surrénaliens, syndrome de Cushing) [1].
Dans un recrutement de centre d’AMP, la fréquence du SOPMK dans sa forme complète est d’environ 7 % et celle de sa forme strictement échographique de 16 à 25 % [1]. Ces chiffres sont même à revoir à la hausse avec l’utilisation des nouveaux critères diagnostiques re-définis en 2003 lors de la conférence de Consensus de Rotterdam [2], qui augmentent de 50 % la prévalence de l’affection définie par les anciens critères. Selon ce consensus, le diagnostic de SOPMK requiert la présence d’au moins deux des treois critères suivants :
— oligo- ou anovulation — hyperandrogénie clinique (acné diffuse, hirsutisme) et/ou biologique (testosté- rone totale ou libre élevée) — volume ovarien J 10 ml et/ou J 12 follicules entre 2 et 9 mm par ovaire
Physiopathologie du trouble de l’ovulation
Le primum movens de la physiopathologie de l’OPK semble être primitivement ovarien [3], lié à un excès de production d’androgènes par les cellules thécales, dès la vie intra-utérine. Le mécanisme initiateur reste mal élucidé. Certains évoquent une hyperactivation intrinsèque des enzymes impliquées dans la stéroïdogénèse (cytochrome P450 C17 en particulier), d’autres suggèrent l’hypothèse d’une reprogrammation fœtale selon laquelle l’ovaire, programmé génétiquement pour être hyperandrogénique, modifierait le fonctionnement du tissu adipeux et de l’hypothalamus, ce qui se traduirait par l’insulinorésistance et l’excès de LH apparaissant à la puberté.
Cette hypothèse est soutenue par des données expérimentales chez des singes femelles rhésus exposées in utero à des concentrations importantes d’androgènes injectés à leur mère. À l’âge adulte, alors qu’elles n’ont pas été exposées aux androgènes depuis leur naissance, ces femelles développent un phénotype de SOPMK, avec syndrome métabolique. Quelques données cliniques humaines viennent compléter ces arguments expérimentaux, comme par exemple l’existence d’un SOPMK chez les femmes exposées in utero à une forte hyperandrogénie du fait d’un déficit en 21-Hydroxylase chez elle-même ou d’une tumeur androgéno-sécrétante chez leur mère [5]. Les mécanismes par lesquels les androgènes interviennent dans la re-programmation du tissus adipeux viscéral et de l’hypothalamus sont encore très mal connus. Il semblerait que chez la femme, à l’inverse de l’homme, les androgènes stimulent la production de graisse abdominale. L’hypersécrétion de LH quant à elle serait due à un effet précoce des androgènes sur la maturation in utero de l’axe gonadotrope, aboutissant au dérèglement des mécanismes de feed-back négatifs exercés par les stéroïdes ovariens [5].
A la puberté, les sécrétions stéroïdiennes reprennent et chez les femmes prédisposées au SOPMK, les androgènes intra-ovariens en excès, contrairement à ce qu’on pensait initialement, ont un rôle trophique sur la folliculogénèse précoce jusqu’au stade de follicule antral sélectionnable (2-5 mm). Les propriétés anti-atrétiques des androgènes expliquent donc qu’il y ait deux à trois fois plus de petits follicules en croissance dans l’OPK que dans un ovaire ‘‘ normal ’’ alors même que le stock de follicules primordiaux est strictement identique. Le nombre de ces petits follicules, estimé sur le plan échographique par le comptage folliculaire (nombre de follicules entre 2 et 9 mm) et sur le plan biologique par l’hormone anti-müllerienne (AMH), est donc un reflet indirect de l’hyperandrogénie intra-ovarienne (l’AMH étant sécrétée par les cellules de la granulosa du stade des follicules primaires aux petits follicules antraux) [3].
