Communication scientifique
Séance du 1 avril 2008

Conclusion

Claude Jaffiol *

Conclusion

Obésité : agir avant la grossesse ?

Est il raisonnable d’être enceinte et obèse ?

Claude JAFFIOL *

Cette question se pose avec d’autant plus d’acuité qu’aujourd’hui un tiers de la population française est en surpoids et que de nombreuses études confirment la fréquence plus élevée des complications au cours des grossesses développées chez les femmes obèses.

L’obésité est devenue la première cause de morbidité obstétricale affectant la mère mais aussi le fœtus.

On relève six à huit fois plus d’hypertensions gravidiques, sept à vingt fois plus de diabète gestationnel, trois fois plus de morts in utéro, quatre fois plus de fausses couches et un tiers de césariennes supplémentaires. L’obésité maternelle augmente très significativement le risque de macrosomie, de malformations cardiaques ou neurologiques, entre autres les anomalies de fermeture du tube neural. Les enfants nés de mères en excès pondéral nécessitent plus souvent un séjour dans un service de réanimation néonatale. A plus long terme, ils sont exposés à devenir obèses ou diabétiques.

De nombreux faits démontrent l’impact de l’obésité sur ces complications. C’est ainsi que les enfants de femmes ayant perdu du poids après chirurgie bariatrique deviennent moins souvent obèses ou diabétiques que ceux nés de mères ayant conservé leur surcharge pondérale pendant leur grossesse.

L’obésité réduit la fertilité .

Les anomalies de l’ovulation sont trois fois plus fréquentes chez les femmes obèses, les traitements de stimulation ovarienne sont moins efficaces et nécessitent des posologies plus importantes. L’excès de graisse abdominale viscérale paraît jouer un rôle pathogène essentiel dans le dérèglement des mécanismes hormonaux de l’ovulation.

Cette situation appelle une politique de prévention urgente . Il est évident que les conseils habituellement donnés aux femmes enceintes ou désirant une grossesse ne sont pas suffisants.

Les intéressées sont rarement conscientes des risques induits par leur excès de poids.

Aussi, l’Académie nationale de médecine fait les propositions suivantes :

— Il est essentiel d’engager une réduction pondérale avant toute grossesse ou avant de commencer un traitement de stimulation ovarienne chez une femme obèse.

— La surveillance de la grossesse doit être très attentive chez les femmes obèses comportant, entre autres, la recherche périodique d’un diabète gestationnel, de complications cardio vasculaires et rénales. La croissance fœtale sera très régulièrement précisée par des contrôles échographiques effectués par un personnel spécialisé.

— Une large campagne d’information doit être engagée auprès des médecins généralistes, des agents paramédicaux, des élèves sage femmes, des centres de planning familial pour engager une lutte efficace contre l’obésité féminine.

— Des consultations spécialisées associant endocrinologues, nutritionnistes et obstétriciens devraient être ouvertes dans les centres de santé.

* Membre de l’Académie nationale de médecine.

Bull. Acad. Natle Méd., 2008, 192, no 4, 689-690, séance du 1er avril 2008