Résumé
Par leurs objectifs définis dans la loi du 4 mars 2002 relatifs aux droits des malades et à la qualité du système de santé, l’organisation de la médecine en réseaux constitue un enjeu de santé publique, au service des patients relevant de pathologies complexes et/ou chroniques. Le Plan Cancer, activé en mars 2003, prévoit la mise en place d’ici 2007 dans chaque région d’un réseau de santé en cancérologie, ayant pour vocation majeure d’assurer aux patients l’égal accès à des soins et à un accompagnement de qualité, fondés sur la coordination des professionnels et la mise à disposition d’outils communs de pluridisciplinarité et de communication. En Lorraine, les actions menées par le réseau ONCOLOR, fruit d’une réflexion initiée dès 1993, sont conformes aux recommandations du Plan Cancer et considérées jusqu’à présent comme une réussite régionale. L’avenir de ce réseau dépend du développement de ses projets, de la pérennité de son financement et de l’évaluation de cette nouvelle culture organisationnelle en terme de bénéfice pour les patients et les professionnels. Il s’agit d’une tâche difficile reposant sur la professionnalisation de l’équipe permanente et la recherche constante d’un équilibre consensuel entre tous les partenaires.
Summary
Legislation governing patients’ rights and health care quality (March 2002) provided for the creation of healthcare networks intended to improve the management of patients with complex and/or chronic diseases. As defined in the Cancer Plan, activated in March 2003, an oncological healthcare network covers a particular French region, with the aim of offering patients equal access to the best available care and accompaniment, based on caregiver coordination, shared multidisciplinary tools, and communication. ONCOLOR, the regional cancer network launched in the Lorraine region in 1993, complies with these objectives. Nevertheless, its future development depends on continued dynamism, durable financial support, and regular evaluation of the benefits for patients and caregivers. The key words are professionalism and consensus..
INTRODUCTION
Les réseaux représentent une innovation organisationnelle motivée par la nécessité de promouvoir un égal accès des patients à des soins continus de qualité, grâce à une coordination des professionnels et à une prise en charge globale prenant en compte l’environnement socio-familial et professionnel. Ils diffèrent des filières de soins qui définissent la trajectoire des patients entre les professionnels de santé et les structures médico-sociales. Centrés autour des personnes malades, devenues acteurs du système de santé, les réseaux constituent un enjeu de santé publique dans un système en mutation en raison de l’évolutivité et de la complexité des connaissances scientifiques, du contexte socio-économique et des besoins de la population. Leur réussite repose sur la volonté des acteurs individuels et institutionnels de définir des objectifs communs dans une pratique régulière de négociations réciproques.
RÉSEAUX DE SOINS, RÉSEAUX DE SANTÉ
Les premiers réseaux sont nés il y a plus de vingt ans autour de pathologies spécifiques (tuberculose, sida, hépatite C) ou de populations en danger (précarité, alcoolisme et toxicomanies). Ils avaient pour objet de rapprocher la ville et l’hôpital en facilitant la proximité des soins. D’autres thèmes ont ensuite émergé : diabète, périnatalité, affections cardiovasculaires, personnes âgées, handicapées ou dépendantes, santé mentale, soins palliatifs, cancer.
Leur cadre législatif et réglementaire a suivi un chemin complexe à la suite de l’inscription des réseaux de soins dans le code de la Sécurité Sociale, puis de la Santé Publique, par les ordonnances du 24 avril 1996. La loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2002 crée une dotation nationale de développement des réseaux (DNDR) au sein de l’Objectif National de Dépenses d’Assurance Maladie (ONDAM) [1]. Des textes réglementaires en définissent les modalités d’application et de mise en œuvre opérationnelle sur le terrain [2, 3]. Cette enveloppe, répartie entre les régions est attribuée aux réseaux par les directeurs des Agences Régionales d’Hospitalisation (ARH) et des Unions régionales des caisses d’assurance maladie (URCAM).
La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de soins, complétée d’un décret [4, 5], définit les réseaux de santé . Leur objectif est de
favoriser l’accès aux soins, la coordination, la continuité et l’interdisciplinarité des prises en charge, notamment de certaines populations, pathologies, ou activités sanitaires. Ils assurent une prise en charge adaptée sur le plan de l’éducation à la santé, de la prévention, du diagnostic et des soins ; ils participent à des actions de santé publique. Ces réseaux incluent des professionnels, des établissements, des institutions sociales et des représentants des usagers. La diffusion de connaissances validées et la transmission sécurisée de données médicales et/ou sociales concourent aux objectifs précités.
Le terme de réseau de santé est préféré à celui de réseau de soins, quand les missions organisationnelles en constituent les activités dominantes. Les réseaux peuvent couvrir une région, un territoire de santé ou un secteur de celui-ci.
La création et le développement d’un réseau de santé imposent la mobilisation des acteurs et des structures concernées par une pathologie et/ou une situation médicosociale relevant d’une organisation interdisciplinaire et transversale, en relation étroite avec les ARH, les URCAM, les Directions Régionales des Affaires Sanitaires et Sociales (DRASS), les Unions Régionales des Médecins Libéraux (URML). Une équipe permanente dirigée par un médecin coordonnateur assure :
— la gestion administrative, technique, financière ;
— la mise en place et le maintien d’outils communs apportant une valeur ajoutée aux acteurs et une amélioration de la prise en charge des patients ;
— l’activation, la coordination et le suivi des projets en réponse aux appels d’offres ;
— l’organisation de formations ;
— le développement d’un système d’information ;
— l’évaluation.
L’importance de ces tâches, dont dépend la crédibilité d’un réseau, exige, outre un financement adapté, des compétences spécifiques de l’équipe de coordination ; ces dernières nécessitent une formation à de nouveaux métiers alliant une connaissance médicale de terrain, une ouverture à des problèmes de santé publique, une écoute des besoins des patients et des professionnels, des capacités managériales.
Le cadre juridique est une convention entre établissements, Association Loi 1901, plus rarement un groupement d’intérêt public, et peut-être dans l’avenir un groupement de coopération sanitaire.
Le financement des réseaux de santé repose sur l’enveloppe nationale de développement des réseaux (125 millions d’euros en 2004, 165 prévus en 2005), les projets soutenus par les Fonds d’Aide à la Qualité des Soins de Ville (FAQSV) ou s’intégrant dans les appels d’offres publics ou privés et éventuellement les subventions des collectivités territoriales.
