Communiqué
Séance du 14 février 2006

Sur l’utilisation en épidémiologie des bases de données recueillies en population générale

MOTS-CLÉS : bases de données.. dossier médical informatisé. épidémiologie

Raymond ARDAILLOU * et Roger HENRION *

Communiquébases de données., dossier médical informatisé, épidémiologieRaymond Ardaillou, Roger Henrion

Raymond ARDAILLOU * et Roger HENRION *

Exposé des motifs

L’Académie nationale de médecine a pris position à plusieurs reprises en faveur d’une meilleure utilisation des données épidémiologiques sans lesquelles aucune politique de santé publique ne peut être, ni définie, ni appréciée à terme.

Ainsi, l’Académie avait, préalablement à l’adoption de la loi du 9 août 2004 relative à la santé publique, effectué à la demande des Pouvoirs Publics une analyse sommaire du projet présenté. Ce rapport préliminaire regrettait que le choix des objectifs retenus dans le projet de loi ne soit pas fondé sur une analyse approfondie de la situation existante, ne s’accompagne pas de la définition de la stratégie à suivre pour atteindre les résultats espérés et ne définisse pas les outils permettant d’évaluer à terme le succès ou l’échec de la politique menée. Dans un communiqué récent formulant des recommandations dans le domaine de la recherche biomédicale, l’Académie demandait l’adaptation des banques de données existantes afin de pouvoir les utiliser à des fins épidémiologiques et la possibilité de croiser les données de ces banques en trouvant un équilibre entre la nécessité de l’anonymat et les contraintes de toute étude scientifique. A titre d’exemple, l’Académie citait le « système national d’information inter régimes de l’assurance maladie (SNIR-AM) » et le « programme de médicalisation du système d’information (PMSI) » utilisé dans les hôpitaux qui touchent la quasi-totalité de la population. Ces deux banques de données ont une finalité essentiellement comptable qui est de chiffrer le coût des dépenses de santé. L’Académie recommandait de les restructurer afin d’en faire des outils efficaces pour l’étude de la prévalence des maladies et des facteurs qui leur sont associés. Il est, en effet, indispensable que le pays dispose de données épidémiologiques fiables sans lesquelles aucune politique de santé publique ne peut être conduite. L’Académie a, enfin, demandé à l’Agence Nationale de la Recherche de privilégier parmi les projets retenus les études de santé publique.

Recommandations

En accord avec ces multiples prises de position, l’Académie, ayant appris que le Comité d’orientation du groupement de préfiguration du Dossier Médical Personnel (DMP) avait recommandé que l’application informatique ne permette pas l’utilisation future des données du DMP à des fins de recherche épidémiologique, formule les recommandations suivantes dans la phase actuelle de préparation de ce dossier :

— La finalité d’un tel dossier ne doit pas seulement être individuelle, c’est-à- dire permettre aux médecins d’obtenir rapidement tous les renseignements utiles au diagnostic, au traitement et au suivi du patient, mais aussi épidémiologique, c’est-à-dire permettre de rassembler les données individuelles en vue d’obtenir les données indispensables sur l’état sanitaire de l’ensemble de la population. La rédaction du dossier doit impérativement tenir compte de cette nécessité.

— Les études croisées rapprochant les données de plusieurs sources devraient être autorisées. On peut donner comme exemple l’utilisation couplée du DMP et du SNIR-AM ou du DMP et des données de grandes cohortes et d’enquêtes en santé publique qui permettrait la validation multi-sources, très utile dans les études épidémiologiques.

— L’anonymat doit être préservé dans toutes ces études, ce que les moyens informatiques modernes de cryptage et de sécurité de l’information autorisent, en respectant les recommandations de la Commission nationale informatique et liberté (CNIL), tels ceux adoptés par l’Institut de veille sanitaire pour les maladies à déclaration obligatoire, notamment le dossier médical des patients séropositifs pour le VIH.

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 14 février 2006, a adopté le texte de ce communiqué moins deux abstentions.

 

* Membre de l’Académie nationale de médecine

 

Bull. Acad. Natle Méd., 2006, 190, no 2, 519-520, séance du 14 février 2006