Publié le 6 avril 2021

Les trois nez de la théorie EVO-DEVO (évolution-développement)

Roger JANKOWSKI ORL Chirurgie Cervico-Faciale à la Faculté de Médecine – Université de Lorraine, CHRU de Nancy

 

La théorie EVO-DEVO intègre la mise en place de l’organe naso-sinusien au cours de l’évolution, Les crâniates (premiers vertébrés) rassemblent près de la vésicule encéphalique autour d’une bouche sans mâchoire les placodes sensorielles olfactives, visuelles et cochléo-vestibulaires. L’organe olfactif borgne de la lamproie, dernier représentant vivant des poissons agnathes, fait le lien entre la placode olfactive des crâniates et le canal olfactif des poissons dipneustes ouvert dans la bouche par des narines internes. Le nez olfactif participe à la respiration aérienne des amphibiens et ouvre la voie à la formation du nez respiratoire chez les premiers reptiles terrestres. Chez les crocodiliens, le déplacement fonctionnel progressif des narines internes, parallèlement à leur ouverture définitive au-dessus de la glotte, s’accompagne d’une réorganisation des os du palais secondaire (vomers, palatins, ptérygoïdes, ectoptérygoïdes) ; ceux-ci deviennent les parois des conduits respiratoires sous les chambres olfactives.

Au cours de l’embryogénèse humaine, les placodes olfactives s’invaginent en puits vers le télencéphale dont elles restent séparées par une capsule cartilagineuse qui deviendra l’os ethmoïde ; celui-ci n’existe que chez les bipèdes (le premier nez est olfactif). La margelle des puits olfactifs, ouverts en bouche, se scinde en processus médians et latéraux donnant naissance aux cartilages septolatéraux et alaires du nez fibro-cartilagineux. Cartilage septal et lame perpendiculaire de l’ethmoïde s’articulent en cloison du nez olfactif sous lequel les os du palais secondaire forment les parois du nez respiratoire ouvert au-dessus de la glotte (le deuxième nez est respiratoire).

Les sinus paranasaux se forment après la naissance, indépendamment des deux autres nez (le troisième nez est sinusal). La théorie EVO-DEVO intègre ce développement des trois parties du nez.

Dans la Covid19, l’anosmie s’explique par l’atteinte élective par le virus des cellules de soutien des neurones olfactifs.

 

 

L’implantation percutanée d’une valve en position aortique : pour quel patient ?

Martine GILARD Service de cardiologie, CHRU de Brest

 

Dans les pays industrialisés, le rétrécissement valvulaire aortique est la valvulopathie la plus fréquente. Longtemps infraclinique, elle est responsable d’une morbi-mortalité importante : 50% 2 ans après le diagnostic. L’implantation d’une valve aortique par voie percutanée (TAVI) a permis aux patients de pouvoir bénéficier d’un traitement efficace malgré leurs comorbidités qui contrindiquaient la chirurgie valvulaire. Depuis les travaux initiaux d’Alain Cribier le TAVI (2002) a bénéficié de nombreuses études conduisant à une amélioration du matériel, de l’expérience des équipes et de la sélection des patients ; à ce jour 500.000 malades en ont bénéficié. Il existe deux types de valves : valve autoexpandables (principe de Séguin) et valve mise en place après dilatation annulaire. La valve est placée par voie fémorale dans 92% des cas. Les complications sont actuellement en diminution : AVC, fuites péri prothétiques, nécessité de la pose d’un pacemaker. Actuellement le TAVI est aussi efficace voire supérieur au traitement chirurgical. Il constitue une véritable révolution dans la prise en charge des patients à haut risque et à risque intermédiaire chirurgical. Pour les patients à faible risque chirurgical le TAVI (valve posée après dilatation) est supérieur à la chirurgie pour la mortalité et les complications. Il demeure encore des indications chirurgicales en cas d’abord fémoral non-possible, de variations anatomiques valvulaires, de nécessité d’un geste de revascularisation coronaire dans le même temps.

La durabilité de la valve TAVI selon le registre des patients traités pendant  2 ans et suivi avec un recul de 5 ans : pas de dégénérescence, pas de réintervention. A 8 ans, le taux de dysfonction valvulaire conduit à un changement dans 1 à 2% des cas.

Enfin, aux USA, le TAVI est privilégié, par rapport à la chirurgie, en raison de taux de succès de 99% et d’une mortalité qui est passée de 6 à 0,19% ; c’est devenu une thérapeutique pour tous :  des patients inopérables, mais aussi quel que soit le stade.

 

 

Indications de l’occlusion de l’auricule gauche comme substitut à l’anticoagulation chez les patients qui ont un AVC lié à une fibrillation atriale : le registre WATCH-AF

Pierre AMARENCO Service de neurologie et centre d’accueil et de traitement de l’attaque cérébrale, Hôpital Bichat, Paris

 

Du fait de contre-indications (personne âgée fragile, troubles cognitifs, co-morbidités) ou du refus par le patient, 40% des patients après un AVC lié à une fibrillation atriale ne sont pas traités par anticoagulants. Parmi ceux-là, quelle est la proportion de ceux qui seraient des candidats potentiels à la fermeture de l’auricule gauche ? quel est le risque de récidive d’AVC à 1 an ?

Un registre prospectif WATCH-AF a inclus consécutivement des patients dans les 72 heures suivant leur admission pour un AVC associé à une fibrillation atriale dans deux  unités d’AVC. À l’admission, à la sortie de l’hôpital, à 3 mois et à 12 mois post AVC, les résultats des échelles d’évaluation de la sévérité de l’AVC, du handicap, de l’indépendance fonctionnelle, du risque de chute, de la cognition, et de la stratification du risque ischémique ou hémorragique ont été recueillis. Les critères de jugement ont été la mort ou la dépendance et la récidive d’AVC (infarctus ou hémorragie cérébrale). Sur 400 patients inclus (370 avec un infarctus cérébral, et 30 avec une hémorragie cérébrale) 31 sont morts au cours de l’hospitalisation et 57 (14,3%) avaient un indication potentielle de fermeture de l’auricule gauche selon les recommandations européennes et américaines. Après 12 mois, parmi les 274/400 (68,5%) patients sortis de l’hôpital sous anticoagulation à long-terme, 49 (17,9%) patients étaient morts ou dépendants et le risque de récidive d’AVC était de 9,8% (26 patients). Chez les 57 patients sortis sans anticoagulation et qui étaient candidats à la fermeture de l’auricule gauche, ces risques étaient de 17,5% et 24,7% (10 et 14 patients), respectivement. Comparativement aux patients traités à long-terme par anticoagulant, les candidats à la fermeture de l’auricule gauche avaient deux fois et demi plus de risque de récidive d’AVC à 1 an.

Au total, 14% des patients qui ont un AVC associé à une fibrillation atriale sont des candidats potentiels à la fermeture de l’auricule gauche, mais pour être efficace ce geste de cardiologie interventionnelle doit être effectué dans les 15 jours suivant l’AVC comme pour une endartériectomie carotidienne. Cependant, même après ce geste, le risque de récidive à 1 an reste supérieur à celui des patients anticoagulés.