Communication scientifique
Séance du 21 février 2012

Les démences vasculaires

MOTS-CLÉS : accident vasculaire cérébral. cadasil. déclin cognitif. démence. leucoencéphalopathies. maladie d’alzheimer
Vascular dementia
KEY-WORDS : alzhiemer disease. cadasil. dementia. dementia, vascular. leukoencephalopathies. stroke

Marie-Germaine Bousser *, Hugues Chabriat *

Résumé

La conjonction d’une augmentation importante de la prévalence des démences avec l’âge et du vieillissement de la population laissent présager une véritable épidémie de démences dans les pays industrialisés. La prévalence actuelle des démences chez les sujets de plus de 65 ans approche 7 % dont les deux-tiers pour la maladie d’Alzheimer et un tiers pour les démences vasculaires. Le terme de démence vasculaire fait référence à un déclin cognitif sévère de cause vasculaire, mais il s’agit en fait d’un syndrome hétérogène aux nombreuses variétés étiopathogéniques : lésions ischémiques sous-corticales multiples, accident vasculaire céré- bral (AVC) siégeant en zone cognitive stratégique, infarctus corticaux multiples, hypoperfusion cérébrale chronique, angiopathie amyloïde… Classiquement, les démences vasculaires sont de survenue ou d’aggravation brutale après un ou plusieurs AVC et comportent un déclin cognitif de type sous-cortical, s’opposant ainsi à la démence corticale progressive de la maladie d’Alzheimer. Cependant, des travaux récents incluant notamment les données de l’imagerie, ont montré que cette opposition classique n’avait plus lieu d’être, les démences étant le plus souvent mixtes, avec une synergie entre les lésions de la maladie d’Alzheimer et au minimum des facteurs de risque vasculaire, puis des lésions cérébrales silencieuses et,au maximum des AVC cliniquement parlants. Il en résulte que, en l’absence actuelle de traitement préventif de la maladie d’Alzheimer, la meilleure prévention de la démence en général est la prévention des AVC, basée essentiellement sur le traitement précoce des facteurs de risque vasculaires, notamment de l’hypertension artérielle.

Summary

The increasing prevalence of dementia with age, combined with the rapid aging of the population, heralds an oncoming epidemic of dementia in industrialized countries. The current prevalence of dementia over 65 years of age is close to 7 % (2/3 Alzheimer’s disease and 1/3 vascular dementia). Vascular dementia refers to a severe cognitive decline due to brain lesions of vascular origin. It is in fact a heterogeneous syndrome with multiple etiopathogenic varieties such as subcortical small artery disease, isolated strategic stroke, multiple infarcts, chronic cerebral hypoperfusion, and amyloid angiopathy. Vascular dementia classically occurs or worsens abruptly and has a subcortical pattern of cognitive impairment, contrasting with the gradual cortical dementia of Alzheimer’s disease. Recent data, including the results of neuro-imaging studies, show however that this classical opposition is no longer justified and that most dementias are ‘‘ mixed ’’, with a synergy between Alzheimer’s disease lesions and vascular risk factors going from, silent brain lesions of vascular origin, to at most, clinically patent strokes. The main therapeutic implication is that, in the absence of effective methods for Alzheimer’s disease prevention, the best way to prevent dementia in general is to prevent strokes, based primarily on early treatment of vascular risk factors, particularly hypertension.

INTRODUCTION

La conjonction d’une augmentation importante de la prévalence des démences avec l’âge, passant d’environ 5 % après 65 ans à 30 % après 80 ans, et du vieillissement de la population, avec un doublement du nombre de sujets de plus de 60 ans entre 2000 et 2025 dans les pays industrialisés laisse présager une véritable épidémie de démence [1]. Quels que soient les critères adoptés pour le diagnostic de démence dégénérative ou vasculaire, toutes les études s’accordent pour reconnaître en la maladie d’Alzheimer (MA) la première cause de démence suivie de près par les démences vasculaires (DV). Ainsi, dans une étude européenne rassemblant onze cohortes en population de plus de 65 ans, la prévalence globale des démences était de 6.4 % dont deux tiers pour la MA et un tiers pour les DV [2]. Dans la Cardiovascular Health Study, l’incidence ajustée sur l’âge était respectivement de 19,2 et 14,6 pour mille habitants par an [3].

Les concepts de démence dégénérative type Alzheimer et de démence vasculaire pourraient paraître simples, la perte neuronale qui sous-tend la démence étant primitive dans le premier cas et secondaire à une atteinte vasculaire dans le deuxième. Ce serait toutefois oublier que d’une part affections dégénératives et affections vasculaires cérébrales sont toutes deux à la fois fréquentes et liées à l’âge, donc souvent associées, et que, d’autre part, les neurones, les cellules gliales et les vaisseaux cérébraux — collectivement réunis au niveau de l’unité neuro-vasculaire — sont indissociables. En effet, cette unité neuro-vasculaire, qui est impliquée dans le maintien de l’homéostasie au niveau microenvironnement au sein du tissu cérébral apparaît profondément altérée dans sa structure et sa fonction, non seulement dans les DV mais aussi dans la MA [4-6]. Il résulte de ces deux facteurs une intrication entre altérations neuronales primitives et secondaires à l’atteinte vasculaire aboutissant à une démence qualifiée de « mixte », beaucoup plus fréquente, notamment chez les sujets âgés, que les formes dites « pures » de MA et de DV.

Outre la reconnaissance de l’importance de cette intrication neurones — vaisseaux et de ses conséquences en terme notamment de diagnostic et de traitement, une autre évolution majeure récente concerne l’élargissement du concept de DV à celui de déficit cognitif vasculaire (Vascular cognitif impairment) [7], réunissant l’atteinte cognitive mineure (« Mild Cognitive Impairment vasculaire » : MCIV) [8] et les formes les plus sévères de démence. Ce concept de déficit cognitif vasculaire avec ses deux principaux degrés de sévérité, le MCIV et la DV, a été récemment repris et adopté par un groupe de travail international sous l’égide de l’American Heart Association (AHA), de l’American Stroke Association (ASA) et de l’American Academy of Neurology [1] CRITERES DIAGNOSTIQUES DES DEFICITS COGNITIFS VASCULAIRES

Le diagnostic de déficit cognitif vasculaire dont la forme la plus sévère est la DV est en théorie facile, reposant sur l’existence d’une altération cognitive secondaire à une atteinte cérébrale d’origine vasculaire. En pratique toutefois, ce diagnostic est souvent difficile et a donné lieu, depuis l’individualisation il y a une quarante d’années de la démence par infarctus multiples [9], à de nombreuses séries de critères diagnostiques qui ne seront pas détaillées ici car très bien résumées dans certaines revues générales récentes [1, 10, 11]. Chaque série de critères possède sa propre définition aussi bien de l’altération cognitive (selon sa sévérité, son type etc.), que de l’atteinte cérébrale d’origine vasculaire (signes cliniques d’accident vasculaire céré- bral (AVC), signes d’imagerie au scanner ou à l’IRM, signes anatomiques etc.) ou que du degré de plausibilité ou de certitude de la relation de cause à effet. Le recours à des critères diagnostiques différents rend compte de l’extrême disparité des données publiées sur les DV et des incessantes controverses quant à la surestimation ou sous-estimation de leur fréquence [12].