CANCER ET RESEAUX DE SANTE
La circulaire de 1998 relative à l’organisation des soins en cancérologie dans les établissements d’hospitalisation publics et privés visait à promouvoir la pluridisciplinarité, l’égalité d’accès aux soins dans des structures graduées complémentaires et leur continuité avec les professionnels de proximité [6]. Elle incitait déjà à la promotion de « réseaux de soins » agréés par les ARH et répondant aux objectifs du Schéma Régional d’Organisation des Soins (SROS) de deuxième génération. Dans le Plan Cancer (2003-2007), ces éléments sont repris avec force dans les mesures 29 à 38 du chapitre « Soins », concernant la coordination des acteurs par la généralisation des réseaux et la régulation graduée des structures de soins [7]. Il est prévu que dans chaque région soit mis en place d’ici 2007 un réseau régional de santé ayant vocation à coordonner les acteurs, organiser des outils communs de pluridisciplinarité et de communication, contribuer à la continuité des soins en liaison avec les réseaux territoriaux existants, à la formation et à l’évaluation de ses membres et de leurs pratiques.
Une mission confiée à Philippe Bergerot par la Mission Interministérielle de Lutte contre le Cancer a permis de faire un état des lieux par questionnaire à la fin de l’année 2003 [8]. Cinquante-six réseaux ont été dénombrés : vingt-cinq déclarent une couverture régionale, trente et un concernent un territoire de santé (ou bassin de vie) ou une relation inter-établissements ou ville-hôpital, notamment autour des soins à domicile. On note une très grande hétérogénéité dans leurs structures administratives et juridiques, leurs missions, leurs réalisations, les modalités de transmission des informations médicales, le niveau de leur financement. Cette diversité s’explique par le degré d’ancienneté des réseaux, le découpage géographique et la démographie des régions, ainsi que par leur niveau d’équipement ; leur logique organisationnelle privilégie une approche centrée tantôt sur les établissements, tantôt sur la hiérarchisation de l’offre de soins, tantôt sur l’optimisation du parcours du patient. L’existence de ces réseaux dépend aussi du contexte humain et du degré d’adhésion des équipes médicales à cette nouvelle organisation de pratiques coordonnées dans laquelle les enjeux de pouvoirs se trouvent modifiés. Néanmoins, l’apport des réseaux se traduit d’ores et déjà par une amélioration des relations entre les établissements publics et privés et entre la ville et l’hôpital, et par une harmonisation des pratiques.
LE RÉSEAU ONCOLOR
Historique, missions, structuration, financement.
Le réseau ONCOLOR est né en 1993 à l’initiative d’un groupe de professionnels de santé lorrains issus du Comité Technique Régional de Cancérologie, activé par la
DRASS, pour réfléchir à la pratique de la chimiothérapie anticancéreuse. La réflexion s’est élargie très vite à l’organisation de la cancérologie régionale en liaison avec l’ARH, l’Urcam et l’URML de Lorraine (URMLL), pour répondre aux besoins des patients et des professionnels de santé dans une région de 2,3 millions d’habitants caractérisée par une surmortalité par cancer (11 000 nouveaux cas et 6 000 décès par an, quatrième rang pour la surmortalité). Les principes du réseau, déjà intégrés dans le SROS de 1995, ont été développés dans ses textes fondateurs et sa convention constitutive agréée par l’ARH le 29 juin 1998. Initialement conçu comme un réseau de soins inter-établissements publics et privés, ONCOLOR est devenu réseau de santé ouvert aux médecins libéraux, généralistes et spécialistes (par l’intermédiaire de l’URMLL), aux autres professionnels de santé concernés, aux représentants des usagers et des mutuelles-santé. Le succès de sa mise en place réside dans la même vision collective de ses acteurs, centrée sur l’intérêt des patients, sa dimension d’emblée régionale, la liaison permanente avec les autorités institutionnelles, une architecture à la fois verticale et transversale, le respect d’un équilibre entre les différentes composantes régionales dans les structures administratives mises en place [10].
Les missions d’ONCOLOR sont les suivantes : assurer un égal accès de tous les patients à des soins de qualité, grâce à la coordination des acteurs, au développement des outils de la pluridisciplinarité, à la formation des professionnels de santé, au partage des informations, à l’évaluation des actions et de l’impact du réseau sur les pratiques professionnelles, l’état de santé et la satisfaction des patients.
Ces missions organisationnelles, définies en 1998, sont conformes à celles préconisées dans la mesure 29 du Plan Cancer et dans la Circulaire relative à l’organisation des soins en cancérologie [7, 9]. Elles sont susceptibles d’être modifiées à l’issue de la réflexion nationale en cours sur le cahier des charges des réseaux de santé en cancérologie. Il est important de souligner qu’ONCOLOR n’intervient pas dans la prise en charge directe des patients, puisqu’il ne s’agit pas d’un réseau de soins.
Le cadre juridique d’ONCOLOR est une Association Loi 1901 (publication au
Journal Officiel le 5 février 2000). Ses instances, mandatées pour trois ans, sont les suivantes : une assemblée générale ; un conseil d’administration de quarante membres délibératifs représentant tous les partenaires du réseau (dont cinquante-trois établissements publics et privés) et quatre membres consultatifs, incluant les directeurs de l’ARH et de l’Urcam ; un bureau de douze membres auquel s’ajoutent des invités permanents, dont l’URMLL. Les autorités institutionnelles et les dirigeants des collectivités territoriales sont invités à l’assemblée générale. Le Président élu par le bureau assure la responsabilité administrative et juridique du réseau (figure 1).
La composition de l’équipe permanente a été adaptée progressivement aux besoins et aux compétences nécessaires. Initialement constituée d’un médecin à mi-temps et d’une secrétaire à temps plein en 1998, l’équipe compte désormais 8,8 équivalents temps plein (ETP), incluant la création de trois nouveaux postes (médecin coordi-
FIG. 1 — Composition du réseau ONCOLOR, 2005 Légende — SHS : sites hautement spécialisés, SSP : sites spécialisés nateur, cadre administratif de coordination, adjoint au cadre), et des chargés de projet (figure1). Cette équipe met en application les décisions issues des instances du réseau, et notamment du bureau. Elle travaille en étroite liaison avec les responsables des groupes de travail thématiques animés par les chargés de projet.
La complexité des tâches de chacun, la diversité des actions, le maintien de l’équilibre d’une équipe très active et réellement professionnelle reposent sur la prise en compte par nos partenaires institutionnels des dimensions nouvelles du réseau ONCOLOR.
Le financement du réseau (Tableau I)
Le réseau a bénéficié, depuis son agrément en 1998, de moyens attribués par l’ARH.
Ré-évalués régulièrement, ils s’inscrivent dans un protocole d’accord pour les années 2003 à 2005, en cours de renouvellement pour 2006-2008. Fin 2004, la DRDR a renforcé ce soutien qui couvre une grande partie des frais de personnel médical et non médical, de fonctionnement et d’investissements. Les membres d’ONCOLOR participent aux frais de fonctionnement du réseau par le financement d’une contribution annuelle. Les établissements soutiennent l’activité de formation.
