Résumé
Le choix des maladies susceptibles de donner lieu à un dépistage néonatal généralisé obéit à des règles précises. La maladie doit être grave, d’apparition précoce, d’une fréquence suffisante, accessible à un traitement efficace, détectable par un test fiable, peu coûteux et applicable à grande échelle. Tout résultat positif doit être suivi de la prise en charge du nouveau-né et tout programme de dépistage doit être régulièrement évalué. Un programme national existe en France depuis 1978. Il est confié à une association privée, l’Association Française pour le dépistage et la prévention des handicaps de l’enfant (AFDPHE) sous la tutelle de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie et de la Direction Générale de la Santé. Actuellement, cinq maladies font l’objet d’un dépistage organisé : la phénylcétonurie, l’hypothyroïdie, l’hyperplasie congénitale des surrénales, la mucoviscidose et la drépanocytose dont le dépistage est limité aux nouveau nés à risque. La toxoplasmose pose un problème à part étant dépistée uniquement chez les enfants de mères non contrôlées au cours de leur grossesse ou en cas de séroconversion. L’accord est unanime sur la nécessité du dépistage de la phénylcétonurie et de l’hypothyroïdie. Celui de l’hyperplasie congénitale des surrénales est majoritairement accepté. Les problèmes de la drépanocytose et de la mucoviscidose sont plus complexes parce que tous les enfants porteurs de la mutation ne présentent pas une affection grave, qu’il n’existe pas de traitement curatif et que l’annonce du diagnostic angoisse les parents alors qu’on ne sait pas encore comment la maladie évoluera. Les tenants du dépistage font valoir l’intérêt d’une prise en charge précoce qui allonge la durée de vie de ces enfants, particulièrement dans le cas de la drépanocytose, la possibilité pour les parents de recourir à un test prénatal en cas de future grossesse et l’information des hétérozygotes par l’enquête familiale. Le problème se pose de l’extension ou non du dépistage néonatal à d’autres maladies. Cette extension est permise par les progrès techniques comme la spectrométrie de masse en tandem qui peut dépister par un seul examen une cinquantaine de maladies. En plus de son coût et des problèmes d’organisation, une telle extension pose des problèmes éthiques comme l’annonce d’une maladie parfois incurable, parfois latente jusqu’à l’âge adulte, et parfois complètement asymptomatique. Les éventuels nouveaux dépistages doivent être limités aux maladies mendéliennes et laisser de côté les polymorphismes génétiques. L’analyse de la situation actuelle permet d’envisager les évolutions souhaitables : — actualiser les critères de sélection des maladies pouvant faire l’objet d’un dépistage néonatal ; — avant de l’étendre à tout le pays, expérimenter un nouveau dépistage à l’échelon local ; — créer une structure d’évaluation réunissant pédiatres et épidémiologistes et évaluer le devenir à long terme des enfants dépistés ; — définir avec précisions les conditions dans lesquelles les hétérozygotes dépistés au cours d’une enquête familiale doivent être informés ; — conserver dans un centre de ressources biologiques les échantillons sanguins prélevés afin d’utiliser la banque ainsi constituée à des fins épidémiologiques.
Summary
Implementation of a generalized screening program for neonatal diseases must obey precise rules. The disease must be severe, recognizable at an early stage, amenable to an effective treatment, detectable with a non expensive and widely applicable test ; it must also be a significant public health problem. Subjects with positive results must be offered immediate treatment or prevention. All screening programs must be regularly evaluated. In France, since 1978, a national screening program has been organized by a private association (‘‘ Association française pour le dépistage et la prévention des handicaps de l’enfant ’’) and supervised by the ‘‘ Caisse nationale d’assurance maladie ’’ and ‘‘ Direction Générale de la Sante ’’. Five diseases are now included in the screening program : phenylketonuria, hypothyroidism, congenital adrenal hyperplasia, cystic fibrosis and sickle cell disease (the latter only in at-risk newborns). Toxoplasmosis is a particular problem because only the children of mothers who were not tested during the pregnancy or who seroconverted are screened. Neonatal screening for phenylketonuria and hypothyrodism is unanimously recommended. Screening for congenital adrenal hyperplasia is approved in most countries. Cases of sickle cell disease and cystic fibrosis are more complex because — not all children who carry the mutations develop severe forms ; — there is no curative treatment ; — parents may become anxious, even though the phenotype is sometimes mild or even asymptomatic. Supporters of screening stress the benefits of early diagnosis (which extends the life expectancy of these children, particularly in the case of sickle cell disease), the fact that it opens up the possibility of prenatal screening of future pregnancies, and the utility of informing heterozygous carriers identified by familial screening. Neonatal screening for other diseases is under discussion. Indeed, technical advances such as tandem mass spectrometry make it possible to detect about 50 diseases in a single run. In addition to issues of cost and organization, any increase in the number of screened diseases will raise ethical problems, such as how to inform parents of an incurable disease, a late-onset disease, or an entirely asymptomatic disorder. It is unanimously agreed that only Mendelian diseases should be screened for (excluding genetic polymorphisms). Analysis of the present situation suggests the following changes : — guidelines for choosing new diseases for neonatal screening should be updated ; — all new screening programs should be tested locally before nationwide implementation ; — an evaluation committee of paediatricians and epidemiologists should be created, and the children’s long-term outcome should be studied ; — the conditions in which heterozygous carriers are informed after familial investigations need to be precisely defined ; — blood samples should be banked for epidemiological studies.
