Publié le 1 janvier 2011
Autre

AutrePrésentation par Jean-Didier Vincent

 

carnage animalier, n’hésitant pas à greffer des testicules de condamnés à mort dans le scrotum de clients fortunés ou à transfuser des cadavres pour démontrer que la mort tissulaire pouvait être différée. Ridicule est le docteur Edgar Bertillon, inventeur de l’« ethnocentrisme » qui, pendant la première guerre mondiale, prétend démontrer la supériorité des français sur les allemands en comparant la quantité et la qualité des urines, le poids et l’odeur des selles, allant jusqu’à dire que les émanations des immondices stercoraires accumulées par les allemands dans leur retraite contrariait la marche de nos soldats tant elles étaient fortes et incommodantes. Scandaleuse est la catastrophe des « bébés thalidomides » dont l’implacable récit montre la puissance et le cynisme des grands laboratoires et n’est pas sans rappeler, toute proportion gardée, des faits très récents. Scandaleuse enfin est « l’affaire du sang contaminé », parfaitement décrite dans son déroulement tragique, associant idéologie, insuffisance, lâcheté et logique économique et dont les auteurs ont presque tous été décorés de la Légion d’honneur.

Ainsi, les auteurs ont choisi de mettre en scène tantôt des individus dont les noms nous sont familiers, et on est alors heureux de les redécouvrir et de parfaire nos connaissances, tantôt des individus moins connus ou plus ou moins oubliés dont on est heureux de faire ou de refaire la connaissance.

Tous ces personnages ont quelques traits communs. Ils ont un sens aigu de l’observation et une grande capacité de déduction. Ils ont su exploiter la chance et saisir les coïncidences heureuses. Ils sont opiniâtres, et il leur a fallu attendre que la société s’approprie leur découverte. Ils sont d’une curiosité insatiable, et n’hésitent pas à mettre leur vie en danger tel Brown-Sequard ingurgitant de petites quantités de déjections de cholériques lors d’une épidémie à l’île Maurice. Ils ont parfois un caractère difficile, ombrageux. Les exemples ne manquent pas : Landsteiner, Semmelweis, Alexis Carrel, Hansen. Mais il faut bien reconnaître que les meilleurs d’entre eux se sont heurtés à l’incompréhension, à la méfiance, à la conformité, à l’obscurantisme, à la jalousie, et l’Académie nationale de médecine ne sort pas indemne de l’aventure. Ils sont parfois suspicieux et peu doués pour la communication, rechignant à publier leurs résultats, ce qui, même en d’autre temps, ne facilitait pas la diffusion de leur découverte. Les uns sont des visionnaires désintéressés, d’autres des êtres ambitieux et âpres au gain. Ils n’ont pas toujours cherché la gloire mais certains l’ont obtenu de leur vivant.

À vrai dire, on ne quitte jamais tout à fait ce livre passionnant où foisonnent les anecdotes insolites ; on y retourne pour relire tel ou tel passage, telle ou telle histoire.

Je ne doute pas que vous trouviez autant de plaisir à le lire que j’en ai eu moi-même.

Roger Henrion MEULDERS M. — William James, penser libre , Paris, Hermann, 2010, 349 p.

J’ai l’honneur de présenter devant notre compagnie le dernier ouvrage de notre confrère Michel Meulders intitulé tout simplement « William James, penser libre ».