Communication scientifique
Séance du 6 mai 2003

La chimiothérapie à visée curative avant (néoadjuvante), ou après (adjuvante) la chirurgie des métastases hépatiques des cancers colorectaux

MOTS-CLÉS : chimiotherapie neoadjuvante.. hepatectomie. metastase tumeur. tumeur colorectale
Adjuvant and neoadjuvant chemotherapy for patients with resectable liver metastases from colorectal cancer
KEY-WORDS : chemotherapy, adjuvant.. colorectal neoplasms. hepatectomy. neoplasms metastasis

Ph. Rougier, R. Guimbaud, E. Mitry, J N. Vaillant

Résumé

Après résection chirurgicale complète de métastases hépatiques de cancers colorectaux, le risque de récidive est de l’ordre de 50 à 75 % à 5 ans. Une chimiothérapie complémentaire pré- ou post-opératoire pourrait diminuer le risque de récidive mais son bénéfice n’est pas démontré. Les essais ayant évalué une chimiothérapie adjuvante systémique par 5FU-acide folinique parfois associée à une chimiothérapie intra-artérielle hépatique, peu nombreux et de puissance limitée, sont pour la plupart négatifs. Il est recommandé d’inclure les patients dans les essais thérapeutiques en cours. Hors essai, une chimiothérapie adjuvante de type LV5FU2 pendant 6 mois est une option raisonnable (accord professionnel). En cas de progression hépatique pendant ou immédiatement après une chimiothérapie adjuvante réalisée après l’exérèse d’une tumeur primitive, une chimiothérapie adjuvante après résection complète des lésions hépatiques doit être discutée (accord professionnel). Une chimiothérapie néo adjuvante n’est pas recommandée hors essai si les métastases sont resécables d’emblée mais peut-être discutée en cas de resécabilité ‘‘ limite ’’ et/ou s’il existe des critères carcinologiques péjoratifs (accord professionnel). Chez les patients dont l’exérèse des métastases hépatiques a été facilitée ou rendue possible par une chimiothérapie d’induction, la reprise de cette chimiothérapie en post-opératoire doit être discutée (accord professionnel).

Summary

The 5-year risk of progression after complete resection of liver metastases is of 50 % to 75 %. Trials which have evaluated adjuvant systemic chemotherapy using 5FU — folinic acid, sometimes in association with intra-arterial chemotherapy, are not powerful and did not demonstrate a clear survival benefit. It is strongly recommended to participate to clinical trials. An adjuvant chemotherapy with the LV5FU2 regimen during 6 months is a reasonable option if the patient has not been included in a trial (professional agreement). A preoperative chemotherapy is not recommended if liver metastases are considered as right away resectable but it should be discussed if resectability is uncertain and/or in case of pejorative factors (professional agreement). If metastases resection has been facilitated or made possible by pre-operative chemotherapy, post-operative resumption of this chemotherapy should also been discussed (professional agreement).

INTRODUCTION

Les métastases hépatiques (MH) compliquent environ 40 % des cancers colorectaux CCR, et 40 à 50 % d’entre elles sont isolées. Celles-ci sont accessibles à un traitement curateur par exérèse chirurgicale dans 5 à 10 % des cas avec des taux de survie à 5 ans de 20 à 40 % et un risque de récidive, de 75 % à 2 ans [1-2], une fois sur deux hépatique. Ce risque justifie les essais d’association à une chimiothérapie (CT) pour améliorer ce pronostic. Cette CT peut-être utilisée après résection R0 des MH (adjuvante) ou, en préopératoire (néoadjuvante). Le point sur la place de ces CT a été fait à l’occasion de la conférence d’experts sur les métastases hépatiques (Paris le 10 janvier 2003 [3]) sous le label de l’ANAES et ce texte en reprend les conclusions.

LA CHIMIOTHÉRAPIE ADJUVANTE APRÈS RÉSECTION DES MÉTASTASES HÉPATIQUES D’ORIGINE COLORECTALE

Après résection chirurgicale complète (résection R0) de MH quelques séries rétrospectives, avaient suggéré [1-5] ou non [6] un bénéfice faible en faveur de CT adjuvantes. D’autres études rétrospectives non contrôlées utilisant des protocoles de CT intra-artérielle divers [7-13] n’ont pas établi la preuve de leur efficacité. En fait seuls quelques essais randomisés menés avec des CT administrées par voie systémique (CIV), intra-artérielle (CIA), ou combinant les deux voies IA + IV permettent aujourd’hui d’envisager le rôle de la CT dans la prise en charge des MH resé- cables.