Les auteurs de l’AHA/ASA scientific statement [1] reprennent les critères habituellement admis de démence et de MCI (tableau 1) mais sont extrêmement prudents concernant l’établissement d’une relation de causalité entre l’atteinte vasculaire et l’altération cognitive, ne reconnaissant que des déficits cognitifs vasculaires « probables » ou « possibles », et ajoutant simplement une catégorie de MCIV « instable » lorsque les troubles cognitifs régressent (tableau 2). Les liens de causalité entre la pathologie vasculaire cérébrale et le déficit cognitif vasculaire, qui sont les mêmes pour les DV et le MCIV — reposent à la fois sur des critères négatifs tels que l’absence de déclin cognitif progressif suggestif d’affection neuro-dégénérative, et sur des critères positifs tels que la présence de lésions cérébrales d’origine vasculaire visibles en neuro-imagerie (critère obligatoire), la survenue d’AVC cliniquement définis, ou encore la présence de maladies des petites artères sous-corticales. La diversité de ces critères radiologiques et cliniques montre que, même dans sa forme la plus sévère de démence, le déficit cognitif vasculaire n’est pas une entité homogène mais un vaste ensemble syndromique aux nombreuses formes étio-pathogéniques.

VARIETES ETIOPATHOGENIQUES DE DEMENCE VASCULAIRE

Les données cliniques, évolutives, radiologiques, génétiques, et anatomopathologiques permettent d’individualiser plusieurs variétés étiopathogéniques de DV qui ont en commun la présence d’une démence définie selon les critères figurant au tableau 1 et une relation de causalité « probable » telle que définie au tableau 2.

De nombreuses classifications des DV ont été proposées (dont aucune n’est satisfaisante) selon la porte d’entrée retenue : la lésion cérébrale (corticale ou souscorticale, unique ou multiples, ischémique ou hémorragique etc.), le mode d’installation de la démence (brutal ou progressif), ou la nature de la pathologie vasculaire sous-jacente (maladie des petites artères cérébrales, pathologie des grosses artères, pathologie inflammatoire etc.).

DÉMENCE PAR LÉSIONS SOUS-CORTICALES MULTIPLES

Le concept de démence vasculaire ischémique sous-corticale et ses limites

La démence par lésions sous-corticales multiples correspond essentiellement à ce qui a été appelé « démence vasculaire ischémique sous-corticale » [13]. La démence est caractérisée au plan neuropsychologique par la précocité et la sévérité de l’atteinte des fonctions exécutives : attention, planification, activités séquentielles, mémoire de travail, rapidité des processus mentaux, capacité d’abstraction, qui peuvent être évaluées par divers tests ou échelles telles que le Trail making B, la VASCOG, l’EXIT 25 etc. [13-15]. Une apathie et des troubles du comportement émotionnel sont fréquents avant que ne s’installe le déficit cognitif [16]. Ces troubles neuropsychologiques peuvent s’aggraver progressivement ou par à coups et rester longtemps isolés mais, au stade de démence, l’atteinte physique est constante, s’aggravant au fur et à mesure de la survenue des infarctus cérébraux et se manifestant par des troubles de la marche et de l’équilibre précoces, puis des troubles sphinctériens, des déficits moteurs, un syndrome pseudo-bulbaire aboutissant au maximum à un état grabataire avec dépendance totale [13].

Les lésions cérébrales responsables de la DV ischémique sous-corticale comportent stricto sensu une atteinte diffuse de la substance blanche souvent qualifiée de leucoaraïose [17] apparaissant à l’IRM en hyposignal sur les séquences T1 et en hypersignal sur les séquences T2, et des infarctus sous-corticaux, souvent de petite taille (lacunes). Les progrès de l’imagerie et des travaux neuropathologiques récents ont montré la fréquence des lésions hémorragiques associées, souvent sous forme de microsaignements décelés en séquence pondérées en écho de gradient T2, et d’une atteinte corticale secondaire [18, 19] touchant notamment la région temporale interne [20] et s’acccompagnant d’une dénervation cholinergique [18] et d’une apoptose des neurones corticaux [21].

Le mécanisme exact de la démence n’est pas connu, mais les données obtenues dans Cadasil (Cerebral Autosomal Dominant Arteriopathy with Subcortical Infarcts and Leucoencephalopathy) montrant une corrélation étroite entre le déclin cognitif et la perte neuronale corticale suggèrent que ce ne sont pas les lésions sous-corticales elles-mêmes qui provoquent la démence, mais qu’elles le font par l’intermédiaire de la perte neuronale corticale secondaire à l’altération des circuits cortico-souscorticaux reliant les noyaux gris de la base au cortex notamment frontal et temporal interne [18, 19, 21].

