Publié le 21 mars 2019

Conférence invitée

 Le numérique au Service de santé des armées par Didier MENNECIER (Directeur des Systèmes d’information et du numérique, Service de santé des armées)

L’organisation du service de santé des armées (SSA) a connu une profonde transformation au cours des deux dernières années. La médecine des forces représente le cœur de métier du SSA. Il se base sur deux systèmes numériques : i) Le système des centres médicaux des armées (CMA). Il correspond au projet Axone, en phase de déploiement, destiné à simplifier et sécuriser les pratiques des CMA. Il existe 16 CMA en métropole qui utilisent un dossier médical unique : le LUMM (logiciel unique médico-militaire) avec une base de données unique. ii)  Le projet des opérations extérieures correspond au système ISSAN (infostructure « soutien santé »). Il correspond aux opérations extérieures (OPEX) et vise à optimiser le soutien santé des forces projetées dans ces opérations. Il doit permettre d’améliorer la prise en charge des urgences, en particulier celle du personnel isolé, ou de pathologies survenant sur un théâtre d’opération, de garantir une qualité de soins comparable à celle qui se trouve dispensée en métropole, et d’optimiser l’utilisation des moyens de la chaîne de santé. Les opérations extérieures sont très nombreuses : en 2017 pour 1667 militaires impliqués, plus de 65 000 consultations, près de 2000 interventions chirurgicales et près de 66 000 actes paramédicaux ont été recensés. Elles font intervenir des CTM (centres de téléexpertise médicale) et le SIRMED (système d’information de régulation médicale sur les théâtres d’opération). Les objectifs du SSA sont, à l’horizon 2020, la finalisation du système Axone et l’élaboration d’un parcours de santé complet du militaire, avec sécurisation de tous les échanges de santé, parcours incluant la prise en charge dans le champ de la santé civile.

 

 

Séance dédiée :

« Dans la perspective de Paris 2024 : les Jeux Olympiques et la santé »

Organisateur : Alain CALMAT

 

Introduction par Alain CALMAT (Président de la commission médicale du CNOSF (Comité national olympique et sportif français)

 Les Jeux Olympiques de 2024 ont été attribués à la France, plus particulièrement à la ville de Paris. L’organisation de la plus grande manifestation sportive mondiale de haut niveau oblige les responsables sportifs, médicaux et politiques à réfléchir aux rapports entre le sport et la santé dans le cadre de la préparation des athlètes, du déroulement des épreuves et également aux conséquences positives à tirer de ce formidable évènement. Parmi les multiples aspects possibles, ont été choisis ceux qui répondent à des préoccupations concrètes et essentielles à ce sujet. Les problèmes spécifiques des Jeux Paralympiques ne seront pas traités dans cette séance mais l’ensemble des présentations s’y rapportent également.

 

 

 

Communications

 La santé des sportifs de haut niveau par Philippe LE VAN (Médecin du sport à l’INSEP, Directeur de la Commission médicale du Comité national olympique et sportif français (CNOSF))

 Les sportifs de haut niveau (SHN) bénéficient en France d’une surveillance médicale réglementaire au regard de la pratique hors norme de leur activité sportive. Cette surveillance débute à leur intégration sur la liste de haut niveau et se déroule pendant toute leur carrière. Elle s’effectue dans le cadre de l’INSEP (Institut national du sport, de l’expertise et de la performance) dont les sportifs ont représenté 56% des médaillés aux J.O. de Londres et 50% à ceux de Rio. Le « Grand INSEP » correspond à un réseau du sport de haut niveau qui comprend 20 centres chargés de permettre aux SHN leur réussite sportive mais aussi scolaire, universitaire et professionnelle. Malgré les risques liés à cette pratique intensive, l’espérance de vie des sportifs olympiens est supérieure (de près de 7 années) à celle de leurs contemporains. Lors des Jeux Olympiques, la délégation française dispose d’un encadrement médical constitué des médecins et masseurs-kinésithérapeutes des équipes de France, aidés par une équipe du Comité national olympique et sportif français (CNOSF). L’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024 à Paris constitue un défi médical à relever pour la médecine en général et la médecine du sport en particulier. L’accueil de plusieurs milliers d’athlètes, de leur encadrement et de millions de spectateurs et touristes nécessitera de mettre toutes les forces vives en action avec une parfaite coordination sur une période estivale. La qualité de la médecine française au point de vue humain mais aussi technique nous permettra de relever ce défi.