La chimiothérapie intra-artérielle (CIA)

La CIA après résection de MH d’origine colorectale a été principalement évaluée dans 3 études prospectives randomisées [14, 16]. (Tableau A).

CIA versus pas de chimiothérapie

Un essai multicentrique, a comparé l’association 5FU acide folinique (AF) IA mensuel après résection de MH (6 au maximum) à la chirurgie seule [14]. Il a été interrompu après inclusion de 226 patients en raison d’une absence d’efficacité (survie médiane : 34,5 mois versus 40,8 mois, NS). De plus les problèmes techniques et la toxicité grade 3-4 observée chez deux tiers des patients, expliquent que seuls 30 % des malades ont reçu le traitement complet. D’autres études menées avec des petits effectifs ont par ailleurs été non concluantes [17-20]. Ce protocole 5FU-AF IA mensuel n’est donc pas recommandé.

Association CIA et chimiothérapie systémique (CIV) versus pas de chimiothérapie

Un essai randomisé a comparé l’efficacité d’une CIA (pompe implantable utilisant le FUDR) associée à une chimiothérapie IV (5FU-FA), après résection de MH (3 au maximum), à la chirurgie seule chez 109 malades [15]. Les résultats définitifs portant sur les malades répondant réellement aux critères d’inclusion (n = 75, recul moyen 4,2 ans) ont été publiés en 2002 [15]. En raison d’une randomisation en préopératoire 25 % des patients ont été écartés pour non respect des critères d’inclusion. Il y avait un avantage significatif de survie sans récidive (SSR) en faveur de la chimiothérapie (CIA-CIV) post-opératoire : 46 % à 4 ans versus 25 % (p = 0,04) et de SSR hépatique : 67 % à 4 ans versus 43 % (p = 0,03). La survie globale n’était cependant pas améliorée pour les 75 malades ‘‘ évaluables ’’ et, dans l’analyse en intention de traiter, pour l’ensemble des malades. Environ 30 % des patients traités ont eu une toxicité hépatique avec élévation des enzymes hépatiques de grade 3 et 2 cholangites sclérosantes secondaires (7 %).

Association CIA + CIV versus CIV

Un autre essai randomisé nord-américain, a comparé la combinaison CIA (FUDR) et CIV (5FU-AF) chez 156 malades après résection R0 de leur MH [16]. Le bras contrôle était une CIV (5FU-AF). Les résultats étaient en faveur de l’association CIA + CIV avec un taux de survie à 2 ans de 86 % versus 72 % (p = 0.03) et une diminution significative des récidives intra-hépatiques (7/74 dans le bras CIA + CIV versus 30/82 dans le bras CIV dans les 2 ans post-opératoires). La toxicité de la combinaison CIA + CIV était supérieure à celle de la CIV seule avec un taux élevé de complications liées à l’utilisation des pompes implantables (n = 16). Cette étude n’est cependant pas complètement convaincante car 13 % des patients avaient des marges positives ou une résection palliative dont l’incidence sur les résultats n’a pas été rapportée et que la survie à 5 ans n’était pas significativement améliorée [21-24]

Un second essai randomisé, portant sur 122 patients a évalué l’intérêt d’un traitement combinant CIA et CIV comparé à une CIV seule [25] et était en faveur du traitement combiné. En fait il s’agissait d’un protocole complexe, non standardisé, combinant CIA-CIV et immunothérapie par IL2, qui n’a pas été analysé en intention de traiter et dont le niveau de preuve est faible (niveau 3).

Conclusions sur les chimiothérapies intra artérielles

Les essais [14-16] de CIA après résection des MH ont porté sur des recrutements très sélectifs [16] ; 75 % des malades inclus avait des MH métachrones et/ou un nombre limité de MH réséquées (moins de 4 métastases pour la majorité), sans facteurs carcinologiques péjoratifs en dehors des cas de résections R1 ou R2 d’une étude [16].

Avec un niveau de preuve de 2 (absence de bras contrôle sans traitement), le protocole CIA + CIV est considéré comme un standard par certains aux Etats-Unis et comme une option en Europe. Il n’est pas recommandé en dehors de services spécialisés et pose les problèmes de l’utilisation de pompes INFUSAID 400R qui sont onéreuses, de la non disponibilité du FUDR, et de sa toxicité biliaire.