Variétés étiologiques

Cadasil , maladie des petites artères cérébrales de transmission autosomique dominante due à des mutations du gène Notch 3, [22, 23] est une affection rare mais qui constitue le modèle le plus pur de DV et l’archétype de la DV ischémique souscorticale avec l’importance et la précocité de l’apathie et de l’atteinte dysexécutive, l’aggravation progressive ou par à coups de la démence toujours associée en fin d’évolution à des signes physiques, et la présence en imagerie d’une atteinte de la substance blanche et d’infarctus sous-corticaux. La fréquence de la démence dans Cadasil est globalement de 30 % mais atteint 60 % après 60 ans et plus de 80 % chez les patients avant le décès qui survient en moyenne vingt à trente ans après les premiers infarctus cérébraux [24-26]. Cadasil se caractérise en outre cliniquement par la présence dans un tiers des cas d’une migraine avec aura qui demeure le seul symptome pendant dix à quinze ans, dans 20 % des cas de troubles de l’humeur, le plus souvent de type dépressif, et dans 5 à 10 % des cas de crises d’épilepsie. En IRM, les microsaignements sont présents dans 25 à 70 % des cas mais sans spécificité, alors que la fréquence des anomalies de signal dans les capsules externes et les pôles temporaux (deux tiers des cas) constituent une particularité de Cadasil [27]. Une étude en IRM — 7 T a montré en outre la présence de micro-infarctus intracorticaux, illustrant à nouveau le caractère simpliste — et illusoire — de la notion de DV par ischémie sous-corticale [28]. Le diagnostic de Cadasil repose sur la détection des mutations du gène Notch 3 qui dépassent actuellement la centaine : aisé dans les formes familiales, il est beaucoup plus difficile dans les formes sporadiques dont la fréquence n’est pas connue et probablement sous estimée. Il doit être envisagé devant tout tableau de syndrome dysexécutif ou de déclin cognitif d’allure « isché- mique sous cortical » chez un sujet jeune, ou en l’absence d’hypertension artérielle ou s’il y a eu précession pendant des années par une migraine avec aura.

D’autres maladies héréditaires des petites artères cérébrales — beaucoup plus rares que Cadasil, peuvent être responsables de DV [27] : les unes ressemblent à Cadasil et n’ont pas encore de gêne identifié, d’autres en diffèrent et ont un gêne identifié :

 

HTRA1 dans Cadasil [29], TREX1 [30] dans la vasculopathie rétinienne autosomique dominante avec leucodystrophie (ou syndrome HERNS), COL4 A1 [31] dans la leucoencéphalopathie avec hémorragies cérébrales, et tortuosités artériolaires rétiniennes qui comporte une atteinte cognitive dans la moitié des cas [31].

La maladie des petites artères cérébrales liée à l’hypertension artérielle (HTA ) est caractérisée histologiquement par des lésions de lipohyalinose, d’artériolosclérose et parfois de nécrose fibrinoïde dans la paroi des artérioles perforantes profondes [27].

Elle est la principale cause d’hémorragies cérébrales et une cause majeure d’infarctus cérébraux le plus souvent de topographie sous-corticale. Avant même le stade d’AVC, les lésions parenchymateuses sous-corticales secondaires à l’atteinte des petites artères : hypersignaux de la substance blanche, microsaignements et infarctus dits « silencieux » sont des facteurs de risque de troubles cognitifs touchant notamment les fonctions exécutives et visuomotrices [32-34]. Au maximum peut s’installer une démence parfois qualifiée de maladie de Binswanger [35] alors qu’il est maintenant bien établi que les signes décrits par Binswanger dans l’ « encephalitis subcorticalis » : démence, infarctus sous-corticaux récidivants, crise d’épilepsie et raréfaction majeure de la substance blanche ne sont pas spécifiques de l’artériosclérose de l’HTA et peuvent se voir dans toutes les maladies chroniques sévères des petites artères cérébrales. Le terme de maladie de Binswanger n’est d’ailleurs plus retenu dans les revues générales récentes [1, 10, 11]. Il n’en demeure pas moins que l’HTA est un grand pourvoyeur de déclin cognitif, de DV ischémique sous-corticale et d’autres variétés de DIV puisqu’elle favorise la majorité des autres causes d’AVC, athérosclérose et cardiopathies en particulier, ce qui a des implications thérapeutiques majeures en terme de prévention.

DÉMENCES PAR AVC UNIQUE EN ZONE « STRATÉGIQUE »

Ce concept classique est défini par l’apparition brutale d’une démence lors d’un infarctus ou d’une hémorragie situés dans une zone « stratégique » pour la cognition telle que, au niveau cortical, le gyrus angulaire, la région temporo-inféromésiale et la région frontale mésiale, et au niveau sous-cortical le thalamus antérieur et dorso-médian, le noyau caudé et le genou de la capsule interne gauche [36, 37].

Cette démence s’inscrit parmi les démences dites « post-AVC » et elle constitue l’une des rares variétés de DV susceptibles de régresser [36]. Elle est rare et son individualisation est parfois remise en cause pour plusieurs raisons : tout d’abord, le terme même de démence peut être jugé abusif pour qualifier les syndromes neuropsychologiques plus ou moins systématisés provoqués par les lésions de ces zones « straté- giques », tels que par exemple le syndrome associant aphasie, désorientation visuospatiale, agraphie et troubles mnésiques observé dans les infarctus du gyrus angulaire [10, 11]. Par ailleurs, la plupart des observations sont anciennes, souvent sans IRM, sans données sur l’état cognitif avant l’AVC et sans suivi au long cours, ne permettant donc pas d’exclure la présence d’autres lésions cérébrales vasculaires ou même une pathologie dégénérative devenue soudainement patente à l’occasion de l’AVC [36]. Néanmoins, certaines observations de démence apparue lors d’infarctus thalamo-sous-thalamiques paramédians bi-latéraux [38] ou d’hémorragies bithalamiques secondaires à des thromboses du système veineux profond [39] correspondant bien à ce concept. Plus que de la lésion thalamique elle-même, la démence résulte probablement essentiellement de la désafférentation corticale secondaire, objectivée en TEP par une réduction diffuse de l’activité métabolique corticale [38].

DÉMENCES PAR INFARCTUS MULTIPLES

Cette variété de DV, la « multi-infarct dementia » d’Hachinski [9] a longtemps été considérée comme la variété la plus typique et la plus fréquente de DV [40, 41]. Les infarctus responsables étaient bilatéraux et siégeaient préférentiellement dans les lobes temporaux et frontaux ainsi que dans les noyaux gris. Ils étaient généralement de grande taille, secondaires à une pathologie des grosses artères et se manifestaient donc essentiellement par des déficits focaux brutaux (hémiplégie, aphasie).

L’atteinte cognitive était au second plan, s’aggravant par paliers à chaque nouvel infarctus et devenant de plus en plus sévère au fur et à mesure que le volume de tissu infarci augmentait [41]. Sans nier le fait que de multiples infarctus puissent aboutir à une démence, diverses études plus récentes ont montré que les deux facteurs déterminants de la survenue d’une démence étaient non pas la taille, mais la localisation des infarctus dans les zones stratégiques pour la cognition et la présence de lésions de MA associées [42]. Cette variété de DV est donc beaucoup plus souvent une démence mixte que vasculaire pure [42]. De plus, l’existence de multiples micro-infarctus non visibles en imagerie standard pourrait être impliquée dans la survenue de la démence indépendamment de la destruction tissulaire liée aux macro-infarctus [43].