Informationdépistage génétique., dépistage néonatalGeneralized neonatal screening based on laboratory testsgenetic screening., neonatal screeningRaymond Ardaillou, Jean-Yves Le Gall (au nom de la Commission I)Le choix des maladies susceptibles de donner lieu à un dépistage néonatal généralisé obéit à des règles précises. La maladie doit être grave, d’apparition précoce, d’une fréquence suffisante, accessible à un traitement efficace, détectable par un test fiable, peu coûteux et applicable à grande échelle. Tout résultat positif doit être suivi de la prise en charge du nouveau-né et tout programme de dépistage doit être régulièrement évalué. Un programme national existe en France depuis 1978. Il est confié à une association privée, l’Association Française pour le dépistage et la prévention des handicaps de l’enfant (AFDPHE) sous la tutelle de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie et de la Direction Générale de la Santé. Actuellement, cinq maladies font l’objet d’un dépistage organisé : la phénylcétonurie, l’hypothyroïdie, l’hyperplasie congénitale des surrénales, la mucoviscidose et la drépanocytose dont le dépistage est limité aux nouveau nés à risque. La toxoplasmose pose un problème à part étant dépistée uniquement chez les enfants de mères non contrôlées au cours de leur grossesse ou en cas de séroconversion. L’accord est unanime sur la nécessité du dépistage de la phénylcétonurie et de l’hypothyroïdie. Celui de l’hyperplasie congénitale des surrénales est majoritairement accepté. Les problèmes de la drépanocytose et de la mucoviscidose sont plus complexes parce que tous les enfants porteurs de la mutation ne présentent pas une affection grave, qu’il n’existe pas de traitement curatif et que l’annonce du diagnostic angoisse les parents alors qu’on ne sait pas encore comment la maladie évoluera. Les tenants du dépistage font valoir l’intérêt d’une prise en charge précoce qui allonge la durée de vie de ces enfants, particulièrement dans le cas de la drépanocytose, la possibilité pour les parents de recourir à un test prénatal en cas de future grossesse et l’information des hétérozygotes par l’enquête familiale. Le problème se pose de l’extension ou non du dépistage néonatal à d’autres maladies. Cette extension est permise par les progrès techniques comme la spectrométrie de masse en tandem qui peut dépister par un seul examen une cinquantaine de maladies. En plus de son coût et des problèmes d’organisation, une telle extension pose des problèmes éthiques comme l’annonce d’une maladie parfois incurable, parfois latente jusqu’à l’âge adulte, et parfois complètement asymptomatique. Les éventuels nouveaux dépistages doivent être limités aux maladies mendéliennes et laisser de côté les polymorphismes génétiques. L’analyse de la situation actuelle permet d’envisager les évolutions souhaitables : — actualiser les critères de sélection des maladies pouvant faire l’objet d’un dépistage néonatal ; — avant de l’étendre à tout le pays, expérimenter un nouveau dépistage à l’échelon local ; — créer une structure d’évaluation réunissant pédiatres et épidémiologistes et évaluer le devenir à long terme des enfants dépistés ; — définir avec précisions les conditions dans lesquelles les hétérozygotes dépistés au cours d’une enquête familiale doivent être informés ; — conserver dans un centre de ressources biologiques les échantillons sanguins prélevés afin d’utiliser la banque ainsi constituée à des fins épidémiologiques.
Implementation of a generalized screening program for neonatal diseases must obey precise rules. The disease must be severe, recognizable at an early stage, amenable to an effective treatment, detectable with a non expensive and widely applicable test ; it must also be a significant public health problem. Subjects with positive results must be offered immediate treatment or prevention. All screening programs must be regularly evaluated. In France, since 1978, a national screening program has been organized by a private association (‘‘ Association française pour le dépistage et la prévention des handicaps de l’enfant ’’) and supervised by the ‘‘ Caisse nationale d’assurance maladie ’’ and ‘‘ Direction Générale de la Sante ’’. Five diseases are now included in the screening program : phenylketonuria, hypothyroidism, congenital adrenal hyperplasia, cystic fibrosis and sickle cell disease (the latter only in at-risk newborns). Toxoplasmosis is a particular problem because only the children of mothers who were not tested during the pregnancy or who seroconverted are screened. Neonatal screening for phenylketonuria and hypothyrodism is unanimously recommended. Screening for congenital adrenal hyperplasia is approved in most countries. Cases of sickle cell disease and cystic fibrosis are more complex because — not all children who carry the mutations develop severe forms ; — there is no curative treatment ; — parents may become anxious, even though the phenotype is sometimes mild or even asymptomatic. Supporters of screening stress the benefits of early diagnosis (which extends the life expectancy of these children, particularly in the case of sickle cell disease), the fact that it opens up the possibility of prenatal screening of future pregnancies, and the utility of informing heterozygous carriers identified by familial screening. Neonatal screening for other diseases is under discussion. Indeed, technical advances such as tandem mass spectrometry make it possible to detect about 50 diseases in a single run. In addition to issues of cost and organization, any increase in the number of screened diseases will raise ethical problems, such as how to inform parents of an incurable disease, a late-onset disease, or an entirely asymptomatic disorder. It is unanimously agreed that only Mendelian diseases should be screened for (excluding genetic polymorphisms). Analysis of the present situation suggests the following changes : — guidelines for choosing new diseases for neonatal screening should be updated ; — all new screening programs should be tested locally before nationwide implementation ; — an evaluation committee of paediatricians and epidemiologists should be created, and the children’s long-term outcome should be studied ; — the conditions in which heterozygous carriers are informed after familial investigations need to be precisely defined ; — blood samples should be banked for epidemiological studies.
