Résumé
L’athérosclérose débute pendant l’enfance et se développe silencieusement jusqu’à l’âge adulte. Sa prévalence et sa sévérité sont favorisées dès l’enfance par différents facteurs de risque, tels que l’obésité, l’hypertension artérielle et l’hyperlipémie. Ces facteurs dépendent de la prédisposition génétique des individus mais aussi de leur environnement, et notamment de l’alimentation. Cette mise au point analyse les bases scientifiques des recommandations alimentaires destinées aux enfants de la population générale dans une stratégie de prévention primaire de la pathologie cardio-vasculaire de l’adulte. En fonction de l’âge, sont analysés : les effets des facteurs nutritionnels anténatals ; la programmation bénéfique de l’allaitement maternel sur la corpulence, la tension artérielle et la cholestérolémie ; chez l’enfant plus âgé, le rôle des graisses alimentaires sur la cholestérolémie, de l’apport en sel et en potassium sur la tension artérielle, et du mode de vie sur la corpulence. Les recommandations du Comité de nutrition de la Société française de pédiatrie sont présentées.
Summary
Atherosclerosis begins during childhood. A strong relationship has been shown between the prevalence and extent of asymptomatic atherosclerosis and cardiovascular risk factors such as elevated body mass index, blood pressure and plasma lipid concentrations, starting in childhood. These risk factors are influenced by genetic predisposition, but also by environmental factors, and particularly diet. The Nutrition Committee of the French Pediatrics Society of Pediatrics has reviewed the scientific basis of dietary recommendations for children, in order to limit risk factors and thereby to reduce the risk of cardiovascular disease in later life. This review focuses on the effects of prenatal nutrition ; the beneficial effects of breast-feeding on cholesterolemia, blood pressure and corpulence in later life ; the impact of dietary lipids on plasma lipid concentrations ; the effects of salt and potassium intake on blood pressure ; and the relation between lifestyle and corpulence.
INTRODUCTION
L’athérosclérose est une des principales causes de morbidité et de mortalité dans les pays industrialisés. Ses complications (ischémie myocardique, accident vasculaire cérébral et artériopathie des membres inférieurs) ne surviennent que chez l’adulte, mais les lésions d’athérosclérose débutent très tôt et progressent de façon silencieuse pendant l’enfance. Leur développement est favorisé par des facteurs d’environnement liés à l’alimentation, à la sédentarité et au tabagisme [1]. Le but de cette mise au point est d’analyser les bases scientifiques sur lesquelles s’appuient les recommandations nutritionnelles pour la prévention de la pathologie cardio-vasculaire chez les enfants de la population générale.
ATHÉROSCLÉROSE DE L’ENFANT : HISTOIRE NATURELLE ET FACTEURS DE RISQUE
Les premières lésions d’athérosclérose sont visibles sur l’intima des artères (aorte et artères coronaires notamment) sous forme de stries lipidiques constituées par l’accumulation de cellules spumeuses d’origine macrophagique, riches en gouttelettes d’esters de cholestérol. Les stries lipidiques évoluent vers la constitution de plaques fibreuses, majoritairement formées de cellules musculaires lisses provenant de la media artérielle, qui viennent coiffer la masse des cellules spumeuses. En l’absence d’intervention, ces lésions se développent silencieusement, sur plusieurs décennies, et peuvent entraîner à l’âge adulte des complications cardiovasculaires, par obstruction de la lumière artérielle ou rupture de la plaque avec exposition et libération de substances thrombogènes, et formation d’un caillot sanguin. Des études anatomiques ont montré que des lésions de l’intima artérielle peuvent être présentes dès l’âge de deux ans [2, 3]. Leur prévalence et leur extension augmentent avec l’âge au cours de l’enfance et sont corrélées avec différents facteurs de risque :
obésité, élévation du LDL-cholestérol (LDL-C) et baisse du HDL-cholestérol (HDL-C) plasmatiques et, à un moindre degré, augmentation du taux des triglycé- rides plasmatiques et de la tension artérielle (TA) systolique [1].