La chimiothérapie systémique (CIV)

Deux études randomisées ont évalué une CIV après résection R0 de MH [26, 27] (Tableau 1).

L’étude française (FFCD-ACHBTH-AURC 9002) a randomisé 163 patients en 10 ans et a été interrompue en raison d’un recrutement insuffisant [26]. Il comparait une CIV par 5FU-AF mensuel post-opératoire à la chirurgie seule. Le nombre de MH était limité à 3. La toxicité a été notable (26 % de toxicités grade 3/4) et cet essai a retrouvé un avantage non significatif en faveur de la CIV en terme de SSR (Odds Ratio : 0,71, p = 0,084). (Cf. tableau A). La seconde étude était intergroupe (NCICanada, EORTC, GIVIO) qui n’a inclus que 129 patients [27] et comparait la chirurgie seule à la chirurgie suivie d’une CIV par protocole FU-AF. Cette étude rapportait aussi un avantage de survie de 10 % à 4 ans (47 vs 57 %) non significatif avec un risque relatif de SSR de 1,28 (p=0,35) et de survie de 1,3 (p=0,39) en faveur de la CIV.

Ces deux essais utilisant l’association 5FU-AF ont retrouvé une amélioration de survie qui n’est pas significative et une analyse commune est prévue.

Discussion et conclusions sur les chimiothérapies adjuvantes

En l’absence de preuves formelles l’abstention après résection des MH était la recommandation (standard) de la conférence de consensus sur les cancers coliques en 1998. Les cinq principales études randomisées [14-16, 26, 27] ont été considérés de qualité insuffisante et les arguments en faveur de la CT adjuvante considérés de niveau 3 ; en particulier si 2 études sont en faveur de la CIV avec un risque d’erreur de 8,4 % [26] et de 30 % [27] elles sont négatives en terme de survie globale.

TABLEAU 1. — Chimiothérapie post-opératoire après résection de métastases hépatiques.

CIA : chimiothérapie intra-artérielle ; CIV : chimiothérapie systémique ; MH : métastases hépatiques ; HR : hazard ratio ; OR : Odd Ratio (risque relatif) Plusieurs points méritent cependant discussion :

— les CIA à base de 5FU ou de FUDR, n’ont pas été comparées aux polychimio thérapies actuelles. Elles ont des limites importantes, elles ne contrôlent pas les progressions extra-hépatiques, elles nécessitent une expertise importante et ont une toxicité locale potentielle. Les CIA sont réservées aux centres spécialisés pouvant utiliser des pompes implantables et le FUDR (non disponible en France !). Dans le futur le développement de CIA utilisant de nouveaux produits donnant des taux de réponses élevés en combinaison avec les CIV font espérer la mise au point de protocoles plus actifs et plus simples ;

— l’association 5FU-AF bolus mensuel [26, 27] est moins efficace qu’administrée par perfusion continue en terme de réponse et de survie sans progression et est plus toxique [28]. Si les études rapportées gardent leur intérêt dans la mesure où il y a une équivalence entre les schémas LV5FU2 et 5FU-AF bolus Mayo Clinic en adjuvant pour les cancers du côlon [29] (niveau de preuve 2), le protocole 5FU-AF n’est plus reconnu comme optimal et des études utilisant des polychimiothérapies plus actives de 5FU-AF et irinotécan ou oxaliplatine sont nécessaires. Ces combinaisons ne peuvent cependant être recommandées en dehors des essais en cours comme celui comparant en adjuvant LV5FU2 et FOLFIRI (protocole Aventis : CPT-GMA).

Quant à la CT associée à la destruction locale des MH par cryothérapie ou par radiofréquence, en cours d’évaluation, son intérêt n’est pas démontré. Une étude de l’EORTC (protocole CLOC) compare CIV seule à une CIV associée à la destruction locale.

RECOMMANDATION FAITE LE 10 JANVIER 2003 [3] Peu d’essais randomisés sont disponibles et leur puissance est limitée. Le bénéfice de la chimiothérapie post-opératoire chez les malades non pré- traités est probable mais non complètement démontré (grade B à C).

L’évolution des pratiques limitera la réalisation des essais avec bras contrôle sans traitement adjuvant.

Ainsi, après résection R0 de métastases hépatiques :

— On doit privilégier l’inclusion du malade dans un essai thérapeutique testant les nouvelles modalités de chimiothétrapie.