Introduction
Le dépistage néonatal est un dépistage de masse destiné à toucher tous les nouveau-nés d’un pays dans le but de détecter une ou plusieurs affections, le plus souvent héréditaires, à des fins de prévention secondaire. Il s’inscrit dans le cadre des dépistages généralisés à l’ensemble ou à une fraction ciblée de la population. En 1968, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a défini les critères auxquels devait répondre une maladie pour justifier un dépistage de masse : — la maladie représente un problème important de santé publique — elle est détectable à un stade précoce, avant ou tout au début de l’apparition de symptômes cliniques — son évolution est connue, — il existe un traitement efficace préventif ou curatif de la maladie ;
— on dispose d’un test de détection fiable au stade pré-clinique ;
— ce test est acceptable par la population en général et recueille l’assentiment du sujet testé ou, si c’est un enfant, de ses parents, qui doivent bénéficier d’une information claire sur la nature du test, la signification des résultats et les possibilités thérapeutiques ;
— le malade dépisté peut être examiné, traité et suivi dans le cadre de structures médicales performantes ;
— le programme de dépistage doit pouvoir être pérenne ;
— le coût du dépistage doit être modéré et ne pas excéder celui de la prise en charge du malade [1].
Adapté au dépistage néonatal, on doit retenir que l’affection dépistée doit être grave et d’apparition précoce, d’une fréquence suffisante (supérieure à 1/20 000 naissances), accessible à un traitement efficace au stade pré-clinique, détectable par un test donnant lieu à un taux faible de faux positifs (pour éviter l’angoisse parentale et la consommation importante de ressources) et à un taux quasi nul de faux négatifs, peu coûteux, applicable à grande échelle (plus de 800 000 naissances / an en France) ; le dépistage doit être accepté par les parents ainsi que, s’il est positif, l’analyse génétique permettant d’identifier la mutation en cause lorsqu’elle est nécessaire, comme c’est le cas dans la mucoviscidose ; tout résultat positif doit conduire à la prise en charge immé- diate du nouveau né dans un but d’amélioration du pronostic et, enfin, tout programme de dépistage organisé doit être évalué régulièrement [2, 3].
L’interprétation de ces critères est variable d’un pays à l’autre, ce qui explique les différences dans la nature et le nombre des maladies dépistées. On peut soit restreindre ce nombre en invoquant les conséquences néfastes du « surdiagnostic », soit l’augmenter afin d’étendre les objectifs du dépistage d’un bénéfice limité au nouveau-né à un bénéfice au profit de toute la famille (dépistage des hétérozygotes et dépistage prénatal en cas de future grossesse) [4].
Historique et état actuel du dépistage néonatal en France
A la suite de l’introduction par Guthrie [5] de la mesure de la phénylalaninémie chez les nouveau-nés pour dépister l’oligophrénie phénylpyruvique en utilisant le simple dépôt de goutelettes de sang sur un support en papier et de la possibilité de prévenir la maladie par le régime pauvre en phénylalanine, des initiatives privées ont été prises en France dans les années soixante-dix pour tester ce mode de prévention. Un programme national a été organisé à partir de 1978 sous l’impulsion de J. Frézal, avec l’accord de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), par l’Association française pour le dépistage et la prévention des handicaps de l’enfant (AFDPHE) avec trois objectifs : l’accès identique de tous les nouveau-nés au dépistage et à la prise en charge thérapeutique, l’efficacité du test avec la recherche d’une sensibilité et d’une spécificité maximales et l’utilité, c’est-à-dire la nécessité d’un bénéfice direct pour le nouveau-né [6].
L’organisation administrative du dépistage comporte actuellement trois niveaux :
— d’exécution régionale avec une association par région assurant toutes les étapes du programme : information des parents et des professionnels, réalisation en maternité du prélèvement de sang au troisième jour, centralisation des analyses dans un laboratoire retenu par l’Association et observant les règles de bonne pratique préalablement définies, prise en charge des nouveau-nés détectés positivement, c’est-à-dire confirmation du résultat, information des parents sur la maladie, mise en route du traitement et de son suivi en coopération avec les professionnels en charge du patient, tenue des registres statistiques — de coordination nationale (AFDPHE) avec pour mission la définition des programmes, la gestion financière et le compte rendu aux tutelles — des tutelles qui sont la CNAMTS pour le financement et la Direction générale de la santé (DGS) pour la validation des programmes. L’Agence nationale de biomédecine, plus récemment créée, intervient également puisque la loi lui confie tout ce qui touche à l’examen des caractéristiques génétiques des personnes à des fins médicales, mais sa place exacte dans le dépistage néonatal est encore à préciser. Il faut noter que le prélèvement de sang n’est conservé après usage que pendant une période limitée (quatre à six mois) et est utilisé exclusivement pour les dépistages prévus [7].