Ces observations anatomiques sont confortées par l’échographie à haute résolution qui a mis en évidence chez des enfants obèses ou hypercholestérolémiques une augmentation de l’épaisseur de l’intima media carotidienne ainsi que des perturbations de la fonction endothéliale à type de baisse de la compliance et de la distensi- bilité artérielle [4, 5]. Ces anomalies artérielles périphériques sont considérées comme prédictives d’insuffisance coronarienne. Or, il existe une association entre certains facteurs de risque cardiovasculaire mesurés pendant l’enfance [hyper LDL-C, obésité, hypertension artérielle (HTA)] et l’épaisseur intima media carotidienne mesurée à l’âge adulte [6-7].
Ces données soulignent l’intérêt d’identifier, dès l’enfance, ces facteurs de risque afin de débuter une prévention.
Pour les enfants de la population générale, les mesures de prévention primaire vis-à-vis de ces facteurs de risque cardio-vasculaire consistent à intervenir sur le mode de vie, et notamment sur l’alimentation, dont le rôle sur la constitution de l’athérosclérose a été démontré par plusieurs études épidémiologiques et d’intervention.
ALIMENTATION, MODE DE VIE ET RISQUES D’ATHÉROSCLÉROSE
NUTRITION PÉRINATALE ET ATHÉROSCLÉROSE
Croissance fœtale et post-natale précoce
L’environnement nutritionnel du fœtus influence le risque cardio-vasculaire à l’âge adulte. Il existe une association entre petit poids de naissance et risque accru d’insulino-résistance, d’insuffisance coronarienne, d’HTA, et de diabète de type 2 à l’âge adulte [8]. Le risque d’insuffisance coronarienne à l’âge adulte serait plus important chez les sujets qui restent « minces » jusqu’à deux ans et augmentent leur indice de masse corporelle (IMC) rapidement après [9]. Selon d’autres études, un rattrapage rapide au cours des premiers mois peut également favoriser un niveau plus élevé de TA et prédisposer à un surpoids ultérieur [10].
Alimentation post-natale précoce
Mode d’alimentation lactée et corpulence
Les enfants allaités ont une croissance pondérale différente au cours de la première année, et pèsent en moyenne 600 g de moins à l’âge d’un an que les enfants ayant reçu une préparation pour nourrissons [11, 12]. Les méta-analyses des nombreuses études publiées, après ajustement en fonction des facteurs de confusion (poids de naissance, tabagisme maternel, antécédents familiaux d’obésité, niveau socioculturel familial) montrent que les enfants et les adolescents qui ont été allaités ont une réduction de l’ordre de 20 à 25 % du risque d’obésité par rapport à ceux nourris avec une préparation pour nourrissons [13]. Cette diminution de risque n’est plus observée à l’âge adulte.
Mode d’alimentation lactée et TA
Une méta-analyse de l’OMS a montré que chez les sujets ayant été allaités, il existe une diminution minime mais significative de la TA systolique [— 1,21 mm Hg (Intervalle de confiance (IC) à 95 % : — 1,72 à — 0,70 mm Hg)] et de la TA diastolique [— 0,49 mm Hg (IC 95 % : — 0,67 à — 0,11 mm Hg)] indépendante de l’âge [14].
Mode d’alimentation lactée et cholestérolémie
Une méta-analyse effectuée en 2002 à partir des données de trente-sept études a montré des résultats très différents en fonction de l’âge auquel la cholestérolémie a été mesurée [15]. Chez les nourrissons allaités, la cholestérolémie est plus élevée. Le mode d’alimentation initial n’influence pas la cholestérolémie au cours de l’enfance et de l’adolescence, alors que chez les adultes, la cholestérolémie est plus basse chez ceux qui ont été allaités [moyenne = — 0,18 mmol/L (IC 95 % : — 0,30 à — 0,06)].
Une revue récente a confirmé ces données chez l’adulte [16]. Des apports élevés de cholestérol à la période initiale de la vie pourraient induire une programmation « bénéfique » de la régulation du métabolisme du cholestérol.
