Rapport
Session of 25 juin 2002

L’aide au geste chirurgical par les navigateurs et les robots

MOTS-CLÉS : chirurgie. imagerie en trois dimensions. instrument chirurgical. législation médicale. robotique.
Surgical procedures improvement due to navigators and robots
KEY-WORDS : imaging-three-dimensional. legislation, medical. robotics.. surgery. surgical instruments

C.H. Chouard et F. Dubois

Résumé

Les navigateurs chirurgicaux fournissent en temps réel une vision en trois dimensions des relations anatomiques des organes nobles avec l’instrumentation et la lésion traitée. Les robots contrôlent les déplacements des appareillages interventionnels selon une programmation pré ou per opératoire plus ou moins sophistiquée, dans le but de pallier l’imperfection du maniement manuel de ces instruments. Souvent associés, ces deux dispositifs améliorent la sécurité, l’efficacité et le confort de beaucoup de gestes chirurgicaux. Il est recommandé de soutenir leur perfectionnement et leur généralisation, et la prise en compte des problèmes économiques, éthiques et juridiques qu’ils soulèvent.

Summary

Navigator is a three-dimensional C-T scan image localization device, which supplies the surgeon with a real time relationship of surgical instruments with pathological lesion and vital organs. Robot controls surgical devices movements according to a various sophisticate programming, in order to palliate the imperfection of their manual use. Navigators and robots, frequently connected, allow a precise control of the instruments course, improving accuracy and efficiency of most surgical procedures. It is necessary to contribute to their improvement and development, taking in count the economic, ethic and legal problems which may be encountered.

INTRODUCTION

La miniaturisation récente des robots industriels et les progrès de l’imagerie ont conduit depuis moins de cinq ans à la mise au point et à la diffusion d’appareillages apportant une aide au geste chirurgical, qui représentent un progrès certain. Mais l’appréciation des avantages que procurent ces avancées qualitatives (amélioration technique d’un geste devenu plus sûr, par exemple, ou suites postopératoires plus rapides avec suppression des cicatrices délabrantes) est toujours sujette à discussion. En outre, leur nature et leur évaluation dépendent du domaine anatomique relevant de cette chirurgie, car celui-ci implique :

— soit un matériel homologué appliquant simplement des techniques éprouvées, — soit un matériel en cours d’homologation, — soit un matériel nouveau capable de répondre à certaines exigences particulières des chirurgiens, dont les premiers essais sont en cours.

Ces difficultés et ces discordances expliquent pourquoi les décideurs économiques hésitent à investir dans ces procédés d’apparence disparate, dont certains pourtant représentent déjà une avancée thérapeutique indiscutable.

En outre, par nature, ces techniques sont un instrument privilégié de la formation chirurgicale et du téléenseignement. Cette utilisation augmente leur intérêt.

Le but de ce rapport est de préciser l’état de l’art à la fin de l’année 2001, afin de proposer des recommandations aptes à • faciliter l’acquisition, par les hôpitaux publics et privés, des appareillages ayant fait leur preuve, • favoriser l’évaluation des systèmes en cours de validation, • susciter les études de faisabilité des perfectionnements souhaités par les utilisateurs.

LES

APPAREILS

DISPONIBLES

ACTUELLEMENT :

AVANTAGES-

CONTRAINTES

Il faut rappeler tout d’abord que dans la plupart des cas, la visualisation du geste chirurgical par l’opérateur est assurée par des systèmes endoscopiques mono-optiques et mono-oculaires. Que la visée de l’optique soit directe, où qu’elle se fasse selon un certain angle, la vision fournie — quel que soit le grossissement — n’est très généralement qu’en deux dimensions, c’est-à-dire sans relief. La vision 3-D, fournissant l’impression de relief, constituera un progrès important, mais elle n’est au point pour l’instant que sur le robot da

Vinci®, dont la robotique et les indications, exposées récemment en séance plénière par le Professeur Loisance, sont actuellement en cours d’évaluation.

On distingue les navigateurs et les robots. On utilise isolément l’un ou l’autre de ces deux types d’appareillages, en fonction de l’organe opéré. Dans certains cas ils sont couplés l’un à l’autre.