Actuellement, cinq maladies font l’objet du dépistage néonatal organisé :
l’hyperphénylalaninémie et l’hypothyroïdie congénitale depuis 1978, l’hyperplasie congénitale des surrénales (HCS) depuis 1996, la drépanocytose chez les enfants à risque potentiel (africains et antillais) d’abord aux Antilles et en Guyane, puis en métropole, et la mucoviscidose depuis 2002. Il faut mettre à part le cas de la toxoplasmose dont le dépistage à la naissance ne se justifie que dans des circonstances particulières et n’est pas inclus dans le programme de l’AFDPHE.
L’hyperphénylalaninémie est une maladie métabolique par déficit en phénylalanine hydroxylase, à transmission autosomique et récessive. La transformation de la phénylalanine en tyrosine n’étant pas assurée de façon satisfaisante, la phénylalanine s’accumule dans le plasma et est éliminée dans les urines sous forme de catabolites dont le principal est l’acide phé- nylpyruvique, d’où le nom de phénylcétonurie également donné à la maladie.
Il s’agit d’une affection relativement rare (1/15 000 naissances). L’hyperphénylalaninémie est dépistée par fluorimétrie entre le troisième et cinquième jour de la vie chez un nouveau-né alimenté normalement. En dehors de tout traitement se développe une encéphalopathie avec arriération mentale. Le traitement est simple et efficace ; c’est le régime appauvri en phénylalanine, prolongé jusqu’à huit ans et adapté à la phénylalaninémie qui doit rester comprise entre 2 et 5 mg / 100 ml, puis ne pas dépasser 15 mg/100 ml jusqu’à la fin de l’adolescence. Le régime appauvri en phénylalanine doit être repris chez les femmes en pré-conceptionnel et pendant toute la grossesse [8, 9].
L’hypothyroïdie congénitale est d’origine malformative, plus souvent que géné- tique. Elle est relativement fréquente (1/3 000 naissances) et prédomine chez les filles. Le dépistage repose sur le dosage de la thyréostimuline (TSH) plasmatique qui est très élevée. En l’absence de traitement, des lésions neurologiques irréversibles s’installent conduisant à un retard psychomoteur.
Le traitement substitutif par la L-thyroxine adapté aux contrôles biologiques des taux de thyroxine et de TSH évite l’installation des lésions neurologiques et permet un développement normal à condition d’être commencé précocement après la naissance [10, 11].
L’hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase est une maladie d’origine génétique à transmission autosomique et récessive. Le déficit de synthèse du cortisol entraîne une stimulation de l’antéhypophyse augmentant la sécrétion d’ACTH qui, à son tour, stimule la biosynthèse des androgènes surrénaliens. La découverte d’un cas par dépistage néonatal exigera un suivi des futures grossesses. C’est une maladie relativement rare (1/18 000 naissances avec une incidence plus élevée à La Réunion). Il existe à la naissance une ambiguïté sexuelle par virilisation ante-natale et une insuffisance surrénale avec perte de sel. Le diagnostic néonatal repose sur le dosage de la 17 OH-progestérone, précurseur du cortisol, dont la concentration est très augmentée (> 60 nmol/L chez les enfants nés à terme). Un risque d’erreur peut survenir chez les prématurés, ce qui nécessite dans ce cas des dosages de contrôle. Un diagnostic précoce évite grâce au traitement substitutif en urgence par l’hydrocortisone et la fluorocortisone, les accidents redoutables d’insuffisance surrénale aiguë avec hyperkaliémie et déshydratation extracellulaire pouvant conduire à la mort de l’enfant [12, 13].
La drépanocytose est une hémoglobinopathie d’origine génétique, autosomique et récessive, qui touche pour l’essentiel la population d’origine africaine (1/700 naissances). Elle est caractérisée par la présence d’hémoglobine S pour 40 % du total chez les hétérozygotes et plus de 80 % chez les homozygotes.
Sous le terme de syndromes drépanocytaires majeurs, on y ajoute les hétérozygotes composites Hb S/C et S/βThal qui représentent en région parisienne 20 et 10 % des enfants dépistés, respectivement. Le dépistage repose sur une technique d’isoélectrofocalisation. En cas d’anomalie, le diagnostic est confirmé par électrophorèse ou par chromatographie liquide à haute performance. C’est un dépistage ciblé qui s’applique à l’ensemble des naissances aux Antilles et en Guyane, et uniquement aux nouveau-nés à risque en France métropolitaine. Le nouveau-né est protégé au cours des premiers mois par l’hémoglobine fœtale. Des complications apparaissent dès l’âge de quatre mois qui peuvent être létales. Il s’agit essentiellement d’épisodes micro-occlusifs dans les capillaires dus aux déformations des hématies survenant dans les tissus périphériques en raison de la diminution de la pression partielle d’oxygène. En l’absence de suivi médical, 30 % des enfants décèdent avant l’âge de cinq ans par infection pneumococcique fulgurante, anémie ou thromboses, en particulier cérébrales. La prise en charge précoce de l’enfant permet de réduire la mortalité précoce par des vaccinations appropriées (anti-pneumococcique), des transfusions, le traitement par l’hydroxyurée pour augmenter le taux d’hémoglobine fœtale, l’éducation des familles et le suivi régulier. Ces conditions de prise en charge ont permis de réduire la mortalité avant cinq ans à une fréquence de 2-5 %. De même, l’espérance de vie des malades dépasse maintenant la cinquième décennie malgré une morbidité encore élevée nuisant à la qualité de vie [14].