A côté des deux grandes causes d’infarctus cérébraux que sont l’athérothrombose et les embolies d’origine cardiaque, toutes les causes vasculaires, hématologiques ou générales d’infarctus cérébraux multiples ou récidivants peuvent être à l’origine de ce type de démence (tableau 3) qui peut même survenir chez le sujet jeune, par exemple en cas de drépanocytose ou de syndrome de Moya-Moya. L’installation rapide du syndrome démentiel doit orienter vers une vascularite, infectieuse ou inflammatoire, cause rare de démence à reconnaître et à traiter d’urgence car susceptible de régresser.

DÉMENCES PAR HYPOPERFUSION CORTICALE CHRONIQUE

Les situations d’hypoperfusion corticale chronique sans infarctus cérébral, même de jonction, sont très rares et il est exceptionnel qu’elles se manifestent par une démence. Elles sont cependant importantes à identifier car potentiellement curables.

Des observations ont ainsi été rapportées de démence régressive après pose de pace-maker pour bloc auriculo-ventriculaire [44], anastomose extra-intracrânienne pour occlusion carotide bilatérale [45] et après traitement d’une fistule artérioveineuse durale permettant de lever l’hypertension veineuse durale responsable de l’hypoperfusion chronique [46]. En dehors de ces situations extrêmes, la fibrillation atriale et l’insuffisance cardiaque systolique constituent des facteurs de risque de déclin cognitif, indépendamment de la survenue d’infarctus cérébraux [1].

LA DÉMENCE PAR ANGIOPATHIE AMYLOÏDE

L’angiopathie amyloïde est une maladie des petites artères cérébrales, beaucoup plus souvent sporadique qu’héréditaire, qui est associée une démence dans 10 à 30 % des cas [27]. L’atteinte artérielle diffère fondamentalement de celle des affections précédentes car elle concerne essentiellement les vaisseaux corticaux et leptoméningés dont les parois sont infiltrées et fragilisées par l’accumulation de dépôts amyloï- des, composés le plus souvent de protéines Aβ. Il en résulte des lésions essentiellement hémorragiques sous la forme de microsaignements multiples et d’hémorragies corticales récidivantes qui sont à la base des critères diagnostiques dits de Boston [47, 48]. L’angiopathie amyloïde sporadique est très fréquente chez les sujets âgés, et est présente dans 10 à 30 % des cerveaux prélevés lors d’autopsies systématiques et dans 80 à 100 % en cas de MA [49]. La démence est donc multifactorielle, liée surtout à l’association de lésions hémorragiques corticales et de lésions de MA mais aussi à la présence fréquente de micro-infarctus, d’atteinte de la substance blanche, et parfois de vascularite associée [50]. En l’absence d’histologie, le diagnostic est suspecté chez le sujet âgé lorsqu’un déficit cognitif apparaît et s’aggrave par à coups lors d’hémorragies corticales récidivantes en présence de nombreux microsaignements corticaux à l’IRM en écho de gradient [47, 48]. L’imagerie en tomographie par émission de positons (TEP) utilisant le ligand amyloïde PIB visualise les dépôts amyloïdes sans cependant pouvoir différencier vaisseaux et parenchyme [51, 52].

L’exemple de l’angiopathie amyloïde illustre bien le caractère arbitraire et réducteur de toute classification des DV car elle aurait pu aussi bien figurer parmi les DV par lésions corticales multiples ou parmi les démences mixtes.

DÉMENCES MIXTES

Bien qu’il n’existe pas de définition unanimement admise des démences mixtes et qu’elles ne figurent pas en tant que telles dans le récent « scientific statement » américain, cette dénomination s’applique lorsqu’existent à la fois des lésions céré- brales d’origine vasculaire et des lésions de MA [10-12]. Les deux pathologies étant liées à l’âge, cette éventualité est beaucoup plus fréquente que celle des DV et MA pures, et comporte des contributions variables des deux pathologies, avec cependant un effet synergique largement démontré [1, 10-12, 42, 53]. Ainsi, dans la célèbre étude des religieuses américaines [54], la fréquence de la démence était de 57 % lorsqu’il n’y avait pas d’infarctus cérébral à l’autopsie et de 88 % en présence d’un infarctus. Dans une étude récente, à charge identique de lésions de MA, la présence d’infarctus cérébral multiplie par cinq le risque de démence [55]. Même lorsque chacune des deux pathologies n’est pas assez évoluée pour provoquer à elle seule une démence, leur association peut y aboutir [53]. Ainsi, la survenue d’un infarctus cérébral peut elle raccourcir la période pré-clinique de développement des lésions de MA, et abaisser l’âge de survenue des signes cliniques de la maladie [12, 53]. Les relations entre les deux pathologies sont rendues encore plus complexes par le fait que l’atrophie hippocampique caractéristique de la MA peut aussi être d’origine vasculaire [56]. L’hypothèse a même été soulevée que l’APP soit produite ou forme des dépôts en réponse à une agression vasculaire [57]. Quelle que soit la part qui revient aux facteurs vasculaires, leur reconnaissance est importante en raison de leur caractère éventuellement modifiable.

DÉMENCES POST-AVC

Le terme de démence post AVC s’applique à toutes les situations où, après un AVC, une démence est constatée, quelles qu’en soient la variété étiopathogénique et l’évolution. Ce terme fait référence à une situation clinique dont la fréquence va de 6 % à plus de 30 % selon les critères diagnostiques utilisés, l’existence éventuelle d’une démence avant l’AVC, le caractère princeps ou récurrent de l’AVC, et le type d’étude [1, 36, 58-60]. Dans une méta-analyse de trente études dont vingt-deux hospitalières et huit en population, la fréquence de la démence post-AVC à trois mois variait de 7,4 % (4,8-10) dans les études conduites en population chez des patients ayant un premier AVC et n’ayant pas de démence préalable, à 41,3 % (29,6 — 53,1) dans les études hospitalières chez des patients ayant une récidive d’AVC et sans avoir exclu l’existence d’une démence préalable [58]. Globalement, 10 % des patients avaient déjà une démence pré-AVC dont les principaux facteurs de risque, l’atrophie médiale temporale, le sexe féminin, et une histoire familiale de démence suggèrent qu’il s’agissait le plus souvent d’une maladie d’Alzheimer. La fréquence de la démence de novo post-AVC est de 10 % après un premier AVC, et dépasse 30 % en cas de récidive d’AVC [58] Les facteurs de risque de démence post AVC incluent certaines caractéristiques de l’AVC lui-même telles qu’une situation en zône stratégique, un AVC de gros volume, un AVC hémorragique, ou la survenue de complications à la phase aiguë. D’autres facteurs de risque concernent le terrain : sujets âgés, faible niveau d’éducation, présence d’une fibrillation atriale ou d’un diabète. D’autres encore concernent les anomalies en IRM : présence d’infarctus silencieux, de leucoaraïose, de microsaignements, ou d’atrophie médiale temporale [36, 58-60].