TABLEAU I. — Financement du réseau ONCOLOR ARH : Agence Régionale de l’Hospitalisation, DRDR : Dotation Régionale de Développement des réseaux, FAQSV : Fonds d’Aide à la Qualité des Soins de Ville, FNADT : Fonds National pour l’Aménagement et le Développement du Territoire, DRASS : Direction Régionale des Affaires Sanitaires et Sociales, HAS : Haute Autorité en Santé, Ministère RNT : Ministère délégué à la Recherche et aux Nouvelles Technologies.
Les autres recettes découlent de réponses à des appels à projet ciblées sur des actions spécifiques, notamment sur la diffusion des référentiels (FAQSV), l’aide à l’investissement pour l’organisation des réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) (e-santé), le développement de nouvelles fonctionnalités du système d’information (e-santé), le Fonds National d’Aménagement et de Développement du Territoire (FNADT), et plus récemment sur une évaluation hiérarchisée des facteurs limitant l’appropriation et la mise en œuvre des référentiels Oncolor pour améliorer leur utilisation (Haute Autorité de Santé, Conseil régional).
Organisation d’une offre hospitalière graduée
Les textes fondateurs d’ONCOLOR ont établi dans leurs cahiers des charges, chartes et conventions, trois niveaux de sites (établissement ou réunions d’établissements) ; ils répondent à des missions complémentaires en fonction des compétences humaines et des moyens techniques à disposition sur site. D’emblée, l’objectif a été d’améliorer pour les professionnels et les malades la lisibilité et la qualité de l’offre de soins.
Les sites hautement spécialisés (SHS) doivent assurer, outre la prise en charge complète des malades, des missions de recours dans le domaine des soins et, selon les cas, d’enseignement et de recherche, Dans les sites spécialisés (SSP) sont réalisées les activités « standards » de prise en charge des patients atteints des cancers les plus
fréquents. Les SHS et les SSP d’ONCOLOR sont en lien avec les professionnels de santé libéraux, généralistes et spécialistes, et avec les réseaux locaux ou thématiques de la région. Ceux-ci concernent l’odontologie et les réseaux ville-hôpital de soins palliatifs. Il en est de même des liens avec les structures de soins et d’hospitalisation à domicile, les pharmacies d’officine, le milieu associatif.
ONCOLOR est le seul réseau français de cancérologie réunissant au niveau régional tous les établissements publics et privés impliqués en cancérologie et ayant fait l’objet d’audits.
Après présentation de la candidature des établissements en vue d’être reconnus SHS ou SSP, les audits ont été précédés d’une auto-évaluation par questionnaire pour faciliter l’évaluation des experts. Ceux-ci (oncologues, spécialistes d’organes, directeurs d’établissements, pharmaciens hospitaliers) étaient extra-régionaux pour les SHS et lorrains pour les SSP. Les conclusions des audits ont été transmises à l’ARH qui a identifié cinq SHS publics/privés et quinze SSP. Par la suite, vingt et un membres associés (ayant une activité ciblée sur la chirurgie, les soins de suite, la réadaptation) ont adhéré au réseau. Les SHS ont en règle rassemblé plusieurs établissements voisins pour renforcer leur conformité au cahier des charges. Ainsi le SHS hospitalo-universitaire public de Nancy comprend le Centre régional de Lutte contre le Cancer, la Fédération de Cancérologie du CHU de Nancy, la Maternité régionale et la Clinique de traumatologie et d’orthopédie pour leur activité chirurgicale en cancérologie.
La reconnaissance par l’ARH des SHS et des SSP a été assortie de recommandations et d’une demande de suivi déclaratif annuel.
Le renouvellement de ces audits est prévu fin 2006, à la demande de l’ARH, après actualisation des cahiers des charges conformément au Plan Cancer et aux textes réglementaires qui en découlent. Cette réévaluation des sites est un gage de sécurité et de transparence et témoigne de l’adhésion des acteurs au travail en réseau.
Elle permettra de définir le Pôle régional de cancérologie, prévu par le Plan Cancer (soins de recours, innovation, recherche, enseignement).
Organisation de la pluridisciplinarité : référentiels régionaux et réunions de concertation pluridisciplinaire
L’exercice de la cancérologie étant fondé sur la pluridisciplinarité, ONCOLOR a organisé en priorité la rédaction collective de référentiels régionaux prenant en compte les recommandations nationales et internationales de bonnes pratiques .
Quatre vingt dix référentiels sur cent quatre prévus ont mobilisé trois cents professionnels autour d’une méthodologie précise fondée sur les données acquises de la science par l’analyse critique de la littérature, les Standards, Options et Recommandations (SOR), les recommandations des sociétés savantes et les avis des experts.
Après validation par un comité local de relecture, ils sont disponibles depuis
décembre 2001 sur le site internet d’ONCOLOR (www.oncolor.org) pour les professionnels et le grand public. La priorité a été donnée aux cancers non métastatiques, aux soins de support et à la surveillance des patients.
Leur élaboration a permis des échanges privilégiés entre les acteurs [11]. Leur actualisation repose sur l’entretien de cette motivation, rendue difficile par les charges croissantes de travail médical et administratif dans un contexte de démographie médicale insuffisante. Une réflexion est menée pour faciliter la veille bibliographique et maintenir des recommandations de qualité, dans l’attente d’une évaluation par l’Institut National du Cancer (INCa).
Ces référentiels sont-ils utilisés ? Leur appropriation a-t-elle été favorisée par leur rédaction régionale ?
Un travail de recherche en cours, soutenu financièrement par la Haute Autorité de Santé et la Préfecture de Région, a pour objet d’identifier les facteurs limitant leur utilisation par les professionnels (grâce à l’approche systémique multi-agents). Ces freins seront hiérarchisés par l’analyse dysfonctionnelle de type AMDEC (Analyse des Modes de Défaillance, de leurs Effets et leur Criticité). Cette étude permettra de proposer des mesures correctrices appropriées visant à favoriser l’implémentation des référentiels. Des audits de dossiers médicaux devraient la complèter afin d’évaluer le degré de conformité aux référentiels des propositions thérapeutiques faites aux patients.
Un logiciel d’aide à la décision , dénommé KASIMIR, soutenu financièrement par le
FAQSV a été développé dans le cadre d’un projet de recherche en multi-partenariat [Conservatoire National des Arts et Métiers, Laboratoire Lorrain de Recherche en Informatique et ses Applications, Centre régional de Lutte contre le Cancer (CRLCC)] dans le but de faciliter via internet l’utilisation de référentiels complexes et leur application à des cas individuels [12]. Le fonctionnement est basé sur un système de représentation des connaissances et de classification hiérarchique (techniques d’intelligence artificielle). Le travail d’acquisition des connaissances s’appuie sur les référentiels ONCOLOR auxquels ont été ajoutées des données implicites permettant à KASIMIR de proposer à l’utilisateur un traitement individualisé.
