Communication scientifique
Séance du 14 juin 2011

Présentation

Patrick Berche *

 

Séance dédiée à la flore intestinale

PRÉSENTATION

Patrick BERCHE *

Le nouveau-né vient à la vie, stérile. Dans les premières heures de la vie, une flore commensale s’installe sur la peau et les muqueuses, atteignant dans le tube digestif des milliards de bactéries, provenant principalement de la mère. Cette flore se maintiendra pendant toute la vie, mais peut varier en fonction de l’alimentation, de l’état nutritionnel, de l’âge, du terrain génétique, des traitements suivis, notamment les antibiothérapies.

Dès les premiers jours de la vie, cette intrusion d’une très abondante flore intestinale et colique entraîne une puissante stimulation du système immunitaire, avec notamment l’apparition d’anticorps « naturels » dirigés contre cette flore. Les bactéries du tube digestif ont longtemps été considérées comme des symbiotes, qui nous sont utiles, par exemple pour fabriquer des vitamines. En réalité, on pressent aujourd’hui que, dans certaines circonstances, cette flore peut être à l’origine de pathologies courantes, comme le cancer du côlon et l’obésité.

L’écosystème digestif demeure très mal connu, car son exploration réside sur des cultures qui ne permettent d’identifier que les bactéries à croissance facile, en réalité très minoritaires. On sait aujourd’hui, grâce aux progrès de la biologie moléculaire, qu’il existe des centaines d’espèces bactériennes, la plupart non cultivables, atteignant des titres très élevés (1014/g). Joël Doré, de l’INRA (Institut National de Recherche Agronomique) de Jouy-en-Josas, va nous présenter l’état de l’art des connaissances sur la flore digestive par approche moléculaire et nous expliquer le rôle possible de certaines bactéries commensales dans les récidives de maladie de Crohn ou de rectocolite hémorragique.

Didier Raoult, de la Faculté de médecine de Marseille, va nous présenter ses travaux sur l’obésité qui, selon l’OMS, touche dans le monde près de trois cent millions de personnes, avec un milliard de personnes en surpoids. En France, cette pathologie n’a cessé d’augmenter depuis vingt ans et touche aujourd’hui 9,6 % des adultes et 12 % des enfants. Didier Raoult nous présentera ses travaux montrant que les probiotiques, largement consommés par la population et utilisés pour les animaux comme facteurs de croissance, pourraient être à l’origine de l’épidémie d’obésité qui se développe actuellement dans le monde. Il a résumé ses travaux dans une récente revue dans Nature Review in Microbiology Diseases [1].

Jean-Philippe Nougayrède va lui présenter ses récents travaux sur certaines souches d’ Escherichia coli , productrice d’une génotoxine, la colibactine, capable d’entraîner des cassures sur les chromosomes des entérocytes [2]. À l’instar de

Helicobacter pylori, faudra-t-il un jour prévenir le cancer du côlon par antibiothérapie ?

 

BIBLIOGRAPHIE [1] Raoult D. — Probiotics and obesity : a link ?

Nat. Rev. Microbiol ., 2009, 7 , 616.

[2] Cuevas-Ramos G., Petit C.R., Marcq I., Boury M., Oswald E., Nougayrède J.P. — Escherichia coli induces DNA damage in vivo and triggers genomic instability in mammalian cells.

Proc. Natl. Acad. Sci . USA , 2010, 107 , 11537-11542.

 

<p>* Membre correspondant de l’Académie nationale de médecine ; e-mail : patrick.berche@univparis5.fr</p>

Bull. Acad. Natle Méd., 2011, 195, no 6, 1289-1290, séance du 14 juin 2011