Hormis le cas des AVC uniques en zone cognitive stratégique pouvant être responsables de démence régressive, toutes les autres variétés étiopathogéniques de démence post AVC comportent une atteinte cognitive d’aggravation progressive ou par à-coups dans laquelle interviennent la survenue de nouveaux AVC silencieux ou cliniquement patents, et une éventuelle maladie d’Alzheimer associée [1, 36, 59].

Ainsi, lorsque trois mois après un AVC est constaté un déclin cognitif, l’évolution ultérieure vers la démence est quasi inéluctable. Par ailleurs, l’existence d’une démence post AVC accroît le risque de décès par rapport aux AVC sans déclin cognitif ou démence [60].

La fréquence et la gravité des démences post AVC soulignent l’importance cruciale d’inclure des critères d’évaluation cognitive dans tous les essais thérapeutiques consacrés aux AVC, qu’il s’agisse d’essais préventifs, conduits à la phase aiguë ou de rééducation.

IMPLICATIONS PRATIQUES

Le diagnostic de démence vasculaire (Tableaux I et II) implique la réalisation d’une triple évaluation, des fonctions cognitives, de la neuro-imagerie cérébrale, et de l’état vasculaire du patient.

Compte tenu de la diversité des formes étiopathogéniques des démences vasculaires, il ne saurait exister un profil type d’atteinte cognitive. Les infarctus en zone straté- gique provoquent des atteintes cognitives spécifiques alors que les lésions ischémiques sous-corticales se caractérisent par une apathie, une labilité émotionnelle et une atteinte précoce des fonctions exécutives. Les démences mixtes ont souvent une atteinte de plusieurs domaines cognitifs, d’où l’importance d’utiliser une large batterie de tests neuro-psychologiques, incluant notamment une évaluation des fonctions exécutives [1, 10, 11]. L’appréciation du retentissement fonctionnel du déficit cognitif doit tenir compte de la présence éventuelle d’un syndrome dépressif associé, fréquent après AVC, et surtout du handicap physique lié aux séquelles d’AVC : troubles de la marche, troubles sphinctériens, négligence, déficit moteur, au maximum syndrome pseudo-bulbaire avec rire et pleurer spasmodiques [1, 10, 11].

L’IRM est l’examen de choix pour étudier les lésions cérébrales observées dans les diverses variétés étiopathogéniques de démence vasculaire : infarctus corticaux uniques ou multiples de grande taille, petits infarctus patents cliniquement ou silencieux, hémorragies cérébrales macro ou microscopiques, hypersignaux de la substance blanche, atrophie corticale. De nombreuses études ont montré que, même en l’absence d’AVC, la présence d’infarctus silencieux, d’hypersignaux de la substance blanche, et de micro-saignements, ainsi que le volume et la progression des hypersignaux étaient corrélés au risque de démence [1, 10, 11, 59].

Ces lésions ne sont toutefois pas spécifiques, puisque les infarctus silencieux, les hypersignaux et les micro-saignements peuvent être présents dans la maladie d’Alzheimer [1]. A l’inverse, l’atrophie hippocampique, signe précoce de maladie d’Alzheimer, peut être d’origine vasculaire, soulignant une fois de plus l’intrication des facteurs dégénératifs et vasculaires dans la pathogénie des démences [1, 61].

D’autres techniques ont été utilisées, telle que la tomographie par émission de

Tableau 1. — Critères Démence et de MCI selon l’AHA/ASA scientific statement (1) DÉMENCE 1 — Le diagnostic de démence est basé sur un déclin des fonctions cognitives par rapport à un état antérieur portant sur au moins deux domaines cognitifs et suffisamment sévère pour altérer les activités de la vie quotidienne 2 — Le diagnostic de démence est basé sur une évaluation cognitive qui doit porter sur au moins quatre domaines : fonctions exécutives, mémoire, langage, fonctions visuo-spatiales 3 — Les altérations des activités de la vie quotidienne sont indépendantes des séquelles sensorimotrices de l’évènement vasculaire cérébral.

MCI VASCULAIRE 1 — Inclut les quatre sous-types du MCI : amnésique, amnésique associé à l’atteinte d’autres domaines, atteinte d’un domaine non amnésique, atteinte de plusieurs domaines non amnésiques.

2 — La classification est basée sur une évaluation cognitive qui doit porter sur au moins quatre domaines : fonctions exécutives, mémoire, langage, fonctions visuo-spatiales et sur un déclin cognitif par rapport à un état antérieur portant sur au moins un domaine.

3 — Les activités de la vie quotidienne sont normales ou légèrement altérées indépendamment de la présence de symptomes sensori-moteurs.

Tableau 2. — Critères de déficit cognitif vasculaire (MCI vasculaire ou démence vasculaire) selon l’AHA/ASA scientific statement [1] DÉFICIT COGNITIF VASCULAIRE PROBABLE :

1 — Atteinte cognitive avec anomalies cérébrales d’origine vasculaire en imagerie et a — relation temporelle claire entre un évènement vasculaire (AVC clinique par exemple) et l’installation de l’atteinte cognitive ou b — relation claire entre le type et la sévérité de l’atteinte cognitive et la présence en imagerie d’anomalies sous-corticales diffuses (CADASIL par exemple) 2 — Pas d’histoire de déclin cognitif progressif avant ou après l’AVC suggérant la présence d’une affection neuro-dégénérative.

DÉFICIT COGNITIF VASCULAIRE POSSIBLE : atteinte cognitive avec anomalies cérébrales d’origine vasculaire en imagerie mais 1 — Pas de relation claire (en terme de mode d’installation des troubles, de sévérité, ou de type d’atteinte cognitive) entre la pathologie vasculaire cérébrale (infarctus silencieux, maladie des petites artères sous-corticales par exemple) et l’atteinte cognitive.

