Communication scientifique
Session of 18 juin 2002

Dysferlinopathie. Exemple d’une nouvelle myopathie

MOTS-CLÉS : dystrophies musculaires. expression génique.. protéines muscle
Dysferlinopathy : a new myopathy
KEY-WORDS : gene expression.. muscle proteins. muscular dystrophies

G. Serratrice, J.F. Pellissier, V. N’Guyen, S. Attarian, J. Pouget

Résumé

L’évolution récente des connaissances sur les dysferlinopathies est exemplaire parmi les myopathies individualisées depuis une dizaine d’années grâce aux progrès combinés de l’exploration morphologique et de la génétique moléculaire. La dysferline est une protéine de surface de la membrane musculaire sans homologie avec d’autres protéines humaines, à l’exception de l’otoferline. Elle est codée par un gène situé sur le chromosome 2. Un bref rappel historique indique l’évolution parallèle des connaissances d’une part des myopathies distales de type Miyoshi, d’autre part de certaines formes (dites de type 2 B) de myopathies des ceintures. Ces deux formes ont été peu à peu rattachées à une mutation du gène de la dysferline présent sur le chromosome 2. Ceci aboutit à la notion cliniquement un peu confuse de myopathie proximo-distale. Quelques exemples personnels précisent la sémiologie qui est souvent évocatrice. Le diagnostic est soupçonné devant certaines localisations électives, devant une élévation très importante du taux de créatine kinase sérique. Il est confirmé par l’étude en immunoblot ou en immunohistochimie du fragment musculaire prélevé par biopsie et par la recherche d’une mutation sur les exons du gène DYSF. En pratique clinique il faut connaître l’originalité des deux principaux phénotypes : type Miyoshi parmi les myopathies distales, formes proximales parmi les myopathies des ceintures ainsi qu’une forme comportant une atrophie globale des compartiments postérieurs des membres inférieurs. Les lésions musculaires comportent souvent des altérations inflammatoires qui font porter pendant plusieurs années le diagnostic de polymyosite, ce qui entraîne une corticothérapie inefficace. Certaines hypothèses essaient d’expliquer la nature de ces lésions. Enfin diverses questions sans réponse concernent les corrélations génotype-phénotype et le mécanisme de la dégé- nérescence musculaire.

Summary

Over the past 10 years, the impact of modern microscopic pathology and molecular genetics on the knowledge of myopathies has been enormous. Dysferlinopathy is a good exemple. * Membre de l’Académie nationale de médecine Tirés-à-part : Professeur Georges Serratrice, Académie nationale de médecine — 16, rue Bonaparte — 75272 Paris cedex 06. Article reçu le 4 mars 2002, accepté le 29 avril 2002. Dysferlin is a surface membrane protein without homology with known mammalian protein excepted otoferlin. It is encoded by a gene on chromosome 2. Miyoshi myopathy and limb girdle muscular dystrophy 2B have been reported to arise from defects in the same genetic locus (chromosome 2p 13). Some personal different examples are presented with typical features, high level of creatine kinase. Gene mutations, immunoblot and immunohistochemestry allow the diagnosis. Three clinical phenotypes are separed : distal myopathy, proximal myopathy, entire lower limbs posterior compartment amyotrophy. Structural changes are mild. Inflammation is not unusual and leads to the diagnosis of polymyositis. There are no correlation genotype-phenotype.

Depuis une dizaine d’années les progrès combinés de l’exploration morphologique et de la génétique moléculaire ont éclairé la compréhension des myopathies, en particulier celles dépendant d’une anomalie membranaire. Un schéma désormais traditionnel illustre la disposition sur la membrane plasmique d’un complexe membranaire et d’éléments dont la déficience peut entraîner une myopathie. Située entre le sarcolemme et l’appareil contractile, la dystrophine, lorsqu’elle est déficiente, est à l’origine de maladies de Duchenne et de Becker. Dans la zone extrasarcolemmique est notamment présente la laminine dont l’altération explique un groupe de dystrophies musculaires congénitales. Enfin, de siège transmembranaire sont les sarcoglycans dont le déficit est à l’origine de diverses myopathies des ceintures. D’autres atteintes sont dues à un déficit en calpaïne ou en cavéoline 3.

