Résumé
Les trois principaux critères qui définissent une urgence médicale : le début soudain, le mauvais pronostic et la possibilité d’amélioration par un traitement immédiat, sont réunis par l’infarctus cérébral. Celui-ci résulte d’une ischémie focale qui va évoluer d’autant plus vite vers la nécrose que la pression de perfusion est basse. Les études sur l’infarctus expérimental et sur la thrombolyse chez l’homme ont montré que la fenêtre d’intervention thérapeutique pour sauver la zone de pénombre était très brève, actuellement fixée à 3 heures chez l’homme pour la thrombolyse intraveineuse mais susceptible de connaître de grandes variations individuelles appréciées au mieux par l’IRM diffusion-perfusion. La prise en charge en urgence du malade atteint d’infarctus cérébral est encore justifiée par la nécessité de diagnostiquer, dès les premières heures, l’infarctus et son étiopathogénie, de repérer les urgences vitales, de prévenir les complications générales, d’administrer un traitement antithrombotique, d’établir un pronostic vital et fonctionnel, de poser à temps les rares indications de la chirurgie ou de thrombolyse in situ et de débuter la prévention secondaire en cas d’accident ischémique transitoire.
Summary
The three main criteria for a medical emergency : sudden onset, poor prognosis and possibility of an effective medical treatment apply to cerebral infarction which is the end result of a focal ischemia, occurring all the more rapidly than perfusion pressure is low. Studies devoted to experimental cerebral infarction as well as to thrombolysis in human have shown that the therapeutic window to save the penumbral tissue is very short, presently 3 hours in human for intra venous thrombolysis but with considerable individual variations best assessed by MRI diffusion-perfusion. Caring for the patient who has a cerebral infarction is an emergency because it is necessary, in the very first hours, to properly diagnose the infarct and its etiopathogenesis, to detect the vital manifestations to prevent the general complications, to start an antithrombotic treatment, to establish a vital and functional prognosis, to apply in due time the rare surgical or intra-arterial thrombolytic treatments and to start secondary prevention in patients with transient ischemic attacks.
INTRODUCTION « Pourquoi l’infarctus cérébral est une urgence ». Que ce titre soit interprété comme une interrogation : « Pourquoi l’infarctus cérébral est-il une urgence ? » ou comme une affirmation : « (je vais vous montrer) pourquoi l’infarctus cérébral est une urgence », il est révélateur du scepticisme qui règne encore à cet égard. Poserait-on la même question pour l’infarctus du myocarde, l’embolie pulmonaire ou l’état de mal épileptique ? Certainement pas. Ce scepticisme ne fait que refléter l’état de la prise en charge de l’infarctus cérébral et de l’ensemble des accidents vasculaires cérébraux (AVC) dans notre pays. Peut-on parler d’urgence lorsque le délai moyen d’arrivée à l’hôpital est de 28 H et lorsque moins de 5 % des patients sont hospitalisés en unités de soins intensifs neuro-vasculaires (USI-NV), dont le bénéfice est amplement démontré en terme de réduction de mortalité et de handicap [1] et qui sont à l’AVC ce que l’USI cardiologique est à l’infarctus du myocarde ?
Et pourtant, les trois principaux critères qui définissent une urgence médicale, à savoir : le début soudain, le mauvais pronostic et la possibilité d’amélioration par un traitement d’urgence sont réunis par l’infarctus cérébral. Ils le sont de façon simple, voire simpliste, lorsque l’on considère seulement l’infarctus cérébral lui-même tel qu’il peut être réalisé chez l’animal : l’occlusion provoquée d’une artère entraîne une ischémie cérébrale focale puis un infarctus qui peut être prévenu, en totalité ou en partie, par la levée de l’occlusion ou par l’administration de diverses substances agissant sur la cascade ischémique. Cependant, si l’on considère non plus la lésion cérébrale elle-même mais le malade atteint d’infarctus cérébral, les 3 critères de l’urgence existent aussi mais de façon infiniment plus complexe car :
— le moment précis de l’occlusion artérielle n’est habituellement pas connu et seuls sont manifestes les symptômes qui en résultent avec leur extrême variété et les difficultés diagnostiques qu’ils soulèvent ;
— la gravité de l’accident n’est pas exclusivement fonction de la taille de l’infarctus et celle-ci ne dépend pas uniquement de la durée de l’occlusion (même si elle en est l’élément fondamental) ;
— les traitements d’urgence susceptibles d’améliorer l’état du patient consistent au moins autant en des mesures générales qu’en une action sur la lésion cérébrale elle-même.
L’INFARCTUS CÉRÉBRAL EST UNE URGENCE : LA FENÊTRE THÉRAPEUTIQUE
Chez l’animal
Les très nombreux modèles d’ischémie cérébrale focale qui ont été développés dans diverses espèces animales, tels que rats, lapins, chats ou singes, ont unanimement montré que la sévérité de la lésion cérébrale était essentiellement fonction de la durée de l’ischémie : si celle-ci est brève, elle n’induit aucune lésion irréversible ; si elle est prolongée, elle provoque un infarctus qui intéresse très rapidement la totalité du territoire occlus. A ce stade ultime, plus aucune intervention thérapeutique n’est efficace. La « fenêtre thérapeutique » correspond à cette brève période durant laquelle l’ischémie est encore réversible, en totalité ou en partie. Elle varie de quelques minutes à 24 H [2]. Ainsi, dans un modèle d’occlusion de l’artère cérébrale moyenne chez le macaque, la durée d’ischémie compatible avec une récupération totale est de 4 à 5 minutes et avec une récupération partielle, c’est-à-dire observée chez 50 % des animaux, de 41 minutes. Au-delà de 374 minutes, il n’existe plus aucune récupération [3]. Dans un autre modèle chez le chat, ces durées sont respectivement de 211, 268 et 340 minutes [4]. Chez le rat, la lésion atteint son maximum en 3-4 H [2]. La durée de l’occlusion artérielle, qui détermine en grande partie celle de l’ischémie, constitue donc l’élément clé du devenir du tissu cérébral, et plus précoce est la levée de l’occlusion, plus petite est la région infarcie.