Les navigateurs

Les navigateurs fournissent une image virtuelle des structures anatomiques couplée à celle de l’instrument, qui permet une visualisation précise de la localisation de celui-ci. Leur mise en jeu implique :

• une unité centrale gérant les informations à tous les stades de la procédure ;

• une entrée préopératoire des images anatomiques selon les trois plans orthogonaux, par la numérisation d’informations dont la nature dépend de l’organe abordé (scanner, IRM, fluoroscopie, etc.). Actuellement ces images sont obtenues quelques heures avant l’intervention ; mais dans un proche avenir, elles devraient pouvoir être générées pendant l’intervention, presque en temps réel. L’entrée de ces données anatomiques est associée à celle des coordonnées d’un repère fixé dans le même temps sur le patient, que celui-ci va conserver ensuite tout au long de l’intervention ;

• une localisation per opératoire de l’extrémité de l’instrument par rapport à ce repère fixe, dont les coordonnées dans l’espace sont transmises en temps réel à l’unité centrale :

— soit par voie opto-électrique, à l’aide d’une diode électroluminescente à rayons infrarouges. Cette diode peut être mobile, placée sur l’instrument, ou fixée sur la station, enregistrant le reflet de son rayonnement sur un ou plusieurs miroirs placés sur l’instrument et/ou sur l’organe opéré (tibia, par exemple). Mais aucun obstacle opaque ne doit être situé sur le trajet des rayons infrarouges ;

— soit par voie électromagnétique, grâce à un émetteur. Mais aucun corps métallique autre que celui de l’instrument ne doit se trouver dans le champ du rayonnement ;

— soit par ultrasons, mais le pouvoir de résolution de cette méthode est quatre fois moindre que celui du repérage électromagnétique.

La mise en œuvre d’un navigateur, actuellement du moins, comprend donc deux phases principales :

• une phase préopératoire, qui correspond à l’acquisition des images et à leur mise en forme. La simulation préopératoire de l’intervention peut être effectuée pendant cette phase, surtout lorsque le navigateur est couplé à un robot ;

• une phase per opératoire. Elle débute par la mise en correspondance de l’espace-image virtuel avec l’espace-image patient. Cette manœuvre doit
être répétée au cours de l’intervention, notamment à chaque changement d’instruments, lorsque le repérage actif du navigateur est situé sur l’instrument lui-même.

Avantages : les navigateurs permettent une augmentation de la précision anatomique du geste. Le volume des espaces de sécurité, qu’il est de règle de respecter au voisinage des organes nobles, peut être considérablement diminué sans danger. En outre l’enregistrement de la séquence opératoire représente un matériel d’enseignement rétrospectif de grande qualité, ainsi qu’un document médico-légal.

Contraintes : leur emploi nécessite une imagerie supplémentaire préopératoire. Le couplage informatique entre le lieu de l’imagerie et le site opératoire doit être sécurisé. Le coût de l’appareillage est relativement élevé, mais il a nettement diminué depuis un an en raison de l’augmentation récente de la diffusion de beaucoup de ces systèmes.

Les navigateurs impliquent une solidarisation parfaite entre l’appareillage et le patient, qui ne peut être obtenue actuellement que par une fixation osseuse.

C’est pourquoi ils ne sont pour l’instant employés qu’en neurochirurgie, en ORL, en orthopédie, sans avoir encore trouvé d’indications en chirurgie viscérale. Pour la même raison ils ne sont pas partageables entre plusieurs spécialités différentes.

Il existe plusieurs types de navigateurs, selon la région anatomique à laquelle ils s’adressent. Ces navigateurs peuvent être ou non couplés à un robot.

Les navigateurs de stéréotaxie neurochirurgicale . Ce sont les plus anciens.

Ils sont toujours associés à un robot.

Les navigateurs de la base du crâne et des sinus . Ce sont les plus répandus. Leur couplage est le plus souvent électromagnétique. Ils assurent sur l’écran de contrôle le repérage anatomique de l’extrémité de l’instrument, qui est actionné manuellement sous endoscopie ou à l’aide d’un microscope opératoire. Ce sont les plus simples, car, notamment en ORL, ils ne nécessitent pas obligatoirement de robot, même pour la manipulation de l’endoscope caméra et de l’instrumentation.

Les navigateurs orthopédiques . Ils sont plus récents. Ils sont dotés d’un couplage opto-électrique, en raison de la présence d’élément métallique dans la plupart des prothèses. Ils sont souvent associés à un robot. Ces navigateurs sont en plein développement : entre 2000 et 2001, le nombre d’appareillages disponibles, aujourd’hui plus d’une dizaine, a été multiplié par cinq.

Les robots

Les robots exécutent un geste sous la responsabilité directe ou indirecte de l’opérateur.