Deux études échographiques ont montré que l’allaitement était inversement associé à l’athérosclérose, elle-même évaluée par l’épaisseur intima-media, la distensibilité artérielle et/ou la prévalence de plaques carotidiennes dans des cohortes d’adultes jeunes [17] et d’adultes âgés en moyenne de 71 ans [18]. Il n’a cependant pas été mis en évidence d’association entre allaitement et moindre morbidité et mortalité cardio-vasculaire chez l’adulte.
ALIMENTATION DE L’ENFANT APRÈS SIX MOIS ET FACTEURS DE RISQUE D’ATHÉROSCLÉROSE
Entre six mois et trois ans, une enquête d’intervention, détaillée plus loin, confirme que l’alimentation à cet âge influence les facteurs de risque cardiovasculaire [19-21].
Chez les enfants de plus de trois ans, différents facteurs alimentaires sont susceptibles d’intervenir sur les facteurs de risque d’athérosclérose. Cependant, les données disponibles concernent principalement l’adulte et les recommandations sont extrapolées à partir de ces données.
Effets de l’alimentation sur la cholestérolémie
Influence des lipides alimentaires sur la cholestérolémie
Chez l’adulte, les acides gras saturés (AGS) n’ont pas les mêmes conséquences sur le cholestérol total et sur ses fractions HDL-C et LDL-C que les acides gras mono- et polyinsaturés (AGMI et AGPI) (Tableau no 1) [22, 23].
Tableau 1. — Définitions et sources alimentaires des principaux lipides susceptibles d’intervenir sur les facteurs de risque cardiovasculaire chez l’enfant Acides gras saturés (AGS) — Acides gras ne comportant aucune double liaison — Principales sources alimentaires : charcuteries, viandes grasses, beurre, crème fraîche, laits et laitages non écrémés, fromages, pâtisseries, viennoiseries…
Acides gras mono-insaturés (AGMI) — Acides gras comportant une double liaison — Principales sources alimentaires : huiles d’olive, de colza, de tournesol et divers produits animaux Acides gras poly-insaturés (AGPI) — Acides gras comportant au moins 2 doubles liaisons. Parmi eux, deux familles : les N-6 (ou ω 6) et les N-3 (ou ω 3) dont les précurseurs respectifs l’acide linoléique et l’acide α linolénique ne sont pas synthétisables par l’homme et sont dits essentiels. Les principaux dérivés supérieurs à longue chaîne (> 18 C) sont l’acide arachidonique pour les N-6 et les acides eicosapentaénoïque (EPA) et docosahexaénoïque (DHA) pour les N-3 — Principales sources alimentaires :
— acide linoléique : huiles de tournesol, maïs, pépins de raisins — acide α linolénique : huiles de colza, noix, soja — acide arachidonique : viandes, œufs…
— EPA-DHA : poissons, surtout gras La consommation excessive d’AGS augmente la cholestérolémie et les risques cardio-vasculaires. Tous les AGS n’ont pas les mêmes effets. Les acides laurique (C ), myristique (C ) et palmitique (C ) sont les plus hypercholestérolémiants ; ils 12 14 16 augmentent le LDL-C plasmatique en diminuant l’activité des récepteurs LDL [24].
L’acide stéarique (C ), rapidement transformé en acide oléique, est relativement 18 neutre. L’effet des AGS sur le HDL-C est variable.
L’augmentation du pourcentage des apports en AGMI, dont le principal représentant est l’acide oléique, aux dépens des AGS, entraîne une diminution du cholestérol total et du LDL-C, sans réduire le HDL-C [25].
Les AGPI n-6 (acide linoléique et dérivés à longue chaîne), réduisent significativement le cholestérol total et le LDL-C. Cependant, des apports élevés diminuent aussi le HDL-C et augmentent les risques de peroxydation lipidique qui pourraient favoriser l’oxydation des LDL [23]. Dans les parois artérielles, les LDL oxydés sont pro-inflammatoires et favorisent l’accumulation de cholestérol dans les macrophages. Des apports élevés en AGPI n-6 sont déconseillés.
