Communiqué
Séance du 10 juin 2008

Alerte aux cigarettes aromatisées, dites cigarettes « bonbons »

MOTS-CLÉS : adolescent. motivation.. sevrage tabagique. tabac. tabagisme

Gérard Dubois et Roger Nordmann

Gérard DUBOIS** et Roger NORDMANN*

L’interdiction de la publicité ainsi que l’augmentation des prix (surtout celle liée à l’accroissement de 40 % des taxes en 2003) ont conduit à une diminution du tabagisme des jeunes Français. Alors que 80 % des jeunes de seize ans déclaraient en 1999 avoir fumé au moins une cigarette au cours de leur vie, cette prévalence était réduite à 60 % (58 % des garçons et 61 % des filles) en 2007. Parallèlement, l’usage quotidien passait de 31 à 17 %.

Cette évolution favorable apparaît cependant inversée depuis peu, notamment chez les plus jeunes, comme en témoignent les résultats de l’enquête de l’association « Paris sans Tabac » qui surveille chaque année 2 % des élèves de l’Académie de Paris. En effet, ceux-ci révèlent une envolée en 2008 de la prévalence du tabagisme des très jeunes, passant de 5 à 12 % à quatorze ans, de 14 à 18 % à seize ans, de 20 à 24 % à dix-sept ans. Cette évolution, fort inquiétante, est certainement liée, pour partie au moins, à l’usage de cigarettes aromatisées au chocolat, à la vanille ou à la réglisse vendues principalement sous deux marques. L’une est de couleur rose et vise les filles. L’autre est noire, se veut diabolique et vise les garçons. Commercialisées depuis environ deux ans, elles arborent un « packaging » destiné à plaire aux plus jeunes. Ces nouvelles cigarettes sont fumées par 30 % des fumeurs âgés de treize ans (5 % à quinze ans). Elles participent donc lourdement à l’initiation tabagique et constituent un piège redoutable que les enfants appellent cigarettes « bonbons ». La dépendance au tabac est très rapide et « fidélise » le jeune consommateur trompé par la saveur agréable de ces produits dont la dangerosité est cependant identique aux autres cigarettes, car elles fournissent 10 mg de goudrons, 10 mg de CO et 0,8 mg de nicotine.

Il est donc nécessaire de s’opposer à cette stratégie de reconquête de l’industrie du tabac. A cet effet, l’Académie nationale de médecine propose :

— d’interdire ces cigarettes et de veiller à une actualisation de la législation et de la réglementation des produits du tabac (ingrédients et additifs) aux niveaux français, européen et international avec l’OMS, — d’appliquer strictement l’interdiction de vente de tout produit du tabac aux moins de seize ans, — de renouveler les campagnes de prévention contre la banalisation de l’usage des produits du tabac, quelle qu’en soit la nature, et d’agir grâce à une politique de taxation de ces produits analogue à celle appliquée en 2003.

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 10 juin 2008, a adopté le texte de ce communiqué à l’unanimité.

 

<p>* Membre de l’Académie nationale de médecine, Président de la Commission Addictions ** Membre correspondant de l’Académie nationale de médecine</p>