Le second trouble de la folliculogénèse caractéristique de l’OPK est l’arrêt de maturation folliculaire avec défaut de sélection d’un follicule dominant et, par voie de conséquence, accumulation des petits follicules en croissance déjà en excès. Ce phénomène de ‘‘ follicular arrest ’’ [3], incomplètement élucidé, semble lié à un défaut d’action de la FSH. Physiologiquement, c’est le pic intercyclique de FSH, secondaire à la lutéolyse, qui initie le recrutement folliculaire. Dans le SOPMK,
plusieurs hypothèses ont été avancées : absence de lutéolyse par anovulation chronique, rétrocontrôle négatif trop important exercé sur l’hypophyse par l’inhibine B et l’estradiol en excès, concentration insuffisante de FSH par follicule du fait de l’excès folliculaire, phénomène de ‘‘ résistance ’’ à la FSH lié à des facteurs locaux inhibiteurs comme l’AMH. L’hypersécrétion de LH, quant à elle, serait plutôt un phénomène secondaire à l’anovulation chronique et non l’anomalie primitive responsable de la dysovulation. Ce point reste toutefois très controversé dans la littérature. Il est admis que l’hypertonie basale de la LH induit l’apparition prématurée de récepteurs à LH sur les cellules de la granulosa au stade de 5-8 mm (au lieu de 10-12 mm) [3]. Cette lutéinisation prématurée des follicules est incontestablement délétère sur la qualité ovocytaire, donc embryonnaire, elle réduit le taux d’implantation et aggrave celui de fausses couches précoces qui atteint 30 à 50 % dans certaines séries 1].
L’impact de l’obésité sur la dysovulation du SOPMK
Epidémiologie
Le surpoids, voire l’obésité, est souvent mais inconstamment et non obligatoirement associé au SOPMK et à l’insulinorésistance. On estime que 30 à 40 % des patientes avec SOPMK ont un poids normal et que 35 à 50 % sont réellement obèses (IMC J 30) [6, 7]. Ces chiffres restent très supérieurs à ceux de la population générale, même si ces derniers sont en constante augmentation du fait de « l’épidémie d’obésité » dans les pays occidentaux.
Élément fondamental et corollaire incontournable de l’obésité, l’insulinorésistance se traduit sur le plan clinico-biologique par le syndrome métabolique dont les critères ont été modifiés en 2005 par l’International Diabetes Federation (IDF) [8].
Il se définit actuellement par un tour de taille J 80 cm chez la femme (à ajuster à l’origine ethnique), associé à au moins deux des quatre critères suivants :
— Triglycérides J 1,5 g/L — HDL-cholestérol < 0,5 g/L — TA J 130/85 mmHg — Glycémie à jeun J 1 g/L Cette définition met l’accent sur l’excès de graisse viscérale abdominale (répartition « androïde » des graisses caractérisant l’obésité dite « centrale »). Outre les consé- quences métaboliques de cet excès de tissu adipeux viscéral (diabète de type 2, dyslipidémie, HTA) qui ne seront pas traitées ici (mais elles ont un impact majeur pendant la grossesse), il est maintenant bien admis que c’est lui, bien plus que le degré d’obésité indiqué par l’IMC, qui additionne ses effets pervers sur la fécondité à ceux spécifiques au SOPMK [9].
Le lien épidémiologique entre anomalie du cycle et IMC ou tour de taille, ce dernier reflétant très fidèlement l’excès de tissu adipeux viscéral, est en effet évident chez les
Fig. 1. — Ce schéma illustre les effets multiples de l’hyperinsulinisme consécutif à l’insulinorésistance sur la fonction de reproduction. Le principal site d’insulino-résistance est le muscle. Il en résulte un hyperinsulinisme compensateur qui va favoriser au niveau hypophysaire l’hypersécré- tion de LH et au niveau ovarien et surrénalien, l’hypersécrétion d’androgènes. Schéma extrait de la référence 11, avec autorisation.
femmes avec SOPMK. De nombreux travaux l’ont confirmé mais ce sont sans doute les études familiales qui le démontrent de la façon la plus éclatante : parmi les filles d’une même fratrie ayant un SOPMK, donc à patrimoine génétique égal, celles qui sont en surpoids ont une hyperandrogénie et un trouble du cycle plus sévères que leurs sœurs de poids normal [10].
Rôle de l’excès de tissu adipeux viscéral sur l’anovulation du SOPMK
Les effets pervers du tissu adipeux viscéral s’exercent via plusieurs intermédiaires :
Au premier rang vient bien sûr l’hyperinsulinisme (HI) réactionnel à l’insulinorésistance (IR). Le tissu adipeux viscéral est considéré de plus en plus comme l’un des principaux responsables de l’IR, via des mécanismes complexes qui ne seront pas envisagés ici.
L’HI aggrave les troubles du cycle par plusieurs mécanismes (figure 1) :
— action directe de l’insuline sur les cellules thécales et potentialisation de l’action de la LH contribuant à renforcer l’hyperandrogénie, l’excès folliculaire et le « follicular arrest » (cf supra).
— augmentation de la forme libre, biologiquement active, de la testostérone via une baisse de la sécrétion hépatique de SBP, majorant encore l’hyperandrogénie.