La mucoviscidose est une maladie génétique, autosomique et récessive, de fréquence relativement élevée (1/5 000 naissances). Le test de dépistage est le dosage dans le plasma de la trypsine immunoréactive. En cas de valeurs élevées (> 65 µg/L), le diagnostic est vérifié par la recherche de mutations sur le gène de la « cystic fibrosis transmembrane conductance regulator channel » (CFTR). Cette recherche examine un ensemble d’environ trente mutations couvrant 90 % de celles observées en France. La plus fréquente d’entre elles (70 %) est la mutation F508del . Le test de la sueur est ensuite prescrit pour vérifier l’expression phénotypique de la maladie (pénétrance de la mutation).
Une concentration de chlorure supérieure à 60 mmol/L est considérée comme anormale. En cas de diagnostic positif, l’enfant est adressé à un Centre de ressources et de compétences pour la mucoviscidose (CRCM) pour une prise en charge globale multidisciplinaire associant pédiatre spécialisé, infirmière puéricultrice, kinésithérapeute, diététicienne, psychologue et biologiste généticien. Le but est d’ainsi assurer l’information des parents, de donner des conseils d’hygiène de vie pour éviter les infections et de suivre régulièrement l’enfant [15, 16] La toxoplasmose néonatale est relativement fréquente en France. Dans la majorité des cas l’affection est inapparente à la naissance, mais susceptible de se révéler tardivement à l’adolescence ou à l’âge adulte entraînant alors diverses atteintes neurologiques et souvent une choriorétinite. Le dépistage immunologique à la naissance n’est pas justifié de façon systématique, mais seulement dans deux circonstances :
— en l’absence de tout contrôle sérologique de la mère au cours de la grossesse ;
— en cas de séroconversion chez la femme enceinte constatée lors d’un des trois examens sérologiques pratiqués au cours de la grossesse.
Le dépistage repose dans un premier temps sur un test simple, la recherche d’IgG anti-toxoplasme. En cas de positivité, il faut déterminer si les anticorps ont une origine maternelle ou fœtale, et dans le second cas mettre en œuvre un traitement [17]. D’autres maladies de la mère à l’origine de fœtopathies comme l’hépatite B ou l’infection par cytomegalovirus font également l’objet d’un dépistage chez le nouveau-né si la mère a été infectée durant la grossesse.
En 2004, l’AFDPHE a organisé le dépistage néonatal chez 817 388 nouveaunés dont 770 208 en métropole et 47 180 dans les DOM-TOM avec les résultats positifs suivants : 88 pour l’hyperphénylalaninémie (1/15 422), 287 pour l’hypothyroïdie congénitale (1/2 848), 45 pour l’hyperplasie congénitale des surrénales (1/18 164), 298 pour la drépanocytose chez 225 474 nouveau-nés à risque (1/663) et 179 pour la mucoviscidose (1/4 383). Au total, un nouveau-né sur 946 a été repéré. Le coût moyen du multidépistage a été de 8,54 k par nouveau-né [7].
Analyse des bénéfices et inconvénients des cinq dépistages organisés en France
Il existe un accord unanime sur l’intérêt du dépistage de la phénylalaninémie et de l’hypothyroïdie congénitale qui est pratiqué dans la quasi-totalité des pays développés. Dans le cas de l’hyperphénylalaninémie, tous les critères de validation d’un dépistage de masse sont réunis : le test utilisé est sensible et spécifique ; le traitement, à condition d’être précoce, est d’une totale efficacité puisque les enfants détectés et soignés sont intellectuellement comparables aux enfants indemnes. Dans le cas de l’hypothyroïdie, la sensibilité et la spécificité du test sont correctes, même s’il existe quelques faux positifs identifiés le plus souvent lors d’un deuxième dosage. La prise en charge rapide des enfants leur assure un développement psychomoteur quasi normal. De même, le dépistage de la toxoplasmose est justifié lorsqu’il y a risque ou présomption d’atteinte fœtale.
L’hyperplasie congénitale des surrénales représente une situation plus ambiguë. La spécificité du dosage est moins bonne du fait des taux élevés de 17 OH-progestérone observés chez les prématurés, et les symptômes de la maladie sont souvent apparents à la naissance avec virilisation et déshydratation permettant le diagnostic clinique principalement chez la fille. Il est intéressant de noter que depuis la mise en route du dépistage néonatal à La Réunion où la maladie a une incidence élevée, le sex ratio auparavant en faveur des filles est devenu équilibré comme le laissait prévoir le caractère de la mutation [6]. Le traitement précoce permet ainsi d’éviter les accidents aigus pouvant être létaux et le dépistage systématique supplée la méconnaissance possible des signes cliniques de la maladie par un médecin peu expérimenté.