Initialement appliqué aux cancers du sein et de la prostate non métastatiques, une extension de KASIMIR aux soins de support et à la surveillance des cancers constitue une aide potentielle intéressante pour les médecins de ville [13]. Un projet soutenu par le Ministère délégué à la Recherche et aux Nouvelles Technologies (2005-2006) a pour objectif de faire évoluer l’ergonomie et les applications de KASIMIR tout en évaluant son impact sur les pratiques des généralistes.
Le recours à l’expertise de comités spécifiques de chaque cancer, sous forme de réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) est indispensable à la proposition de décisions thérapeutiques concernant les situations complexes et les cancers hors référentiels, soit 30 à 40 % des cas. ONCOLOR a permis le développement des RCP, actuellement au nombre de quarante-neuf, situés dans les SHS, ceci grâce à une politique d’incitation et d’aide logistique (équipements informatiques et secréta-
riats). Un formulaire unique de demande d’avis et de réponse a été élaboré ; le fonctionnement des RCP va être facilité par la mise en place de nouveaux outils de communication : messageries sécurisées, visioconférences, réunions électroniques.
Ainsi, sur l’année 2004, on peut estimer qu’environ 20 000 malades en Lorraine relevaient d’une décision pluridisciplinaire (nouveaux malades et patients en rechute ou en poursuite évolutive). Un peu plus de 6 000 ont fait l’objet d’une discussion en RCP et, à priori, environ 10 000 ont été traités selon l’un des référentiels régionaux, comme devrait le prouver l’audit des dossiers médicaux.
Les actions du groupe ONCOLOR-Pharmacie font de la Lorraine une région pionnière dans ce domaine [14]. Inscrite dans le cahier des charges des SHS et des SSP, une Unité Centralisée de Préparation des Cytotoxiques (UCPC) existe depuis 2000 dans vingt-six à vingt-huit pharmacies hospitalières alors que neuf d’entre elles seulement en étaient pourvues en 1997. Un sous-groupe informatique a fait le choix d’un logiciel commun de prescription informatisée et rédigé le fichier produits ; il est utilisé par la moitié des établissements. La gestion de la qualité repose sur l’usage de référentiels communs aux vingt-six pharmacies, les audits des UCPC, la production d’un manuel d’auto-évaluation. Une formation validante est délivrée aux pharmaciens et préparateurs et un diplôme d’Université de Pharmacie Oncologique a été activé en 2004 avec la Faculté de Pharmacie ; après une phase test, il sera ouvert aux pharmaciens d’officine. Les actions récentes concernent la rédaction de fiches de bon usage des molécules onéreuses, l’homogénéisation des protocoles de chimiothérapie dans un même type de cancer. Une réflexion est menée sur les difficultés posées par le non remboursement de certaines spécialités et dispositifs médicaux prescrits à la sortie de l’hôpital et sur l’application de l’Arrêté du 20 décembre 2004 [15] fixant les conditions d’utilisation des anticancéreux injectables administrés à domicile hors hospitalisation à domicile (HAD).
L’organisation des soins de support, incluant douleur, psycho-oncologie, soins palliatifs, a fait l’objet d’une analyse par questionnaire et audit réalisée en 2002 dans quinze établissements de quatre SHS d’ONCOLOR. Elle sert de base à la mise en adéquation des besoins et des moyens, a permis de sensibiliser les professionnels et d’homogénéiser les pratiques. Ainsi, la cancérologie a servi de modèle à Nancy à la création en mai 2004 de la première Fédération inter-établissements (CHU/ CRLCC) des soins de support pour maladies graves.
Organisme de formation reconnu depuis décembre 2000, ONCOLOR répond aux besoins de formation des professionnels. Outre les pharmaciens et préparateurs, deux sessions de six jours par an sont destinées aux infirmières des établissements.
Le programme évolue en fonction de l’actualité et des besoins exprimés dans les questionnaires d’évaluation.
Le groupe ONCOLOR-Patients , en liaison avec les représentants des usagers (notamment les Comités départementaux de la Ligue contre le Cancer), les professionnels de santé et les directeurs d’hôpitaux, a pour objectif de favoriser l’accès à
l’information des patients et de leurs proches en incitant à la mise en place dans seize établissements volontaires de lieux d’informations et de rencontres (IRCa :
Informations-Rencontres-Cancer). Leur cahier des charges s’inspire de celui (allégé) des Espaces-Rencontres-Information (ERI) de façon à permettre leur ouverture dans tout type d’établissement. Ces IRCa sont animés par des bénévoles formés et évalués, issus du milieu associatif. Après validation, cette initiative pourrait servir de modèle à d’autres pathologies sévères et/ou chroniques et favoriser la création de « maisons des usagers ».
L’expérimentation du dispositif d’annonce a été portée en 2004 par ONCOLOR dans le SHS hospitalo-universitaire (CHU/CRLCC). Par la suite et sans empiéter sur la responsabilité des établissements, ONCOLOR devrait contribuer par son rôle incitatif à l’extension régionale de cette dynamique de meilleure prise en charge globale des patients et de prise de conscience de leurs attentes.
Le réseau régional de Cancérologie Pédiatrique , en cours de formalisation, sera intégré dans ONCOLOR qui en assurera la gestion administrative et soutiendra l’organisation de la continuité des soins à partir du Centre de Référence Lorrain [16].
Le système d’information .
La promotion du site internet du réseau (www.oncolor.org) et de ses bases de connaissances (référentiels) a été assurée auprès des professionnels par l’envoi postal d’une plaquette de présentation (décembre 2001) et d’un CD-ROM présentant les référentiels (mai 2002). Des informations sur le fonctionnement des RCP sont accessibles aux médecins grâce à un identifiant/mot de passe. Le système d’aide à l’organisation des RCP consiste à intégrer au site web des solutions sécurisées (cryptage des échanges et authentification par Cartes Professionnelles de Santé) pour les RCP, permettant des échanges électroniques de formulaires, l’archivage et la gestion des agendas et la mise en place d’un relevé automatisé d’indicateurs d’activité. Ce projet est mené dans le cadre d’une réflexion régionale en matière de système d’information et de la mutualisation des projets et des moyens apportés par une plate-forme régionale de services web et d’inter-opérabilité. Il s’agit d’une étape indispensable à la mise en place d’un dossier communiquant en cancérologie, en lien avec le dossier médical personnel.
