Résumé
Les cancers rares dont définis généralement par une incidence inférieure à 6/100 000 nouveaux cas par an. Ils concernent environ 20 % des cancers au sein de l’union Européenne, mais près de 30 % des décès liés aux cancers. Dans cet article, nous résumons les difficultés spécifiques de la prise en charge ce groupe de cancers, mais également les enjeux qu’ils représentent. Les difficultés portent sur l’identification précise de ces cancers et les errances dans la prise en charge diagnostique et thérapeutique initiale du fait de leur rareté. Cette rareté rend également délicat la réalisation d’essais cliniques, avec un recrutement lent et le faible intérêt suscité par ces maladies auprès de l’industrie pharmaceutique jusqu’à récemment. Cependant les progrès dans la caractérisation biologique de tous les cancers induit une recomposition des classifications nosologiques, où les cancers dits fréquents s’avèrent en fait le plus souvent rassembler une myriade de maladies distinctes sur le plan moléculaire, et donc de cancers rares. Traiter le problème des cancers rares devient ainsi l’enjeu général de la cancérologie pour les années à venir. Le développement du diagnostic moléculaire, de nouvelles méthodologies statistiques pour évaluer l’apport thérapeutique des médicaments innovants, l’intégration des associations de patients dans le processus de recherche, et les exigences de qualité et d’innovation à toutes les étapes de la recherche, ont permis au cours des années récentes de propulser ces cancers rares au premier plan de la scène, ou ils ont pu devenir pour certains, par exemple les GIST, des paradigmes de développement de nouveaux médicaments sur de petits sous-groupes de cancers fréquents, tels que les cancers bronchiques. Pour ces raisons, les enjeux de la recherche clinique sur les tumeurs rares sont en fait les enjeux de l’oncologie des décennies à venir. Ceux-ci requièrent notamment une intégration internationale des activités de recherche clinique, dans les pays Européens et sans doute au-delà.
Summary
Rare cancers are defined by an annual incidence below 6/100 000 new cases. According to this definition, 20 % of malignancies in the European Union are rare cancers. These cancers are associated with considerable excess mortality, as they account for close to 30 % of all cancer deaths within the E.U. This article reviews the specific management challenges pertaining to this group of neoplastic diseases, but also the research opportunities they represent for the entire field of oncology. The principal challenges are related to their low incidence: inaccurate diagnosis is frequent (up to 30 % of cases), and initial management does always not follow clinical practice guidelines because of their limited diffusion in the medical community. These patients are also under-represented in clinical trials, because of the rarity of dedicated clinical trials in both the academic and industrial settings. The situation has evolved in recent years, however, because it is increasingly recognized that rare cancers offer major opportunities for clinical development. Indeed, the underlying molecular alterations are easier to identify than those responsible for frequent cancers. Other advances include the development of novel statistical methods, the unification of academic and industrial clinical research projects, the integration of patient advocacy groups in research programs, and importantly, paradigm shifts such as the development of tyrosine kinase inhibitors for GIST and other connective tissue tumors. With the increasing fragmentation of frequent tumors into subsets of rare tumors, as exemplified by lung cancer, many frequent tumors will need to be managed with approaches similar to those developed in recent years for rare cancers. In the age of routine molecular biology, the challenges of clinical research on rare tumors are thus becoming the challenges of all clinical research in oncology. This will required extensive multinational collaboration within the European Union and beyond.
Bull. Acad. Natle Méd., 2013, 197, no 1, 103-122, séance du 8 janvier 2013