Rapport
Session of 30 novembre 2004

Sur la demande d’autorisation d’exploiter, en tant qu’eau minérale naturelle, telle qu’elle se présente à l’émergence, après transport à distance l’eau des captages « Eugénie », « César » et « Grottes Rouges » situés sur la commune de Royat et l’eau des captages « Saint-Mart » et « Auraline » situés sur la commune de Chamalières (Puy-de-Dôme)

MOTS-CLÉS : eau minéralisée. source « auraline » (puy-de-dôme).. source « césar » (puyde-dôme). source « eugénie » (puy-de-dôme). source « saint-mart » (puy-de-dôme)
KEY-WORDS : mineral waters .

Jean-Pierre Nicolas (au nom de la Commission XI - climatisme, thermalisme, eaux minérales)

RAPPORT

Au nom de la Commission no XI (Climatisme — Thermalisme — Eaux minérales)

Sur la demande d’autorisation d’exploiter en tant qu’eau minérale naturelle, telle qu’elle se présente à l’émergence et après transport à distance, l’eau des captages « Eugénie », « César » et « Grottes Rouges » situés sur la commune de Royat et l’eau des captages « Saint-Mart » et « Auraline » situés sur la commune de Chamalières (Puy-de-Dôme).

Jean-Pierre NICOLAS *

CALENDRIER 8 Juin 1995 : Par pétition présentée par M. le Président du Conseil d’Exploitation de la Régie Municipale des Eaux Minérales de Royat, celui-ci sollicite l’autorisation d’exploiter, en tant qu’eau minérale naturelle, à l’émergence et après transport à distance, l’eau des captages « César », « Eugénie », « Grottes Rouges » situés sur la commune de Royat (Puy-deDôme) et l’eau des captages « Saint-Mart » et « Auraline » situés sur la commune de Chamalières (Puy-de-Dôme).

Cette demande est faite en application des articles R. 1322-1 & R. 1322-10 du Code de la Santé Publique.

10 octobre 1996 : Avis favorable de la DDASS ;

25 Mars 1997 : Avis favorable de la DRIRE ;

Février 2003 : Rapport « Amélioration de la connaissance des ressources en eaux souterraines des sites thermaux en Auvergne », site de RoyatChamalières (Puy-de-Dôme) du BRGM ;

— Analyses du Laboratoire d’Etudes et de Recherches en Hydrologie de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments sur des prélève-
ments effectués les 17 Octobre 2001, 23 Avril 2002, 25 Novembre 2002 et 27 Mai 2003 ;

21 Juin 2004 : Avis de l’Agence Française de Sécurité des Aliments, séance du 3 Février 2004 ;

2 Juillet 2004 : Lettre de la Direction Générale de la Santé – Sous Direction de la Gestion des Risques des Milieux au Secrétaire Perpétuel de l’Acadé- mie Nationale de Médecine.

CONTEXTE GÉNÉRAL DE LA DEMANDE

Par lettre en date du 2 Juillet 2004, le Ministre de la Santé, de la Famille et des Personnes Handicapées, sollicite l’avis de l’Académie Nationale de Médecine sur la demande d’exploiter, en tant qu’eau minérale naturelle, telle qu’elle se présente à l’émergence et après transport à distance, l’eau des captages « Eugénie », « César » et « Grottes Rouges » situés sur la commune de Royat (Puy-de-Dôme) et l’eau des captages « Saint-Mart » et « Auraline » situés sur la commune de Chamalières (Puy-de-Dôme).

Les communes de Royat et Chamalières sont situées au centre du département du Puy-de-Dôme, à 5 kilomètres environ au sud-ouest de ClermontFerrand.

Les captages sont situés dans la zone urbanisée des communes de Royat et Chamalières de part et d’autre du ruisseau de la Tiretaine. Le captage Auraline est situé à quelques dizaines de mètres de ce ruisseau, qui dans ce secteur, est couvert.

L’établissement thermal comporte plusieurs émergences de sources dont certaines sont localisées sur le territoire de Chamalières (Auraline – Saint-Mart) et d’autres sur celui de Royat (Eugénie – Grottes Rouges – César). Il est géré par la Régie Municipale des eaux minérales de Royat. La saison thermale se déroule de fin mars à fin octobre.

Les eaux thermominérales de Royat émergeaient naturellement à l’époque Romaine.

Le circuit de ces eaux n’est pas identifié dans sa totalité mais de nombreux travaux sur le site ont permis de poser le schéma classique suivant :

L’eau de pluie s’infiltre dans le substratum granitique de la chaîne volcanique des Puy et éventuellement de la Limagne.