La durée de la fenêtre thérapeutique est d’autant plus brève que l’ischémie est sévère : ainsi, une chute du débit sanguin cérébral (DSC) à 10-15 ml/100 g/min entraîne la mort des neurones les plus vulnérables en moins d’une heure [5]. En cas d’occlusion artérielle focale, la zone la plus vulnérable est la zone ischémique centrale, là où le débit est le plus bas. Autour de cette zone, se trouve une zone dite de « pénombre » dans laquelle le débit est moins bas (15 à 20 ml/100 g)/min) et les cellules nerveuses souffrent mais ne sont pas mortes. Cet état de pénombre dans lequel les neurones sont « assommés » et ont perdu toute communication électrique entre eux, est tout à fait instable, évoluant rapidement soit vers la récupération soit vers la nécrose. Il existe donc une relation spatio-temporelle très étroite entre la zone de pénombre et la durée de la fenêtre thérapeutique : plus la zone de pénombre est grande, plus longue est la fenêtre et vice-versa . L’évaluation de l’existence et du volume de la zone de pénombre est donc l’élément clé de l’appréciation de la durée de la fenêtre thérapeutique [2, 6].
Les phénomènes biochimiques qui caractérisent l’évolution de l’ischémie vers la nécrose s’enchaînent les uns aux autres en une cascade extraordinairement complexe [2, 5, 7]. L’interruption du flux prive les neurones de l’oxygène et du glucose qui leur sont indispensables et les conduisent à passer d’une respiration aérobie à une respiration anaérobie entraînant secondairement une diminution de la production d’ATP et une acidose lactique. Cette réduction de la production énergétique
entraîne une inhibition des pompes métaboliques et un début de dépolarisation neuronale, d’augmentation du glutamate extracellulaire et d’ouverture de canaux calciques voltage-dépendants. Il s’ensuit une légère entrée de calcium dans la cellule, globalement bénéfique pour la fonction neuronale [6]. À ce stade, la cellule peut encore récupérer mais, si l’ischémie se prolonge et/ou devient plus sévère, la synthèse d’ATP s’arrête, des radicaux libres toxiques sont produits, les pompes ioniques ne fonctionnent plus, le relargage excessif de glutamate active les récepteurs NMDA (N-methyl-D-aspartate) et AMPA (alpha-amino-3-hydroxy-5-methyl-4-isoxazole propionic acid), ce qui provoque une entrée massive de calcium dans la cellule entraînant la mort cellulaire. Ces phénomènes sont exacerbés par une réponse inflammatoire qui se développe à l’interface de la cellule endothéliale avec activation des leucocytes et largage des médiateurs de l’inflammation (prostaglandines, leukotriènes, …).
Toutes les substances qui interfèrent avec cette cascade ischémique, qualifiées de neuroprotecteurs, qu’il s’agisse des antagonistes calciques, des antagonistes du NMDA, des piégeurs des radicaux libres ou des anti-inflammatoires, ont démontré leur efficacité chez l’animal mais ils ne réduisent la taille de l’infarctus et n’allongent la durée de la fenêtre thérapeutique que s’ils sont administrés moins de 1 à 2 heures après l’occlusion artérielle. De plus, l’efficacité maximale n’est obtenue que par l’association de diverses classes de neuroprotecteurs.
En résumé, le message à tirer de l’abondante littérature consacrée à l’infarctus cérébral chez l’animal est qu’il existe une fenêtre d’intervention thérapeutique de durée variable selon les espèces mais ne dépassant pas 5-6 H chez le macaque, et qu’au sein de cette fenêtre, la taille de l’infarctus est étroitement liée à la durée de l’occlusion artérielle, 50 % de la zone ischémiée étant infarcie en moins de 2 H, et au délai d’administration des traitements quels qu’ils soient, leur efficacité étant maximale s’ils sont administrés le plus tôt possible après l’occlusion artérielle (et même avant celle-ci, ce qui est difficilement transposable à l’homme).
Chez l’homme
La situation est infiniment plus complexe, car, en dehors des accidents emboliques survenant au cours d’une procédure intra-artérielle ou cardiaque, le moment exact de la survenue de l’occlusion artérielle n’est pas connu. De plus, le scanner, qui constitue actuellement l’examen de routine en cas d’AVC, ne permet pas de diffé- rencier la pénombre de la nécrose et d’évaluer la durée de la fenêtre d’intervention thérapeutique. C’est pourtant de cette fenêtre que dépend l’efficacité du traitement, tout traitement administré alors que la zone ischémiée est déjà entièrement infarcie étant non seulement voué à l’échec, mais potentiellement générateur d’effets délétères [2]. En revanche, s’il persiste une zone de pénombre, une intervention thérapeutique adaptée peut empêcher son évolution vers la nécrose, y restaurer l’activité fonctionnelle et favoriser ainsi la récupération neurologique. L’un des grands enjeux de la neuro-imagerie physiologique est donc d’être capable de détec-
ter, chez le malade puis individuellement, la présence et le volume de la pénombre [9, 10].