La dysferline est une protéine associée à ce complexe dystrophine — glycoprotéine mais elle en est indépendante. Elle est une protéine de 230 Kda [1]. Elle a été récemment localisée comme une protéine de surface de la membrane musculaire [2].

Elle ne possède pas d’homologie avec des protéines humaines et animales connues, à l’exception de l’otoferline dont le déficit entraîne une surdité [3] et de la myoferline [4], qui pour l’instant n’a aucune fonction pathologique reconnue [5].

La dysferline est donc une grande protéine qui possède un segment terminal transmembranaire ancré sur la membrane par son terminal carboxyl. La portion cytoplasmique contient 4 à 6 domaines C2 composés de 80 à 130 acides aminés, dont la fonction est en principe un signal de transduction ou une action de trafic intramembranaire. Ces domaines interagissent avec le calcium, les phospholipides ou d’autres protéines en signalant des échanges ou en agissant sur la fusion membranaire. Le terme de « dysferline » (ou Dystrophy-associated fer.1 .like protein) [6, 7] provient d’une certaine homologie avec la ferline 1, facteur de spermatogenèse nécessaire à la fusion membranaire chez caenorhabditis elegans . On estime que la dysferline pourrait intervenir dans la fusion membranaire à médiation calcique.

La dysferline est codée par un gène DYSF localisé sur le chromosome 2 p. 12-14 [8], grand gène de 150 kilobases comportant 55 exons de taille allant de 30 à 461 bp. Ce
gène est exprimé dans le muscle squelettique et cardiaque, dans le placenta. Un transcript plus court de 3,5 Kb est exprimé dans l’ensemble du tissu cérébral.

L’histoire des dysferlinopathies est récente et complexe mais exemplaire, résultant de la connaissance parallèle de deux maladies différentes. En 1967 puis en 1986 une forme originale de myopathie distale de l’adulte jeune est décrite au Japon par Miyoshi et al . [9,10]. Cette forme nouvelle est rattachée à une localisation sur le chromosome 2 p. 12-14 [11] puis 2p13 (Bejaoui et al , 1998). Parallèlement il apparaît qu’une variété particulière de myopathie des ceintures de l’adulte jeune est rattachable au même locus 2p 13 (Bashir et al 1994, Passos-Buenos et al , 1995). Par la suite des mutations du gène DYSF, gène de la dysferline, sont identifiées chez des patients atteints de myopathie de Miyoshi et de myopathie des ceintures, étiquetée 2 B, démontrant l’extrême variabilité du spectre clinique. Ceci aboutit à la notion, cliniquement un peu confuse, de myopathie proximo-distale dépendant de mutations variables du gène DYS, sans corrélation très claire entre génotype et phénotype.

Quelques exemples personnels non encore publiés donnent une meilleure approche des tableaux cliniques qui diffèrent selon les cas. Ainsi les 2 premiers illustrent parfaitement le tableau de la forme décrite par Miyoshi [12]. Chez un homme de 19 ans apparaissent une fatigabilité avec atrophie d’un puis des deux mollets aux dépens des muscles jumeaux internes. Le taux de créatine kinase sérique est très élevé. Le scanner musculaire confirme une hypodensité importante des jumeaux internes et des soléaires. La biopsie musculaire montre nécrose, fibrose, inflammation périvasculaire. Le diagnostic de polymyosite est porté mais la corticothérapie à posologie élevée est sans effet. De même, chez un patient de 20 ans, des crampes des membres inférieurs s’associent à une intolérance à l’effort. Une atrophie musculaire est présente sur les jumeaux internes et sur les muscles des cuisses. Le taux de créatine kinase sérique est très élevé. Le scanner musculaire montre une hypodensité des compartiments postérieurs des cuisses et des jambes. La biopsie musculaire comporte nécrose, fibrose et infiltrats inflammatoires. La corticothérapie à posologie élevée entraîne une aggravation. La faiblesse musculaire devient par la suite proximale et s’accompagne de douleurs des membres inférieurs. La sémiologie, présente dans ces deux cas, est évocatrice d’une myopathie distale de Miyoshi.

