Publié le 26 avril 2024

Risques pour les enfants en contact étroit avec des animaux de compagnie non traditionnels (ACNT), dans les lieux publics

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Risques pour les enfants en contact étroit avec des animaux de compagnie non traditionnels (ACNT), dans les lieux publics[1]

Communiqué de l’Académie nationale de médecine

26 avril 2024

 

Dans différents lieux publics, des enfants peuvent être exposés aux risques liés à un contact étroit avec des « animaux de compagnie non traditionnels » (ACNT), qu’ils soient domestiques (lapin, ruminants, porc, volailles…) ou non domestiques [rongeurs (rats, souris, …), hérissons, reptiles, amphibiens, oiseaux] (1).

Zoos et parcs aquatiques

Si le cadre réglementaire y impose des mesures de « biosécurité » (2) permettant de limiter les risques, la frontière est parfois floue entre le public et les animaux, et des risques sont liés à certains contextes :

– les bassins tactiles permettant aux enfants de caresser des poissons ou autres espèces aquatiques sans gants exposent à une contamination par Mycobacterium marinum ou le bacille du rouget ;

– les visites des coulisses permettant à des enfants de s’improviser « apprentis soigneurs » ou « soigneurs d’un jour » de certains animaux ;

– les « petting-zoos» (ou mini-fermes) qui, en l’absence de mesures de « biosécurité », favorisent les contacts étroits avec les animaux ;

– la proximité de ces enclos avec un lieu de restauration, les enfants étant invités à nourrir les animaux avec un aliment pouvant être vendu avec le ticket d’entrée. Le risque de transmission féco-orale de différents agents pathogènes (Escherichia coli entérohémorragique (ECEH), Salmonella , Campylobacter spp., Cryptosporidium spp…) excrétés par des ACNT apparemment en bonne santé a été souligné (3, 4).

Fermes pédagogiques

Depuis le début des années 2000, la forte augmentation des visites de fermes pédagogiques a conduit à observer de nombreux cas de syndrome hémorragique et urémique (SHU) chez de jeunes enfants exposés à un contact avec des ruminants asymptomatiques réservoirs d’ECEH (5-7). L’exposition était liée au contact avec le fumier animal et au comportement naturel main/bouche des enfants âgés de moins de 5 ans, âge peu adapté à la recommandation de lavage des mains. En France, l’étude de 1215 cas de SHU a révélé que 20 % étaient liés au contact avec un animal de ferme ou le sol de son enclos en cas de chute (8).

Écoles, hôpitaux et autres lieux publics

Dans les écoles, la présence d’ACNT expose à des risques de maladies variées : salmonellose (volailles, hérisson, mue de serpent) ; teigne (hérisson) ; rage (chauve-souris). À l’hôpital, en particulier pour les enfants sous traitement  immunodépresseur, la chorio-méningite lymphocytaire peut résulter du contact avec des rongeurs (souris, hamster) (9, 10). Une affection zoonotique (rouget, brucellose, mycobactériose, leptospirose…) peut résulter du contact avec un mammifère marin mort d’une de ces maladies et échoué sur une plage.

Considérant que les risques liés à un contact étroit des enfants avec des ACNT dans l’espace public sont sous-estimés, l’Académie nationale de médecine (1) :

– rappelle que, si les liens entre animaux et enfants sont des facteurs de bien-être, de bonne santé mentale, et d’enrichissement des connaissances, ils doivent donner lieu à des précautions sanitaires s’agissant du contact avec ces animaux  des enfants les plus jeunes ou immunodéprimés;

– invite, selon une approche « une seule santé », à une surveillance épidémiologique des zoonoses infantiles, en vue de la prévention et du traitement précoce de ces maladies;

– recommande que le grand public soit informé des risques potentiels liés à un contact étroit entre de jeunes enfants et des ACNT, le lavage des mains devant être la règle après avoir touché un tel animal, et qu’un affichage des mesures de « biosécurité » soit instauré dans les établissements accueillant enfants et ACNT, notamment concernant les règles d’hygiène et de sécurité approuvées par les Directions départementales de la protection des populations ;

– déconseille fortement, comme le fait Santé publique France, que des enfants de moins de 5 ans touchent des ACNT (ruminants, en particulier) dans les lieux publics.

– recommande une interdiction de zones de restauration trop proches d’une mini-ferme (ou d’un « petting-zoo»), afin d’éviter que de jeunes enfants nourrissent des animaux tout en mangeant leur propre repas.

Références

  1. Brugère-Picoux J., Rosolen S., Hascoet J.M., Risques zoonotiques et traumatiques liés aux contacts des enfants avec les animaux de compagnie non traditionnels (ACNT), Avis de l’Académie nationale de médecine, 12 mars 2024
  2. Arrêté́ du 25 mars 2004, Directive Zoo Européenne 1999/22, Nouvelle Loi Santé Animale (2016/429)
  3. Dunn J.R., Behravesh C.B., Angulo F.J., Diseases transmitted by domestic livestock: perils of the petting zoo, Microbiol Spectr. 2015; 3(6): 3.6.08.
  4. Göttling J., Heckel J., Hotzel H., et al., Zoonotic bacteria in clinically healthy goats in petting zoo settings of zoological gardens in Germany. Zoonoses and Public Health, 2022; 69(4):333‑43.
  5. Crump J.A., Sulka A.C., Langer A.J., et al., An outbreak of Escherichia coli O157:H7 infections among visitors to a dairy farm, N Engl J Med. 2002;347(8):555‑60.
  6. Goode B., O’Reilly C., Dunn J., et al., Outbreak of Escherichia coli O157: H7 infections after petting zoo visits, Arch. Ped. Adol. Med. 2009;163(1):42‑8.
  7. Kassenborg H.D., Hedberg C.W., Hoekstra M., et al.; Farm visits and undercooked hamburgers as major risk factors for sporadic Escherichia coli O157:H7 infection, Clin Infect Dis., 2004;38(s3): S271‑8.
  8. Brugère-Picoux J., Rapport sur le risque de zoonoses inhérent aux visites de fermes pédagogiques, Bull Acad Vét France. 2017;170(3):1‑15.
  9. Bruyand M., Mariani-Kurkdjian P., Le Hello S., et al. Paediatric haemolytic uraemic syndrome related to Shiga toxin-producing Escherichia coli, an overview of 10 years of surveillance in France, 2007 to 2016. Eurosurveillance. 21 févr 2019;24(8). https://www.eurosurveillance.org/content/10.2807/1560-7917.ES.2019.24.8.1800068
  10. Platero L., Garcia-Sanchez P., Sainz T., et al., Pets for pediatric transplant recipients: To have or not to have. Front Vet Sci.t 2022; 9:974665.

 

 

[1] Communiqué de la Plateforme de Communication Rapide de l’Académie.