Les travaux effectués en tomographie d’émission de positons (TEP) ont permis de caractériser de manière qualitative la pénombre comme une forme de « perfusion de misère », c’est-à-dire de baisse du DSC avec augmentation de l’extraction d’oxygène et relatif maintien de la consommation d’oxygène [11]. Ils ont cependant montré l’extrême hétérogénéité des anomalies hémodynamiques et métaboliques à la phase aiguë de l’accident ischémique cérébral. Ainsi, dans les accidents sylviens étudiés entre 5 et 18 H après le début des symptômes, il existe 3 profils d’anomalies. Le profil I est caractérisé par une baisse profonde et étendue du DSC et de la consommation d’oxygène traduisant une nécrose extensive précoce d’évolution spontanée constamment défavorable ; le profil II, présent dans un tiers des cas, est celui de la pénombre (perfusion de misère) susceptible d’évoluer vers la nécrose ou vers la guérison ; le profil III est caractérisé par une augmentation du DSC, une diminution d’extraction d’oxygène, et une préservation de la consommation d’oxygène. Ce profil de « perfusion de luxe » reflète un tissu viable peu ou pas lésé évoluant vers la récupération [9]. De nombreux travaux se sont attachés à définir des seuils d’apparition de la pénombre et de l’infarctus [11-15]. Le DSC normal est compris entre 40 et 60 ml/100 g/min. De 20 à 40 ml, c’est l’oligohémie caractérisée par une perfusion de misère compensée permettant le maintien du métabolisme et de l’activité électrique ; de 12 à 20 ml c’est la pénombre, zone de perfusion de misère décompensée avec des cellules ayant perdu leur activité électrique mais non détruites, de 12 à 8 ml, c’est la pénombre « critique », zone qui évoluera inéluctablement vers la nécrose en l’absence de reperfusion rapide. Au dessous de 12, c’est l’infarctus inéluctable.
Compte tenu de l’extrême hétérogénéité des anomalies hémodynamiques et métaboliques observées dans l’ischémie cérébrale humaine, la durée de la fenêtre thérapeutique (c’est-à-dire de la persistance d’une pénombre viable) est extraordinairement variable. Cette variabilité tient à de nombreux facteurs individuels dont beaucoup sont encore mal connus : âge, pression artérielle, glycémie, température, capacités de suppléances anastomotiques, niveau pie-mériennes, survenue d’une recanalisation spontanée, fonctionnalité du cercle de Willis [9, 12]. L’ensemble des études [9-16] s’accorde à dire que, dans la majorité des cas, la fenêtre thérapeutique ne dépasse pas 5 heures et même probablement 3 heures chez de nombreux patients, mais qu’il existe néanmoins des cas de persistance de tissu pénombral viable 16 heures après le début clinique et peut-être même jusqu’à 48 heures après [17]. Ces observations effectuées en TEP montrent qu’il n’existe pas de fenêtre thérapeutique rigide et universelle et soulignent la nécessité de disposer en urgence des outils permettant d’évaluer la pénombre (et donc la fenêtre) à l’échelon individuel. La TEP n’étant pas un outil de routine, des travaux de corrélation ont été effectués avec la tomographie d’émission mono- photonique (TEMP) qui permet l’étude du DSC, principalement au moyen du traceur 99mTc-HMPAO. Ils ont montré qu’une zone de tissu cérébral dont le débit était inférieur à 20 ml/100 g/min évoluait vers la nécrose,
malgré la thrombolyse et qu’à l’inverse, le pronostic était favorable lorsque aucune anomalie de débit n’était décelée [18-20].
C’est actuellement l’imagerie par résonance magnétique (IRM) qui est l’examen clé pour l’étude de l’ischémie cérébrale chez l’homme. Elle permet non seulement le diagnostic précoce de l’ischémie et même de l’hémorragie, mais aussi l’évaluation de l’état du parenchyme et de la perfusion cérébrale. Ainsi, l’IRM de diffusion évalue le degré d’œdème cytotoxique dont le volume est corrélé à la sévérité du déficit neurologique et l’IRM de perfusion évalue le volume sanguin cérébral, le DSC et le temps de transit moyen du sang au niveau tissulaire [21, 22]. De très nombreux travaux ont souligné l’intérêt du couplage de l’IRM diffusion et perfusion pour étudier à l’échelon individuel la situation hémodynamique et métabolique du tissu cérébral ischémié. L’existence d’une lésion cérébrale plus étendue en IRM perfusion qu’en IRM diffusion (« mismatch perfusion/diffusion ») indique l’existence d’une zone de pénombre alors que le profil inverse (altération plus étendue en diffusion qu’en perfusion) signe la nécrose et constitue l’équivalent du profil I défini en TEP [21-24].
Il existe donc chez l’homme, comme chez l’animal, une fenêtre d’intervention thérapeutique dont la durée moyenne est de quelques heures mais avec une très grande variabilité interindividuelle. Cependant, contrairement à l’animal chez lequel de multiples traitements ont démonté leur efficacité, chez l’homme tous les médicaments neuroprotecteurs essayés jusqu’ici ont connu des échecs cuisants, essentiellement en raison des différences fondamentales qui existent entre l’infarctus expérimental et l’accident ischémique cérébral chez l’homme. Le seul traitement qui ait fait la preuve de son efficacité est la levée de l’occlusion artérielle telle qu’elle peut être réalisée par la thrombolyse intraveineuse ou intra-artérielle. Sans entrer dans le détail des études consacrées à la thrombolyse qui font l’objet d’une autre communication (P. Amarenco), il est fondamental de constater qu’elles confirment l’importance de la précocité du traitement. Dans l’étude PROACT II [25], qui se rapproche le plus de l’infarctus expérimental puisqu’elle concerne des patients ayant une occlusion documentée de l’artère cérébrale moyenne, la pro-urokinase intraartérielle est efficace sur le taux de recanalisation et la récupération fonctionnelle lorsqu’elle est administrée dans les 6 heures qui suivent le début des symptômes. En revanche, aucune des études randomisées consacrées au rt-PA intraveineux (qui ont toutes été effectuées chez des patients dont le degré de perméabilité de l’artère en cause était inconnu) n’a montré de bénéfice dans les 6 heures [26-28]. Seule l’étude américaine du NINDS [29], dans laquelle le rt-PA était administré dans les 3 heures, a montré un bénéfice avec une augmentation relative d’un tiers du pourcentage de patients récupérant sans séquelles et une augmentation absolue de 12 % de la proportion de malades indépendants à 3 mois. Ce bénéfice tient essentiellement aux malades traités dans les 90 premières minutes. Même si une partie du résultat favorable (4 % du bénéfice absolu) s’explique par un déséquilibre dans la sévérité des groupes à l’entrée dans l’étude parmi les patients traités entre 91 et 180 minutes [30], il n’en demeure pas moins que cette étude confirme que la clef de la guérison passe
par la levée de l’occlusion artérielle et que plus l’occlusion est levée tôt, meilleur est le pronostic.