— aggravation de la dysrégulation de la sécrétion de LH — aggravation de l’hyperandrogénie surrénalienne, fréquemment associée.
L’HI n’est certes ni nécessaire ni suffisant, pour la constitution du SOPMK, mais son rôle amplificateur est bien démontré a contrario par l’utilisation thérapeutique des drogues insulino-sensibilisantes sous lesquelles on observe une amélioration de l’hyperandrogénie et du trouble du cycle, très variable à vrai dire d’une patiente à l’autre ( cf infra ).
D’autres intermédiaires sont néanmoins incriminés, mais leur rôle à ce jour n’est pas bien établi. Ainsi, les taux plasmatiques de leptine sont augmentés chez les femmes obèses avec SOPMK. Connaissant ses interactions possibles avec la physiologie du follicule ovarien et avec la sécrétion hypophysaire de LH, la leptine se présente comme un candidat intéressant. Néanmoins, il n’y a pas de corrélation entre les taux plasmatiques de leptine et la sévérité du trouble du cycle chez les patientes avec SOPMK [12]. D’autres produits du tissu adipeux viscéral sont actuellement à l’étude car ils semblent liés à l’hyperandrogénie du SOPMK et peuvent interférer avec la physiologie du follicule ovarien : TNF-α, Interleukine-6, résistine, adiponectine, … Ces deux dernières font l’objet d’une attention plus soutenue ces derniers temps. Les taux plasmatiques d’adiponectine sont plus faibles chez les femmes avec SOPK que chez les témoins appariés pour l’âge et l’IMC, tandis que les taux de résistine sont plus élevés [13]. Les taux d’adiponectine sont inversement corrélés à ceux des androgènes et positivement associés au tour de taille [13]. L’adiponectine étant considéré comme un agent insulino-sensibilisant naturel, son déficit peut être perçu comme étant l’un des facteurs, mais pas le seul, d’insulino-résistance. L’excès de graisse viscéral et l’hyperandrogénie contribueraient ainsi tous deux, indépendamment l’un de l’autre, à l’insulino-résistance du SOPMK. Aucune donnée à ce jour ne relie spécifiquement le trouble de l’ovulation du SOPMK aux différents marqueurs du dérèglement du tissu adipeux viscéral. Pour l’instant, on ne peut donc que spéculer sur ce lien, sans savoir s’il reflèterait un effet direct des adipokines sur le follicule ou s’il se ferait via le renforcement de l’effet de l’hyperandrogénie sur la folliculogénèse (cf supra).
L’infécondité des femmes obèses : il n’y a pas que le SOPMK !
En fait, les effets pervers de l’obésité et surtout de l’excès de tissu adipeux viscéral sur la fécondité féminine débordent largement le cadre de la physiologie et de la pathologie ovarienne.
Données épidémiologiques
Deux grandes études démontrent clairement que l’obésité affecte la fécondité féminine indépendamment de son impact ovarien. Dans l’étude de la NHS [14], le
Fig. 2. — La courbe en trait plein indique la chance relative d’obtenir une grossesse spontanée évolutive en fonction de l’indice de masse corporelle sur une durée de 1 an. L’axe des ordonnées est gradué en logarithmes. Par exemple, la valeur -0.2 indique 20% de chance en moins par rapport à la population de référence délimitée par les traits verticaux (zone d’indice de masse corporelle de 21 à 29). La population étudiée (n=3.029) n’a comporté que des femmes ayant des cycles spontanément ovulatoires. Schéma extrait de la référence 15 , avec autorisation.
risque relatif d’infécondité est multiplié par 2,5 à partir d’un IMC supérieur à 28, alors que le risque relatif d’irrégularité menstruelle, et donc de dysovulation, est à peine multiplié par 1,5. Une étude toute récente, menée par des auteurs néerlandais ayant inclus plus de trois mille femmes ne présentant pas de trouble de l’ovulation, indique que le risque d’infécondité augmente de 4 % par unité d’IMC supérieur ou égal à 29 (figure 2). Cela signifie que, pour une femme normo-ovulante dont l’IMC est à 38, la probabilité d’obtenir une grossesse dans l’année à venir est de 40 % inférieure à celle d’une femme avec IMC normal.
Physiopathologie
L’hypofertilité liée à l’obésité relève de multiples facteurs : outre son impact sur l’ovulation, l’obésité féminine perturbe la sexualité, augmente le risque de fausse couche, et nuit vraisemblablement à la qualité ovocytaire et embryonnaire, et enfin perturbe l’implantation.