 

Les Jeux-Olympiques, la lutte contre le dopage et le maintien de l’équité par Xavier BIGARD (Professeur agrégé du Val-de-Grâce, Ancien titulaire de la chaire de Recherche de l’École du Val-de-Grâce ; ex-conseiller scientifique auprès de l’Agence Française de Lutte contre le Dopage (AFLD) ; Union Cycliste Internationale – Aigle (CH))

 Le maintien de l’équité et le respect de l’éthique sont des sujets d’une grande actualité dans le sport de haut niveau. Le sport doit être pratiqué dans les meilleures conditions de sécurité, la victoire devant être accessible à tous et ne souffrir d’aucune contestation ; c’est la raison pour laquelle le mouvement olympique s’est très tôt investi dans la lutte contre le dopage. La lutte contre le dopage s’est ensuite organisée, sur la base d’une entité internationale en charge d’édicter les règles et méthodes à utiliser : l’agence mondiale antidopage (AMA). Des outils de détection directe et indirecte de substances interdites, dites dopantes, sont mis en œuvre lors de contrôles organisés pendant les Jeux Olympiques et Paralympiques. Ainsi, à Rio, le laboratoire a reçu près de 5000 échantillons (dont 80% urinaires). La question de la prévalence réelle du dopage reste une question non encore résolue à ce jour, mais qui est essentielle pour juger de l’état sanitaire des sportifs. A Rio, 0,6% des résultats se sont avérés anormaux, ce qui est relativement faible par rapport à la prévalence annuelle pour toutes les disciplines, estimée à 1,5%. D’autres situations que le dopage sont susceptibles d’affecter l’équité dans le sport, comme la participation de sportifs transgenres aux compétitions, ainsi que les hyperandrogénies des athlètes féminines, ouvrant la question de la définition de critères d’éligibilité pour ces athlètes.

 

 La femme olympienne par Dominique HORNUS-DRAGNE (Anesthésiste, Médecin fédéral à la Fédération Française d’Escrime) et Carole MAITRE (Gynécologue et Médecin du sport à l’INSEP, Médecin fédéral à la Fédération Française de Lutte)

 La femme olympienne est une sportive de haut niveau (SHN) engagée dans la plus prestigieuse des compétitions. Suite à la charte du CIO de 2015 s’engageant à la parité hommes-femmes, le pourcentage d’athlètes féminines a connu un essor constant (45% à Rio en 2016 versus 13% à Tokyo en 1964). La féminité interagit avec sa recherche de performances. Ces interactions peuvent être pathologiques, les exigences de certains sports exposant la SHN à des atteintes spécifiques avec à leur tête la « triade » de la sportive (aménorrhée-anorexie-ostéoporose). Fractures de fatigue, rupture du ligament croisé antérieur et incontinence urinaire affectent particulièrement ces sportives de haut niveau chez qui, en phase de préparation olympique, il convient d’être particulièrement vigilants quant au risque de harcèlement sexuel dont la dépression peut être un des symptômes révélateurs. Les interactions de la féminité peuvent aussi être physiologiques par la volonté de la SHN d’avoir une grossesse suivie d’un retour au plus haut niveau. Tout entraînement de performance doit être arrêté au-delà de deux mois de grossesse. Certains sports demeurent compatibles sous réserve d’un entraînement adapté (natation, golf). L’environnement médical, familial et sportif de la femme olympienne est le garant de son épanouissement de femme, de mère et de championne sans impact sur sa santé physique et mentale.

 

 L’héritage santé des Jeux Olympiques par Alain CALMAT (Président de la commission médicale du CNOSF, Ancien interne des Hôpitaux de Paris, Professeur au Collège hospitalier Pitié-Salpêtrière. Olympien, patinage artistique, 1956, 1960 et médaillé d’argent en 1964. Ancien ministre délégué à la Jeunesse et aux Sports)

Le Comité International Olympique (CIO) souhaite promouvoir un héritage positif pour les villes et pays hôtes des Jeux olympiques. L’héritage santé est un des aspects majeurs choisis par le Comité d’Organisation des Jeux Olympiques (COJO Paris 2024). Il sera forcément le résultat d’une collaboration étroite entre l’État, la Ville de Paris, la Région Ile-de-France et surtout le mouvement sportif. Un rôle capital revient donc au Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF) : il a conçu un ouvrage, en coopération étroite avec la Société Française de Médecine de l’Exercice et du Sport (SFMES) : le MÉDICOSPORT-SANTÉ© (MSS). Ce dictionnaire médical à visée des disciplines sportives est diffusé à la grande majorité des médecins français par des fiches du Groupe VIDAL® et par internet (htpps://www.france olympique.com). Il représente un outil essentiel pour la prescription d’activités physiques et sportives (APS) comme thérapeutique non médicamenteuse. Les pathologies et états de santé qui ont été validés actuellement par la Commission Médicale du CNOSF sont : APS et cancers, APS et affections de l’appareil locomoteur, APS et maladies cardiovasculaires, APS et maladies métaboliques, APS et pathologies neurologiques, APS et troubles psychiques, APS et avancée en âge, APS et enfant et adolescent, APS et grossesse et post-partum. La puissante incitation pour les activités physiques que représente la perspective des JO de 2024 sera sans doute un apport important à l’héritage santé attendu.