Les robots chirurgicaux sont toujours couplés — soit à un navigateur, — soit à un système optique (endoscope le plus souvent, voire microscope opératoire).

C’est en neurochirurgie que leur usage s’est le premier développé dans la pratique de la stéréotaxie. On distingue :

Les robots actifs. Ils comprennent, comme le navigateur auquel ils sont couplés, une unité centrale et une entrée préopératoire d’informations anatomiques. Leurs mouvements successifs sont programmés avant l’intervention, ce qui permet de choisir la meilleure technique opératoire, et de répéter virtuellement l’intervention plusieurs fois pour en optimiser toutes les séquences. Leur conception dépend beaucoup de la zone anatomique où ils sont employés. Ils ont donc difficilement une vocation pluridisciplinaire en un bloc opératoire commun.

Les robots passifs, encore appelés « télémanipulateurs ». Ils ne sont pas forcément couplés à un navigateur, mais plus volontiers à une visée endoscopique. Ils ne répondent qu’aux ordres per opératoires du chirurgien. Ces ordres sont donnés soit par des manettes ou des pédales, soit par une série de plusieurs dizaines de commandes vocales différentes, propres à chaque opérateur, préenregistrées une fois pour toutes lors de la première utilisation du robot. La fidélité de cette reconnaissance vocale leur permet donc d’être assez facilement partagés par plusieurs opérateurs de spécialités chirurgicales différentes.

Dans les deux cas le chirurgien, qu’il soit à proximité ou plus ou moins éloigné du patient, conserve la maîtrise des mouvements du robot, même lorsque ceux-ci ont été programmés.

Un robot comporte deux modules :

— une console « maître » pour l’opérateur, qui à l’aide de manettes et de pédales réalise les gestes chirurgicaux qu’il surveille par « immersion visuelle » (en 3 D sur le da Vinci) ;

— une console « esclave », porteuse des instruments qui sont insérés à travers la paroi de l’opéré.

Seule la console « esclave » a besoin d’être stérile. L’opérateur, en tenue non stérile, et la console « maître » peuvent être dans la même salle d’opération, ou à distance (pièce voisine ou à 10 000 kilomètres) ; la liaison entre les deux peut être assurée par câble ou par radio.

Le geste ordonné au robot est transmis de manière indirecte, après numérisation et transfert par connexions câblées (voire dans certains cas par radio), ou de manière directe mécanique.

Avantages

Les robots offrent de nombreux avantages • Ils améliorent la préparation du geste, grâce à la répétition préopératoire de celui-ci. Ils autorisent un véritable apprentissage préopératoire, propre aux particularités pathologiques de chaque patient. Leur association à la vision endoscopique, notamment en « 3-D » et/ou au microscope offre une excellente vue dans des régions difficilement accessibles en chirurgie ouverte, tel le petit bassin de l’homme, ou les hypochondres.

• Ils augmentent la précision du geste, en reproduisant et en accentuant l’agilité de la main dans toutes les positions, et en réduisant le tremblement.

Ils assurent une gestion des forces dans les mouvements fins et complexes.

Ils permettent enfin une prohibition programmable des mouvements dangereux.

• Ils diminuent très vite avec l’expérience la durée opératoire, la fatigue de l’opérateur et même (robot porte-optique) le personnel médical qualifié nécessaire.

• Pour toutes ces raisons, ils fournissent des résultats qui dépendent moins de l’opérateur qu’avec les techniques classiques (avec ces dernières, par exemple, la perméabilité d’une suture coronaire varie entre 60 et 98 % selon l’opérateur).

Les robots rendent possible la téléchirurgie

À partir du moment où l’opérateur est déconnecté physiquement de l’opéré, la télétransmission est possible. Ceci est déjà réalisé pour les téléconférences, ou le téléenseignement. Mais pour la téléchirurgie, les délais de transmission, secondaires dans les cas précédents, deviennent essentiels. En effet, pour que le chirurgien opère dans des conditions quasi normales de confort et de sécurité, il faut que le temps écoulé entre le geste ordonné par l’opérateur, sa réalisation par « l’esclave », la perception de son efficacité par l’opérateur, et le nouveau geste de l’« esclave » soit inférieur à 300 millisecondes. Or, si l’on doit utiliser un satellite géostationnaire, c’est-à-dire à 36 000 km de la terre, le délai du double aller-retour, associé aux temps de codage—décodage et de compression—décompression dépasse facilement 500 millisecondes. Certes, ce temps pourrait être abaissé grâce aux réseaux de satellites à basse altitude, mais ceux-ci ne sont pas actuellement assez opérationnels pour cet usage.

