Quatre ans après sa magistrale description clinique de l’angor pectoris, Heberden rapportait en 1772 le cas de l’un de ses patients angineux qui s’était amélioré en sciant et transportant du bois, une heure par jour. En 1855, Stokes écrivait « Nous devons conseiller au patient cardiaque un entraînement progressif régulier. Il doit avoir une discipline d’exercices musculaires répétés. »
Après avoir abusivement conseillé le séjour prolongé au lit après infarctus du myocarde pendant des années, les cardiologues ont pris conscience des méfaits de cette prescription et de l’interdiction de l’exercice chez les cardiaques .Les travaux de l’école physiologique scandinave ont démontré dès 1970 les bienfaits de l’exercice physique. Varnauskas montrait chez le coronarien les transformations cardiocirculatoires et métaboliques apportées par l’entraînement physique : ralentissement cardiaque à l’état basal, augmentation de la différence artérioveineuse, réduction de la consommation d’oxygène myocardique à l’effort amélioration de la capacité aérobique avec l’entraînement. La communauté cardiologique alors multiplia les publications sur les bienfaits de l’entraînement physique à l’effort, montrant que la mobilisation précoce, un entraînement physique régulier sous surveillance cardiologique apportait aux répercussions physiques, psychologiques et sociales des cardiopathies un progrès spectaculaire dont les plus ardents promoteurs étaient les premier patients réadaptés. De très nombreuse études apportèrent les preuves du bénéfice de la réadaptation à l’effort après infarctus et depuis dix ans pour les insuffisants cardiaques démontrant que cette méthode était une thérapeutique à part entière réduisant la morbidité et la mortalité cardiovasculaire .La réadaptation effectuée dans des centres spécialisés permet d’assurer la prise en charge globale et personnalisée du patient, l’optimisation de son traitement, de son hygiène de vie. Le deuxième objectif est la correction des facteurs de risques et corollaire de cette lutte, l’éducation thérapeutique en responsabilisant le patient et sa famille.
Après mon rappel des bases physiopathologiques de la réadaptation, de ses indications, et complications, le Professeur Stéphane Hatem montrera l’intérêt et les résultats de la réadaptation chez les insuffisants cardiaques. Cette modalité de traitement impensable il y a quelques décennies est actuellement largement recommandée, son efficacité étant démontrée par des études multicentriques randomisées.
Le Professeur Jean-Etienne Touze présentera un exposé sur la réadaptation des patients coronariens, après infarctus du myocarde ou dans le traitement de l’ensemble de la maladie coronaire. Les études multicentriques actuelles mettent en évidence une réduction de la mortalité de 20 à 25 %. La réduction significative de la morbidité et une amélioration remarquable de l’aptitude à l’effort et de la qualité de vie.
La réadaptation cardiaque est une approche thérapeutique globale ayant pour but de motiver et aider le patient à modifier son mode de vie afin de prévenir les complications et hospitalisations à un coût de santé tout à fait acceptable. .Elle permet d’épargner des vies, des gestes d’intervention et des hospitalisations itératives. On peut regretter que sa généralisation tarde à se dessiner, alors qu’une réadaptation ambulatoire, encore moins coûteuse serait facile à mettre en place.
Effectuée par des équipes entraînées, spécialisées et compétentes, associée à la prise en charge des facteurs de risque et à l’éducation thérapeutique, la réadaptation du cardiaque est une thérapeutique à part entière, un modèle de prévention secondaire à faible coût, hélas insuffisamment conseillée et pratiquée.
Bull. Acad. Natle Méd., 2014, 198, no 3, 489-490, séance du 18 mars 2014