Chez un autre patient âgé de 32 ans s’est installée depuis une dizaine d’années une faiblesse des muscles des racines surtout pelvienne avec chutes, difficultés à se relever après accroupissement, amyotrophie des biceps et triceps suraux. Le diagnostic est celui de myopathie des ceintures et seul le déficit en dysferline prouvé par immunoblot permet le diagnostic.

Un autre exemple est le cas d’une homme de 43 ans, souffrant de crampes d’effort depuis l’âge de 40 ans et porteur d’une atrophie étendue à la fois aux loges postérieures des jambes et aux loges postérieures des cuisses avec genu recurvatum , taux de créatine kinase très élevé, hypodensité des loges postérieures sur le scanner musculaire. Immunoblot et immunohistochimie montrent l’absence de dysferline.

Une mutation (insertion d’adénine entre les nucléotides 1765 et 1766 entraînant un décalage du cadre de lecture), est présente sur l’exon 15.

Plus particulier est le cas de 2 frères. Le premier âgé de 21 ans a souffert depuis l’âge de 12 ans d’intolérance à l’effort avec difficultés à la course. L’examen met en évidence une amyotrophie des 2 jumeaux internes avec impossibilité de station sur les pointes des pieds. Le taux de créatine kinase dépasse de 100 fois la normale. Le frère âgé de 27 ans présente depuis l’âge de 22 ans une difficulté à l’abduction des membres supérieurs prédominant à droite et une faiblesse majeure de la ceinture pelvienne obligeant au fauteuil roulant. Le taux de créatine kinase dépasse de 100 fois la normale. Dans ces deux cas l’immunoblot et l’immunohistochimie montrent l’absence totale de dysferline.

Dans de tels cas le diagnostic est évoqué devant des arguments cliniques : sur des aspects d’hypodensité sur le scanner musculaire, un taux de créatine kinase très élevé dans le sérum, un électromyogramme de type myopathique. L’affirmation du diagnostic se fait sur plusieurs éléments.

L’exploration moléculaire du gène DYSF permet, par des techniques classiques de séquençage direct (habituellement précédées par un screening des mutations en SSCP) des 55 exons codants, de mettre en évidence une mutation à l’état homozygote [13], à type de substitution d’une base, de délétion ou d’insertion d’une base.

Cependant cette méthode est de longue réalisation étant donné la grande taille (150 Kb) du gène et le séquençage est d’un prix élevé. Le déficit en dysferline est également prouvé par immunoblot ou étude immunohistochimique d’un fragment musculaire. Toutefois cette méthode nécessite une biopsie invasive du muscle. Le test proposé récemment par Ho et al. [14] recherche l’expression de la dysferline sur les monocytes du sang circulant et devrait être de réalisation simple, ne comportant pas les inconvénients précédents.

En pratique clinique il convient de savoir évoquer une dysferlinopathie et des arguments de valeur confèrent une certaine spécificité aussi bien aux formes distales qu’aux formes proximales.

Les formes distales ont une place particulière parmi les autres myopathies distales.

Parmi ces dernières, certaines ont un début tardif. Le type Welander [15], d’hérédité autosomique dominante lié au chromosome 2p 13, survient vers la cinquantaine, prédomine sur les muscles des mains et les fléchisseurs distaux. L’évolution, peu invalidante, s’étend tardivement aux muscles distaux des membres inférieurs. Les lésions musculaires sont modérées avec souvent des vacuoles bordées. Le type Markesbery-Griggs [16], dominant lié au chromosome 2q 31 est également de début tardif portant sur les loges antérieures des jambes (une forme assimilable est la myopathie tibiale décrite par Udd en Scandinavie [17]). L’évolution se fait vers une faiblesse proximale et la marche devient impossible en une vingtaine d’années. Les mains sont atteintes tardivement. Des vacuoles bordées sont fréquentes sur les muscles.