Les AGPI de la série n-3 affectent peu le LDL-C et le HDL-C chez les sujets normocholestérolémiques. Les AGPI n-3 à longue chaîne (AGPI-LC), l’acide eico- sapentaénoïque (EPA) et l’acide docosahexaénoïque (DHA), dont les poissons gras constituent la principale source alimentaire, font baisser les triglycérides plasmatiques [23]. L’hypertriglycéridémie chronique et un pic post-prandial élevé de lipoprotéines riches en triglycérides sont des facteurs de risque cardio-vasculaire indé- pendants de l’hypercholestérolémie [26]. Les AGPI-LC n-3 pourraient contribuer par d’autres mécanismes à la diminution du risque cardiovasculaire : diminution de l’agrégabilité plaquettaire et des eicosanoïdes pro-inflammatoires, baisse de la TA, modulation de la fonction endothéliale, prévention de l’arythmie [27].
La majorité des acides gras insaturés ont une configuration cis . L’alimentation apporte aussi des acides gras trans . Certains sont d’origine naturelle (produits laitiers, viandes de ruminants). D’autres, d’origine industrielle et produits par l’hydrogénation catalytique ou les traitements thermiques des huiles et des graisses, sont plus abondants dans l’alimentation occidentale et peuvent être délétères. Ils sont principalement apportés par les viennoiseries, les pâtisseries, les biscuits, les plats cuisinés, les barres chocolatées [28]. Les AG trans d’origine industrielle augmentent le LDL-C et peuvent diminuer le HDL-C [29]. Les AG trans d’origine animale n’ont des effets comparables qu’avec des apports élevés, bien supérieurs à ceux d’une alimentation courante [30].
Chez l’adulte, l’addition de cholestérol à la ration alimentaire augmente le cholestérol plasmatique, notamment le LDL-C, de façon moins importante que les AGS ou les acides gras trans . L’effet du cholestérol alimentaire est très variable selon les individus [31].
En pratique, dans le cadre de la prévention cardiovasculaire, il est conseillé, chez l’enfant comme chez l’adulte, de limiter les apports alimentaires en AGS, en acides gras trans et en cholestérol.
Influence des phytostérols
Les phytostérols sont des analogues structuraux du cholestérol présents dans les huiles, les margarines, le pain, les céréales, certaines graines et certains fruits et légumes, qui interfèrent avec l’absorption intestinale du cholestérol. Chez l’adulte et chez l’enfant hypercholestérolémiques, des aliments enrichis de 2 à 3 g/j de phytostérols réduisent de 10 % le LDL-C [32]. En l’absence de recul sur les effets à long terme de la consommation des aliments enrichis en phytostérols, leur usage courant n’est pas conseillé pour l’ensemble de la population pédiatrique.
Influence des fibres alimentaires solubles sur la cholestérolémie
Les fibres solubles (glucanes, pectines, gommes, psyllium), dont les principales sources sont les céréales complètes, les légumes secs, les légumes et les fruits ont un effet hypocholestérolémiant démontré, plus important chez les sujets hypercholestérolémiques [31, 33].
Consommation alimentaire de lipides et apports conseillés chez l’enfant
L’enquête INCA réalisée en France en 2006-2007 a étudié la consommation 2 alimentaire de 1 455 enfants et adolescents âgés de 3 à 17 ans [34]. L’apport lipidique moyen représentait 38 % de l’apport énergétique total (AET). Les AGS représentaient 16,7 % de l’AET de 3 à 10 ans, 15,9 % de 11 à 14 ans et 15,3 % de 15 à 17 ans.
Les apports moyens en AG trans totaux étaient estimés à 1 % de l’AET [28].
Cette enquête montre que les apports moyens de lipides totaux et d’AGS des enfants et adolescents sont supérieurs aux apports nutritionnels conseillés pour la population française en 2001. Il est en effet recommandé à partir de 3 ans de limiter les lipides totaux à 30 à 35 % de l’AET, les AGS à 8 à 12 % de l’AET et le cholestérol à 300 mg/j [35, 36]. La plupart des recommandations pour l’ensemble de la population proposent que les acides gras trans totaux représentent moins de 2 % de l’AET [28].
