Communiqué
Session of 17 mai 2005

Renforcement de la prévention des accidents majeurs d’athérosclérose coronarienne prématurée avant 50 ans. Nécessité d’un dépistage systématique sanguin des anomalies glucido-lipidiques chez les jeunes des deux sexes, avant 20 ans

MOTS-CLÉS : arteriosclérose coronaire/prévention et contrôle. dépistage systématique. hypercholestérolémie. prévention primaire.
KEY-WORDS : coronary arteriosclerosis/prevention and control. hypercholesterolemia. mass screening. prevention primaire.

Jean-Luc de GENNES**

Communiquéarteriosclérose coronaire/prévention et contrôle, dépistage systématique, hypercholestérolémie, prévention primaire.coronary arteriosclerosis/prevention and control, hypercholesterolemia, mass screening, prevention primaire.Jean-Luc de Gennes, au nom d’un groupe de travail

Jean-Luc de GENNES**

En octobre 2001, l’Académie nationale de médecine votait à l’unanimité un vœu en faveur d’un dépistage glucido-lipidique sanguin avant l’âge de 20 ans [1-2]. Près de quatre ans plus tard, il faut reconnaître qu’aucune disposition en ce sens n’a encore été inscrite dans les actions de santé publique. De nombreux arguments récents imposent de revenir sur le sujet et de redire à nouveau toute l’importance de ce dépistage et combien il est urgent de le mettre en œuvre.

Il est désormais bien prouvé que chez certains sujets le début de l’athérosclé- rose est précoce dès la fin de l’adolescence. Le méconnaître ou rendre illusoire son dépistage revient à priver ceux qui y sont exposés de la prévention cardiovasculaire des accidents coronaires tragiquement anticipés à des âges inférieurs à 55 ans, et à en reconnaître beaucoup trop tard l’origine.

Celle-ci est prioritairement liée à des anomalies innées du métabolisme du cholestérol dans ses différentes fractions circulantes et éventuellement aggravées par le cumul d’autres facteurs de risque. Ces accidents prématurés peuvent s’étager des âges de 25 à 55 ans. Ils sont plus fréquents chez l’homme, mais en augmentation actuellement chez la femme. Ils peuvent représenter jusqu’à 20 % des 100.000 infarctus myocardiques annuels recensés en France.

La fréquence attendue d’anomalies identifiables par dépistage systématique [3, 4] en temps utile, c’est-à-dire précocement, entre les âges de 16 à 20 ans est de l’ordre de 4 %, voire plus. Des stries lipidiques peuvent se voir dès l’âge de 10 ans sur l’aorte et sur les artères coronaires et des plaques d’athérome avant l’âge de 20 ans [5-8]. Les contrôles artériels in vivo par échotomographie, notamment des carotides confirment les observations précédentes [9-10].

Le créneau idéal de ce dépistage systématique précoce se situerait entre les âges de 16-17 à 19-20 ans, donc au-delà de la puberté, afin de les libérer des fluctuations antérieures des niveaux de la cholestérolémie totale et de la triglycéridémie.

Sa réalisation comporte un contrôle minimal, à la 12ème heure de jeûne, du cholestérol total (CT), du HDL cholestérol (HDLC), du LDL cholestérol et/ou du cholestérol non HDL (calculés), des triglycérides (TG), et de la glycémie. Tout traitement interférent, comme les oestroprogestatifs ou les rétinoïdes, doit alors être évité, lors de ces dosages, ainsi que toute situation fébrile, ou tout état de dénutrition en évolution. La prise de pilule doit être mentionnée, si l’arrêt est impossible.

L’automatisation, et les contrôles de qualité auxquels sont soumis actuellement tous les laboratoires, donnent une garantie largement suffisante pour leur précision. Dans l’interprétation de ces dosages, on retiendra, comme anormalement dépassées à ces âges, les valeurs suivantes : glycémie 1,20 g/L (7 mmol/L), CT >1,90g/L (5 mmol/L) ; LDLC (calculé) >1,15g/L (3 mmol/L) ;

HDLC <0,40g/L (1 mmol/L) chez le garçon, et <0,50g/L (1,3 mmol/L) chez la fille ; TG >1,30g/L (1,5 mmol/). Le cholestérol non HDL peut être aussi calculé, car il est très bien corrélé au dosage de l’apoprotéine B [15].