La drépanocytose constitue un cas à part puisque le dépistage n’est effectué que chez les enfants des populations à risque. Le test utilisé ne génère que peu de faux positifs et faux négatifs, le problème majeur étant le nombre important d’enfants sains porteurs de la mutation. Il n’existe pas de traitement efficace de la maladie, mais des mesures préventives des complications qui diminuent considérablement la mortalité. Il convient de noter qu’en raison des flux migratoires, la drépanocytose est devenue en France la première maladie génétique mendélienne, en nombre de cas dépistés par an. Compte tenu de sa fréquence dans les populations concernées, des mesures de santé publique allant au-delà du simple dépistage néonatal doivent être mises en œuvre.
Le dépistage de masse de la mucoviscidose est le plus discuté [4, 18].
Plusieurs raisons sont avancées pour en déconseiller le maintien :
— le test utilisé a une spécificité insuffisante, générant ainsi des faux positifs ;
— l’annonce aux parents d’un risque nécessitant des examens de confirmation les angoisse, parfois inutilement même si un résultat négatif ultérieur suffit en général à les tranquilliser ; il en est de même pour les hétérozygotes détectés dans la famille qui mèneront une vie normale, mais se sauront porteurs de la mutation ;
— le retentissement sur le phénotype des diverses mutations est variable et imprévisible ; il existe, en particulier, des mutations dites « mild », type
R117H, associées à un bon pronostic et ne nécessitant qu’une prise en charge allégée ; il faut aussi souligner qu’un nombre encore important, mais en diminution, d’enfants arrivant à l’étape du test à la sueur (un peu moins de 70 %) se révèle négatif ;
— le suivi de tout nouveau-né par un médecin expérimenté ferait rapidement reconnaître la maladie sur l’hypotrophie et les infections respiratoires à répétition ;
— enfin, il n’existe pas de traitement curatif de la maladie.
En faveur du dépistage, on peut retenir comme arguments :
— la prise en charge précoce de l’enfant dans un centre spécialisé permettant son suivi et la prévention des complications par le traitement rapide de toute infection, la kinésithérapie respiratoire et des mesures d’hygiène de vie ;
— la détection secondaire d’un état d’hétérozygotie chez les deux parents, ce qui peut les conduire à recourir à un diagnostic prénatal de la maladie en cas de grossesse ultérieure ;
— la mise en œuvre d’une enquête familiale à la recherche de porteurs hétérozygotes qui pourront ainsi être informés.
L’existence de ces éléments opposés fait que la mucoviscidose n’est pas comprise dans la liste des maladies dépistées à la naissance dans tous les pays. Cependant, dans une étude récente, le « Center for disease control and prevention » après avoir dressé le bilan risques vs bénéfices conclut que ce dépistage est justifié [19] et on constate aussi que la balance penche plutôt vers le dépistage systématique qui est en cours aux États-Unis, en Grande Bretagne, en Australie, en Autriche et en Nouvelle Zélande et devrait être prochainement mis en place dans d’autres pays comme l’Allemagne, les Pays Bas et l’Espagne.
Faut-il dépister d’autres maladies ?
Plusieurs arguments sont avancés en faveur d’un dépistage plus étendu que celui actuellement en pratique :
— ces dernières années ont vu s’accroître la disponibilité de nouveaux tests de biochimie et biologie moléculaire et d’appareils comme la spectrométrie de masse facilitant la détection simultanée de nombreuses maladies héréditaires avec de faibles risques d’erreurs et un coût acceptable [20] ;
— il serait logique de proposer aux parents une palette de possibilités et les laisser décider après avoir été informés ;
— un dépistage étendu fait de nombreux bénéficiaires : l’enfant testé dont la maladie pourra éventuellement être traitée plus efficacement, parfois en urgence, ou, tout au moins, être attentivement surveillée afin de prévenir les complications, les parents avertis des risques pour les grossesses futures et mieux à même ainsi de prendre les dispositions adéquates (diagnostic prénatal) et dans l’immédiat d’organiser leur vie, et, enfin, les administrations publiques qui pourront prendre en compte dans leurs prévisions les coûts sociaux des maladies dépistées ;
— le dépistage systématique peut suppléer la méconnaissance par le médecin traitant des symptômes cliniques de la maladie ;
— enfin, la conservation des prélèvements après usage permettrait l’analyse extensive de l’ADN de tous les nouveau-nés et, ainsi, de mieux connaître les polymorphismes génétiques dans l’ensemble de la population.
Les adversaires d’une telle extension avancent :
— son coût, l’argent dépensé pouvant trouver ailleurs une meilleure utilisation ;
— l’existence de faux positifs génératrice d’angoisse chez les parents ;
— le doute sur le bénéfice réel pour un hétérozygote d’être détecté puisqu’il va se croire malade alors qu’il ne l’est pas ;
— la perturbation de la relation mère-enfant du fait de la révélation à la naissance du diagnostic ;
— l’entrée dans la maladie dès la naissance alors que la maladie ne se développera que plusieurs années plus tard parfois ;
— la facilité dans de nombreux cas du diagnostic clinique de la maladie chez les enfants atteints ;
— l’absence fréquente de traitement à proposer ;
— les dangers de la fréquentation régulière des hôpitaux exposant les enfants aux infections nosocomiales.