— En dehors d’un essai thérapeutique, la réalisation d’une chimiothérapie est une option (grade C). Dans ce cas on recommande la réalisation d’une chimiothérapie systémique à base de 5U continu de type LV5FU2.

— L’intérêt d’une chimiothérapie intra-artérielle par FUDR, couplée à une chimiothérapie systémique, démontré dans les essais (grade B), est limité par la complexité technique, le coût, la morbidité propres à cette technique, et la non disponibilité du FUDR et des pompes implantables. Elle est donc non applicable et ne peut-être recommandée en dehors d’essais et centres expérimentés.

Cas particuliers :

Après résection de métastases hépatiques chez un patient ayant reçu une chimiothérapie préalable pour ses métastases :

— Après exérèse de métastases rendues resécables par une chimiothérapie d’induction la reprise du même schéma de chimiothérapie doit être discutée en fonction de l’intensité de la réponse tumorale pré- opératoire, de la toxicité cumulative et des suites de la chirurgie hépatique (accord professionnel).

— Après destruction locale de métastases hépatiques (radiofréquence, cryothérapie…) : après destruction locale des métastases l’indication d’une chimiothérapie ne peut faire l’objet d’une recommandation, elle doit être discutée en concertation pluridisciplinaire.

LA CHIMIOTHÉRAPIE NÉOADJUVANTE AVANT RÉSECTION DES MÉTASTASES HÉPATIQUES D’ORIGINE COLORECTALE

La chimiothérapie néoadjuvante des MH a pour but de diminuer le risque de récidive après résection, de faciliter la résection, ou, en cas de MH non resécables d’emblée d’essayer de les rendre resécables.

Chimiothérapie néoadjuvante des MH resécables

On distingue les MH facilement résécables (classe I) et les métastases de résécabilité plus complexe (classe II) ainsi que les MH synchrones dont la résection n’est pas prévue dans le même temps opératoire que celui de la tumeur primitive.

MH de resécabilité facile (classe I) et sans facteurs péjoratifs supplémentaires :

Il y a des arguments théoriques en faveur de la CIV pré-opératoire en particulier :

l’augmentation du taux de résécabilité R0 qui n’est jamais de 100 % [28, 30], la diminution du taux de récidive post-opératoire, et l’évaluation de la chimiosensibilité des MH pour guider le choix d’une éventuelle CT adjuvante. Il y a aussi des inconvénients, en particulier une toxicité sévère potentielle dans 15 à 30 % des cas avec les protocoles de polychimiothérapie actuels et, un risque de progression tumorale sous CIV de 10 à 30 % des cas (selon les protocoles), qui peut gêner voir empêcher une résection secondaire des métastases.

Une étude évalue l’intérêt d’une CIV dans cette situation, il s’agit du protocole EORTC 40983-FFCD 2000-02 qui compare la chirurgie seule à la chirurgie précé- dée et suivie d’une chimiothérapie selon le protocole FOLFOX4 (LV5FU2 + LOHP).

MH techniquement resécables au prix d’un geste difficile (classe II) et/ou présence de critères carcinologiques péjoratifs.

Dans cette situation il n’y a pas non plus d’étude prospective ayant évalué l’intérêt d’une chimiothérapie pré-opératoire, mais tous les arguments développés ci-dessus
restent valables et dans cette situation, ou le bénéfice de la chirurgie d’exérèse est plus faible, il est souvent discuté une CIV pré-opératoire en réunion de concertation pluridisciplinaire.

RECOMMANDATION FAITE LE 10 JANVIER 2003 Il n’est pas recommandé, hors essai, de réaliser une chimiothérapie avant résection de métastases résécables d’emblée et jugées de resécabilité classe I, en l’absence de plusieurs facteurs carcinologiques péjoratifs (accord professionnel).

Cependant, lorsque les métastases hépatiques sont de resécabilité classe II et/ou qu’il existe plusieurs critères carcinologiques péjoratifs, le bénéfice de la chirurgie devient moindre et une chimiothérapie première doit être discutée afin de faciliter la resécabilité et/ou de contrôler l’évolutivité tumorale (accord professionnel). On recommande dans cette situation, la réalisation d’essais thérapeutiques contrôlés.

Dans le cas particulier de métastases synchrones non réséquées dans le même temps que la tumeur primitive, une chimiothérapie d’intervalle avant la résection hépatique doit être discutée en concertation pluridisciplinaire (accord professionnel).