Les résultats de ces dosages permettront de dépister des situations anormales mais de bénignité relative dans la plupart d’entre elles, ne requérant qu’une surveillance espacée, et des mesures simples et modestes d’orientation de régime, mais d’autres d’importance majeure imposent une prise en charge thérapeutique immédiate. Un grand risque cardiovasculaire juvénile, spécialement coronaire, de cette origine, est décelé chez environ 1 %, voire plus, des jeunes participant à un dépistage systématique.

• Une part seulement relève des formes les plus sérieuses et bien identifiées d’hypercholestérolémie familiale (F.H.hé.) à transmission monogénique dominante : dont 0,2 % par déficit du gène du récepteur LDL situé sur le bras court du chromosome 19 (12) ; ou encore par mutation ponctuelle R3500Q du gène de l’apoprotéine B situé sur le chromosome 2, de fréquence un peu moindre que la précédente, et de gravité un peu plus faible. Reste 0,002 % de formes liées à une mutation ponctuelle sur le chromosome 1 (gène PCSK9 :

 

Proprotein Convertase Subtilisin/Kexin-Type 9), et un pourcentage encore plus faible de formes très rares d’hypercholestérolémies familiales par transmission récessive (gène ARH en localisation chromosomique 1p35) [13].

Certes pour les F.H.hé., le dépistage sélectif sur les antécédents parentaux au premier degré soit d’accidents Cardiovasculaires, soit d’hypercholestérolémie LDL, resterait à conseiller entre deux et dix ans. Mais l’expérience internationale montre ce dépistage par trop défaillant, ignorant près de 70 % des cas, et confortant le besoin incontestable du dépistage systématique qui évite ces graves lacunes.

• Une autre part plus importante, mais aussi très sérieuse, relève : soit d’autres hypercholestérolémies familiales monogéniques restant encore non identifiées (mais localisées déjà sur un autre locus situé sur le chromosome 1) ; soit encore d’hypercholestérolémies qualifiées, faute de mieux, de polygéniques, témoignage plutôt de leur origine encore obscure ; soit enfin de sujets à phénotypes ApoE4, plus sensibles aux excès alimentaires.

• Surtout, une autre part, prédominante celle là, et retrouvée dans 0,6 % des 1 % des formes rapidement menaçantes, revient aux hyperlipidémies mixtes ou combinées, souvent d’athérogénicité très précoce et accélérée, lorsque elles sont présentes chez les jeunes, en raison des lipoprotéines LDL petites et denses (très athérogènes) qu’elles véhiculent dans le sang. Elles sont trois fois plus fréquentes que la F.H. hé. [14].

• Restent enfin les plus rares hyperglycéridémies endogènes de type IV, et les hypoHDLémies isolées qui complètent cet éventail d’anomalies athérogènes dépistables .

 

Dans les anomalies les plus sérieuses, un engagement thérapeutique immédiat, dans l’objectif d’une correction complète à long terme, est impérativement à envisager et à discuter dès ces âges : après réexpertise complétée sur le plan biologique (+ dosages de l’apoprotéine B et de la Lp a), et identification définitive de l’anomalie ; et après intégration cumulée des autres facteurs de risque, encore bien rares à ces âges, en dehors du tabagisme, et/ou d’une association à l’obésité, ou, moins souvent, d’une hypertension artérielle, naturellement à réduire, et éradiquer dans toute la mesure du possible. Le diabète de type 2, jusque là encore bien rare à ces âges, tend à se montrer aujourd’hui de plus en plus fréquent : le plus souvent associé à une franche obésité, et même à une tendance hypertensive [11].

Les seuils obligés d’intervention médicamenteuse sont au delà de 3 g/L (7, 8 mMol/L) de cholestérol total, avec un LDLC >ou = à 2, 20g/L (5,7 mMol/L), dans les hypercholestérolémies pures ; ou à des niveaux moindres, mais avec un rapport CT/HDLC>7 dans les autres, notamment, les hyperlipidémies mixtes (TG>2gm/L).

Certes, l’orientation diététique adéquate devra toujours précéder de quelques semaines, voire plusieurs mois, l’introduction d’une thérapeutique complémen- taire médicamenteuse. Mais son efficacité à long terme, aboutissant généralement à une baisse maximale de l’ordre de 6 à 8 %, s’avérera, dans la plupart des dépassements sévères méritant correction, décevante et insuffisante [15].