La profondeur est estimée à 3450-4600 m. Le temps de séjour n’est pas connu, il est supérieur à 50 ans et peut atteindre quelques milliers d’années. La présence de gaz carbonique facilite la minéralisation de l’eau.

Ces eaux sont de type chloro-bicarbonaté. Les analyses chimiques montrent que toutes les eaux captées sur le site thermal de Royat sont de même type :

il y a unicité de la ressource.

Au cours du circuit ascendant des eaux, celles-ci se mélangent avec des eaux d’origine moins profonde et donc moins minéralisées.

Les principales indications thérapeutiques sont les maladies cardiovasculaires et la rhumatologie ; elles comportent : l’administration de gaz thermal , les balnéothérapies, les cures de boisson et les applications de boue thermale .

Cette demande concerne les différentes sources de cet Etablissement thermal.

— Grottes Rouges

Le captage Grottes Rouges a été réalisé du 8 au 14 Janvier 1992. Il constitue une réserve supplémentaire pour la commune de Royat (projet d’un Centre thermo ludique) ; il n’alimente pas l’Etablissement thermal.

— Eugénie

Le captage Eugénie a été réalisé du 18 au 23 Décembre 1991 et du 6 au 8 janvier 1992. Il résulte du recaptage du puits Eugénie (autorisation ministérielle du 15 Décembre 1843, déclaration d’intérêt public du 8 décembre 1860 et décret instituant un périmètre de protection du 26 Février 1880), il est actuellement exploité en buvette, pour des bains, soins ORL et couloir de marche. L’ancien puits sera obturé dès que l’autorisation d’exploiter le nouveau captage Eugénie sera accordée.

— Saint-Mart

L’autorisation d’exploiter, en tant qu’eau minérale naturelle, à l’émergence l’eau du captage Saint-Mart, a été accordée par arrêté ministériel du 25 Juin 1877.

Comme pour le captage César, la demande de régularisation au titre du décret de 1957 est restée sans suite.

Le captage, réalisé en 1875 (puits de 7,5 m de profondeur), n’a jamais fait l’objet de modification à l’exception d’une amélioration de son équipement de pompage en 1960 puis en 1981. Après la construction du nouvel Etablissement thermal, sa profondeur a été ramenée à 6,85 m par rapport au sous-sol de ce bâtiment. La pétition concerne également la régularisation de la situation administrative de ce captage.

— César

L’autorisation d’exploiter, en tant qu’eau minérale naturelle à l’émergence, l’eau du captage César a été accordée par arrêté ministériel du 12 décembre 1878.

Une demande de régularisation de cette autorisation, au titre du décret de 1957 sur la police des eaux minérales naturelles, pour ce qui concerne l’exploitation de cette source à l’émergence et après transport, a été déposée en septembre 1957, elle est restée sans suite.

La vétusté du captage d’origine a entraîné sa réfection en 1971-1972. La pétition vise à régulariser la situation administrative de ce captage après ces travaux.

— Auraline

Enfin, la demande d’autorisation d’exploiter, en tant qu’eau minérale naturelle, à l’émergence l’eau du captage Auraline a été déposée le 16 Janvier 1987. La pétition vise également la régularisation de la situation administrative de ce captage.

ANALYSE DU DOSSIER DE LA DEMANDE

Au vu des informations fournies :

— d’une part dans le dossier concernant : le contexte hydrologique, l’étude des têtes de captage, le transport, la qualité de l’eau ainsi que les caractéristiques physico-chimiques, les analyses bactériologiques, la composition en éléments traces, en contaminants, en radioéléments, — d’autre part d’après l’avis de l’AFSSA du 21 juin 2004 :

A —

Le captage « Grottes Rouges » a fait l’objet de trois campagnes de prélèvements, celle du 25/11/2002 a révélé une contamination par

Legionella pneumophila sérogroupe 1 (20 000 dans 1000 ml) tandis que les paramètres physico-chimiques faisaient ressortir des fluctuations très importantes. La tête de forage a fait l’objet de différentes modifications (pompe, robinet de prélèvement, bride…) il est important de relever que ce captage, ayant pour seul abri, une caravane de chantier est situé au milieu d’un parking. Il en résulte qu’au vu des informations fournies dans le dossier et des résultats des analyses, l’eau de captage « Grottes Rouges » ne répond pas aux dispositions et aux exigences sanitaires applicables aux eaux minérales naturelles .

