Résumé
La chute est la première cause de mortalité accidentelle chez le sujet âgé (environ 12 000 décès par an). Elle devient de plus en plus fréquente au fur et à mesure du vieillissement : un tiers des sujets âgés de plus de 65 ans vivant à domicile chutent au moins une fois par an et la moitié des plus de 85 ans font une ou plusieurs chutes par an. Malgré sa fréquence, elle ne doit pas être banalisée, car elle entraîne une morbidité et des dépenses de soins importantes : 10 % des chutes ont des conséquences traumatiques sévères à l’origine de 30 % des hospitalisations des personnes âgées ; même en l’absence de lésions traumatiques, la chute peut avoir des conséquences psychologiques (anxiété à la marche, peur de retomber) qui se compliquent d’un syndrome de désadaptation psychomotrice avec une restriction volontaire des activités de la vie quotidienne dans 3 % des cas.
Les facteurs de risque de chute sont nombreux et on tombe exceptionnellement pour une raison unique et précise. Lorsque la chute est récurrente, on trouve cliniquement des troubles de l’équilibre et de la marche, ainsi qu’une baisse de la force musculaire parfois dans le cadre d’une pathologie latente. Chez les chuteurs à domicile, la prise en compte des risques liés à l’environnement est nécessaire, car cela permet le développement d’actions ciblées de prévention.
En institution, il est important que les soignants intègrent que le risque de chute augmente avec le degré de sévérité de la démence, avec la prise de certaines catégories de médicaments (psychotropes surtout) ou avec l’existence d’une cachexie compliquée d’une baisse majeure de la force des quadriceps.
Environ 1,5 % de l’ensemble des dépenses de santé sont en lien avec les chutes. La majorité des coûts est due aux hospitalisations, sachant que les fractures de l’extrémité supérieure du fémur sont les plus coûteuses à traiter. Depuis quelques années, grâce à la prévention de l’ostéoporose et des chutes, le nombre annuel de fractures du col du fémur se stabilise (environ 79 500 par an) et les taux standardisés d’hospitalisation ont baissé, ainsi que les durées de séjour. Pour réduire les coûts en lien avec l’augmentation du nombre de sujets âgés, il faudra intensifier la prévention grâce à la prise en compte précoce des facteurs de fragilisation du milieu de la vie.
Summary
Falls are the leading cause of accidental death among the elderly, accounting for about 12 000 deaths per year. The risk of falls increases with age: one-third of subjects over 65 years old living in the community and half of those over 85 fall at least once a year. Despite their frequency, falls should not be trivialized, as they are associated with significant morbidity and care expenditure: 10% of falls have severe traumatic consequences, and 30% of hospital admissions for traumatic injury among elderly individuals are due to falls. Even when they have no physical repercussions, falls can have psychological effects (anxiety while walking, fear of falling), and can be complicated by a psychomotor disadaptation syndrome with voluntary restriction of activities of daily living in 30% of cases.
Risk factors for falls are numerous, and falls are rarely due a single, precise reason. Recurrent falls are associated with balance and gait impairment and decreased muscle strength, sometimes due to a latent pathological condition. Factors that may favor falls in the home must be taken into account through targeted prevention actions.
Among institutionalized populations, the risk of falls increases with the severity of dementia, the use of certain drugs (particularly psychotropics) and the existence of wasting, which leads to a decline in quadriceps strength.
About 1.5% of all health expenditure is related to falls. The majority of these costs are due to hospitalization, fractures of the proximal femur being the most costly complication. In recent years, thanks to the prevention of both osteoporosis and falls, the annual number of hip fractures has been stable at about 79 500 cases per year, standardized hospitalization rates have declined, and the average length of stay has decreased. With the increasing number of elderly people, one priority to reduce healthcare costs is to identify and correct factors of frailty in midlife, using a preventive approach.
Bull. Acad. Natle Méd., 2014, 198, no 6, 1025-1039, séance du 3 juin 2014