Rapport
Séance du 21 février 2017

Rapport 17-01. Avis de l’Académie nationale de médecine relatif à l’évaluation des risques sanitaires liés à la présence de baryum dans des argiles constitutives des boues thermales et à l’absence de contrôle sanitaire des boues thermales

MOTS-CLÉS : ARGILES THÉRAPEUTIQUES. BARYUM. BOUES THERMALES. CONTRÔLE SANITAIRE. PELOIDES. VIGILANCE
Opinion of the French National Academy of Medicine on the evaluation i) of the health risks related to the presence of barium in clays constituting the thermal muds and ii) the absence of sanitary control of the thermal mud.
KEY-WORDS : BARYUM. HEALTH CONTROL. PELOIDS. THERAPEUTIC CLAYS. THERMAL MUDS. VIGILANCE

Daniel BONTOUX *, Patrice QUENEAU *, Christian François ROQUES-LATRILLE *, Richard TREVES *

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêt en rapport avec le contenu de ce texte.

Résumé

Environ 400 000 curistes bénéficient de traitements par boues soit 6 000 000 de traitements annuels. L’utilisation est principalement rhumatologique avec un bénéfice patent sur les douleurs. La mise en évidence de baryum (Ba) dans une argile utilisée pour confectionner des boues thermales, les observations de la Commission d’Évaluation et de Contrôle de l’Assemblée Nationale sur l’absence de contrôle sanitaire des boues ont amené la Direction générale de la Santé à saisir l’académie sur ces deux problèmes. Les éléments décrits dans ce travail sont le fruit de l’analyse de la littérature et des échanges avec des professionnels du thermalisme. Les traitements par boues thermo-minérales sont destinés à apporter de la chaleur et d’éventuels éléments présents dans les boues, notamment minéraux ; ils consistent essentiellement en illutations et applications de cataplasmes, multiples. Les boues sont préparées et délivrées aux patients selon des modalités qui reflètent, en bonne partie, les particularités des établissements thermaux. La durée des traitements excède le plus souvent la durée minimale règlementaire de 10 mn. La tolérance des traitements par les boues paraît bonne ; les rares événements indésirables identifiés (EI) sont essentiellement des phénomènes d’intolérance thermique. Mais il n’existe pas de vigilance normalisée, systématique, de la survenue d’EI. Les personnels des établissements thermaux peuvent aussi être concernés : les agents thermaux manipulent les boues lors de l’application au malade ; les agents techniques peuvent, dans certains cas, être exposés à des poussières d’argile. Le Ba, dès lors qu’on le recherche, est mis en évidence dans les boues thermales. Il provient essentiellement des substrats, principalement les argiles, et les eaux minérales naturelles (EMN). Une concentration de Ba mesuré ne peut toutefois s’interpréter qu’en connaissant la technique de dosage utilisée. La possibilité d’un passage transcutané d’une forme de Ba disponible (forme ionisée et sels hydro-solubles) ne peut être écartée mais son importance n’est pas appréciable sur la base des données d’observation actuellement disponibles. La toxicité potentielle du baryum, dès lors que sa présence dans les boues thermales est patente, justifie d’explorer cette éventualité par des expériences pertinentes destinées notamment à apprécier son passage dans l’économie et/ou son transfert vers le patient à partir de la boue. A la différence de l’EMN, il n’existe pas de réglementation sur le contrôle et la surveillance sanitaire des boues. La certification Aquacert inclut un contrôle et une surveillance sanitaires des boues. Ces évaluations sont basées sur la transposition aux boues thermales de normes établies pour d’autres produits (boues d’épandage pour les caractéristiques physico-chimiques ; produits cosmétiques pour les critères microbiologiques) qui doivent être vérifiées, complétées et mises à jour. L’analyse des données de la certification utilement favorisée par des incitations pertinentes, devrait permettre de déterminer si la contrôle et surveillance des boues relèvent de la réglementation ou de l’obligation de moyens des établissements thermaux. Ces conclusions ont conduit à l’élaboration de préconisations qui sont proposées par l’Académie Nationale de Médecine à la Direction Générale de la Santé.