Des formes à début précoce surviennent chez l’adulte jeune. La plus typique est la forme décrite par Nonaka [18, 19], de transmission autosomique récessive, liée au chromosome 9p 1-q1 et d’évolution sévère. Le début se fait également par les loges antéro externes des jambes avec steppage. Rapidement, en quelques années, la faiblesse s’étend à l’ensemble des muscles des jambes et à la cuisse ainsi qu’aux fléchisseurs du cou. Un fauteuil roulant est nécessaire après une dizaine d’années. Les vacuoles bordées et les inclusions de 18 nm de diamètre sont très abondantes et le type Nonaka est considéré comme une myopathie héréditaire à inclusions.

L’originalité propre à la myopathie distale de Miyoshi est la survenue chez un adulte jeune de difficultés à la station sur la pointe des pieds, l’amyotrophie élective des jumeaux internes et des soléaires confirmée par le scanner musculaire, parfois des douleurs jambières avec intolérance à l’effort, un taux très élevé de créatine kinase sérique, un aspect de nécrose et de régénération sur la biopsie musculaire avec souvent des images inflammatoires. L’association de douleurs, du taux élevé de créatine kinase, de signes musculaires inflammatoires fait que souvent le diagnostic de polymyosite est porté. Une corticothérapie à posologie élevée reste sans effet et la faiblesse musculaire finit par s’étendre aux régions proximales. Cependant la maladie est relativement bénigne et les patients sont rarement en fauteuil roulant. Malgré ces caractères originaux on ne peut totalement assimiler myopathie de Miyoshi et dysferlinopathie en raison de l’hétérogénéité génétique de la myopathie de Miyoshi, certaines formes dépendant d’une anomalie du chromosome 10 [20].

Les formes proximales s’inscrivent parmi les myopathies des ceintures (dont elles réalisent le type 2 B) à côté du déficit en calpaïne (2 A — chromosome 15), des sarcoglycanopathies, de la rare téléthonopathie qui comporterait parfois une élévation importante de la créatine kinase sérique dans un tableau proximodistal.

L’originalité des formes proximales tient à des éléments cliniques : une marche différente de la marche dandinante (Dysferlin gait) [21] de par un aplatissement de la plante du pied avec hyperflexion des orteils, associé à une rotation externe proximale par faiblesse des muscles de la hanche et de la cuisse ; un genu recurvatum dû à l’atrophie du quadriceps ; tardivement une atteinte des biceps brachiaux avec formation de « boules » dans le muscle [12], contrastant avec un respect des muscles périscapulaires. Une hyperlordose est également fréquente ; des signes inflammatoires préexistent souvent sur la biopsie musculaire et ici encore le diagnostic de polymyosite débouche sur une corticothérapie inefficace. L’évolution d’ensemble est relativement peu invalidante et la marche est longtemps conservée. La maladie est dans l’ensemble moins sévère que les autres myopathies des ceintures.

A ces deux formes schématiques s’ajoutent d’autres localisations phénotypiques :

atteinte des compartiments antérieurs de la jambe [22], et surtout atteinte des compartiments postérieurs des membres inférieurs, c’est-à-dire des muscles des hanches, des cuisses et des mollets visible sur un scanner musculaire. Dans ces cas en position debout un véritable « rabotage » postérieur est visible avec voûte plan-
taire aplatie, flexion des orteils (Serratrice et al, 2002). Le scanner musculaire confirme l’hypodensité des muscles des loges postérieures des membres inférieurs.

Les lésions histopathologiques propres aux diverses dysferlinopathies ont une originalité propre.

La microscopie optique montre, à côté de lésions myopathiques non spécifiques (variation de taille des fibres, centralisations nucléaires, fissuration de fibres, fibres nécrotiques et régénératives), des infiltrats inflammatoires faits de lymphocytes et de macrophages [23] expliquant l’éventualité du diagnostic initial de polymyosite, qui est remis en cause devant l’échec de la corticothérapie. Ces lésions, présentes 9 fois sur 13 cas au voisinage des fibres nécrotiques [24], sont constituées de lymphocytes (CD4+, CD8+) et de macrophages. L’antigène HLA de classe I est exprimé autour des fibres nécrotiques. Le complexe d’attaque membranaire C B se dépose autour 5 9 des fibres nécrotiques. Il pourrait avoir une action de lyse des dépôts granulaires d’origine membranaire visible en ultrastructure. Ces aspects diffèrent des aspects inflammatoires présents dans certaines myopathies : maladie de Duchenne où sont visibles quelques lymphocytes T dans des fibres non nécrotiques, myopathies facioscapulo-humérales avec parfois infiltration interstitielle par des lymphocytes B et CD4+.