B — En ce qui concerne le puits « Eugénie » autorisé le 15 Décembre 1843 qui alimente actuellement l’Établissement thermal, il doit être remplacé par un nouveau captage « Eugénie » dont la conception de l’équipement correspond aux règles de l’art ; aucun prélèvement réglementaire n’a pu être effectué à son émergence car la mise en route de la pompe provoque l’arrêt de l’alimentation.

C — Les eaux des captages « César », « Saint-Mart » et « Auraline », caractérisées par un même profil de type chloro-bicarbonaté calcique et
sodique, répondent aux exigences sanitaires applicables aux eaux minérales naturelles à l’émergence et après transport.

Cependant :

a) Du point de vue hydrogéologique, les émergences « César », Saint-Mart » et « Auraline » exploitent le même gisement d’eau minérale naturelle, cependant des différences de température sont observées entre les diverses émergences, elles peuvent être dues à des mélanges avec des eaux d’infiltration plus récentes et plus vulnérables et à une éventuelle contamination, bien que jusqu’à présent aucune trace de pollution n’ait été décelée. Aucun des moyens de mesure du débit, de la température et de la conductivité sur la tête de chacun des captages et d’aménagement du périmètre sanitaire d’émergence du captage « Auraline » ne sont mis en place ;

b) L’eau des captages «

César », « Saint-Mart » et « Auraline » contient de l’ arsenic (19 µg César à 367 µg/l Saint-Mart ) et du bore (0,44 mg César à 8,01 mg/L

Auraline ) à des concentrations très supérieures aux valeurs limites préconisées par l’AFSSA (avis du 10 Juillet 2001 concernant les eaux minérales embouteillées). Les activités en radioéléments alpha globales (« César », « Saint-Mart » et « Auraline ») sont supérieures à la valeur guide de 0,1 Bq/L recommandée par l’OMS tandis que les activités béta globales (« Saint-Mart » et « Auraline ») sont supérieures à la valeur guide de 1 Bq/L (Laboratoire Santé Environnement Hygiène de Lyon).

Ces eaux ne peuvent être consommées que dans le cadre d’une cure thermale et sous prescription médicale ;

c) Une contamination par des

Pseudomonas stutzeri sur le point de transport du captage «

Saint-Mart » a été montrée lors de la première campagne de prélèvement. Cette contamination n’a pas été confirmée par la suite. En revanche, un point d’usage alimenté par ce captage était contaminé par des Pseudomonas lors de deux campagnes. Cette constatation doit conduire à un entretien adapté et un suivi bactériologique renforcé au point d’arrivée du transport à distance du captage « Saint-Mart » et du réseau de soins qu’il dessert.

 

CONCLUSIONS

Au vu des informations figurant dans le dossier, la Commission XI, réunie le 9 novembre 2004 sous la présidence du Professeur Claude Boudène, propose d’émettre :

1 — Un avis défavorable concernant le captage de Grottes Rouges , compte tenu :

— des fluctuations importantes des caractéristiques essentielles — des modifications des installations de la tête de captage à chaque campagne de prélèvement — de la contamination par des Legionella pneumophila sérogroupe 1 — de la protection sommaire du captage :

Elle souhaite qu’avant toute nouvelle demande d’autorisation : l’équipement du captage envisagé soit achevé et que soient menées des études complémentaires, afin de préciser le régime d’exploitation du captage, de démontrer la stabilité des caractéristiques essentielles de l’eau pour le régime d’exploitation envisagé et d’attester, par un suivi analytique renforcé, que l’eau est exempte de toute contamination microbiologique.

2 — Un avis de sursis à statuer concernant :

a) le captage «

Eugénie », et demande :

— que soit révisé le périmètre de protection institué en 1880 pour le puits « Eugénie » en tenant compte des connaissances hydrogéologiques actuelles et de l’évolution de l’urbanisation des communes de Royat et de Chamalières ;

— que soient menées des études complémentaires afin de préciser le régime d’exploitation du captage ;

— qu’une vigilance particulière veille aux conditions d’abandon de l’ancien puits « Eugénie ».

b) les eaux de captage «

Saint-Mart », « César », et « Auraline », — que des précisions sur les différentes eaux soient apportées. Il est impossible de donner une réponse globale pour des eaux si différentes ;

— que l’origine, les usages et l’utilisation de chaque eau soient connus et que des études complémentaires soient engagées concernant une éventuelle interdépendance des différents captages.

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 30 novembre 2004, a adopté le texte de ce rapport à l’unanimité.

 

* Membre de l’Académie nationale de médecine.

Bull. Acad. Natle Méd., 2004, 188, no 8, 1479-1484, séance du 30 novembre 2004