2 — Pas d’information suffisante sur la pathologie vasculaire cérébrale (par exemple pas de scanner ou d’IRM) 3 — Aphasie sévère ne permettant pas d’effectuer une évaluation cognitive correcte 4 — Association à la pathologie vasculaire cérébrale d’une affection neuro-dégénérative telle que maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson ou de toute autre affection (par exemple psychiatrique, cancéreuse, métabolique, etc …) susceptible d’altérer la cognition.

positons au fluorodeoxyglucose, qui montre dans les démences ischémiques souscorticales un hypométabolisme affectant principalement les régions frontales et aussi les noyaux gris centraux et le cervelet [10, 62].

L’évaluation vasculaire concerne les facteurs de risque vasculaire et l’étiologie de la démence vasculaire. Parmi les facteurs de risque d’AVC, ceux qui, présents à l’âge moyen de la vie, ont une relation prouvée avec le risque de démence sont l’hypertension artérielle, le diabète, l’hypercholestérolémie et l’augmentation de la CRP. La relation est moins solidement établie pour les autres facteurs tels que le tabac, l’alcool, ou l’obésité [1, 63, 64]. Dans une étude de cohorte californienne portant sur 11 341 sujets âgés de 40 à 44 ans, le risque de démence trente ans plus tard était de 7,8 % et était significativement associé à la présence d’hypertension, de diabète, d’hypercholestérolémie, et dans une moindre mesure de tabagisme. Un score composite associant ces quatre facteurs montrait une relation dose-dépendante avec la démence, allant d’un risque relatif de 1,2 pour la présence d’un seul facteur à 2,63 pour l’association des quatre facteurs [63].

De tous les facteurs, c’est l’hypertension artérielle qui a l’imputabilité la plus forte :

dans la grande cohorte REGARDS portant sur 23 752 sujets sains, la présence d’une hypertension artérielle systolique était significativement corrélée à la survenue d’un déclin cognitif mineur décelable dès quatre ans plus tard [65]. La pression artérielle systolique ambulatoire sur vingt-quatre heures serait un marqueur de risque de déclin cognitif encore plus sensible que celle mesurée chez le médecin [66].

Des travaux récents résumés dans le AHA/ASA statement [1] suggérent qu’indépendamment même des facteurs de risque, la présence de marqueurs du vieillissement tels que l’augmentation d’épaisseur intima-média de la carotide commune, la rigidité aortique, l’athérome extra ou intra-crânien, seraient corrélés aux lésions céré- brales silencieuses d’origine vasculaire et au déclin cognitif [1].

Toutes les variétés d’affections vasculaires cérébrales pouvant aboutir à une démence vasculaire, le bilan étiologique comporte les investigations vasculaires, cardiaques, hématologiques, métaboliques, immunologiques, inflammatoires et génétiques permettant de diagnostiquer les affections figurant au tableau III. La découverte de la cause — ou souvent des causes — associées telles que la fibrillation atriale, l’athérome et les maladies des petites artères chez les sujets âgés — est essentielle à la mise en place de mesures de prévention secondaire, afin de tenter d’éviter un nouvel AVC dont on a vu le rôle déterminant sur l’aggravation de la démence.

IMPLICATIONS THÉRAPEUTIQUES

En l’absence de traitement curatif des démences, toute mesure susceptible de retarder même modestement, l’apparition ou l’aggravation du déclin cognitif serait déjà un progrès considérable et se traduirait par une réduction importante de l’incidence des démences. Les principales mesures concernent la prévention, et à un moindre degré, le traitement symptomatique.

 

Tableau 3. — Principales causes de démence par infarctus multiples — Athérosclérose extra et intracrânienne — Autres pathologies des grosses artères • Artérites : Takayasu, maladie de Horton • Angiopathies radiques • Syndrome de Moya-Moya — Fibrillation atriale et cardiopathies emboligènes — Affections hématologiques • Polyglobulies • Thrombocytémies • Hémoglobinopathies • Syndrome hypereosinophile • Syndrome des antiphospholipides • Dysglobulinémies — Vascularites cérébrales et affections apparentées • Infectieuses • Inflammatoires, primitives ou secondaieres • Syndrome SICRET • Syndrome de Sneddon — Cancers, lymphomes et chimiothérapies — Autres affections • Mitochondriopathies • Maladies de surcharge (Maladie de Fabry) • Homocystinurie Prévention

La première mesure préventive concerne le dépistage et le traitement précoces des facteurs de risques vasculaires, si possible avant l’apparition des lésions cérébrales silencieuses d’origine vasculaire et des premiers signes de déclin cognitif, et à fortiori avant la survenue du premier AVC clinique.

Le facteur de risque le plus important à la fois pour les AVC et la démence est l’hypertension artérielle mais alors que l’efficacité de l’abaissement de la pression artérielle est largement démontrée sur la prévention des AVC, les résultats sont divergents quant à la prévention de la démence [1]. Les études observationnelles suggèrent un effet bénéfique sur le risque de maladie d’Alzheimer, d’autant plus net que le sujet a été traité à un âge jeune et pendant longtemps [1]. Six essais randomisés ont été effectués et parmi ceux-ci, quatre n’ont pas mis en évidence d’effet du traitement anti-hypertenseur sur les fonctions cognitives et le risque de démence, alors que deux ont constaté un effet préventif. L’étude SYST-EUR conduit en prévention primaire a montré une réduction de 50 % du risque de démence (maladie d’Alzheimer et démence vasculaire) chez des patients ayant une hypertension systolique traitée par nitradipine [67, 68]. L’étude PROGRESS, conduite en prévention secondaire après un premier AVC ischémique ou hémorragique, a montré une réduction non significative de 12 % du risque de démence dans le groupe traité par périndopril fi indapamide et une réduction de 34 % statistiquement significative du risque de démence associé à un nouvel AVC [69, 70]. Ces études ont donné lieu à cinq méta-analyses qui montrent toutes une diminution du risque de démence allant de 11 à 20 % sous traitement anti-hypertenseur, n’atteignant cependant la signification statistique que dans une seule étude [71]. Globalement, malgré des divergences essentiellement liées à des limitations méthodologiques, les données actuelles vont dans le sens d’un effet préventif de l’abaissement de la pression artérielle sur le risque de démence post AVC et de démence tardive, qu’il s’agisse de démence vasculaire, de maladie d’Alzheimer, ou de démence mixte [1, 67, 68]. L’efficacité du traitement préventif après quatre-vingts ans, solidement établi sur le risque d’AVC, ne l’est pas pour le risque de démence, peut être, au moins en partie, à cause du biais induit par l’efficacité du traitement sur la réduction de la mortalité [1].