L’amélioration de la communication interne et externe du Réseau est en cours de réflexion. Elle s’appuie sur la modernisation du site oncolor, la diffusion régionale d’un journal trimestriel, l’organisation de réunions régionales d’experts et des deuxièmes Assises nationales des réseaux de Santé en Cancérologie prévues en 2006.
L ’évaluation est intégrée à la dynamique du réseau. Les actions d’évaluation consistent à définir des indicateurs de suivi de toutes les actions réalisées ou en cours, en adéquation avec les objectifs définis pour répondre aux effets attendus et apprécier la nature des services rendus. Cette évaluation interne porte sur : — la vérification par audits de la conformité des établissements hospitaliers aux cahiers des charges
du réseau ; — le degré d’atteinte des objectifs principaux (pluridisciplinarité, formations, sécurité des pharmacies hospitalières, systèmes d’information). L’impact des réalisations du réseau sur la qualité des pratiques, la satisfaction des usagers et les études médico-économiques relèvent d’une méthodologie plus complexe et parfois même d’une recherche évaluative.
Le réseau devra répondre en outre aux conditions d’évaluation externe exigée par décret et dont les critères de labellisation sont en cours de préparation au niveau national.
COMMENTAIRES
Aux côtés de plusieurs Réseaux régionaux de Cancérologie (rappelons notamment le plus abouti, ONCORA, en région Rhône-Alpe), ONCOLOR peut être considéré jusqu’alors comme une réussite régionale par le choix de ses objectifs, l’implication globalement forte de l’ensemble des acteurs, le soutien des autorités institutionnelles, le développement de nombreux partenariats, la transparence de l’information.
Rappelons que l’activité d’un réseau régional de cancérologie se mesure au degré d’atteinte des objectifs fixés dans le cadre de ses missions, ciblées sur la coordination et l’aide à l’amélioration de la qualité des soins. Le nombre de malades pris en charge est un témoin d’activité des établissements, des sites, des structures de proximité. Il est prévu dans l’avenir que leur enregistrement soit transmis au réseau régional.
La coordination entre les professionnels repose sur des conventions entre les établissements constituant les SHS et liant les SHS, les SSP et les membres associés, permettant une meilleure lisibilité des structures de soins, tout en respectant le libre choix des malades. L’élaboration de référentiels régionaux accessibles à tous (y compris les patients) et surtout l’aide à la formalisation des RCP favorisent l’homogénéisation des pratiques et les décisions plurisdisciplinaires dans les situations complexes et/ou hors référentiels. Le travail engagé sur le système d’aide à la transmission de données sécurisées concernant les RCP constitue une première étape applicative du dossier communiquant en cancérologie, dans l’esprit de l’expé- rimentation nationale menée dans quatre autres réseaux régionaux. Enfin, rappelons l’important travail visant à sécuriser le fonctionnement des pharmacies hospitalières.
ONCOLOR se trouve néanmoins à un tournant décisif pour faire face à la montée en charge des projets, à la complexité des actions, aux difficultés liées à l’environnement socio-économique, à la nécessité de valoriser les acteurs pour éviter leur démotivation.
Le bénéfice apporté à la population en terme d’amélioration des taux de guérison et de satisfaction des patients ne pourra être évalué qu’ultérieurement.
L’ouverture à la ville doit être renforcée par une valorisation de la place des médecins libéraux dans les missions du réseau (formation, décisions thérapeutiques, soins de support, dossier communiquant, évaluation des pratiques). Des propositions sont faites par ONCOLOR pour assurer la coordination des structures de proximité.
La formation délivrée aux infirmières hospitalières, aux pharmaciens et aux préparateurs en pharmacie, doit évoluer en tenant compte de leurs niveaux d’exercice en cancérologie et en s’articulant avec des formations nationales et/ou internationales labellisées. Elle doit aussi s’étendre à d’autres professionnels et aux béné- voles.
Sur le plan général, les difficultés résident aussi dans l’important périmètre des missions attribuées par le Plan Cancer aux réseaux régionaux , le poids de leur gestion administrative et technique, les incertitudes sur la pérennité de leur financement, l’équilibre à préserver entre les rôles respectifs des acteurs. Le patient souhaite bénéficier des meilleurs soins au plus près de chez lui, être informé et accompagné tout au long de son parcours ; il est donc sensible avant tout à l’organisation globale de sa prise en charge par les acteurs de terrain. Le réseau régional ne doit pas empiéter sur la politique des établissements , mais des liens étroits sont nécessaires et leurs missions respectives présentent des zones de chevauchement. Les médecins libéraux , notamment les généralistes, s’inquiètent de la multiplication des réseaux.
Tous les professionnels s’accordent pour être rémunérés dans le cadre du temps dédié à un réseau.
Les réseaux de santé régionaux doivent en outre coordonner les soins de proximité, qu’il s’agisse de réseaux de soins de cancérologie (bassin de vie, territoire de santé, ville-hôpital) ou de l’activité cancérologique des structures d’hospitalisation à domicile, de soins infirmier à domicile, des équipes mobiles issues des établissements et des autres réseaux thématiques (gérontologie, par exemple). Il convient de respecter les services rendus aux patients là où existent des structures efficaces, mais il convient aussi de permettre une certaine souplesse ; la multiplication des réseaux de proximité ne se justifie probablement pas sur l’ensemble du territoire. Le rôle d’un réseau régional est de fédérer l’existant et de proposer, en liaison avec les professionnels et les ARH, des solutions répondant aux besoins des patients et aux particularités de leur environnement géographique et démographique.
On peut s’interroger sur l’intérêt de multiplier les référentiels régionaux alors qu’il existe des recommandations nationales et internationales validées par des organismes spécialisés. Une réflexion est en cours à l’institut National du Cancer pour faciliter l’élaboration, l’actualisation et la validation des référentiels et les recommandations de bonnes pratiques. Le rapprochement entre les professionnels doit être préservé pour faciliter l’appropriation et l’implémentation de ces outils visant à homogénéiser les pratiques. On peut envisager une mutualisation des moyens et des tâches entre plusieurs réseaux régionaux.
Les réseaux qui se sont impliqués dans la transmission électronique des données concernant les RCP, sont également en attente des propositions de l’INCa concernant le dossier communiquant en cancérologie et son lien avec le dossier médical personnel.
En vue d’homogénéiser leur fonctionnement, les réseaux régionaux de santé sont concernés par les textes réglementaires publiés ou attendus depuis l’activation du Plan Cancer : la proposition d’un cahier des charges des réseaux, l’articulation avec le Pôle régional de Cancérologie et avec les Cellules de Coordination en Cancérologie (3C) des établissements, le recueil des données relatives aux activités de soins, les modalités pratiques d’application de l’Arrêté sur la chimiothérapie à domicile [15].