Les données provenant de l’AMP permettent de mieux analyser ces derniers effets.
À conditions égales de stimulation, de recueil d’ovocytes et d’embryons transférés, les femmes avec IMC supérieur ou égal à 35 voient leurs chances de grossesse diminuer de 50 % après une tentative d’AMP par rapport aux femmes de poids normal [16]. Cet effet peut s’expliquer par une moins bonne qualité ovocytaire et/ou embryonnaire, mais les données de la littérature sont discordantes sur ce point. On s’oriente plutôt maintenant vers un problème d’implantation endométriale, mais les études sont encore peu nombreuses et les arguments restent pour l’instant théoriques. Le don d’ovocyte permet d’appréhender spécifiquement ce phénomène et certaines études indiquent effectivement un taux significativement plus élevé de fausse-couche chez les receveuses obèses, par rapport aux receveuses de poids normal [17]. Cependant les quelques données disponibles sur ce point précis manquent de puissance statistique du fait de la petite taille des populations étudiées.
La perte de poids améliore-t’elle la fécondité ?
Il est parfaitement établi que la perte de poids, quel que soit le moyen utilisé, permet d’améliorer significativement la fécondité des femmes avec SOPK. La littérature foisonne de synthèses sur ce sujet [ in 18]. On peut en retenir essentiellement qu’il suffit d’une diminution de 5 à 10 % de l’IMC pour observer cette amélioration.
D’autre part, il est démontré par certaines études que c’est la diminution de la graisse viscérale qui rend principalement compte de cet effet.
L’effet de la perte de poids passe essentiellement par la réduction de l’hyperinsulinisme. Dès lors, vu la difficulté bien connue d’obtenir un amaigrissement par le seul respect des règles hygiéno-diététiques, beaucoup de praticiens ont misé sur l’utilisation des traitements insulino-sensibilisants. Concernant le médicament le plus étudié, la Metformine, il apparaît indéniable d’après les quelques méta-analyses disponibles [20-22], qu’elle augmente le taux d’ovulation spontanée par rapport à un placebo (table 1). Toutefois, en termes de grossesse, même si les études divergent Table 1. — Résultats des méta-analyses de l’effet de la METFORMINE sur le taux d’ovulation, comparativement à un placebo.
Revues [reference]
Nombre d’études
Taux d’ovulation (%) incluses (n)
Placebo
METFORMINE
Harbone et coll, [20] 7 21 % 41 % Lord et coll, [21] 7 24 % 46 % Costello et coll, [22] 9 35 % 56 %
entre elles, celles qui ont la plus grande puissance statistique indiquent que cet effet se situe très en dessous de celui que l’on obtient avec le Citrate de Clomifène, correctement utilisé. Dans le plus grand essai randomisé disponible à ce jour [23], les taux de grossesse par cycle sont respectivement de 7 % et 22 %. Dès lors, beaucoup considèrent qu’il ne faut pas utiliser la Metformine comme un traitement inducteur de l’ovulation, mais que ce traitement peut avoir sa place dans la préparation métabolique à l’induction de l’ovulation et à la grossesse. En effet, bien que cela ne soit pas encore clairement démontré, on peut attendre de cette thérapeutique qu’elle facilite le maniement des traitements inducteurs, qu’elle diminue l’incidence des fausses couches, et qu’elle réduise le risque des complications obstétricales liées à l’obésité et à l’insulino-résistance. Ainsi émerge de plus en plus l’idée qu’il faut savoir différer la mise en œuvre d’un traitement inducteur de l’ovulation chez les femmes dont l’IMC dépasse 35 kg/m2 et même idéalement 30…[24].
Synthèse et conclusion
Le SOPMK et l’obésité sont deux états extrêmement fréquents, qui se renforcent l’un l’autre. L’obésité est responsable d’effets multiples et non spécifiques sur la fécondité. Lorsqu’elle est associée à un SOPMK, elle va en outre aggraver l’effet spécifique de celui-ci sur la fonction ovulatoire.
Pour la pratique, il est donc extrêmement important de bien faire la part de la responsabilité de l’un et de l’autre, car ils relèvent chacun de traitements bien spécifiques. C’est vraisemblablement le manque de discernement entre ces deux états qui explique en bonne partie la confusion qui règne actuellement dans la littérature quant à l’intérêt et à l’efficacité de la Metformine pour traiter l’infécondité liée au SOPMK.