L’importance du facteur « temps » est encore attestée par les diverses mêta-analyses des essais consacrés au rt-PA qui montrent un bénéfice sur la mort ou la dépendance plus marqué dans les 3 heures : OR : 0,55 [95 % IC : 0,42 – 0,73] que dans les 6 heures : OR : 0,79 [0,68 – 0,92] et un risque d’hémorragie cérébrale qui augmente avec le délai d’administration. Le rapport bénéfice/risque de la thrombolyse étant d’autant plus favorable que le traitement est précoce, l’idéal serait, comme chez l’animal, de l’administrer dans l’heure qui suit l’occlusion artérielle. Ceci n’étant, sauf exception, pas possible, on conçoit l’importance de l’évaluation individuelle des possibilités de récupération du tissu cérébral lésé. Les données fondamentales acquises en TEP puis par l’IRM diffusion/perfusion commencent à être appliquées à l’utilisation de la thrombolyse. Il a ainsi été montré récemment [31] que, en l’absence de mismatch perfusion/diffusion à l’IRM, le rt-PA intraveineux administré dans les 6 heures ne modifiait pas la taille de l’infarctus hémisphérique par rapport à un groupe non traité, alors qu’en cas de mismatch il y avait une augmentation significative du volume du tissu pénombral sauvé et une amélioration de la récupé- ration neurologique. La présence d’une lésion cérébrale étendue sans mismatch semble donc bien correspondre à une nécrose extensive précoce non modifiable par le rt-PA alors que la présence d’un mismatch paraît effectivement refléter la pénombre et autoriser la thrombolyse intraveineuse au-delà de la limite actuelle des 3 heures [31, 32]. Si ces données se confirment dans les essais actuellement en cours qui incluent tous l’IRM diffusion/perfusion, elles permettront enfin de déterminer pour chaque patient l’état du tissu cérébral et les possibilités d’intervention thérapeutique. Les données acquises chez l’animal suggèrent que, en dépit des échecs actuels de la neuroprotection chez l’homme, le bénéfice de la reperfusion pourrait être augmenté (et la fenêtre d’administration allongée) par l’administration précoce de neuroprotecteurs [8, 32].
En résumé, chez l’homme, comme chez l’animal, la fenêtre d’intervention thérapeutique est brève, ne dépassant pas, le plus souvent, 5 ou 6 heures, et le traitement le plus efficace pour réduire la taille de l’infarctus est la levée de l’occlusion artérielle.
Celle-ci est actuellement effectuée par la thrombolyse qui a montré son efficacité dans les 3 heures avec le rt-PA intraveineux et dans les 6 heures avec la pro-urokinase en intra-artériel dans les occlusions sylviennes. Au sein de la fenêtre d’intervention thérapeutique, le bénéfice est d’autant plus important que le traitement est administré précocement et le risque d’autant plus élevé que le traitement est administré tard.
Il existe néanmoins une très grande variabilité interindividuelle quant à la réponse au traitement, essentiellement dépendante de l’état physiologique du tissu cérébral ischémié qui peut actuellement être apprécié au mieux en pratique quotidienne par l’IRM diffusion-perfusion.
Les données expérimentales et humaines montrent donc bien à quel point l’ischémie cérébrale est une urgence et même une urgence extrême, les traitements, quels qu’ils soient, n’étant aptes à limiter la taille de l’infarctus que dans les toutes premières
heures, cette fenêtre d’intervention étant néanmoins parfois susceptible d’être allongée en cas de mismatch prolongé.
LA PRISE EN CHARGE DU MALADE QUI A UN INFARCTUS CÉRÉBRAL EST UNE URGENCE
La thrombolyse — qui est toujours en attente d’autorisation dans cette indication en Europe — ne constitue pas, loin s’en faut, la seule justification à une prise en charge d’urgence, car d’une part, même aux États-Unis où elle est autorisée depuis 7 ans elle ne concerne que 3 % des infarctus cérébraux, d’autre part, il existe de nombreuses autres raisons d’agir en urgence, que ce soit pour établir un diagnostic précis, pour évaluer le pronostic immédiat et le risque de complications ou pour appliquer d’autres mesures thérapeutiques.
L’infarctus cérébral, une urgence diagnostique
La perte brutale d’une ou plusieurs fonctions cérébrales qui caractérise l’infarctus cérébral est loin d’en être l’apanage, les mêmes symptômes pouvant être provoqués par une hémorragie cérébrale, et, plus rarement, par d’autres affections telles que thrombose veineuse cérébrale, abcès, encéphalite, tumeur, sclérose en plaques, déficit post-critique ou hypoglycémie. Plusieurs études effectuées dans des services d’urgence ont montré que le diagnostic d’AVC lui même était porté par excès environ une fois sur cinq et par défaut une fois sur quatre [33]. Quant à l’interpré- tation du scanner sur lequel repose la distinction entre infarctus et hémorragie, elle est souvent loin d’être optimale : ainsi, dans une étude américaine basée sur un échantillon de 38 urgentistes, 29 neurologues et 36 radiologues, seulement 52 % des radiologues, 40 % des neurologues et 17 % des urgentistes atteignaient une sensibilité de 100 % pour l’identification de lésions hémorragiques au scanner [34]. Par ailleurs, le scanner ne montre pas l’ischémie très précoce, ne visualise souvent pas les infarctus de petite taille et les infarctus sous-tentoriels et ne permet pas souvent d’éliminer une démyélinisation, un abcès ou une tumeur. L’IRM est l’examen clé en urgence car elle permet, en moins de 10 minutes, de visualiser l’ischémie, même très précoce (séquence de diffusion), l’hémorragie (écho de gradient), et l’occlusion artérielle éventuelle (angio IRM), d’évaluer l’état fonctionnel du parenchyme (IRM diffusion-perfusion) et d’éliminer les autres affections citées ci-dessus.