En résumé, les responsables d’un réseau de santé en Cancérologie doivent savoir développer leurs missions organisationnelles en contribuant surtout à la coordination des acteurs, dans le respect de leurs spécificités et des besoins des patients.
CONCLUSION
L’organisation des réseaux de santé est considérée comme un enjeu de santé publique destiné à améliorer le service médical rendu aux patients relevant de pathologies complexes et/ou chroniques. Le Plan Cancer en a imposé l’organisation dans chaque région, afin d’assurer l’égal accès des malades à des soins de qualité et à un accompagnement adapté, mais aussi de contribuer aux actions de dépistage, prévention, information, formation et de s’engager dans une politique d’évaluation.
Si des textes réglementaires successifs ont facilité l’activation et le financement des réseaux, la réalité est qu’un réseau qui fonctionne ne peut être imposé par décret. Il doit reposer sur la volonté des acteurs d’adhérer, à titre individuel et institutionnel, à des objectifs communs et transversaux et de contribuer activement à leur réalisation. Ceci passe par une évolution des mentalités, mais aussi par une valorisation des professionnels, grâce au soutien des autorités institutionnelles. En cancérologie, l’expérience acquise par les réseaux de santé activés avant le Plan Cancer peut contribuer à en faciliter les recommandations.
REMERCIEMENTS
Nos remerciements s’adressent à Isabelle KLEIN, médecin coordonnateur d’ONCOLOR et à Sabine THEOBALD, cadre administratif de coordination, pour leur efficacité et leur disponibilité, ainsi qu’aux membres des deux bureaux successifs de l’Association réseau ONCOLOR.
Composition du Bureau de mai 2000 à juin 2003
Pierre BEY (CRLCC Nancy), Rémi BOUVIER (Hôp.-Clin.Cl.Bernard Metz), Marc DAVID * (CH Verdun), Gérard DELENA ** (CH Briey), Yves KESSLER (Polyclin. Gentilly Nancy),
Ivan KRAKOWSKI (CRLCC Nancy), Marie-Paule LANG (CH Mont St Martin), MarieClaude LEVEL *** (CH Verdun), Jean-Marie LECLERCQ (CHR Metz-Thionville), Rénal LURON* (CH Remiremont), Michel NABET (Hôp.-Clin. Cl. Bernard Metz), Danièle SOMMELET (CHU Nancy), Sabine WALTER (CHR Metz-Thionville), Invités permanents :
Isabelle MAY (pharmacien CHU Nancy), Rémi UNVOIS (URMLL), Hervé GARIN (†) (système d’information ONCOLOR).
Composition du Bureau de juin 2003 à juin 2006
Éric BARTHELME (CHR Metz-Thionville), Rémi BOUVIER (Polyclin. Gentilly Nancy), Gérard DELENA (CH Sarrebourg), François GUILLEMIN (CRLCC Nancy), Patrick GUILLOT (CHR Metz-Thionville), Yves KESSLER (Polyclin. Gentilly Nancy), Ivan KRAKOWSKI (CRLCC Nancy), Marie-Paule LANG (CH Mont St Martin), Yves MARTINET (CHU Nancy), Michel NABET (Clin. Cl. Bernard Metz), Jean-François ROCHE (CH Verdun), Stéphane RUCK **** (CH J Monnet Epinal), Danièle SOMMELET (CHU Nancy). Invités permanents : Isabelle KLEIN (médecin coordonnateur), Isabelle MAY (pharmacien CHU Nancy), Rémi UNVOIS (URMLL).
* Membres sortants au 26 juin 2001, ** succède à Rénal LURON, *** succède à Marc DAVID, **** nouveau membre depuis le 26 juin 2002 BIBLIOGRAPHIE [1] Loi no 2001-1246 du 21 décembre 2001 de financement de la Sécurité Sociale pour 2002 codifiée aux articles L.162-43 à L.162-46 du code de la Sécurité Sociale.
[2] Décret no 2002-1298 du 25 octobre 2002 sur le financement des réseaux de santé.
[3] Circulaire no DHOS/03/DSS/CNAMTS/2002/610 du 19 décembre 2002 relative aux réseaux de santé, en application de l’article L.6321-1 du code de la santé publique et des articles L.162-43 à L.162-46 du code de la sécurité sociale et des décrets (no 2002-1298 du 25 octobre 2002) relatif au financement des réseaux et (no 2002-1463 du 17 décembre 2002) relatif aux critères de qualité et conditions d’organisation, de fonctionnement et d’évaluation des réseaux de santé.
[4] Loi no 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.
[5] Décret no 2002-1463 du 17 décembre 2002 relatif aux critères de qualité et conditions d’organisation, de fonctionnement et d’évaluation des réseaux de santé.
[6] Circulaire DGS/DH 134 no 98/213 du 24 mars 1998 relative à l’organisation des soins en cancérologie dans les établissements publics et privés.
[7] Plan Cancer : 2003-2007. — Site web : www.plancancer.fr [8] Rapport sur l’état des lieux des réseaux de cancérologie à la fin de l’année 2003, Dr Philippe BERGEROT, 166 pages, Avril 2004. (adresse web : http : //www.plancancer.fr/Documents/Rapport Annexes.pdf) [9] Circulaire no DHOS/SDO/2005/101 du 22 février 2005 relative à l’organisation des soins en cancérologie.
[10] BEY P., BOUVIER R., DAVID M., DELENA G., GARIN H., KESSLER Y., KLEIN I., KRAKOWSKI I., LANG M-P., LECLERCQ J-M., LEVEL M-C., LURON R., MAY I., NABET M., RUCK S., SOMMELET D., THEOBALD S., UNVOIS R., WALTER S. — Oncolor a dix ans : l’âge de raison pour le réseau de santé lorrain en cancérologie. Bull. Cancer. , 2004, 91 , 599-607.
[11] UWER L., RIOS M., SOMMELET D., MOLE D., SIRVEAUX F., VERGHAEGHE J-L., STINES J., BEY P. — Comment améliorer la prise en charge initiale des patients atteints de tumeurs des os et parties molles : expérience d’un comité de concertation pluridisciplinaire du réseau Oncolor, avant la diffusion des référentiels régionaux. Bull. Cancer. , 2003, 90 269-277.
[12] LIEBER J., D’AQUIN M., BEY P., BRESSON B., CROISSANT O., FALZON P., LESUR A., LEVEQUE J., MOLLO V., NAPOLI A., RIOS M., SAUVAGNAC C. — The Kasimir project : knowledge management in cancérology. In : Proceedings of the 4th International Workshop on Enterprise Networking and Computing in Health Care Industry (Health-Comm 2002 ), 2002, 115-127.