Effet de l’alimentation sur d’autres facteurs de risque d’athérosclérose
Alimentation et tension artérielle
Dans la population adulte, l’élévation de la TA est un facteur majeur de risque de maladies cardiovasculaires. L’excès de poids, l’apport élevé de sodium, l’apport faible de potassium, l’apport élevé d’alcool et la sédentarité sont les principaux facteurs de risque favorisant l’élévation de la TA [37]. Chez les enfants et adolescents américains âgés de 8 à 17 ans, la TA a augmenté en une dizaine d’années (entre 1988-1994 et 1990-2000) de façon significative de 1,4 mm de mercure pour la pression systolique et de 3,2 mm de mercure pour la tension diastolique ; parallèlement, le pourcentage de sujets en surpoids a augmenté de 11,7 % à 16,3 % [38].
L’intérêt d’éviter une élévation de la TA est d’autant plus grand que les enfants et adolescents dont la TA se situe à la partie supérieure de la distribution ont un risque plus grand d’avoir une TA élevée à l’âge adulte [39].
L’effet de la consommation de sodium sur la TA est moins bien établi chez l’enfant [40]. En France, la consommation moyenne de sel des enfants entre 3 et 17 ans est estimée à 6,9 g/j dans l’enquête ENNS 2006. Elle est supérieure à 12 g/j chez 9 % des garçons et 5 % des filles, et chez 23 % des garçons de 15 à 17 ans. Si on veut diminuer la consommation de sel dans la population générale, il faut que les enfants prennent l’habitude de consommer une alimentation moins salée.
La relation entre l’apport de potassium et la TA a été peu étudiée chez l’enfant. Dans l’étude de Geleijnse, qui a porté sur 233 enfants et adolescents âgés de 5 à 17 ans suivis pendant sept ans, l’élévation annuelle de la TA a été significativement plus basse chez les sujets dont l’apport en potassium était le plus élevé [41]. On ne dispose pas actuellement d’estimation des apports en potassium des enfants en France.
Pour prévenir l’élévation de la TA chez l’enfant, il est donc recommandé d’éviter une prise de poids excessive, de pratiquer une activité physique régulière, de consommer une alimentation moins riche en sodium, et plus riche en fruits, légumes, fibres et produits laitiers à teneur réduite en lipides [42].
Alimentation, mode de vie et corpulence
La morbidité et la mortalité par maladie cardio-vasculaire sont augmentées chez les adultes qui étaient en surpoids ou obèses à l’adolescence [43, 44]. Ceci peut être lié à la persistance de l’obésité à l’âge adulte, constatée chez environ les deux tiers des enfants de plus de dix ans obèses [45]. En outre, le risque de maladie cardiovasculaire reste augmenté chez les adultes qui ont été en surcharge pondérale à l’adolescence, quel qu’ait été le devenir de leur corpulence [43]. Ce risque indépendant de l’évolution pondérale ultérieure peut être expliqué par les anomalies arté- rielles mises en évidence par les techniques d’ultrasons à haute résolution chez des enfants et adolescents obèses : diminution de la dilatation endothélio-dépendante de l’artère radiale, diminution de l’élasticité et augmentation de l’épaisseur de l’intima/média carotidienne [4, 46].
La surcharge pondérale et l’obésité chez l’enfant et l’adolescent majorent le risque de maladies cardio-vasculaires à l’âge adulte. Chez des enfants obèses, l’association d’une prise en charge diététique associée à un programme structuré d’activité physique pendant 6 à 12 mois permet non seulement de diminuer certains facteurs de risque mais aussi d’améliorer la fonction artérielle [47, 48].
ÉTUDES D’INTERVENTION
Les études d’intervention cherchant à évaluer les effets de modifications alimentaires sur les facteurs de risque d’athérosclérose sont peu nombreuses en pédiatrie [19-21, 49, 50].