C’est ce qui fait tout le mérite de la performance réalisée par J. Marescaux 1 1. MARESCAUX J., JEROY J., GAGNER M., RUBINO F., MUTTER D., VIX M., BUTNER S.E., SMITH M.K. — Transatlantic robot assisted telesurgery. Nature , 2001 , 9 , 413, 379-380.

avec l’aide de France Telecom, qui grâce à son réseau de câbles à fibres optiques, et à l’affinement de ses logiciels de codage et de compression, a pu réaliser cette double liaison le 9 septembre 2001 entre New York et Strasbourg, en moins de 200 millisecondes, pour pratiquer une cholécystectomie télécommandée.

Les robots favorisent l’enseignement par compagnonnage ou par téléenseignement.

L’enseignement de la chirurgie a déjà été facilité par la vidéochirurgie, puisque le geste de l’opérateur est devenu « transparent », suivi visuellement par tout l’entourage : il y a « partage du geste ».

La robotisation devrait apporter un plus :

— en facilitant les gestes, et en particulier pour l’apprentissage des microsutures ;

— en rendant plus aisé le passage de la chirurgie ouverte à la chirurgie mini invasive, ceci pour les chirurgiens déjà formés à la chirurgie classique, permettant peut-être un jour de court-circuiter le passage par la vidéochirurgie ;

— en facilitant l’entraînement sur simulateurs, dont le développement sera facilité par la navigation et la robotisation ;

— en permettant éventuellement à un « senior » placé devant une console centrale, de surveiller des « juniors » opérant sur des consoles annexes dans des salles différentes, et d’intervenir en cas de nécessité sur l’un des sites opératoires.

Les robots, dont les gestes sont enregistrés, contribuent à la traçabilité médico-légale.

Contraintes

En dehors de leur coût, les inconvénients des robots consistent en certains défauts persistants.

Les perfectionnements attendus tardent à venir au gré des chirurgiens :

— l’encombrement de ces appareils est particulièrement gênant, et une miniaturisation s’impose ;

— l’ergonomie des bras manipulateurs doit faire d’énormes progrès, pour en faciliter l’installation, actuellement longue et fastidieuse ;

— la vision 3 D doit être généralisée à tous les systèmes, et il est nécessaire de pouvoir élargir la vision opératoire, pour contrôler tous les instruments introduits, afin d’éviter que ceux-ci ne puissent léser inopinément un organe ;

— le développement d’endo-capteurs s’impose, en particulier celui permettant d’apprécier la pression exercée sur les instruments, car actuellement l’opérateur n’a aucune sensation de retour ;

— et surtout le prix d’achat de ces appareils, de leur entretien, et du matériel consommable (1 600 k par intervention) limite considérablement leur généralisation. Ce prix devrait baisser très sensiblement par l’effet de série, comme cela a été le cas pour la plupart des appareils, tels par exemple les robots porte-optique.

Par ailleurs la nécessité d’un double apprentissage des chirurgiens doit être soulignée, pour leur permettre de savoir intervenir de manière conventionnelle en cas d’incident.

Les robots les plus utilisés se retrouvent (par ordre de fréquence d’emploi décroissant) :

— en neurochirurgie , où leurs avantages trouvent aujourd’hui application dans la plupart des interventions de la spécialité ;

— en orthopédie , notamment pour la chirurgie des genoux, du rachis, voire de la hanche ;

— en chirurgie viscérale , thoracique (notamment cardiaque), mais aussi abdominale et pelvienne. Actuellement, dans cette spécialisation, deux appareillages doivent être cités : le système da Vinci®, de la Société Intuitive (avec son système de vision 3-D), et le système Socrate®, de Computer Motion.

AGRÉMENT ET DIFFUSION

Parmi les différents matériels actuellement sur le marché, il existe une grande disparité selon leur diffusion, leur coût, leur agrément. Cette disparité pourrait s’ordonner en tenant compte de l’organe abordé. Mais dans l’optique de ce rapport, il faut opposer les appareils ayant fait leur preuve, et les systèmes en cours d’évaluation.

Appareils ayant fait leur preuve

Leur diffusion est importante. Ils ont déjà l’agrément FDA. et CE., et certains sont recommandés par le Comité d’Evaluation et de Diffusion des Innovations Technologiques (CEDIT) de l’AP-HP.

