Publié le 5 octobre 2021

Mucoviscidose : la révolution thérapeutique des modificateurs du canal CFTR

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Mucoviscidose : la révolution thérapeutique des modificateurs du canal CFTR

 Communiqué de l’Académie nationale de médecine (*)

5 octobre 2021

 

 

La mucoviscidose est une maladie génétique autosomique récessive, dont la prévalence en Europe est de 1/3000 naissances et qui affecte de nombreux organes : poumons, pancréas, foie, intestins, peau, appareil uro-génital, et autres.[i] C’est une maladie chronique responsable d’une importante altération de la qualité de vie, malgré un support nutritionnel, l’apport d’extraits pancréatiques, une kinésithérapie respiratoire pluriquotidienne, des cures répétées d’antibiotiques. Le dépistage néonatal systématique, les traitements non spécifiques et une prise en charge multidisciplinaire dans les 47 centres de ressources et de compétences de France ont permis de porter l’espérance de vie à la naissance au-delà de 35 ans. Malgré la transplantation pulmonaire, voire multi-organes, la maladie reste la cause d’une mortalité parfois précoce.[ii]

 

Un gène codant pour une protéine nécessaire à l’activité Cystic Fibrosis Transmembrane Regulator (CFTR), présente dans des canaux ioniques, a été découvert. Cette protéine permet l’excrétion épithéliale des ions chlore et bicarbonate et la sécrétion d’un mucus fluide.[iii] La mutation de ce gène provoque une mucoviscidose par absence ou déficience de cette protéine. Plus de 2.000 mutations ont été décrites, classées de I à VI selon le type de déficit de la protéine CFTR.[iv] L’impact clinique est déterminé par la classe de mutations et la présence d’un ou deux allèles identiques. Il est sévère dans le cas de la mutation F508del, caractérisée par une activité CFTR absente (>80% des patients français), ou lors d’une des rares mutations caractérisées par une activité CFTR résiduelle.

 

Divers modificateurs du canal CFTR ont été développés et testés par des essais cliniques contre placebo, d’abord chez des patients de plus de 12 ans, puis chez des enfants âgés de 6 mois à 11 ans, tandis que la pharmacodynamie et la tolérance de ces molécules étaient vérifiées entre les âges de 6 mois à 5 ans et de 4 à 6 mois.[v]

 

Le premier modificateur testé a été un potentiateur de la fonction CFTR résiduelle : ivacaftor (Kalydeco®).[vi] Puis, ont été testées des combinaisons d’un potentiateur et de correcteurs de la fonction CFTR chez des patients homozygotes pour la mutation F508del (caractérisée par l’absence de protéine CFTR) ou hétérozygotes (F508del/mutation avec activité résiduelle), comme lumacaftor + ivacaftor (Orkambi®)[vii] ou tezacaftor + ivacaftor (Symkevi®).[viii] Enfin, une triple association d’ivacaftor + tezacaftor + elexacaftor (Kaftrio®) a démontré une excellente efficacité chez les patients homozygotes pour la délétion F508del sur la réduction du chlore sudoral, l’amélioration de la fonction respiratoire (VEMS), la diminution des exacerbations pulmonaires annuelles et la consommation d’antibiotiques.[ix],[x]

 

Kaftrio® vient d’obtenir récemment l’autorisation de mise sur le marché en France pour les patients porteurs de la mutation F508del. D’autres mutations sont susceptibles de répondre, en fonction des résultats de l’étude des cellules qui ont été prélevées sur les patients afin de choisir la meilleure option thérapeutique.[xi]

 

Il est encourageant d’entendre les patients témoigner de l’amélioration significative de leur qualité de vie et de constater que le nombre de transplantations pulmonaires annuelles pour mucoviscidose a diminué en France de 72-80 à 33 (-57%) entre 2018 et 2020, sans augmentation des décès en l’absence de transplantation.[xii]

 

L’Académie nationale de médecine a jugé important de faire connaitre ces progrès thérapeutiques majeurs dans la lutte contre la mucoviscidose. Elle souligne que :

– Les perspectives diagnostiques et thérapeutiques ouvertes dans la mucoviscidose permettent d’envisager désormais une véritable stratégie de médecine personnalisée ;

– Le pronostic de cette maladie est susceptible de s’améliorer de manière importante si ces nouveaux traitements démontrent, sur le long-terme, le maintien de leur efficacité sur la survie et la qualité de la vie, ainsi que leur tolérance.

 

Références

 

(*) Communiqué de la Plateforme de Communication Rapide de l’Académie validé par les membres du Conseil d’administration le 4 octobre 2021.

[i]       Shteinberg M, et al. Lancet 2021 ; 397:2195-211.

[ii]       www.registredelamuco.org

[iii]      Kerem B, et al. Science 1989; 245:1073-80.

[iv]      Zielenski J, et al. Annu Rev Genet 1995; 29:777-807.

[v]      https://www.cff.org/Trials/Pipeline

[vi]      Ramsey BW, et al. N Engl J Med 2011; 365(18):1663-72.

[vii]     Wainwright CE, et al. N Engl J Med 2015; 373(3):220-31.

[viii]    Taylor-Cousar JL, et al. N Engl J Med 2017; 377(21):2013-23.

[ix]      Middleton PG, et al. N Engl J Med 2019; 391(19):1809-19.

[x]       Heijerman HGM, et al. Lancet 2019; 394:1940-8.

[xi]    Pranke et al. Am J Respir Crit Care Med 2019; 199(1):123-126.

[xii]     Burgel PR, et al. Am J Respir Crit Care Med 2021; 204(1):64-73.