Communication scientifique
Session of 16 novembre 2022

À propos des prescriptions hors Autorisation de mise sur le marché (AMM) : réflexions sur l’évolution de l’image de l’AMM chez le prescripteur et dans le public en France

MOTS-CLÉS : Revue des pratiques de prescription des médicaments
Some factors influencing in France the prescribers and public perception of the Drug marketing authorization decisions
KEY-WORDS : Drug utilization review

G. Bouvenot

G. Bouvenot déclare des liens ponctuels (conseils en développement) avec : GSK, Sanofi, Vifor Pharma, SageTherapeutics, Steba Biotech, Alnylan, TesaroBio France, Insmed, GenSight, Pierre Fabre médicaments.

Résumé

L’image sacro-sainte que le prescripteur et le public se faisaient de l’Autorisation de mise sur le marché (AMM) il y a trois ou quatre décennies a notablement évolué depuis quelques années, suite à la prise en compte – parfois polémique – de certaines de ses insuffisances ou de ses faiblesses. Le texte de cet article évoque quelques-uns des facteurs pouvant expliquer cette évolution des mentalités, délétère pour la sécurité des patients. Parmi ces facteurs, on mentionnera le retard bien compréhensible de certaines AMM sur les données acquises de la science, un formalisme parfois excessif et contre-productif ou encore de possibles discordances d’avis entre Agences responsables de l’enregistrement des médicaments. Mais il faut surtout retenir certaines AMM fragiles, d’image dégradée, prématurément octroyées sur des niveaux de preuve non optimaux dans le but d’accélérer l’accès des malades aux nouveaux médicaments dits « prometteurs ». Enfin, l’intervention des patients, désormais très importante dans le domaine, est un phénomène de société à ne pas méconnaître, soit qu’ils se méfient du médicament et de son évaluation ou qu’ils fassent pression sur le prescripteur pour obtenir une prescription hors AMM vantée dans les réseaux sociaux. Il n’en demeure pas moins que l’AMM reste la référence et le repère à respecter pour une prescription médicamenteuse optimale, sécurisée et responsable. Un point positif est que la pandémie due au COVID-19 aura permis aux journalistes de mieux maîtriser les notions de niveau de preuve et de balance bénéfices/risques. Par la même occasion, elle aura permis au public, dans sa très grande majorité, de comprendre ce qu’est une AMM et d’en admettre la nécessité, malgré l’érosion de sa confiance dans l’expertise scientifique et sa suspicion vis-à-vis des institutions de santé. S’il n’y a pas lieu de regretter que davantage de transparence et de démocratie sanitaire permettent au citoyen de s’approprier la signification et les déterminants de l’AMM, il y a lieu, pour les spécialistes de l’évaluation, d’appeler au maintien de sa rigueur dans l’intérêt même des patients et pour les autorités de santé de la maintenir.

Summary

The sacrosanct image that prescribers and the public had of Drug Marketing Authorization (AMM) three or four decades ago has changed significantly over the past few years, following the recognition, – sometimes controversial – of some of its shortcomings or weaknesses. The text of this article discusses some of the factors that may explain this change in mentality, which is harmful to patient safety. Among these factors, we can mention the understandable delay of some AMMs on the data acquired from science, a sometimes excessive and counterproductive formalism, or even possible disagreements between the Agencies responsible for the registration of medicinal products. But above all, it is necessary to retain that some AMMs are fragile, with a degraded image, prematurely granted on sub-optimal levels of evidence with the aim of accelerating patients’ access to new, so-called “promising” drugs. Finally, the intervention of patients, now very important in this field, is a social phenomenon that should not be overlooked, either because they are wary of the drug and its evaluation or because they put pressure on the prescriber to obtain an off-label prescription touted in social networks. The fact remains that the AMM remains the reference and the benchmark to be respected for an optimal, secure and responsible drug prescription. A positive point is that the pandemic due to COVID-19 has enabled journalists to better master the notions of level of proof and benefit/risk balance. At the same time, it will have enabled the vast majority of the public to understand what AMM is and to accept, for the most part, the need for it, despite the erosion of their confidence in scientific expertise and their suspicion towards the health institutions. If there is no reason to regret that more transparency and health democracy allow the citizen to appropriate the meaning and the determinants of AMM, there is reason, for the evaluation specialists to call for maintaining its rigor in the very interest of patients and for health authorities to maintain it.

Accès sur le site Science Direct : https://doi.org/10.1016/j.banm.2022.12.009

Accès sur le site EM Consulte

Académie nationale de médecine, 16, rue Bonaparte, 75006 Paris, France

Bull Acad Natl Med 2023;207:165-170. Doi : 10.1016/j.banm.2022.12.009