Les difficultés sont encore plus grandes pour l’accident ischémique transitoire dont le diagnostic repose exclusivement sur l’interrogatoire, avec environ un tiers d’erreurs par excès [35], les principales erreurs d’interprétation se faisant avec les auras migraineuses isolées et les crises d’épilepsie focale.
L’infarctus cérébral est très hétérogène quant à son mécanisme et à sa cause. Il connaît trois causes principales : l’athérosclérose, les embolies d’origine cardiaque et les maladies des petites artères et de nombreuses autres causes plus rares telles que les dissections ou les hémopathies. La question reste posée de savoir s’il y a un
bénéfice à connaître en urgence la cause de l’ischémie [36-38]. Ceci n’était un pré requis ni dans l’étude du rt-PA [29] ni dans les 2 grandes études IST [39] et CAST [40] consacrées à l’aspirine, d’où la recommandation [36] de recourir à l’aspirine sans attendre le bilan étiologique. On conçoit néanmoins tout l’intérêt du diagnostic d’urgence de certaines causes telles que les dissections pour lesquelles existe un consensus en faveur de l’héparine, les endocardites qui requièrent une antibiothérapie lourde, les hémopathies qui relèvent d’un traitement causal, les sténoses serrées ou les occlusions de la carotide ou du tronc basilaire dont il est crucial d’apprécier le retentissement hémodynamique intracrânien. Si celui-ci est important, un décubitus strict est imposé tandis que dans les autres cas, la mise au fauteuil, voire le lever précoce sont recommandés [36-37]. Par ailleurs, l’étiologie de l’accident détermine les modalités de la prévention secondaire qui doit être débutée le plus tôt possible pour éviter les récidives précoces : aspirine ou autre antiplaquettaire dans les accidents liés à l’athérosclérose, anticoagulants oraux en cas de cardiopathie emboligène.
Le bilan nécessaire au diagnostic d’urgence d’infarctus cérébral et à une première orientation étiologique est simple [36, 37, 41, 42]. Il comporte un interrogatoire du patient et si possible de son entourage, un examen neurologique et cardiovasculaire, un bilan sanguin de base (numération globulaire, vitesse de sédimentation, glycémie, ionogramme), la prise de la température, un électrocardiogramme et un scanner sans contraste (en attendant que des IRM soient disponibles 24 heures sur 24 dans les centres accueillant les AVC en urgence). Ce bilan diagnostique initial qui doit être complété par un écho Doppler cervical et transcrânien et une échocardiographie peut être effectué très rapidement à l’hôpital. Mais le retard encore si fréquent au diagnostic tient au moins autant à des facteurs pré-hospitaliers qu’intrahospitaliers. Les nombreux déterminants de ce retard ont été bien identifiés :
méconnaissance par le grand public de ce qu’est un infarctus cérébral, confondu plus d’une fois sur 5 avec l’infarctus du myocarde [43], non identification des premiers symptômes [44], appel direct insuffisant aux services de transports d’urgence et en revanche trop fréquent au médecin généraliste, lenteur des transports, accueil et aiguillage des patients trop lents aux urgences, délais d’attente au scanner, etc. [42-46]. Le développement de la thrombolyse s’est accompagné de campagnes d’éducation du grand public, du personnel paramédical et des médecins sur l’infarctus cérébral et la nécessité de le diagnostiquer et traiter en urgence, avec de résultats spectaculaires : diminution du délai d’arrivée à l’hôpital de 3, 2 heures à 1,5 [47] dans une étude, augmentation de 37 % à 86 % du nombre de patients arrivant dans les 24 heures [48], évaluation du patient moins de 10 minutes après son arrivée aux urgences, obtention du scanner dans les 25 minutes et début de la thrombolyse en moins d’une heure [49, 50].
En résumé, l’infarctus cérébral est une urgence diagnostique, tant pour le reconnaî- tre que pour en préciser le mécanisme et la cause. Les moyens à mettre en œuvre pour ce diagnostic d’urgence sont connus et d’efficacité démontrée.
L’infarctus cérébral, une urgence thérapeutique
Le traitement de l’AVC en général et de l’infarctus cérébral en particulier, a récemment fait l’objet de nombreuses revues générales et recommandations [36-38, 41, 42, 52-54] qui seront envisagées en détail dans l’article de P. Amarenco. Certains aspects particulièrement urgents de la prise en charge méritent néanmoins d’être rappelés.
Certains patients présentent d’emblée des manifestations qui mettent en jeu le pronostic vital et doivent donc être traitées en extrême urgence, tels que des troubles de conscience sévères, des troubles du rythme respiratoire (notamment dans les accidents du tronc cérébral), un œdème pulmonaire, un infarctus du myocarde associé ou un état de mal épileptique [55-56]. Les indications de la ventilation mécanique ont fait l’objet de nombreux travaux et il existe un consensus pour dire que le bénéfice en est incertain et les indications rares à discuter cas par cas.