L’ÉTUDE FINLANDAISE DISC (Dietary Intervention Study in Children) a évalué l’innocuité et l’efficacité à long terme d’une alimentation contrôlée en graisses chez des enfants ayant un LDL cholestérol modérément élevé [49, 50]. Six cent soixante-trois enfants âgés de huit à dix ans ayant un LDL cholestérol plasmatique compris entre le 80e et le 98e centile de la distribution (112-165 mg/dL) ont été randomisés pour une intervention diététique spécifique ou des recommandations habituelles. Cette intervention était basée sur les recommandations de niveau 2 du National Cholesterol Education Program (NCEP) [36] (moins de 28 % des apports énergétiques par les lipides, moins de 8 % par les AGS et moins de 75 mg/1 000 kcal de cholestérol par jour). Pendant la durée de la surveillance, la croissance et le développement pubertaire ont été identiques dans les deux groupes. Il a été observé une baisse significative du LDL-C dans le groupe intervention dès la 1ère année, sans carence concomitante. Cette étude montre qu’une alimentation à faible teneur en graisses ne comporte pas de risque chez l’enfant ayant un LDL cholestérol modé- rément élevé et peut avoir un effet bénéfique sur la santé. On ne peut pas cependant extrapoler ces recommandations à l’ensemble de la population pédiatrique.
L’ÉTUDE FINLANDAISE STRIP (Special Turku Coronary Risk Factor Intervention Project) [19-21] a évalué les effets à long terme d’une alimentation pauvre en
AGS, débutée précocement chez des nourrissons. Plus de mille nourrissons en bonne santé ont été inclus et randomisés à l’âge de sept mois ; le groupe intervention recevait des conseils diététiques et de mode de vie individualisés deux fois par an : l’allaitement était encouragé jusqu’à l’âge de un an, puis les conseils avaient pour objectifs que les graisses alimentaires et les AGS constituent respectivement 30 à 35 % et moins de 10 % des apports énergétiques quotidiens à partir de l’âge de trois ans. En fin de suivi, à l’âge de dix ans, il a été observé chez les garçons du groupe intervention des concentrations plasmatiques de cholestérol inférieures de 5 % mais surtout une fonction endothéliale artérielle améliorée par rapport au groupe contrôle. La croissance était identique dans les deux groupes, mais le pourcentage de surpoids était significativement inférieur chez les filles du groupe intervention (10,2 % contre 18,8 % dans le groupe contrôle). Cette étude révèle que des recommandations diététiques ciblées sur la restriction en AGS peuvent être débutées chez les enfants jeunes sans consé- quence délétère sur la croissance, avec des effets bénéfiques sur les facteurs de risque d’athérosclérose et sur la fonction artérielle des garçons.
CONCLUSION
L’athérosclérose commence à se développer pendant l’enfance. La prévention des principaux facteurs de risque (hypercholestérolémie, obésité, HTA) doit commencer dès le plus jeune âge.
L’ensemble des données présentées ci-dessus a conduit le Comité de nutrition de la Société française de pédiatrie aux propositions suivantes :
Chez la femme enceinte — Éviter les facteurs environnementaux de malnutrition fœtale : alcool, tabac, et régimes restrictifs inadaptés.
Avant l’âge de trois ans — Recommander l’allaitement maternel, — Dépister les excès de gain pondéral, — Habituer les nourrissons et les enfants en bas âge à consommer une alimentation peu salée, — Donner une alimentation équilibrée sans restriction des apports lipidiques.
Après l’âge de trois ans — Limiter les aliments riches en acides gras saturés, en acides gras trans d’origine industrielle, et en cholestérol, et augmenter proportionnellement les apports en aliments riches en acides gras mono- et polyinsaturés, — Limiter les graisses d’origine animale et privilégier les matières grasses d’origine végétale, — Encourager la consommation de viandes maigres, de volailles, de lait demiécrémé, de légumes, de fruits, d’aliments riches en fibres et de poissons gras, sources d’EPA et de DHA, — Limiter la consommation de sel et augmenter la consommation de fruits et de légumes, sources de potassium, dont l’effet est favorable sur la TA, — Tracer la courbe d’IMC afin de prévenir ou dépister précocement la surcharge pondérale et l’obésité qui majorent le risque d’athérosclérose et de maladies cardio-vasculaires à l’âge adulte.
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