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DISCUSSION
M. Jacques BATTIN
Les pédiatres de l’adolescence ont établi un rapport entre une puberté précoce et singuliè- rement l’aménarche précoce et la survenue d’un SOPK. Ils ont appris à reconnaître ce syndrome précocement et à le traiter par antiandrogène devant quelques poils sur la ligne médiane, une seborrhée, l’apparition d’une agressivité, alors que la testostérone est normale, mais au test LH-RH démontrant l’élévation de la CH- qu’apporte le traitement précoce sur l’évolution future ? Concernant les lignées de dysménorrhéïques avec transmission de
SOPK, que sait-on sur les gènes candidats ?
Dans certaines populations, et en particulier dans la population catalane, il existe en effet un lien entre précocité pubertaire, particulièrement l’adrénarche précoce, et survenue ultérieure d’un SOPK. L’explication de ce lien peut se trouver dans l’hyperinsulinisme secondaire à une insulino-résistance que présente la majorité de ces jeunes filles. Cette insulino-résistance semble elle-même secondaire à une hypotrophie fœtale dans un certain nombre de cas. Quoi qu’il en soit, ces jeunes filles vont effectivement présenter précocement quelques symptômes d’hyperandrogénie, pas toujours facile à démontrer sur le plan biologique. En effet, le dosage de la testostérone totale est un paramètre d’une médiocre sensibilité chez la femme, et encore plus chez la jeune fille. La prise en charge précoce de cette hyperandrogénie par un traitement oestroprogestatif anti-androgène permet rapidement de les atténuer. Cependant, ces traitements ne vont pas modifier l’évolution future du SOPK, dont les symptômes réapparaîtront dans les quelques semaines qui suivent l’arrêt d’un traitement oestroprogestatif, quelle qu’ait été la durée de ce traitement. Concernant le déterminisme génétique du SOPK, les approches utilisées jusqu’ici n’ont pas débouché sur des données bien convaincantes. Seuls quelques gènes de susceptibilité secondaires ont été identifiés, avec des résultats très variables d’une population à l’autre. En fait, il convient de mener une approche à très grande échelle, comme pour le diabète de type 2, s’agissant d’une affection à l’évidence multigénique et de pénétrance extrêmement variable. Cette recherche est actuellement en cours, par un consortium mondial d’équipes impliquées dans cette pathologie.
M. Roger HENRION
Aux États-Unis, en raison du nombre croissant de femmes obèses, observe-t-on de plus en plus de femmes porteuses d’ovaires polymicrokystiques ? Le terme de ‘‘ coaching ’’ a été utilisé par les deux orateurs, Didier Dewailly et Jean-Noël Hugues. Ne risque-t-on pas de favoriser, en employant ce terme, la génération spontanée de ‘‘ coachs ’’ qui sont parfois d’authentiques charlatans ?
Effectivement, du fait de l’inflation galopante de l’obésité aux Etats-Unis, on observe de plus en plus de femmes porteuses d’un syndrome des ovaires polymicrokystiques. Il est
vrai que le terme de « coaching » est un anglicisme que l’on peut regretter. Il n’a pas cependant d’équivalent français. On pourrait utiliser les termes « accompagnement », « encadrement », « prise en charge », mais ils ne rendent pas bien compte du travail d’équipe que cela représente. Soulignons à ce propos que la constitution d’une équipe pluridisciplinaire pour la prise en charge des femmes obèses souhaitant une grossesse est actuellement chose impossible, du moins dans les hôpitaux publics, car cette activité est très mal valorisée. Comme vous le soulignez, cela laisse le champ libre aux charlatans, plus soucieux de l’épaisseur de leur portefeuille que de celle de leurs clientes…
M. Claude DREUX
Pourrait-on remplacer le terme ‘‘ coaching ’’, avec son incidence de charlatanisme, par ‘‘ aide médico-psychologique ’’ qui correspond à un vrai métier avec une formation reconnue (exemple de la maladie d’Alzheimer) ?
Effectivement, le terme « aide médico-psychologique » conviendrait assez bien à cette problématique. Peut-on espérer des pouvoirs publics qu’ils nous aideront à faire reconnaître ce métier dans la problématique de l’obésité et grossesse, tout comme ils l’ont fait pour la maladie d’Alzheimer ?
* Service de Gynécologie endocrinienne et Médecine de la Reproduction , Hôpital Jeanne de Flandre, Centre Hospitalier de Lille, 59037 Tirés à part : Professeur Didier Dewailly, même adresse Article reçu et accepté le 17 mars 2008
Bull. Acad. Natle Méd., 2008, 192, no 6, 649-660, séance du 1er avril 2008