Indépendamment de ces rares urgences vitales, il est important pour la stratégie ultérieure comme vis-à-vis du patient et de son entourage, d’évaluer dès les premiè- res heures le pronostic vital et fonctionnel. De nombreux scores ou index cliniques ont été proposés qui s’accordent à reconnaître une bonne valeur prédictive à certaines échelles cliniques telles que le NIH stroke scale (NIHSS) quant au pronostic et à la qualité de la récupération fonctionnelle [58-60]. Néanmoins, c’est la combinaison du NIHSS avec 2 paramètres liés à l’IRM diffusion (le délai de l’examen et le volume de tissu ischémié) qui semble avoir dès les premières heures la meilleure valeur prédictive des capacités de récupération avec une sensibilité de 0,77 et une spécificité de 0,88 [61].
Près de la moitié des décès à la phase aiguë de l’infarctus cérébral étant liés à la survenue de complications générales, celles-ci doivent faire l’objet d’une prévention à instaurer le plus tôt possible, en surveillant étroitement l’état neurologique et les fonctions vitales, en assurant la liberté des voies aériennes et en mettant sous oxygène en cas d’hypoxémie, en traitant toute hyperthermie > 37°5 et toute glycémie > 10 mmol/l, en détectant et corrigeant les désordres électrolytiques, en respectant des chiffres de pression artérielle sauf en cas de comorbidité requerrant une baisse de pression (encéphalopathie hypertensive, œdème pulmonaire), en traitant la moindre infection par une antibiothérapie adaptée, en prévenant les complications de décubitus par la mobilisation précoce et les phlébites et embolies pulmonaires par une héparine de bas poids moléculaire [53].
La cause immédiate de l’infarctus cérébral étant dans l’immense majorité des cas un phénomène thromboembolique, la prescription d’un antithrombotique est impérative et bien que, contrairement à la thrombolyse, il n’y ait eu ni pour l’héparine ni pour l’aspirine l’évaluation de l’efficacité en fonction du délai d’administration, le plus tôt est certainement le mieux. Les mêta-analyses des études consacrées à ces substances n’objectivent, en termes de mortalité ou de dépendance, aucun bénéfice des héparines [62] quelles qu’en soient les modalités d’administration mais l’anticoagulation d’urgence reste néanmoins proposée de façon consensuelle dans certai-
nes indications telles que les dissections artérielles, les sténoses athéromateuses serrées ou les cardiopathies à haut risque embolique [53]. Quant à l’aspirine, son efficacité est démontrée dans des études l’ayant administrée dans les 48 premières heures avec une réduction significative du risque de décès ou de dépendance (13 évités pour 1 000 patients traités) et une augmentation significative du nombre de patients récupérant sans séquelles (11 pour 1 000 traités). Ce bénéfice pourrait être plus important en cas de traitement plus précoce mais ceci reste à démontrer.
Certains infarctus relèvent d’un traitement chirurgical : les infarctus cérébelleux avec hydrocéphalie aiguë nécessitant la pose d’une dérivation ventriculaire externe, voire la réalisation d’une craniectomie décompressive [64] et les infarctus sylviens « malins » du sujet jeune chez lesquels la chirurgie améliore le pronostic vital [64-66] mais dont l’efficacité au plan fonctionnel est en cours d’évaluation dans des essais randomisés. Bien que les indications de la chirurgie ne concernent que < 1 % des patients, elles justifient une surveillance heure par heure des malades ayant ce type d’infarctus afin d’effectuer l’intervention au moment optimal, c’est-à-dire pas trop tôt pour ne pas opérer à tort des malades qui n’en auraient pas besoin, mais sans attendre que le cap de l’irréversibilité soit franchi [54-66].
Les thromboses du tronc basilaire nécessitent également une surveillance très étroite en raison d’une symptomatologie fluctuante et de l’évolution possible vers un tableau dramatique tel qu’un locked-in syndrome. La sévérité du pronostic a conduit à proposer en urgence une thrombolyse intra-artérielle qui, sur la base de petites séries, paraît plus efficace que l’héparine ou l’aspirine [67-68].
De nombreux patients vus très précocement après le début des symptômes voient ceux-ci régresser dans les heures qui suivent. Il s’agit alors d’un accident ischémique transitoire (AIT) qui constitue un véritable syndrome de menace, le risque d’infarctus cérébral atteignant 8,6 % à 7 jours et 12 % à 30 jours et allant jusqu’à respectivement 12 % et 18,8 % s’il s’agit de patients hypertendus ayant un AIT cérébral (et non purement oculaire) [69]. Ceci illustre l’urgence du bilan étiologique nécessaire à la mise en route de la prévention secondaire optimale.
Tout ce qui précède concerne l’ischémie artérielle, mais l’urgence existe aussi pour les thromboses veineuses cérébrales dont le traitement, contrairement à celui de l’accident ischémique artériel, repose essentiellement sur l’héparine et à titre exceptionnel sur la thrombolyse in situ [70, 71]).
EN CONCLUSION
Avec un décalage d’une vingtaine d’années par rapport à l’infarctus du myocarde, l’infarctus cérébral est maintenant reconnu comme une urgence médicale requerrant un diagnostic immédiat dont les deux élément clés sont la clinique et l’IRM, une hospitalisation en unité de soins intensifs neurovasculaire, dont l’efficacité est démontrée, et l’application au cas par cas de mesures thérapeutiques diverses qui ont
également fait la preuve de leur efficacité. Les données acquises chez l’animal et l’expérience de la thrombolyse chez l’homme montrent sans ambiguïté que la prise en charge thérapeutique, quelle qu’elle soit, est d’autant plus efficace qu’elle est précoce, d’où l’expression : « time is brain » [52]. Malheureusement, il existe entre les données de la littérature et la réalité quotidienne un fossé considérable qui ne pourra être comblé que par une volonté politique forte permettant d’informer le grand public, les paramédicaux et les médecins, sur l’infarctus cérébral, ses symptômes d’appel et sa gravité, de développer de vastes programmes de prévention, d’organiser un système d’alerte téléphonique et de transport d’urgence performant, d’augmenter le nombre d’USI-NV, d’IRM, de personnel médical et non médical spécialisé en neurologie vasculaire, d’organiser la prise en charge en structures de suite sans laquelle les services d’aigu ne peuvent fonctionner.