Une mutation du gène de la dysferline a été identifiée chez la souris SLJ [25] qui est ainsi un modèle animal avec une faiblesse musculaire et des lésions de type dystrophique. En outre des lésions inflammatoires sont habituellement présentes chez ces animaux.

De plus certaines mutations (mutation d’épissage) pourraient produire un phénotype accompagné d’inflammation [26].

L’immunohistochimie montre l’absence ou la diminution d’expression de la dysferline. Piccolo et al [27] ont observé une accumulation intracytoplasmique de dysferline dans les fibres rapides, qui pourrait être liée à un processus de réparation. Il est à noter que les mêmes auteurs signalent une réduction de l’expression sarcolemmique de la dysferline dans 50 % des sarcoglycanopathies et dans 20 % des dystrophinopathies, ce qui apporte la notion de dysferlinopathie secondaire simplement liée à la dégénérescence musculaire.

La microscopie électronique enfin [28] témoigne d’altérations membranaires. La membrane plasmique des fibres nécrotiques est le siège de discontinuités membranaires et d’invaginations profondes et de projections papillaires. Dans les fibres non nécrotiques des aspects de discontinuité membranaire sont également présents. La membrane basale est épaissie avec parfois duplications contenant des amas granuleux.

L’évolution à long terme des dysferlinopathies est mal connue. Il est vraisemblable qu’une période silencieuse précède l’amyotrophie comme le montre l’exploration de cas précoces dans des formes familiales [29, 30]. En outre, chez nos patients, il est fréquent qu’un syndrome d’intolérance à l’effort avec crampes et myalgies soit noté
dans les années précédentes ou même dans l’enfance. Quant à l’évolution à long terme elle a pu être suivie chez un autre de nos patients de 63 ans porteur d’une amyotrophie proximodistale majeure nécessitant un fauteuil roulant, avec hypodensité de l’ensemble de la musculature, insuffisance respiratoire dont les troubles avaient évolué en plusieurs épisodes : douleurs et intolérance à l’effort de 20 à 30 ans, démarche « claquante » avec atrophie des mollets ayant fait porter le diagnostic de maladie de Charcot Marie à 30 ans, aggravation majeure à 59 ans.

De nombreuses questions restent cependant sans réponse. Il n’existe pas de corré- lations génotype-phénotype. Des variations intrafamiliales avec coexistence de phénotypes différents sont connues (Weiler et al 1999, association de myopathies distale et proximale chez deux frères dans nos cas). Les phénotypes extrêmes — formes distales ou proximales — sont-elles la conséquence de mutations dans des points différents ou doit-on invoquer des gènes modificateurs des facteurs épigéné- tiques ou environnementaux. Le début se fait chez l’adulte jeune, mais la possibilité d’une période silencieuse dans la première décennie est signalée dans certaines formes familiales [29, 30]. Le mécanisme de la dégénérescence musculaire causée par la dysferlinopathie est-il lié à un défaut de fusion membranaire ou à un autre processus ? Enfin, bien que la dysferline soit exprimée dans le cerveau, aucun déficit cognitif n’est connu.

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DISCUSSION

M. Louis AUQUIER

Vous avez signalé la ressemblance clinique entre certaines myopathies héréditaires et les myosites inflammatoires. Est-ce que l’échec des anti-inflammatoires dans ces myopathies constitue un critère suffisant pour attirer l’attention et faciliter la distinction ?

