Publié le 15 mai 2018

Les complications cardio-vasculaires du diabète sont le thème de cette séance organisée par Michel Komajda.

Elle a comporté trois communications de Fabrice Bonnet (CHU de Rennes), Bernard Charbonnel (CHU de Nantes) et Michel Komajda (Paris, Groupe Hospitalier Saint Joseph).

En introduction, M.Komajda souligne l’importance du sujet: le diabète est une pathologie de masse concernant 400 millions de personnes. Les progrès de la connaissance et plusieurs études récentes dont certaines avec un long recul apportent des perspectives nouvelles dans la compréhension et la prise en charge des complications cardio-vasculaires du diabète.

  • Le risque cardio-vasculaire du diabète : les évidences (Fabrice Bonnet) 

– L’objectif principal du traitement est la prévention des complications microangiopathiques et cardio-vasculaires qui sont la première cause de mortalité des patients diabétiques; leur risque de survenue est deux fois plus important chez le diabétique par rapport à une population générale d’âge équivalent, particulièrement avant 55 ans soulignant l’intérêt d’une prise en charge précoce.

– L’artériopathie des membres inférieurs est trois fois plus fréquente chez le patient diabétique.

– Le diabète est un facteur de risque indépendant pour l’AVC et, en France, l’incidence de l’AVC est supérieure à celle de l’infarctus du myocarde chez le patient diabétique.

– Le sur-risque d’infarctus ou d’AVC associé au diabète est plus élevé chez la femme que chez l’homme (+27% pour l’AVC) et le pronostic reste plus défavorable.

– Le sur-risque de mortalité est comparable chez les patients diabétiques de type 2 et non diabétiques en prévention secondaire.

Ces données épidémiologiques soulignent l’importance de la prévention des complications cardio-vasculaires en prévention primaire par la prise en charge des facteurs de risque associés (surpoids, hypertension artérielle, dyslipidémie, tabagisme, sédentarité) et suggèrent la nécessité d’optimiser la prévention cardio-vasculaire chez les patients diabétiques et notamment les femmes.

> Texte complet de la communication de Fabrice BONNET

 

  • Le contrôle glycémique réduit-il les complications cardio-vasculaires du diabète de type 2 ? (Bernard Charbonnel)

En 2018, plus de 20 études de morbi-mortalité ont cherché à répondre à cette question. Les études d’observation montrent une corrélation forte entre le niveau d’HbA1c et le risque cardio-vasculaire du diabète de type 2; le risque de morbi-mortalité cardio-vasculaire est augmenté de 18% par point d’HbA1c. Cependant, ces études ne permettent pas d’éliminer la possibilité d’une association sans valeur de causalité en raison d’éventuels facteurs confondants. Des études d’intervention sont ainsi importantes, leurs objectifs étant de vérifier si le strict contrôle glycémique permet une meilleure prévention des complications cardio-vasculaires qu’un contrôle glycémique moins strict. Parmi les 4 études UKPDS, ACCORD, ADVANCE et VADT, aucune prise individuellement n’a conclu à une différence statistiquement significative à court terme; en revanche, cette différence devenait significative après un suivi de cinq à dix ans en moyenne. Un bénéfice cardio-vasculaire du strict contrôle glycémique est probable mais avec un niveau de preuve faible. En outre, un éventuel sur-risque cardio-vasculaire lié à un sur-traitement avec des médications à risque hypoglycémique est actuellement débattu. Les méta-analyses de ces 4 études suggèrent qu’un strict contrôle glycémique pendant 5 ans réduit le risque coronarien de 15% par point en moins d’HbA1c, ne réduit pas le risque d’AVC, est sans effet sur la mortalité. Enfin, tous les antidiabétiques ne sont pas équivalents vis-à-vis du risque cardio-vasculaire, certains antidiabétiques modernes ayant montré une meilleure efficacité. Le traitement du diabète de type 2 relève aujourd’hui d’une double stratégie: classique de baisse de la glycémie et de prévention spécifique de ses complications.

> Texte complet de la communication de Bernard CHARBONNEL

Entretien avec le professeur Bernard Charbonnel le 10/04/2018 à l’ANM :

  • Diabète et insuffisance cardiaque : données épidémiologiques et implications thérapeutiques (Michel Komajda)

L’association diabète de type 2 – insuffisance cardiaque est fréquente et induit un risque accru d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (+30% globalement et +20% par point d’augmentation de l’HbA1c) et un risque accru de mortalité. Globalement, le diabète ne modifie pas le traitement de l’insuffisance cardiaque mais plusieurs points doivent être soulignés:

– Les inhibiteurs du système rénine angiotensine aldostérone augmentent le risque d’hyperkaliémie et/ou de détérioration de la fonction rénale en cas d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection altérée.

– La metformine et l’insuline n’augmentent pas le risque d’insuffisance cardiaque alors que ce risque est augmenté pour les sulfamides hypoglycémiants de première génération dans les études observationnelles.

– Les glitazones (pioglitazone et rosiglitazone) sont associées à un risque bien documenté de décompensation d’insuffisance cardiaque.

– Dans les inhibiteurs de la DPP4, la saxagliptine est associée à un sur-risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque, sur-risque actuellement inexpliqué; en revanche, ce sur-risque n’existe pas pour la sitagliptine. Un doute subsiste pour les analogues du glucagon like peptide (GLP1) comme le liraglutide : si les grandes études de morbi-mortalité chez les diabétiques à haut risque cardio-vasculaire (LEADER et SUSTAIN6) ne montrent pas d’augmentation du risque d’insuffisance cardiaque, deux études avec insuffisance cardiaque avérée donnent un signal négatif peut-être lié à une augmentation de fréquence cardiaque induite par cette classe de médicaments; il faut donc rester prudent dans la prescription des analogues du GLP1 chez les diabétiques avec dysfonction ventriculaire gauche à type de fraction d’éjection diminuée ou insuffisance cardiaque avérée.

– Parmi les inhibiteurs du co-transporteur sodium glucose (SGLT), deux inhibiteurs sélectifs du SGLT2 (empaglifozine et canaglifozine) réduisent significativement la mortalité cardio-vasculaire et le risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque; ces résultats justifient les études de morbi-mortalité en cours dans l’insuffisance cardiaque, avec ou sans diabète.

>Texte complet de la communication de Michel KOMAJADA

Entretien avec le professeur Michel Komajda le 10/04/2018 à l’ANM :