Ce n’est qu’au prix de cet effort collectif que la mortalité et la dépendance résultant des infarctus cérébraux diminueront significativement.
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DISCUSSION
M. Jean-Daniel SRAER
Quelles sont les possibilités de développer des centres de suite après accidents vasculaires cérébraux pour que les patients ne séjournent pas indûment dans les services de réanimation ? Quelles sont les nécessités de ventilation assistée dans les accidents ischémiques cérébraux ? Qu’en est-il des ischémies cérébrales secondaires à des vascularites bien identifiées telles que périartérite noueuse ou Wegener et des autres maladies des petites artères ?
Nous avons abordé aujourd’hui l’infarctus cérébral sous l’angle de l’urgence. Malheureusement, 50 % des patients ayant un accident vasculaire cérébral vont garder des séquelles et 20 % des patients hospitalisés pour AVC nécessitent un transfert en structure dite de « soins de suite » qui incluent le service de médecine physique rééducation, de soins de suite gériatriques et de long séjour. Il existe dans notre pays une insuffisance notoire en soins de suite et tout particulièrement en Ile-de-France où le déficit est estimé à plus de 200 lits. Ceci conduit inévitablement à des hospitalisations indues en service d’aigus ou de réanimation. La durée moyenne d’hospitalisation dans notre service, lorsque le patient doit partir en structure de suite, est ainsi de 21 jours, alors que tout le bilan peut être terminé en moins d’une semaine. Plusieurs études concernant la place de la ventilation assistée dans les accidents vasculaires cérébraux ont été entreprises. Ainsi dans une étude américaine ayant porté sur 510 AVC, 10 % ont été ventilés artificiellement. Parmi eux, 65 % sont décédés et seulement 4 % étaient indépendants dans la vie quotidienne au-delà d’un an. Les principales indications de la ventilation assistée sont les complications potentiellement curables de l’AVC telles que l’état de mal épileptique, la pneumopathie de déglutition, l’insuffisance cardiaque décompensée, etc. En cas de troubles de conscience, la ventilation assistée est impérative si un traitement curatif peut être effectué tel qu’une chirurgie d’un infarctus, ou d’hématome du cervelet ou d’un infarctus sylvien malin. Bien qu’il soit exceptionnel, le recours à la réanimation justifie que les unités de soins intensifs neurovasculaires soient mises en place dans des hôpitaux disposant de lits de réanimation. Les causes des infarctus cérébraux sont extrêmement nombreuses et l’on peut schématiquement distinguer d’une part, les maladies dites des « grosses artères », athérosclérose et cardiopathie emboligène responsables d’infarctus territoriaux (par exemple infarctus du territoire de l’artère cérébrale moyenne ou de
l’artère cérébrale postérieure), d’autre part les maladies dites des « petites artères » ; les unes sont aiguës telles que les angéites dont vous venez de parler, les autres chroniques, telles que l’artériolosclérose, l’angiopathie amyloïde ou le CADASIL. Les maladies des petites artères provoquent le plus souvent des petits infarctus cérébraux mais parfois aussi des hémorragies cérébrales et une atteinte de la substance blanche appelée leucoaraïose. Assez souvent, nous arrivons à porter le diagnostic de maladie des petites artères mais nous n’arrivons pas à en préciser la nature exacte.
M. Jacques CAEN
Les traitements de l’infarctus du myocarde ont précédé de 30 ans ceux des infarctus cérébraux. Il est tout aussi important de transférer d’urgence les infarctus cérébraux dans les services spécialisés que les infarctus du myocarde dans les unités de soins intensifs cardiologiques. L’exploration de la coagulation peut être utile pour le diagnostic de certains accidents vasculaires cérébraux tels que les thrombophlébites cérébrales. Les troubles du rythme cardiaque sont une cause connue d’infarctus cérébral et, dans cette indication, les anti-vitamines K semblent avoir une action supérieure aux anti-plaquettaires.
Je ne peux que souscrire à vos commentaires. J’espère vous avoir montré que l’infarctus cérébral était une urgence et que les unités de soins intensifs neuro-vasculaires avaient fait la preuve de leur efficacité dans la prise en charge des patients. Le problème est qu’il n’en existe encore que très peu en France puisque, en Ile-de-France, la capacité d’accueil n’est actuellement que de 8 % de l’ensemble des AVC. L’étude des D-Dimers est intéressante dans les accidents vasculaires cérébraux car il est exact que les D-Dimers sont particulièrement augmentés dans les thromboses veineuses cérébrales. Cependant, nous avons eu quelques cas à D-Dimers normaux. Par ailleurs, dans un infarctus artériel, la constatation de D-Dimers très élevés peut mettre sur la voie de la recherche d’une endocardite en rapport avec un cancer profond. Vous avez tout à fait raison, dans la prévention des embolies cérébrales liées à une fibrillation auriculaire, les anti-vitamines K sont bien supérieurs à l’Aspirine puisqu’ils diminuent le risque d’embolie cérébrale de 70 % contre seulement 20 % pour l’Aspirine (les autres anti-plaquettaires n’ont pas encore été étudiés dans cette indication).
M. Maurice GOULON
Les services de réanimation ont toujours été sollicités pour l’admission des malades victimes d’accident vasculaire cérébral. Comment situez-vous la place de la réanimation par rapport aux unités de soins intensifs neuro-vasculaires ?