Le dépistage de nombreuses maladies fait ainsi l’objet de discussions analysées en détail par l’« American College of Medical Genetics » [21] dont quelques exemples sont envisagés ci-dessous.
Le problème a été soulevé de savoir s’il fallait ou non utiliser la spectrométrie de masse en tandem (MS/MS) pour dépister par un seul examen 40 à 50 maladies héréditaires du métabolisme, pour la plupart des enzymopathies [22, 23]. Ces maladies se répartissent en trois grandes catégories :
— les intoxications par accumulation dans l’organisme de substrat endogène, telles les aminoacidopathies dont l’hyperphénylalaninémie déjà examinée, la leucinose et les tyrosinémies héréditaires, les aciduries organiques, les déficits du cycle de l’urée, les intolérances héréditaires aux glucides comme la galactosémie et la fructosémie, les porphyries et les intoxications par les métaux (hémochromatose et maladie de Wilson) ;
— les déficits du métabolisme énergétique, maladies mitochondriales affectant la chaîne respiratoire ou les molécules énergétiques (acides gras, glucides, corps cétoniques) et conduisant à des désordres de la production, de l’utilisation ou du stockage de l’adénosine triphosphate (ATP) ;
— les maladies affectant la synthèse ou le catabolisme de molécules complexes, comme les protéines, dont les maladies de surcharge d’origine lysosomiale (ex : maladies de Gaucher, de Fabry…).
Les affections appartenant à la première catégorie n’affectent pas le développement fœtal. L’enfant naît normal et on dispose alors de nombreuses possibilités pour le traiter : épuration en cas d’urgence par hémodialyse, utilisation de médicaments « épurateurs » qui favorisent l’excrétion des molé- cules toxiques, régimes particuliers dépourvus du substrat dont le métabolisme est déficitaire. Il y a donc toutes les chances d’assurer à l’enfant un développement normal s’il est traité. Les affections du deuxième type sont de diagnostic plus difficile ; elles perturbent le développement intra-utérin et n’admettent que peu ou pas de traitements. Dans le cas des maladies de la troisième catégorie, on peut disposer de l’enzymothérapie substitutive très onéreuse, mais habituellement efficace. Les enzymopathies sont des maladies rares ; mais, si on prend l’exemple de la leucinose (en moyenne 5 cas par an en France), on peut se demander pourquoi ne pas la dépister alors que la MS / MS permet de mesurer leucine et phénylalanine dans le même examen. Cette méthode a prouvé sa spécificité et sa sensibilité, toutes deux élevées, et il est maintenant possible d’allonger la liste des maladies détectables. Cependant, restent à résoudre des questions économiques, organisationnelles et éthiques.
En effet, ce type de dépistage exige la création de centres de dépistage performants, même s’ils sont en nombre limité, et de ce fait, le transport rapide du prélèvement de la maternité au laboratoire de détection. Le coût d’une telle organisation étendue à tout le pays doit être chiffré afin de savoir s’il est supportable par la collectivité. Les problèmes éthiques posés par le dépistage de maladies sans symptomatologie clinique ou ne donnant lieu à aucune proposition thérapeutique satisfaisante sont aussi à souligner [24].
La possibilité d’un dépistage néonatal a été discutée pour plusieurs autres affections héréditaires dont l’hémochromatose, l’hypercholestérolémie familiale, le syndrome de l’X fragile et la myopathie de Duchenne, les arguments en faveur du dépistage étant l’intérêt pour les parents de prévoir l’organisation des soins pour l’enfant et celle de la vie familiale, d’envisager un diagnostic prénatal en cas de future grossesse, de rechercher les hétérozygotes dans la famille et, dans le cas de l’hypercholestérolémie, de prévoir un régime adéquat et éventuellement un traitement dés l’apparition des troubles du métabolisme des lipides. Pour chacune de ces affections, des arguments défavorables ont été avancés dont la révélation tardive de la symptomatologie clinique pour l’hypercholestérolémie familiale et l’hémochromatose, les variations de la pénétrance des mutations pour l’hémochromatose rendant impossible tout pronostic à long terme, l’absence de traitement efficace pour la myopathie de Duchenne et le syndrome de l’X fragile. Dans la situation actuelle, ces dépistages sont exceptionnellement effectués et uniquement à titre d’essais en vue d’une évaluation [4].
Le problème s’est également posé de savoir s’il fallait intégrer dans le dépistage néonatal la recherche des polymorphismes génétiques associés à une augmentation du risque de développer la maladie, s’il s’agit d’une maladie répandue chez l’enfant comme le diabète de type 1 ou l’asthme [25]. Il existe une quasi unanimité pour apporter une réponse négative à cette question. Il s’agit là, en effet, de médecine prédictive d’une maladie de survenue problé- matique et non de dépistage d’une maladie existante. Les risques d’inquiéter à tort les parents et d’imposer aux enfants des précautions inutiles l’emportent largement sur l’intérêt d’un diagnostic pre-symptomatique.