Summary

Every year about 6,000,000 mud treatments are delivered in France to 400,000 patients. The Health Department asked the perception of the National Academy of Medicine i) on barium observed in clays used for mud therapy and ii) on the opportunity to organize a health control of muds. The report was elaborated from a litterature analysis and exchanges with persons involved in mud therapy (scientists and professionnals). Findings and recommandations are exposed. Thermal muds, directly applied on the skin or as poultices, deliver heat and elements present in the substrates, alleviating pain in patients mainly with rheumatic conditions. The substrates are mainly made of clay and peat which are mixed with natural mineral water extemporaneously or previously (to favour some maturation of the muds). 5 to 8 kilogrammes of dry material are necessary for one patient’s treatment. The treatments are made of 9 to 18 applications for at least 10 minutes for each treatment. Muds are made and delivered with strong companies peculiarities. It would be suitable to have an acceptable standardization of muds preparation and delivery. The poultices would have always to be wrapped with permeable envelops. Muds applications are quite well tolerated except a few adverse events due to heat. But a systematic clinical vigilance of thermal treatments’ adverse events has to be organized in France. Workers of the thermal care facilities can be concerned as some have to handle muds and other are exposed to pulverulent clay. Protective measures (gloves, masks, …) have to be implemented for facilities workers and caregivers. Barium was observed in clays but the measured rates depend on the chemical techniques. An agreement of chemists and toxicologists is compulsory for the chemical techniques. Transdermal absorption can be discussed for ionized Barium and/or soluble salts. The data are few, the issue remains unclear. So investigations have to explore transfers of barium from muds to the blood. The data obtained from biological investigations and vigilance would draw conclusions on the (un)suitability of the presence of barium in thermal muds. These conclusions could be questionable for other heavy metals. A better knowledge of the properties of muds substrates is compulsory. A legal regulation is applied to Natural Mineral Water but not to thermal muds. Aquacert©, a certification process, based on the « Thermal Good Practices Guidelines », includes regular supervising of physical, chemical and microbiological properties of thermal muds. This assessment is based on standards made for i) soils accepting sewage sludge (chemical and physical standards) and ii) cosmetics substances applied on the skin of human beings (microbiological standards). These different standards have to be updated and completed. The assessment of the data provided by certification, favoured by relevant incentive, would be helpful for the discussion between a legal regulation and the « obligation of means » for thermal muds health control and supervising. The National Academy of Medicine i) proposes findings and recommandations to the Health Department and ii) emphasizes the need of a supervision of the implementation of the recommanded measures. 

NB : Les documents de l’annexe 3 sont disponibles en téléchargement en infra et les documents de l’annexe 3 bis sont consultables sur demande auprès du Secrétariat des Commissions de l’Académie sous forme imprimée.

Annexe 3
Document de synthèse des auditions et visites sur site
Guide des bonnes pratiques thermales
Guide de certification Aquacert
Texte réglementant le contrôle et la surveillance sanitaire des eaux minérales utilisées dans les établissements thermaux (Arrêté du 22 octobre 2013)
Règlement (CE) N° 1223/2009 paru au JO de l’Union européenne du 22.12.2009 ; L342 :59-209
Document sur les boues Ecole Nationale de la Santé Publique, 2005 (auteurs : François G, Micollier A, Rouvié I)
Décret 2007-49 du 11 Janvier 2007
Circulaire DGS/SD7A n° 2007-57 du 2 Février 2007 relative aux modifications apportées aux dispositions règlementaires du code de la santé publique par le décret n° 2007-49 du 11 Janvier 2007 relatif à la sécurité sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine

 

 

Bull. Acad. Natle Méd., 2017, 201, n°s 1-2-3, 13-38, séance du 21 février 2017