Comme je l’ai déjà indiqué, le nombre de patients victimes d’AVC susceptibles de véritablement bénéficier d’un transfert en réanimation est faible et il faut toujours bien peser le pour et le contre avant d’adresser un patient en réanimation. Certaines unités de soins intensifs neuro-vasculaires, comme celles de La Salpêtrière ou de Toulouse, disposent de lits de ventilation ce qui était aussi le cas avant mon arrivée à Lariboisière. La tendance actuelle est plutôt d’avoir des USI-NV sans possibilité de ventilation et de transférer, si besoin, les malades dans le service de réanimation.
M. Yves GROSGOGEAT
J’aimerais rappeler que la création du premier centre d’urgences cérébro-vasculaires à Paris remonte à une vingtaine d’années et que son promoteur en fut notre ami Jean-Claude Gautier, précurseur dans ce domaine. Comment peut-on situer l’accident ischémique transitoire par rapport à l’infarctus sur le plan étiologique, physiopathologique et thérapeutique ?
L’accident ischémique transitoire est le meilleur signe avant-coureur de l’infarctus céré- bral puisqu’il en multiplie le risque par 14. Il est donc très important de le reconnaître, ce qui n’est pas toujours facile car des symptômes transitoires très voisins peuvent s’observer dans l’aura migraineuse ou dans les crises d’épilepsie. Une fois reconnu, l’accident ischémique transitoire doit faire l’objet d’un bilan étiologique à la recherche des maladies des grosses artères et des petites artères dont je parlais toute à l’heure et ensuite, le traitement est fonction de la cause. Si, par exemple, il s’agit d’une sténose carotide serrée avec AIT homo latéraux, une endartérectomie carotidienne est indiquée d’urgence. S’il s’agit d’embolies d’origine cardiaque, le traitement sera celui de la cardiopathie associé aux anti-coagulants oraux.
M. André VACHERON
Pensez-vous, comme moi, que le traitement anti-vitamine K est le meilleur traitement préventif des embolies cérébrales dans la fibrillation auriculaire qui est une cause fréquente d’infarctus cérébraux ?
Je suis tout à fait d’accord avec vous : la fibrillation auriculaire est de loin la première cause d’embolie cérébrale d’origine cardiaque. Elle est d’autant plus dangereuse qu’elle s’associe à une valvulopathie mais, même dans la fibrillation auriculaire non valvulaire, le risque d’embolie cérébrale est élevé. S’il y a déjà eu un premier accident ischémique cérébral le risque de rechute est de l’ordre de 12 % par an. Tant en prévention primaire qu’en prévention secondaire, le bénéfice des anti-vitamines K est largement démontré et bien supérieur à celui de l’Aspirine.
M. Georges SERRATRICE
Quel est le mécanisme de la récupération après pénombre ? Fait-il intervenir les neurones quiescents, une dérepression génomique ou l’intervention de neurotransmetteurs ?
Les mécanismes de la récupération après infarctus cérébral font actuellement l’objet d’études passionnantes, notamment grâce à l’IRM fonctionnelle. De multiples facteurs interviennent dans la récupération qui est liée essentiellement à la plasticité du cerveau humain, d’autant plus importante que le sujet est jeune : ces facteurs sont la modification de la somatotopie du cortex impliqué, le recrutement d’aires situées à distance de la lésion, l’implication des cortex associatifs, la réorganisation du métabolisme cérébral, etc. Ce qui est bien démontré, quoique le mécanisme en demeure inconnu, c’est le bénéfice de la rééducation pour l’hémiplégie, l’aphasie et l’hémi négligence ; ce bénéfice est d’autant plus important que la rééducation est précoce, intensive et prolongée. Là encore, le bénéfice maximal est obtenu dans des unités de rééducation spécialisées.
Monsieur Maurice CARA
Je suis très frappé par la notion d’urgence à la mise en œuvre du traitement. Il me paraît que le délai de 3 heures est encore trop long, ne faudrait-il pas faire une action dans les milieux médicaux pour insister sur l’importance de réduire au minimum cette durée ? Je m’interroge sur la signification de l’effet de la ventilation artificielle chez ces patients. Pourriez-vous nous dire dans quelles conditions les malades ont été ventilés, notamment quel était le réglage de la ventilation minute ?
Le délai actuel de 3 heures est celui de l’administration du rt-PA intraveineux mais, pour que ce traitement soit administré dans les 3 heures, il faut que le patient arrive à l’hôpital moins d’une heure et demie après le début des symptômes car on sait qu’il y a une heure à une heure et demie de temps incompressible à l’intérieur de l’hôpital, correspondant à l’examen neurologique, aux prises de sang, à la réalisation de l’imagerie cérébrale, à l’obtention des résultats de la glycémie et du dosage des plaquettes, etc. De nombreux travaux ont été effectués à l’étranger et ont bien permis d’individualiser les facteurs qui permettent de réduire les délais tant avant l’arrivée à l’hôpital qu’à l’intérieur même de l’hôpital. Toutefois, j’insiste sur le fait que j’ai déjà souligné, à savoir que mettre en œuvre tous ces moyens pour que les malades arrivent plus tôt n’aurait pas de sens si parallèlement nous ne développions pas les structures de soins de suite. En ce qui concerne votre deuxième question, je suis désolée, mais je ne sais pas répondre quant aux conditions précises de réglage de la ventilation artificielle dans les études entreprises sur ce sujet dans les accidents vasculaires cérébraux.
* Service de Neurologie, Hôpital Lariboisière, 2 rue Ambroise Paré — 75571 Paris cedex 10. Tél. 01 49 95 25 98 — Fax 01 49 95 25 96. — E-mail : mg.bousser@lrb.ap-hop.paris.fr Tirés-à-part : Professeur Marie-Germaine BOUSSER, à l’adresse ci-dessus . Article reçu le 20 juin 2002, accepté le 24 juin 2002.
Bull. Acad. Natle Méd., 2002, 186, n° 7, 1159-1177, séance du 15 octobre 2002