Conclusion
L’Académie nationale de médecine se félicite de l’action menée par l’AFDPHE qui a été l’initiatrice en France du dépistage néonatal et grâce à laquelle de nombreuses maladies ont été détectées, ce qui a permis de sauver des vies, de permettre à des enfants une existence et un développement normaux ou, au moins, de prévenir chez eux des complications et ainsi d’accroître leur espérance de vie. Cette association qui a fait la preuve de son efficacité doit être soutenue par les pouvoirs publics et son existence préservée. L’analyse de la situation actuelle permet cependant de suggérer quelques modifications à la situation actuelle.
— Il convient d’actualiser les critères de l’OMS publiées il y a quarante ans sur les conditions de validité d’un dépistage néonatal. Deux points devraient être considérés : d’une part, la prévalence de la maladie ne peut pas être un critère absolu et la limite au dessous de laquelle le dépistage néonatal n’est pas envisageable pourrait être abaissée si, malgré la faible prévalence de la maladie, la balance bénéfice/risques reste positive ; d’autre part, la notion de l’existence d’un traitement curatif ne doit pas être la seule à être prise en compte si des traitements palliatifs permettant d’améliorer la qualité de vie et de prolonger la vie des patients sont possibles.
— Tout dépistage néonatal nouveau devrait être évalué grâce à une modélisation prenant en compte les données de la science disponible, puis expérimenté à une échelle locale ou régionale, si la première étape est franchie, avant d’être généralisé. De tels dépistages doivent exclure toute recherche d’un polymorphisme génétique associé à une augmentation du risque de développer ultérieurement une maladie et être réservé à des maladies génétiques mendéliennes à expression néonatale.
— Une structure d’évaluation réunissant des épidémiologistes et des pédiatres devrait être prévue afin de faire le bilan des dépistages néonataux récemment institués ou discutés comme celui de la mucoviscidose. Il est également indispensable d’évaluer le devenir des enfants dépistés à long terme pour savoir si le dépistage a été suivi ou non d’une amélioration et d’une prolongation de la vie de l’enfant. Le rôle de l’Agence de biomédecine devrait être précisé à cet égard.
— Les conditions dans lesquelles la découverte d’une maladie génétique chez le nouveau-né amène à mettre en œuvre une enquête familiale à la recherche d’hétérozygotes, porteurs de la mutation doivent être définies avec précision ; l’information donnée à un sujet porteur doit éviter de générer un état anxieux, mais aussi doit lui permettre de prendre des décisions en connaissance de cause sur une demande, dans le futur, de dépistage pré-conceptionnel ou prénatal. Le cas particulier du dépistage néonatal n’est pas envisagé dans le projet de décret relatif aux examens des caractéristiques à des fins médicales pris en application de la loi du 6 août 2004 relative à la bioéthique, projet au sujet duquel l’Académie a été consultée en décembre 2005 [26]. Il est certain que des mesures particulières doivent être prises à cet égard.
— En accord avec les recommandations antérieures de l’Académie sur l’intérêt de créer dans notre pays des banques de données utilisables à des fins épidémiologiques, il serait opportun de ne plus détruire les échantillons sanguins prélevés en vue du dépistage néonatal. La collection ainsi constituée pourrait être à la base d’une étude du patrimoine génétique de l’ensemble de la population française en assurant l’anonymat selon les directives de la Commission Nationale Informatique et Liberté (CNIL).
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Liste des experts auditionnés :
Professeur Pierre Ambroise-Thomas, professeur de parasitologie au CHU de Grenoble, vice-président de l’Académie de médecine ; Docteur Ségolène Aymé, directeur de recherches à l’INSERM (service commun de l’INSERM SC 11 ; Hôpital Broussais, Paris), présidente de la Société française de génétique humaine ; Docteur Malika Benkerrou, praticien hospitalier en pédiatrie à l’Hôpital Robert Debré (Paris) ; Docteur Claudine Blanchet-Bardon, médecin dermatologue à l’Hôpital Saint Louis (Paris) ; Professeur Jacques Elion, professeur de biochimie à l’Université Denis Diderot (Paris) et chef de service à l’Hôpital Robert Debré (Paris) ; Professeur Jean Pierre Farriaux, président de l’Association Française pour le Dépistage et la Prévention des Handicaps de l’Enfant (AFDPHE) ; Professeur Arnold Munnich, professeur de génétique et pédiatre à l’Université René Descartes (Paris) et au groupe hospitalier Necker-Enfants Malades, membre de l’Académie des sciences ; Professeur Michel Roussey, professeur de pédiatrie au CHU de Rennes, membre de l’AFDPHE ; Professeur Jean-Marie Saudubray, chef de service de pédiatrie au groupe hospitalier Necker-Enfants Malades (Paris) ; Professeur François Thépot, professeur d’histologie-embryologie au CHU d’Amiens, chargé de mission à l’Agence nationale de biomédecine ; Madame Joëlle Vailly, chargée de recherches à l’INSERM (Centre de recherches sur la santé, le social et le politique, Université Paris 13- Bobigny)
* Membre de l’Académie nationale de médecine
Bull. Acad. Natle Méd., 2006, 190, no 8, 1745-1759, séance du 14 novembre 2006