Comme je l’ai indiqué un certain nombre de cas comportant en particulier un élément douloureux associé à un taux élevé de créatine kinase sérique et à la présence de nécrose et d’inflammation sur la biopsie musculaire sont considérés comme des polymyosites et traités sans succès comme tels. Il est certain que la résistance aux anti-inflammatoires stéroïdiens est un des arguments importants devant faire rechercher une anomalie de la dysferline.

M. Yves GROSGOGEAT

Existe t’il des atteintes cardiaques associées et, si oui, quel type de myocardiopathie ? Existe t’il une atteinte des protéines contractiles et peut-on observer des aspects anormaux des stries Z ?

Il n’y a pas d’atteinte cardiaque au cours des dysferlinopathies. En revanche, les desminopathies s’accompagnent de cardiomyopathie. D’autre part, l’atteinte des stries Z ne s’observe pas au cours des dysferlinopathies.

M. Pierre RONDOT

Cette nouvelle myopathie a t’elle permis de démembrer l’ancienne myopathie tardive de Nevin, rapportée à une polymyosite mais réagissant souvent mal au traitement antiinflammatoire ? L’aspect en « boules » sur les muscles myopathiques a été décrit par R.

Garcin.

La dysferlinopathie est différente, même dans les formes proximales de l’ancienne myopathie tardive de Nevin, d’autant plus que cette dernière était habituellement corticosensible. L’aspect en boules remarqué par Michel Fardeau dans les dysferlinopathies [12] en diffère légèrement, en particulier par une sorte de rétraction de la partie inférieure du biceps contrastant avec un respect des muscles de la ceinture scapulaire.

M. Alain LARCAN

Peut-on expliquer par une répartition inégale des facteurs en cause : dystrophine, dysferline… l’atteinte prépondérante de tel ou tel groupe musculaire ? Votre description correspond au démembrement des myopathies distales qui avaient été surtout décrites par Gowers.

Existe t’il des signes de regroupement de ces myopathies distales ?

Gowers avait en effet donné en 1902 une lecture sur les myopathies distales en rapportant des cas antérieurs. Mais c’est au signe de Gowers que je faisais allusion, c’est-à-dire à la difficulté à se relever après accroupissement, le patient devant prendre appui sur ses cuisses afin d’effectuer ce mouvement. Ce signe a la signification d’une faiblesse musculaire de la ceinture pelvienne. Concernant les myopathies distales elles sont très variées, précoces ou tardives, d’hérédité autosomique dominante ou récessive. Certaines formes (scandinave type Welander, japonaise type Nonaka notamment) sont rattachées aux myopathies à inclusions du fait de la présence de vacuoles bordées et d’inclusions de 18 nanomètres de diamètre sur la biopsie musculaire.

M. Jacques CAEN

Est-ce que le déficit en calpaïne et la calpaïnopathie secondaire sont spécifiques du déficit en dysferline ?

La calpaïnopathie secondaire n’est pas spécifique des dysferlinopathies. Elle n’est pas non plus constante.

M. Jean-Jacques HAUW

Quelle est la fréquence de la maladie ? Quel est le délai moyen séparant l’apparition des premiers signes cliniques et le diagnostic en centre spécialisé ?

A Marseille, une trentaine de cas ont été observés. Mais il s’agit d’un centre spécialisé.

Aussi ne puis-je répondre à votre seconde question qu’en signalant deux extrêmes. En centre spécialisé, le diagnostic est fait rapidement lorsque la sémiologie est évocatrice.

M. Jean DUBOUSSET

Pensez-vous que ces maladies musculaires avec ces anomalies de génétique moléculaire puissent être retrouvées dans les formes d’atrophies distales ou proximales observées chez certains enfants ?

A priori, la dysferlinopathie ne se manifeste pas avant l’âge de 20 ans. Cependant, dans des formes familiales, certains enfants ont été reconnus comme porteurs de l’anomalie. Il est difficile d’imposer une biopsie musculaire lorsqu’on a un doute. En revanche, si le test sanguin de recherche de dysferline sur les monocytes s’avérait fiable, il serait du plus haut intérêt de l’appliquer chez des enfants présentant une intolérance à l’exercice.

Bull. Acad. Natle Méd., 2002, 186, no 6, 1025-1034, séance du 18 juin 2002