Bien entendu, dans ces cas sévères, qui ne reflètent pas la totalité des cas dépistés, l’évaluation préthérapeutique de la balance coût/bénéfices n’est pas de mise, au nom de l’éthique la plus élémentaire dans une telle conjoncture. En effet, dans les hypercholestérolémies familiales par exemple, le risque d’un événement coronaire mortel est augmenté de plus de 100 fois chez l’homme, avec une mortalité coronaire annuelle de 2,17 %, et de 50 fois chez la femme, avec une mortalité coronaire annuelle de 0,46 %, entre les âges de 20 et de 39 ans [12]. Seule, la balance risque/bénéfices doit alors prévaloir. Et les études comportant une population placebo comparative sont complètement à proscrire en ces cas, à moins qu’elles ne dépassent pas au maximum un à deux ans.

Pour les dépassements moindres, il est au contraire possible de temporiser de plusieurs années sur l’opportunité d’un traitement médicamenteux. A la condition, toutefois, que, d’une part, la réorientation diététique soit déjà bien appliquée, et se soit montrée biologiquement efficace, et que d’autre part, la recherche infra-clinique d’athérosclérose débutante, par échotomographie de toutes les artères accessibles, reste négative, et qu’enfin la surveillance biologique devienne au minimum annuelle.

La tolérance médicamenteuse à long terme n’a, à priori, pas de raison d’être différente, à ces âges de transition entre la fin d’adolescence et l’âge adulte, de celle déjà démontrée habituellement excellente au-delà de 20 ans, pour les résines (appelées à être remplacées dans l’avenir par les inhibiteurs d’absorption digestive du cholestérol alimentaire), et pour les statines particulièrement.

Une abstention provisoire de toute médication, consensuelle et absolue doit être respectée en cas de désir de grossesse proche, avant et pendant toute la durée de celle-ci, et d’un éventuel allaitement. Une recharge systématique en acide folique et en vitamine B 12, (surtout en cas de traitement par résines), doit être effectuée avant le début de la grossesse.

L’acceptation du dépistage systématique

Si l’utilité du dépistage sanguin des anomalies glucido-lipidiques (G-L) chez les jeunes, garçons et filles, avant 20 ans ne peut être contestée, l’Académie nationale de médecine (ANM) reconnaît que sa mise en œuvre peut se heurter à des difficultés pratiques d’acceptation mais surtout d’organisation. Il convient de les surmonter.

L’acceptation par les jeunes gens de consentir à participer à une campagne de dépistage à visée de prévention en leur faveur est un a priori vraisemblable. Le fait ne soulève par ailleurs aucun questionnement éthique. L’objectif n’est pas celui d’une recherche clinique sans bénéfice personnel, mais la mise en place d’une politique de prévention des accidents cardiovasculaires, à partir de données scientifiques établies. Le refus éventuel d’y consentir n’aurait d’éventuelles conséquences négatives que pour l’intéressé. Une information pertinente sur l’objectif du dépistage doit à l’évidence être apportée, à commencer par la confirmation pour celui ou celle dont les dosages seront normaux, que leur avenir est libéré de toutes craintes et menaces cardiovasculaires de cette origine, à relatif court terme. Tout préjudice psychologique lié à la découverte d’anomalies, lors de ce dépistage juvénile, doit pouvoir être aisément évité grâce à l’implication souhaitable du médecin traitant et, aux ménagements qu’il prendra à prévenir l’intéressé et sa famille. Par ailleurs l’expérience montre une bonne acceptation psychologique de ces jeunes en cas de dépistage positif.

Celle-ci a déjà été prouvée chez les jeunes filles dans l’acceptation d’examens de dépistage précédant la prescription d’un traitement oestroprogestatif à visée contraceptive, comme chez les jeunes gens à l’occasion de quelques essais thérapeutiques contrôlés.

L’organisation du dépistage

Idéalement ce dépistage aujourd’hui reconnu très souhaitable chez les jeunes gens entre I7 et 20, aurait trouvé sa place dans le cadre des examens de santé auxquels procédaient les autorités militaires de Santé lors de la période obligatoire dite des « trois jours ». La suppression de la conscription y a mis un terme. L’ANM a déjà alerté les pouvoirs publics sur les conséquences que ne manquerait pas d’avoir sur la Santé Publique, la brèche ainsi ouverte dans les dispositifs de dépistage et de prévention. Ils avaient fait la preuve de leur efficacité chez les jeunes hommes (hypertension, diabète, vaccinations etc.), et l’on pouvait en attendre la même utilité chez les jeunes filles depuis peu également concernées [16].

En dépit des regrets que l’on peut exprimer, il paraît bien illusoire d’envisager qu’un dépistage, pour une prévention à grande échelle, des origines biologiques de l’athérosclérose prématurée, puisse trouver sa place dans la J.A.P.D.