ORGANES

Navigateur

REPÉRAGE

REMARQUE

AGRÉMENT

DIFFUSION

COÛT

Surcoût

Robot & MARQUAGE (achat) unitaire

CE

Sinus et base NAVIGATEUR I.R.

FDA, CE, CEDIT 77.000 k du crâne Electromagnét.

Robot porte ROBOT Endoscopie Commande FDA, CE, CEDIT 85.000 k endoscope 2-D vocale, ou manuelle Genou NAV. + ROBOT FDA, CE, CEDIT 610.000 k 300 k Plus de 9 000 procédures Rachis NAV. + ROBOT I.R.

Cadre déjà réalisées stéréotaxique En cours fixé sur la d’évaluation vertèbre Hanche NAV. + ROBOT NeurochiNAV. + ROBOT Ultrasons FDA, CE, CEDIT Plus de 460.000 k 175.000 k rurgie 3 000 procédures déjà réalisées Chirurgie ROBOT Endoscopie robot En cours 38 aux USA 930.000 k thoracique, 3-D bimanuel et d’évaluation 28 en Europe cardiaque, 2-D à pédalier dont abdominale 3 en France et pelvienne Dans ce tableau nous ne citons pas les noms des instruments et de la société qui les commercialise, car ces deux paramètres sont en continuel remaniement, en raison des fusions de sociétés qui se multiplient, à mesure que les matériels se perfectionnent et sont fabriqués de manière industrielle. Leur coût sont exprimés en k T.T.C. communiqués fin 2001.

Leur coût est en nette diminution ; près de 50 % en un an pour le navigateur des sinus, qui est actuellement le plus répandu. En orthopédie, leur coût dépend de leur spécialisation :

• lorsqu’ils sont spécifiques d’une marque particulière de prothèses, le navigateur et son robot sont loués comme système ancillaire, lors de la mise en place de la prothèse ;

• lorsqu’ils ne sont pas spécialisés, ils doivent être achetés, puis programmés pour chaque type de prothèse employée.

Ces appareillages, qui ont fait leurs preuves, sont les suivants :

• robots et navigateurs en neurochirurgie, • robot porte-optique en chirurgie viscérale, • navigateurs dans la chirurgie des sinus et de la base du crâne, • robots et navigateurs orthopédiques pour le genou et le rachis.

Systèmes en cours d’évaluation • Robots et navigateurs destinés au rachis, à la hanche.

• Robots destinés à la chirurgie viscérale.

On notera qu’il reste • à évaluer, entre les systèmes dédiés à une marque de prothèse orthopédique et les systèmes indépendants, la méthode la plus efficace et la plus économique ;

• à obtenir des fabricants un effort de formation à l’utilisation de leurs appareils.

RAPPORT EFFICACITÉ / COÛT

Il est en pratique impossible de chiffrer l’amélioration apportée par les navigateurs et les robots. Une étude rétrospective destinée à démontrer l’existence de cette amélioration ne serait pas valable. Des études prospectives randomisées sont envisageables ; certaines sont en cours pour les techniques les plus récentes, les plus lourdes. Mais ces études, qui sont forcément très longues, deviennent éthiquement difficiles à poursuivre par les équipes chirurgicales qui y participent, dès lors qu’elles commencent à acquérir l’habitude de ces nouveaux appareils.

CONCLUSION

À une échéance de dix ans, il est raisonnable d’espérer que chaque salle d’opérations soit équipée d’un télémanipulateur ou d’un robot.

Aussi est-il indispensable de réfléchir dès maintenant aux difficultés éthiques qui vont apparaître, et de faire préciser la législation qui s’appliquera à propos des responsabilités engagées par ces technologies nouvelles.

Quant à l’application de ces techniques d’avant-garde aux pays en voie de développement, si on tient compte du coût de l’investissement humain et financier qu’elles impliquent, il semble qu’il y ait actuellement dans ces pays des problèmes sanitaires beaucoup plus urgents.

RECOMMANDATIONS

Trois sortes de recommandations peuvent être formulées :

Faciliter l’introduction, dans le parc hospitalier public et privé, des appareillages ayant fait leurs preuves

Il s’agit actuellement des appareillages suivants :

• Robots et navigateurs en neurochirurgie.

• Robots porte-optique en chirurgie viscérale vidéo-assistée.

• Navigateurs dans la chirurgie des sinus et de la base du crâne.

• Robots et navigateurs orthopédiques pour la chirurgie du genou et du rachis.