La situation est moins claire en ce qui concerne les autres facteurs de risque, dont le traitement diminue significativement le risque d’AVC, mais sans preuve, dans la grande majorité des cas, d’une diminution du risque de démence. Ceci peut être dû soit à l’absence d’étude interventionnelle prenant comme critère d’évaluation le déclin cognitif ou la démence, ce qui est le cas du tabac ou du diabète, soit que ces études aient été négatives, comme pour les statines [72]. En revanche, des études observationnelles et quelques études d’intervention suggèrent un effet bénéfique sur la cognition de diverses modifications du style de vie, telles que le régime alimentaire méditerranéen [73, 74] ou l’exercice physique [75, 76].

Étant donné le risque de démence lié à la survenue d’un et à fortiori de plusieurs AVC, il est vraisemblable que les traitements des facteurs de risque efficaces sur la prévention des AVC le sont aussi sur le risque de démence, au moins sur celui de démence post AVC, mais d’autres études sont nécessaires pour confirmer cet effet bénéfique. Le même raisonnement s’applique aux autres mesures d’efficacité prouvée dans la prévention des infarctus cérébraux : anticoagulants oraux dans la fibrillation atriale, anti-plaquettaires dans les maladies artérielles, chirurgie des sténoses carotides serrées [77]. Seule l’aspirine a fait l’objet d’études spécifiques sur la cognition avec des résultats divergents dans les études d’observation, et une absence d’efficacité dans une étude d’intervention ayant porté sur 3 350 sujets de 50 à 75 ans ayant un athérome asymptomatique et suivis pendant cinq ans [78].

 

Traitement symptomatique

Le traitement symptomatique est d’abord celui de l’AVC lui-même et de ses complications, en particulier l’incontinence, les crises d’épilepsie, la confusion mentale, les épisodes d’hypoxie et d’hypotension, qui sont toutes significativement corrélées au risque de démence post AVC [58]. Bien qu’il n’y ait pas de preuve que cette relation soit causale, il est vraisemblable — mais difficile à prouver — que la prévention et le traitement de ces complications à la phase aiguë diminue le risque et la sévérité de la démence post-AVC. Très peu d’études ont été consacrées à la réhabilitation cognitive des sujets ayant une démence post-AVC, mais des travaux sont en cours avec diverses méthodes cliniques et paracliniques, telles que la stimulation magnétique transcrânienne qui a donné lieu à des résultats préliminaires intéressants, au moins sur le langage et l’apprentissage moteur [79].

De nombreuses études et méta-analyses ont été consacrées à l’effet sur les démences vasculaires des médicaments utilisés dans la maladie d’Alzheimer : inhibiteurs des cholinestérases (Donepezil, Rivastigmine, Galantamine) et antagonistes du NMDA tels que la Memantine. Ces études, détaillées dans plusieurs revues générales [1, 10, 77] sont très disparates quant au nombre de patients inclus, à la sévérité du déclin cognitif, au type de démence vasculaire, à la durée du suivi et aux critères d’évaluation. Malgré cette hétérogénéité, il existe globalement une amélioration cognitive, modeste mais certaine, avec notamment le Donepezil, la Galantamine et la Memantine, mais sans bénéfice notable sur les échelles fonctionnelles et globales et avec des effets secondaires identiques à ceux observés dans la maladie d’Alzheimer [1]. Un bénéfice cognitif fonctionnel et global a cependant été observé avec la Galantamine, mais il s’agissait de patients ayant une démence mixte [80]. Dans un essai portant sur 168 patients atteints de Cadasil suivis pendant dix-huit semaines, le Donepezil a montré un effet bénéfique uniquement sur les fonctions exécutives, ce qui suggère l’utilisation dans les études portant sur les démences ischémiques sous-corticales, de critères différents de ceux utilisés dans les démences mixtes et dans la maladie d’Alzheimer [81]. Pour certains, le bénéfice cognitif obtenu dans les démences vasculaires avec les agents cholinergiques et la Memantine est de signification clinique douteuse, et d’autres études sont nécessaires avant de recommander une large utilisation de ces médicaments dans le déclin cognitif vasculaire [11, 82].

De nombreux autres médicaments tels que la Nimodipine, le Piracetam, la Sertraline, la Vinpocetine, la Cytidinediphosphocholine et des traitements non médicamenteux tels que l’acupuncture et la stimulation cognitive ont été étudiés dans les démences vasculaires sans preuve de bénéfice [1].

CONCLUSION

La maladie d’Alzheimer et les démences vasculaires sont toutes deux liées à l’âge, ce qui, compte tenu du vieillissement très rapide de la population, laisse présager une véritable épidémie de démence dans les pays industrialisés. L’opposition traditionnelle entre démences dégénératives et vasculaires n’a plus lieu d’être car l’immense majorité des démences est mixte, associant aux lésions de maladie d’Alzheimer, au minimum des facteurs de risque vasculaire, puis des lésions céré- brales silencieuses d’origine vasculaire tels que leucoaraïose, infarctus, microsaignements, et au maximum la survenue d’AVC cliniquement parlants. Chacun de ces facteurs semble agir en abaissant le seuil auquel les lésions de la maladie d’Alzheimer produirait un déclin cognitif, puis une démence.

Cette intrication entre facteurs vasculaires et dégénératifs a une conséquence pratique essentielle : la meilleure prévention de la démence, en l’absence actuelle de traitement préventif de la maladie d’Alzheimer, est celle des accidents vasculaires cérébraux, c’est-à-dire le traitement précoce des facteurs de risque vasculaire (hypertension, cholestérol, tabac, diabète etc.), l’adoption d’un « style de vie sain », et l’application des traitements spécifiques dont l’efficacité est prouvée dans la prévention primaire et secondaire des AVC. La démonstration d’un bénéfice sur la prévention de la démence elle-même requiert que toutes les études de prévention et de traitement des AVC comporte une évaluation cognitive, ce qui a rarement été le cas, sauf pour le traitement anti-hypertenseur qui, prescrit tôt dans la vie, diminue effectivement le risque de démence ultérieure.