Chimiothérapie néoadjuvante des métastases non résécables d’emblée

Cette situation ne correspond pas strictement au thème de la place de la chimiothé- rapie curative dans la prise en charge des MH. Elle concerne les cas ou l’efficacité de la CT permet de discuter secondairement une exérèse alors que les MH étaient initialement non resécables. Elle correspond à une CT d’induction [30].

Ce concept repose sur des séries rétrospectives, en particulier de l’hôpital Paul Brousse [30-32] qui ont rapporté des taux de réponses objectives chez des patients porteurs de MH « non resécables » de l’ordre de 50 %, et après réévaluation régulière, des résections RO dans 16 % à 31 % des cas. Ces résections ont été favorisées par des régressions tumorales importantes dont quelques réponses complètes [31] et la survie à 5 ans des patients réséqués après CT d’induction est de 58 %, taux comparable à celui observé après résections de MH de première intention [14, 32].

Les récidives sont fréquentes (80 % des cas dans un délai médian de 12 mois) et peuvent justifier des résections hépatiques itératives (30 %). Ces études rétrospectives posent le problème des critères de non recécabilité dont la définition a évolué dans le temps.

Il s’agissit initialement de MH ayant des rapports vasculaires empêchant la résection, une taille supérieure à 5 cm, ou un siège bilatéral [30, 31], mais certains de ces facteurs ne sont plus considérés comme des contre-indications à la résection.

Les facteurs de non resécabilité doivent donc être mieux définis dans les futures études…

Deux études prospectives de phase II [33, 34] ont évalué l’intérêt de la CT systémique associant 5 FU et acide folinique pour rendre resécable des MH « non resécables ». Leurs effectifs étaient faibles et elles n’ont pas fourni d’informations sur les facteurs pronostiques utiles à la sélection des patients pouvant bénéficier d’une CT d’induction.

Quant à la répercussion des CT sur la tolérance des résections hépatiques et les risques de morbidité post-opératoires, elle semble faible, même après CT majeure ou intensive, dans les tumeurs germinales dont la résection s’accompagne d’une morbidité acceptable [35, 36].

Quatre points sont actuellement évalués :

— l’optimisation de la chimiothérapie d’induction avec l’utilisation protocoles de CT intensifié copmme les trithérapies : 5FU-AF + CPT-11 + LOHP ou les associations de CIA et de CIV [37] ; ;

— la prédiction de la réponse à la CT. Soit à partir de facteurs clinico-biologiques comme ceux rapportés avec l’association 5 FU-AF combinée ou non à l’irinotécan [38] (EG, taux de bilirubine, nombre de sites métastatiques…), soit à partir de paramètres spécifiques du métabolisme des CT comme l’expression de la folylpolyglutamate synthétase [39], la présence de p53 sauvage [40] et l’expression de la thymidylate synthétase [41] qui sont corrélés à la sensibilité au 5FU ;

— l’attitude à avoir en cas de réponse complète de certaines lésions après CT d’induction, et en particulier de l’intérêt des résections limitées aux seuls sites métastatiques persistants après CT qui reste mal établie…

— l’intérêt de la reprise de la CT après résection seconde RO, qui n’est pas démontré mais souvent conseillée, et doit être étudié dans des essais spécifiques.

En dehors de ces essais il doit être discuté au cas par cas en tenant compte du nombre de cycles administré en pré-opératoire, de leur efficacité et de leur tolérance ainsi que des suites de la chirurgie hépatique.

Conclusion : la CT d’induction peut donc rendre resécables certaines métastases hépatiques et mérite d’être explorée de façon plus méthodique et systématique. Elle devrait surtout concerner des patients ayant des métastases volumineuses et venant au contact des axes vasculaires principaux. Elle implique que les dossiers soient discutés avant toute CT puis en cas de bonne réponse en réunion de concertation pluridisciplinaire. Elle peut s’appliquer à des cas ou existent plusieurs sites métastatiques à condition ue l’exérèse totale de ces sites puissent être envisagée en cas de bonne réponse à la CT.

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* Fédération des spécialités digestives, Hôpital Ambroise Paré — 92100 Boulogne. ** Fédération Transversale de Cancérologie/HU et CLCC Toulouse. Tirés-à-part : Professeur Philippe ROUGIER, à l’adresse ci-dessus. Article reçu le 18 mars 2003, accepté le 31 mars 2003.

Bull. Acad. Natle Méd., 2003, 187, n° 5, 881-892, séance du 6 mai 2003