Résumé
Les organismes vivants ont développé des mécanismes leur permettant de s’adapter à leur environnement chimique. Chez les mammifères et notamment chez l’homme, cette protection passe par la reconnaissance des xénobiotiques par des récepteurs dédiés et l’induction de la voie de métabolisme des xénobiotiques. Étant donnée la très grande diversité de l’exposome chimique (des dizaines de milliers de substances différentes dans l’environnement), les protéines impliquées dans la reconnaissance et le métabolisme des xénobiotiques ont chacune la capacité de lier et de métaboliser des centaines de substances. Cette situation de faible spécificité est à l’origine de la toxicité que ce système provoque : intermédiaires réactifs, production d’espèces réactives de l’oxygène, découplage entre les profils de liaison des récepteurs et ceux des enzymes, etc. Par ailleurs, le récepteur de la dioxine appelé AhR (un des 3 ou 4 récepteurs des xénobiotiques) a aussi d’autres fonctions associées à sa capacité de reconnaître des ligands endogènes, du microbiote intestinal ou des aliments. Cette propriété conduit à un risque de compétition entre les différents types de ligands et donc à une toxicité. Enfin, concernant les xénobiotiques qui ne peuvent pas être métabolisés (comme la dioxine), ils peuvent être stockés dans le tissu adipeux ce qui protège les autres tissus. En revanche ce tissu devient une source de polluants à bas bruit et chronique. Tout se passe comme si les mammifères ont développé un système qui les protège d’une exposition aiguë et massive aux polluants chimiques au prix d’une toxicité au long cours.
Summary
Living organisms have developed mechanisms allowing them to adapt to their chemical environment. In mammals and particularly in humans, this protection involves the recognition of xenobiotics by dedicated receptors and the induction of the xenobiotic metabolism pathway. Given the great diversity of the chemical exposome (tens of thousands of different substances in the environment), each of the proteins involved in the recognition and metabolism of xenobiotics have the capacity to bind and metabolize hundreds of substances. This low specificity may account for the toxicity that this system causes: reactive intermediates, production of reactive oxygen species, decoupling between the binding profiles of receptors and those of enzymes, etc. Furthermore, the dioxin receptor called AhR (one of the 3 or 4 xenobiotic receptors) also has other functions associated with its ability to bind endogenous ligands as well as intestinal microbiota metabolites or foods. This property leads to a risk of competition between the different types of ligands and therefore to toxicity. Finally, regarding xenobiotics that cannot be metabolized (like dioxin), they can be stored in adipose tissue, which in fact protects other tissues in case of acute exposure. On the other hand, this tissue becomes a low-noise and chronic source of pollutants. It is as if mammals have developed a system that protects them from acute and massive exposure to chemical pollutants at the cost of long-term toxicity.
Accès sur le site Science Direct : https://doi.org/10.1016/j.banm.2023.11.013
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(b) Service de biochimie métabolomique et protéomique, hôpital Necker-Enfants–malades, Paris, France
Bull Acad Natl Med 2024;208:193-198. Doi : 10.1016/j.banm.2023.11.013