[13] RIOS M., DESANDES E., BRESSON B., KLEIN I., LESUR A., BOISSON F., DEMANGE V., BEY P. — Référentiels de bonnes pratiques cancérologiques : étude comparative de trois supports d’aide à la proposition thérapeutique pour les cancers du sein et de la prostate en Lorraine. Bull. Cancer. , 2003, 90 , 363-370.
[14] MAY I., PAULUS C., VIGNERON J., WATELET M., VEYRIER B., BICHET F., BIDEAUX B., BEY P. — Évolution des pharmacies hospitalières publiques et privées à travers la mise en place du réseau de cancérologie en Lorraine : Oncolor. Bull. Cancer. , 2001, 88 , 435-441.
[15] Arrêté du 20 décembre 2004 fixant les conditions d’utilisation des anticancéreux injectables inscrits sur la liste prévue à l’article L.5126-4 du code de la santé publique.
[16] Circulaire no 161 DHOS/0/2004 du 29 mars 2004 relative à l’organisation des soins en cancérologie pédiatrique.
DISCUSSION
M. Michel BOUREL
Quelle est la place des bénévoles ? Quels problèmes (humains, relationnels) se trouvent posés par la philosophie du réseau ‘‘ tout le monde est égal à tout le monde ’’. Existe-t-il la nécessité d’une équipe de ‘‘ conciliateurs ’’ ?
Les bénévoles bénéficient depuis cette année d’une formation organisée par ONCOLOR en liaison avec la Ligue Nationale Contre le Cancer leur permettant de faire face aux demandes et aux échanges rendus possibles par l’individualisation dans seize hôpitaux volontaires d’un lieu d’information et de rencontre (les IRCa : Information Rencontre Cancer). Nous démarrons avec eux cette expérience pilote pour répondre aux besoins des patients et de leurs proches. Les bénévoles seront soutenus psychologiquement et « supervisés » par les interlocuteurs de l’établissement concerné (médecin, directeur). A noter que les représentants des « usagers » sont représentés dans le Conseil d’Administration d’ONCOLOR. La réussite d’un réseau de santé repose en grande partie sur l’équilibre des acteurs au service des patients. Ceux-ci sont multiples, mais leurs compé- tences doivent être complémentaires. La transversalité doit primer sur la verticalité ; la hiérarchie existe dans certains domaines, mais le respect et la réponse aux attentes des patients et des professionnels permettent de maintenir un équilibre néanmoins toujours fragile. La transparence des informations y contribue aussi largement. Mais tout n’est pas toujours facile ; les intérêts respectifs des individus, leurs modes et types d’exercice, la politique des établissements peuvent s’opposer, les motivations de certains acteurs s’amenuiser, les luttes de pouvoirs se ranimer. Les réseaux de santé régionaux sont devenus obligatoires et nous avons anticipé la mesure 29 du Plan Cancer, mais il nous faut continuer à soutenir et inciter sans gêner. Vous avez évoqué le recours à une
équipe de conciliateurs, quelques membres du bureau ont eux-mêmes jusqu’alors joué ce rôle.
M. Maurice TUBIANA
Les référentiels régionaux ne pourraient-ils pas faire apparaître des discordances entre les régions même voisines, ce qui pourrait entraîner des difficultés ? Que faites-vous pour éviter ce risque ?
Vous avez raison d’évoquer le problème important posé par l’élaboration et l’actualisation des référentiels régionaux. Ceci a été dès 1998 la priorité du réseau dans le cadre du renforcement de la pluridisciplinarité et de l’homogénéisation des pratiques. Les trois cents médecins qui ont participé initialement à cette opération ont appris ou réappris à travailler ensemble, en adoptant une méthodologie dérivée de celle utilisée par l’équipe Standards Options Recommandations (SOR), basée sur la médecine des preuves. Il n’est pas envisageable de multiplier les référentiels par le nombre de régions, et nous envisageons de nous articuler avec l’équipe des SOR pour faciliter le nécessaire travail de deuxième ligne, celui de la rédaction des référentiels au niveau (inter)régional afin d’en faciliter l’appropriation, l’implémentation et d’en limiter le risque d’hétérogé- néité.
M. Jacques ROUËSSÉ
Quel est le coût annuel du réseau ? Quel est le statut juridique du réseau ? Qu’en est-il du problème de la responsabilité juridique des Réunions de Concertation Pluridisciplinaire et du médecin traitant ?
Le réseau a plusieurs sources de financement : depuis 2004, l’enveloppe issue de la dotation régionale de développent des réseaux (guichet unique des réseaux) provenant elle-même de la dotation nationale des développement des réseaux, émanant de l’ARH et de l’URCAM sur présentation tous les un à trois ans d’un dossier décrivant et justifiant les objectifs, les actions, les résultats obtenus et attendus, les besoins en personnel et en moyens de fonctionnement ; un protocole d’accord signé pour trois ans en 2003 entre ONCOLOR et l’ARH (et renouvelé récemment), dont la présentation est complémentaire de la précédente ; les cotisations des membres ; les projets de recherche soutenus par les instances ministérielles, la Haute Autorité de Santé, le Fond d’aide à la qualité des soins de ville, la Préfecture de Région. Les recettes ont été pour 2005 de 868 K euros. Les Réunions de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) proposent au médecin référent du malade un avis et/ou une procédure thérapeutique dont l’application après adhésion du patient, n’engage en principe que la responsabilité de celui ou ceux qui réalise(nt) les actes. Une réflexion est nécessaire sur les conséquences juridiques d’une proposition qui pourrait, en étant suivie d’un échec, soulever des interrogations sur la responsabilité des professionnels présents lors de la RCP et/ou appliquant des référentiels contestables ou contestés. On peut dire cependant que, malgré des failles possibles, la pratique des RCP, en assurant une proposition thérapeutique pluridisciplinaire, améliore globalement la sécurité des patients. Il convient d’insister sur la nécessité de disposer d’une fiche commune comportant les informations nécessaires et suffisantes à la discussion de chaque dossier et assurant la traçabilité de celles-ci. Le statut juridique d’ONCOLOR est une Association loi 1901.
M. Patrice QUENEAU
Le réseau que vous avez structuré a-t-il pu démontrer un effet réducteur des accidents médicamenteux grâce à une collaboration plus étroite entre médecins, pharmaciens et infirmiers, notamment ? Dans le cas contraire, cela sera-t-il un de vos objectifs futurs ?
La démonstration n’a été apportée qu’indirectement par la mise aux normes des pharmacies hospitalières (unités centralisées de préparation des cytotoxiques), l’adoption d’un logiciel de prescription de la chimiothérapie, la formation des pharmaciens, des préparateurs en pharmacie des établissements du réseau, la formation des infirmier(e)s. Il reste à homogénéiser dans le détail les protocoles de traitement.