Les progrès en terme de recherche, de prévention, d’évaluation et de traitement de la démence requièrent une étroite collaboration — très insuffisante en France actuellement —entre divers spécialistes : neurologues spécialistes des affections neurodégénératives, neurologues vasculaires, spécialistes en réhabilitation, gériatres, psychiatres, sociologues, spécialistes en santé publique, chercheurs cliniciens et fondamentalistes.

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[78] Price JF., Stewart MC., Deary IJ., et al. — Low dose aspirin and cognitive function in middle aged to elderly adults: randomised controlled trial.

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[79] Takeuchi N., Tada T., Toshima M., Matsuo Y., Ikoma K. — Repetitive transcranial magnetic stimulation over bilateral hemispheres enhances motor function and training effect of paretic hand in patients after stroke. J. Rehab. Med., 2009, 41 , 1049-1054.

[80] Erkinjuntti T., Kurz A., Gauthier S., Bullock R., Lilienfeld S., Damaraju CV. — Efficacy of galantamine in probable vascular dementia and Alzheimer’s disease combined with cerebrovascular disease: a randomised trial. Lancet, 2002, 359 , 1283-1290.

[81] Dichgans M., Markus HS., Salloway S., et al. — Donepezil in patients with subcortical vascular cognitive impairment: a randomised double-blind trial in CADASIL.

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[82] Kavirajan H., Schneider LS. — Efficacy and adverse effects of cholinesterase inhibitors and memantine in vascular dementia: a meta-analysis of randomised controlled trials. Lancet Neurol., 2007, 6 , 782-792.

 

DISCUSSION

M. Bernard PESSAC

Concernant le Cadasil, quelles sont les cellules altérées des petits vaisseaux et le mécanisme éventuel ?

Dans Cadasil, les mutations du gène

NOTCH3 entraînent une accumulation de la protéine NOTCH3 dans la paroi des petits vaisseau x. Les cellules principalement touchées sont les cellules musculaires lisses.

 

M. Jean-Pierre OLIÉ

Quelle est l’importance et quelle est la chronologie de survenue des symptômes émotionnels dans les formes par lésions sous corticales multiples ? Après un AVC, quelle est la place des antidépresseurs ? S’agissant de la stimulation cognitive, a-t-on un niveau de preuve suffisant ?

Les troubles de l’humeur sont présents chez environ 20 % des patients Cadasil, généralement à type de dépressions « atypiques ». Ils alternent parfois avec des épisodes maniaques. Ils surviennent habituellement après les premiers accidents ischémiques cérébraux, mais ils peuvent parfois être révélateurs. La dépression est très fréquente après AVC de tout type, y compris bien sûr dans Cadasil. Elle est habituellement traitée par IRS. Pour la stimulation cognitive, il n’y a aucune preuve d’efficacité dans Cadasil mais il est tentant de la proposer dans cette affection où l’apathie est un symptôme majeur et précoce, même en l’absence de dépression.

M. Jacques CAEN

Dans l’unité vasculaire, les neurones, les cellules gliales interviennent. Quelles sont les parties du vaisseau et de ses constituants qui sont impliquées ?

L’unité neurovasculaire est un ensemble anatomique et fonctionnel qui réunit vaisseaux, neurones et cellules gliales. Je pense que l’ensemble du vaisseau est impliqué pour s’adapter immédiatement à l’activité neuronale.

M. Jacques BATTIN

Dans le syndrome Cadasil la pénétrance est-elle forte ou, comme dans toute maladie dominante, l’expressivité est-elle variable, indépendamment des traitements préventifs à visée neuro-vasculaire ?

La pénétrance est complète mais avec effectivement une expression phénotypique variable. Il peut y avoir dans la même famille une forme gravissime avec démence et AVC évoluant vers la mort en quelques années et une forme relativement bénigne avec trente ou quarante ans de migraine avec aura avant que n’apparaissent les premiers infarctus cérébraux. Il n’y a malheureusement aucun traitement préventif d’efficacité prouvée mais nous utilisons les traitements habituels : aspirine, statines, antihypertenseurs etc.

M. André VACHERON

Dans l’une des dernières diapositives de votre excellent exposé, vous avez mentionné le rôle délétère du tabac dans les démences vasculaires. Intervient-il dans le Cadasil ?

Il n’y a pas eu d’études spécifiques sur le tabac mais il est hautement vraisemblable que tous les facteurs de risque vasculaire jouent un rôle délétère dans Cadasil aussi. A contrario, ce qui nous avait frappé dans notre première famille, c’était l’absence de facteurs de risque vasculaire, notamment d’HTA, susceptibles d’expliquer la survenue, à un âge jeune, de ces infarctus cérébraux !

 

M. Roger NORDMANN

Alors que de nombreuses études ont été consacrées aux relations entre consommation d’alcool et maladie d’Alzheimer, certaines concluent à un effet protecteur d’une consommation dans certaines limites de mieux en mieux définies. Dispose-t-on de travaux portant sur la relation entre une telle consommation et les démences vasculaires ?

Il semblerait effectivement qu’une consommation très modérée d’alcool puisse avoir un effet protecteur, mais étant donnée la fréquence des démences « mixtes », il est difficile de faire la part de ce qui revient primitivement aux neurones ou aux vaisseaux.

Emmanuel-Alain CABANIS

L’unité neuro-vasculaire a des racines, multiples et vérifiées, dont celles de son application dans l’effet « Bold » de l’IRM (f). Mais qu’en est-il de la neuro-tractographie (IRMT(D)) dans le Cadasil ? A l’époque, l’IRM de diffusion n’existait pas en routine. Aujourd’hui on connaît (cf Stanford) la déshabitation calloso-corticale dans certaines démences. La tractographie sous-corticale montre-t-elle une raréfaction semblable, à partir de 3 Tesla ?

En toute logique, l’image de la population neuronale associative sous-corticale ne se réduit-elle pas ?

On sait depuis les travaux effectués il y a plus de dix ans en IRM Tenseur de diffusion par Hugues Chabriat dans notre équipe qu’il existe dans la substance blanche une augmentation de la diffusion de l’eau et une perte d’anisotropie qui reflètent la perte et la désorganisation des axones et que ces anomalies sont mieux corrélées au déclin cognitif que le nombre et le volume des hypersignaux. On a montré plus récemment l’importance, dans le déterminisme de la démence, des lésions corticales secondaires aux lésions sous corticales.

 

Bull. Acad. Natle Méd., 2012, 196, no 2, 409-430, séance du 21 février 2012