En outre il faudrait :

• obtenir des constructeurs que dans le prix de l’appareil soit inclus le financement de l’apprentissage à ces robots (non pas bien sûr de la technique chirurgicale elle-même), ainsi que l’entretien courant de manière forfaitaire sur une période suffisamment longue, ce qui, pour les établissements de soins, en faciliterait l’acquisition ;

• faire participer l’Éducation nationale à ce financement dans le cadre du téléenseignement, en sachant qu’on devra surmonter des difficultés comptables dans la répartition des frais engagés, notamment en matière de fonctionnement ;

• obtenir, en raison de leurs avantages pour les patients, une cotation spécifique dans la nomenclature des actes pris en charge par les caisses d’assurance maladie lorsqu’ils comportent un geste chirurgical assisté par navigateur et/ou robot.

Favoriser l’évaluation des systèmes actuellement en cours de validation, susciter et faciliter les montages financiers permettant d’obtenir les perfectionnements attendus :

• miniaturisation ;

• ergonomie des bras manipulateurs ;

• généralisation de la vision 3 D à tous les systèmes ;

• élargissement de la vision opératoire, pour contrôler tous les instruments introduits ;

• développement d’endo-capteurs permettant d’apprécier la pression exercée sur les instruments ;

• télémanipulateurs, et programmation préopératoire (grâce à la navigation) ;

• « vrais robots » programmés ;

• mise au point de simulateurs, pour l’enseignement et l’entraînement ;

• télétransmission pour équiper des territoires isolés et des navires, en vue de traiter les urgences en situation extrême ;

• abaissement du prix de ces appareils, de leur entretien, et du matériel consommable qui limite considérablement leur généralisation. Ce prix devrait baisser très sensiblement par l’effet de série, comme cela a été le cas pour la plupart des appareils, tels par exemple les robots porte-optique ou les navigateurs à sinus.

Pour y parvenir, doivent être développés les appels d’offres thématiques et la collaboration internationale.

Souligner la nécessité de maintenir un double apprentissage pour les jeunes chirurgiens , qui devront toujours savoir intervenir de manière conventionnelle en cas d’incident, et envisager dès maintenant les questions éthiques posées par ces technologies nouvelles, notamment en matière de responsabilité médicale .

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 25 juin 2002, a adopté ce rapport à l’unanimité.

RÉFÉRENCES

Audition de personnalités Réunion du 9.10.01

Navigateurs des sinus et de la base du crâne : Dr LOMBARD (Hôpital Desgenettes — Lyon),

M. JAECKEL (Société Collin ORL — Cachan), M. GUERIN (Société VTI — Chevreuse).

Navigateurs et robots chirurgicaux : Pr Alim-Louis BENABID (Correspondant de l’Académie — CHU Grenoble), M. Hervé KOEHLE (Société Jojumarie — Saint-Martin-d’Hères), M. Fernand BADANO (Société ISS — Bron).

Réunion du 13.11.01

Robots en chirurgie cardiaque et viscérale : Pr Daniel LOISANCE (Correspondant de l’Académie — Hôpital Henri Mondor, Créteil), M. SOUSTEIEL (Société Intuitive — SaintGermain-en-Laye).

Navigateurs et robots en chirurgie orthopédique : Pr Alain SAUTET (Hôpital Saint-Antoine — Paris), M. BLONDEAU (Société B. Braun-Aesculap — Boulogne).

Réunion du 28.11.01

La chirurgie du pelvis vidéoendoscopique assistée par robot : Pr Guy VALLANCIEN (Institut

Mutualiste Montsouris — Paris), Dr Adrian LEBOUTIU (Société Intuitive).

Téléchirurgie et téléenseignement : Pr Jacques MARESCAUX (Correspondant de l’Académie — IRCAD — Strasbourg), Mme Mary ZANGANEK (Société Computer motion), M. Alain BERNARD (France Telecom).

Rapports du Comité d’Évaluation et de Diffusion des Innovations Technologiques (CEDIT) de l’AP-HP (Pr E. Féry-Lemonnier) :

• Chirurgie assistée par ordinateur : intérêt de l’assistance visuelle stéréotaxique dans la visée pédiculaire — Décembre 1997, • Chirurgie cardiaque assistée par robot — Mars 1999, • Bras robotisé pour la chirurgie endoscopique — Mai 2000, • Le robot de stéréotaxie neurochirurgicale ‘neuromate’ — Décembre 2000.

Bull. Acad. Natle Méd., 2002, 186, no 6, 1091-1102, séance du 25 juin 2002