(Journée d’Appel de Préparation à la Défense), d’autant que celle-ci ne porte plus que sur un échantillon des jeunes de la génération concernée. Les informations qui pourraient être recueillies de cette façon auraient certes un intérêt d’information épidémiologique, mais ne contribueraient en rien à la prévention des accidents cardiovasculaires chez les jeunes concernés dans la population générale. On mesure par là les conséquences regrettables de la suppression des examens de santé systématiques tels que les réalisait le Service de Santé des Armées, si l’on retient que le dépistage des anomalies glucido lipidiques sur 200.000 appelés, garçons et filles, permettrait d’éviter quatre cents accidents coronariens prématurés dont plus du quart s’avère mortel d’emblée ou à court terme

Est-ce à dire qu’il faille renoncer à le mettre en place ?

Certainement pas. Certes, il n’est pas dans les attributions de l’Académie nationale de médecine, de définir ce que doit ou devrait être le cadre réglementaire et administratif de la mesure de prévention : il est, en revanche, de son devoir de préconiser. L’Académie nationale de médecine suggère que le dépistage sanguin des anomalies glucido-lipidiques (G-L) chez les jeunes, garçons et filles avant 20 ans, soit mis en place, à titre expérimental, à l’échelon d’un ou plusieurs départements, ou d’une ou plusieurs régions ; et, en tout cas, sur le prochain échantillonnage des quelques 20.000 jeunes appelés en Juin 2006 à la J.A.P.D. avec l’aide éventuellement gratuite des laboratoires d’analyse médicale. Néanmoins, pour remplir ces objectifs de prévention, l’ANM insiste pour que soit mis en place un dépistage généralisé à la quasi-totalié de la génération concernée.

Diverses modalités peuvent être envisagées — L’invitation à participer à ce dépistage pourrait être rappelée, en temps utile, aux jeunes concernés, par leur Caisse d’Assurance Maladie , comme cela est fait pour les personnes de plus de soixante ans, en ce qui concerne la vaccination contre la grippe.

Le soin de la prescription pourrait être confié au médecin traitant ( tel que l’institue la réforme de l’assurance maladie). Les examens seraient judicieusement confiés par le médecin traitant à un laboratoire d’analyse médicale dûment accrédité. Le coût global de ces dosages, de l’ordre de trente euros, devrait pouvoir être pris en charge dans le cadre de la politique de santé publique, au titre des actions de recherche et de prévention.

Les résultats des dosages pourraient être alors consignés dans un dossier médical succinct, établi par le médecin traitant, qui y ajouterait les données cliniques (paramètres poids/taille, tension artérielle, situation clinique géné- rale) et les antécédents parentaux directs de problèmes cardiovasculaires et/ou d’hyperlipidémies.

— La présentation de ce « dossier de dépistage des anomalies G-L » pourrait être exigée par les autorités responsables de l’organisation de la JAPD. Les résultats de ce contrôle pourraient être pris en compte par le Service de Santé des Armées, pour éviter, dans les anomalies sévères, des orientations incompatibles avec certains types d’activité militaire.

— Une seconde opportunité pour ce dépistage pourrait se situer dans le cadre de la médecine scolaire, à la fin du cursus , tant des filles (coïncidant avec le contrôle de rigueur pour un traitement oestroprogestatif), que des garçons. Les informations recueillies pourraient alors figurer dans le dossier médical personnalisé, qui à cet âge devra prendre le relais du carnet de santé obligatoire sur lequel figurent toutes les données médicales de l’enfance.

— On conçoit l’intérêt pour un patient chez lequel seraient ultérieurement, de façon inopinée voire tardive, découvertes de telles anomalies lipidiques de savoir en fait leur préexistence utilement démasquée grâce à ce dépistage précoce.

— Quelles que soient les modalités retenues pour la première phase expérimentale du dépistage G-L chez les jeunes gens, tous les résultats devront être recueillis à des fins statistiques et épidémiologiques par une instance appropriée (INSERM ?) dans des conditions de strict anonymat des données et le respect des exigences de la C.N.I.L.

— En fonction de l’acceptabilité, de la faisabilité, et de la performance, des diverses campagnes expérimentales mises en œuvre, une évaluation rigoureuse devrait permettre de définir les conditions les plus pertinentes d’un dépistage ultérieur généralisé.

RECOMMANDATIONS

L’Académie nationale de médecine tient à rappeler les points suivants :

Près de 50 %, et sans doute plus , des jeunes adultes, victimes d’infarctus myocardiques précoces, trop souvent mortels d’emblée ou à brève échéance, étaient porteurs à leur insu d’anomalies glucidolipidiques sévè- res à l’origine de cet accident, mais n’avaient été l’objet d’aucun dépistage préalable qui eut permis la mise en œuvre de mesures urgentes et indispensables de prévention cardiovasculaire primaire.