M. Christian NEZELOF
Vous avez fait œuvre de pionnier. Le système Oncolor a-t-il été imité ? Est-il imitable ?
Le réseau ONCOLOR a été créé en 1998 précédé par le réseau ONCORA (Rhône Alpes) et suivi par cinq ou six réseaux régionaux du même type. En 2003, une enquête menée à la demande de la Mission Interministérielle de Lutte contre le Cancer par Philippe BERGEROT a fait état de cinquante-six réseaux de cancérologie, mais la plupart étaient plutôt des réseaux de soins de proximité ne répondant pas aux missions organisationnelles attendues d’un réseau de santé en cancérologie. Le développement de ces réseaux est en cours et certains d’entres eux ont servi de lieu d’expérimentation du dossier communicant en cancérologie. ONCORA demeure l’un des plus développés.
M. Gérard SCHAISON
La rédaction de référentiels ou de protocoles n’apparaît pas dans les objectifs du réseau.
Vous utilisez des protocoles régionaux, nationaux ou internationaux. Qui guide votre choix ? Vos protocoles sont-ils mis à jour régulièrement ? Je connais les difficultés qui existent entre les cancérologues : cancérologues de ville, d’hôpital, de centre anticancéreux, chirurgiens, radiothérapeutes. Chacun a sa vérité. Comment le réseau peut-il aplanir toutes ces difficultés ?
Comme je l’ai dit, la rédaction des référentiels régionaux, au nombre de 90, a été la première action d’ONCOLOR, débutée en 1998 et la meilleure façon de faire travailler ensemble des chirurgiens, des radiothérapeutes, des oncologues et tous types de spécialistes. Nous travaillons à leur actualisation. Ces référentiels sont accessibles à tous les médecins du réseau sur notre site internet ainsi d’ailleurs qu’au public. La politique du réseau est d’inciter les professionnels à travailler selon des procédures homogènes ; les audits des structures et notamment des dossiers (études de pratiques) permettront de le mettre (ou non) en évidence. Nous menons actuellement une cherche évaluative sur la hiérarchisation des freins à l’utilisation des référentiels.
M. Bernard LAUNOIS
J’allais poser les mêmes questions que Maurice Tubiana et Gérard Schaison sur les références régionales. Ce qui m’inquiète, c’est l’évolution des références. Par exemple, le
traitement chirurgical des métastases hépatiques du cancer du sein était controversé. On sait, depuis cinq mois, que l’on a une survie de 45 % à cinq ans. Est-ce inclus déjà dans les références régionales ?
L’actualisation des référentiels doit, comme leur élaboration, reposer sur la médecine des preuves. C’est un travail régulier et difficile nécessitant une motivation continue des acteurs. Celle-ci peut-être facilitée par certaines démarches innovantes ; c’est ainsi que nous avons réussi à rassembler cent cinquante personnes, qui à l’issue d’un travail préparatoire de quelques mois, ont été capables en deux jours d’actualiser des référentiels interrégionaux sur les cancers de l’appareil digestif en réunissant les spécialistes de deux réseaux de santé (CAROL en Alsace et ONCOLOR en Lorraine) et des experts exté- rieurs.
M. Jacques-Louis BINET
Pour mieux définir vos relations avec l’Institut national du cancer, obtenez-vous de cet institut un financement ? Nancy, avec son CHU et son centre anticancéreux, constitue-t-il une cancéropole ?
Le CHU de Nancy et le Centre régional de Lutte Contre le Cancer ainsi que les structures de recherche régionales appartiennent à la cancéropôle grand Est. Les réseaux régionaux de santé peuvent être impliqués dans le fonctionnement d’une cancéropôle dans le cadre de leur contribution à certains travaux de recherche. En ce qui concerne les relations avec l’Institut National du Cancer (INCa), elles sont régulières et constructives grâce à la participation de plusieurs membres du bureau d’ONCOLOR et de l’équipe pérenne à l’établissement du cahier des charges des réseaux de cancérologie, la mise en place du Dossier Communicant de Cancérologie (DCC), l’expérimentation du dispositif d’annonce, la réflexion sur la chimiothérapie à domicile, l’organisation des soins de support, la rédaction des référentiels, la réflexion sur les procédures de labellisation des réseaux de cancérologie et enfin l’oncopédiatrie. Nous ne recevons pas de financement de l’INCa pour le fonctionnement d’ONCOLOR, mais des budgets sont attribués sur appel d’offres (par exemple : DCC, dispositif d’annonce).
M. Denys PELLERIN
Dans votre organisation, vous invoquez un site d’échange des connaissances. Avez-vous envisagé de l’utiliser pour recueillir des informations ‘‘ incidents-accidents ’’ avec retour d’information ? Cette recherche de qualité ‘‘ systémique ’’ ne vous paraît-elle pas souhaitable dans l’objectif d’une ‘‘ responsabilité collective ’’ ? Vous avez réussi à harmoniser votre dossier Oncolor avec le dossier réseau cancer. Pensez-vous qu’il puisse être bénéfique au DMP ?
Vous posez là, Monsieur le Président, le difficile problème du dossier communicant de cancérologie qui doit en principe s’articuler avec le dossier médical personnel. Nous avons répondu récemment à l’appel d’offres sur la mise en place du DCC ciblé actuellement sur la transmission d’informations sécurisées concernant les réunions de concertation pluridisciplinaire. Nous poursuivons ainsi le travail engagé depuis plus de deux ans sur ce thème, contribuant à côté d’autres initiatives régionales à la mise en place du DCC national. L’étape ultérieure concernera la collecte des données permettant de suivre le parcours du patient et notamment les délais de prise en charge au diagnostic et lors des
phases successives du traitement. Bien que le DCC soit un outil destiné aux professionnels de santé, son accès aux patients sur le site web d’ONCOLOR (comme sur les sites des autres réseaux), son accès aux patients sera conforme à la législation. Les systèmes d’alerte ne font pas partie actuellement du cahier des charges du DCC, mais pourront y être intégrés ultérieurement afin de contribuer à une meilleure évaluation de la qualité des soins, répondant également à votre question sur « la responsabilité collective ».
* Présidente du Réseau ONCOLOR — 6 avenue de Bourgogne — 54500 VANDOEUVRE-lèsNANCY. ** Directeur de l’Institut Curie — 26 rue d’Ulm — 75005 PARIS, Ancien Président du Réseau ONCOLOR. Tirés à part : Professeur Danièle SOMMELET, Réseau ONCOLOR à l’adresse ci-dessus. Article reçu le 25 avril 2005, accepté le 24 octobre 2005 .
Bull. Acad. Natle Méd., 2006, 190, no 2, 419-438, séance du 14 février 2006