Résumé
Ensemble très hétérogène, les dispositifs médicaux (DM) sont soumis à une réglementation fondée sur trois concepts : — le marquage CE, organisé à l’échelle européenne, qui subordonne la mise sur le marché à la démonstration préalable de la sécurité et des performances des DM, — l’évaluation du service rendu ou de son amélioration par ces DM, qui conditionne la prise en charge par l’Assurance Maladie en France, — et enfin la matériovigilance, organisée également au niveau national, qui permet la détection des failles de conception ou de fabrication et celle des anomalies de fonctionnement ou de vieillissement. Ce système récent a pour points forts d’être fondé sur une législation européenne développée et un référentiel, et d’aborder l’ensemble des dispositifs malgré leur diversité. Il présente cependant plusieurs faiblesses : — les organismes notifiés habilités à délivrer le marquage CE sont inégaux en moyens et en exigences ; — la banque de données européenne sur les DM n’est pas encore opérationnelle ; — les essais précliniques sont souvent limités à un minimum, notamment pour tout ce qui a trait au vieillissement des matériaux et des dispositifs sur banc physique ou après implantation chez l’animal ; — les essais cliniques de marquage CE sont parfois abusivement remplacés par un dossier d’analyse de la littérature ; — l’essai clinique randomisé, développé pour l’évaluation des médicaments, est mal adapté aux DM. Des méthodes spécifiques d’évaluation des dispositifs médicaux doivent être développées et enseignées ; — le suivi des DM après leur mise sur le marché, qui est en principe obligatoire, a un faible retour. Un tel suivi pourrait détecter précocement les cas qui relèvent de la matériovigilance, et éviter ainsi la diffusion de DM non sûrs ; — l’évaluation du service rendu apporté par un DM, n’est pas suffisamment dissociée des procédures de prise en charge, et devrait être effectuée avec une méthodologie adaptée aux DM ; — la matériovigilance est difficile à mettre en œuvre parce que le dossier de conception des DM et des risques encourus n’est pas simple à expertiser et qu’il n’existe pas de structure de coordination au plan international. Les recommandations de l’Académie concernent : — la recherche méthodologique qui doit être développée dans les domaines suivants : analyse de risque, essais précliniques et cliniques, évaluation du service médical rendu et évaluation des coûts des DM ; — la formation à la méthodologie et à la pratique de l’évaluation des DM ; — le développement du suivi après mise sur le marché ; — l’évaluation du service rendu qui devrait être dissociée de celle des coûts et de la prise en charge, organisée au niveau européen et confiée à des professionnels représentatifs des secteurs public et privé, indépendants et rémunérés ; — la matériovigilance qui devrait prendre en compte les problèmes d’ensemble des produits de même catégorie, permettre un examen rétrospectif de l’analyse de risque et du dossier de conception des DM, et enfin être coordonnée au niveau européen ; — le vieillissement et l’obsolescence : les DM devraient être soumis à une évaluation périodique concernant l’ensemble des produits de même catégorie et prenant en compte l’évolution des techniques.
Summary
Medical devices are an heterogeneous group. The legislation to which they are submitted is based upon three concepts : the European EC label which allows distribution throughout Europe provided that safety and performance are satisfied, a health technology assessment and appraisal necessary to obtain a financial support from the french Social Security services, and medical device vigilance aimed at detecting design or manufacturing errors, malfunctions or ageing defects. This system is still evolving and several weaknesses are noteworthy : — the organisations authorized to grant EC labelling have unequal means and requirements ; — the European medical device data base is not yet operational ; — preclinical tests are often minimal, especially with regard to material and device ageing tested on physical models or on animals ; — clinical tests for EC labelling are often overlooked and replaced by a mere analysis of the scientific literature ; — random clinical tests, developed for drug evaluation, are poorly adapted to assess medical devices. Specific methods for the assessment of medical devices should be developed and taught ; — medical device post market follow-up, though compulsory, has a poor yield. Such a follow-up could improve early surveillance and avoid the distribution of unsafe medical devices ; — health technology assessment is too closely linked to health technology appraisal. Health technology should be assessed by using methods adapted to the medical device problems ; — medical device vigilance may be impaired by a lack of expertise with regard to risk analysis and design files. Its organisation at the European level is not yet satisfactory. The French National Academy of Medicine makes the following proposals : — methodological research development in the following areas : risk analysis, preclinical and clinical tests, assessment and appraisal of health technology, assessment of medical device costs ; — training on the methodology and practice of medical device assessment ; — post market follow-up development ; — the separation of medical device assessment and medical device cost evaluation and appraisal. Medical device assessment should be organized at the European level and performed by independent investigators representing the public and private medical practice and receiving an honorarium ; — medical device vigilance should take into account the problems common to the same class of products, allow for retrospective expertise on the risk analysis and design file and be organized at the European level ; — the ageing and obsolescence of medical devices should be periodically tested as regards security, performances and technology assessment, and take the progress of medical devices into account.
Bull. Acad. Natle Méd., 2003, 187, n° 4, 779-783, séance du 29 avril 2003