— L’observation de plus en plus fréquente d’accidents coronariens chez des sujets jeunes, avant 30-55 ans, y compris de sexe féminin, impose d’avancer l’âge de la prévention cardiovasculaire primaire. En effet les infarctus du myocarde prématurés, capables de survenir entre les âges de 25 à 50 ans, sont suivis de mort subite au moins dans un cas sur trois.

— La prévention du risque cardiovasculaire à long terme dépendant d’une athérosclérose prématurée, surtout coronaire, est désormais sûre et d’une efficacité garantie pour autant que cette action englobe parallèlement la lutte contre tous les autres facteurs associés de risque cardiovasculaire. Il est urgent de faire bénéficier au plus tôt de cette prévention les jeunes et leurs familles.

L’Académie nationale de médecine recommande

La mise en place d’un dépistage systématique des anomalies glucidolipidiques dans le sang des jeunes, garçons et filles, en fin d’adolescence dès les âges de 16 à 19 ans. Elle attire particulièrement sur ce fait, l’attention de la Haute Autorité de Santé.

Regrettant qu’il ne soit plus possible de s’en remettre au dispositif efficace de dépistage et de prévention que représentait l’examen systématique par le Service de Santé des Armées des jeunes gens de la tranche d’âge concernée L’Académie nationale de médecine suggère que, dans une première étape,ce dépistage soit mis en place à titre expérimental dans un cadre départemental ou régional à définir.

— Il lui semble que les modalités de l’actuelle réforme de l’assurance maladie pourraient conduire à confier aux caisses d’assurance maladie le pilotage d’une expérimentation faisant appel au « médecin traitant » pour prescrire les examens biologiques sanguins, en recueillir les résultats, et les joindre à la fiche succincte qu’il aura établie portant sur les paramètres cliniques du jeune, date de naissance, poids/taille, tension artérielle, situation clinique générale et ses antécédents parentaux directs de problèmes cardiovasculaires et/ou d’hyperlipidémies. Dès que cela sera possible, ces données seront reportées sur le dossier médical personnalisé informatisé en y laissant une trace indélébile, et récupérable à tout moment.

— Une seconde opportunité pour ce dépistage pourrait se situer dans le cadre de la médecine scolaire, à la fin du cursus , tant des filles que des garçons.

Les informations recueillies pourraient alors figurer soit sur le carnet de santé qui devrait alors être prolongé jusqu’à la fin de la scolarité, soit sur le dossier médical personnalisé institué par la Loi, et qui à cet âge devra prendre le relais du carnet de santé obligatoire sur lequel figurent toutes les données médicales de l’enfance.

L’Académie nationale de médecine souligne

D’une part l’intérêt pour un patient chez lequel seraient ultérieurement, de façon inopinée voire tardive, découvertes de telles anomalies lipidiques, de pouvoir être instruit en fait de leur préexistence utilement démasquée grâce à ce dépistage précoce ; d’autre part, de l’intérêt pour le médecin traitant de reconnaître ainsi l’ancienneté d’une hyperlipidémie jusque là négligée, favorisant depuis de nombreuses années une athérosclérose évoluant à bas bruit.

Quelles que soient les modalités retenues pour la première phase expérimentale du dépistage G.L chez les jeunes gens, tous les résultats devront être recueillis à des fins d’exploitation statistique et épidémiologique par une instance appropriée (INSERM ?) dans des conditions de strict anonymat des données et le respect des exigences de la C.N.I.L.

 

En fonction de l’acceptabilité, de la faisabilité et de la performance des diverses campagnes expérimentales mises en œuvre, une évaluation rigoureuse devrait permettre de définir les conditions les plus pertinentes d’un dépistage ultérieur généralisé.

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[16] LARCAN A. — Suppression du service national. Ses graves conséquences sanitaires. — Bull.. Acad. Natle Méd ., 1999, 183 , no 2, 387-388.

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 17 mai 2005, a adopté le texte de ce communiqué moins trois abstentions.

 

* Constitué de MM. J.L. de GENNES (Président), C. DREUX, Y. GROSGOGEAT, C. JAFFIOL, C.P. GIUDICELLI, P. BENLIAN. ** Membre de l’Académie nationale de médecine.

 

Bull. Acad. Natle Méd., 2005, 189, no 5, 1041-1050, séance du 17 mai 2005