Résumé
Le dépistage des cancers est une démarche de santé publique pour réduire la mortalité d’un cancer donné. L’intervention identifie les porteurs probables de ce cancer par un « test » proposé à une population asymptomatique dont la majorité des individus ne sont pas porteurs de ce cancer. Le bénéfice du dépistage s’objective par la baisse de la mortalité due au cancer ciblé dans la population testée. Les effets indésirables (faux positifs, examens et traitements inutiles, faux négatifs…) doivent aussi être mesurés afin de s’assurer que les bénéfices sont supérieurs aux effets négatifs. Ces données ne sont connues et gérables que dans le cadre d’un programme organisé. À l’heure actuelle, seuls les cancers du sein, du colon-rectum et du col de l’utérus satisfont à ces principes et font l’objet d’un dépistage organisé en France. Cette balance bénéfice/risque doit être estimée régulièrement, car elle se modifie avec le temps en raison des acquis médicaux (nouveaux tests…) ou de modifications épidémiologiques (nouvelles populations atteintes…). En conséquence, cette évaluation doit entraîner une interrogation régulière sur les programmes en cours et une mise en place rapide des ajustements nécessaires. Dans l’état actuel des évaluations, en ce qui concerne les cancers du sein, seul le dépistage organisé (DO) est préconisé en France de 50 à 74 ans ; le taux actuel de participation (50 %) devrait être stimulé pour atteindre 70 %. La détection individuelle (hors DO), avant ou après 50 ans, non justifiée par un risque familial ou un symptôme doit être clairement déconseillée. Les travaux de recherche pour un meilleur ciblage de la population soumise au dépistage doivent être soutenus. En ce qui concerne les cancers colorectaux, le dépistage doit avant tout être mieux ciblé sur une tranche d’âge plus efficiente soit : 55–75 chez les hommes et 60–80 chez les femmes. Sous peine de rester inefficace, le taux de participation doit être au moins doublé par diverses mesures d’organisation dont la prise en charge totale du reste à payer. La possibilité d’utiliser d’autres tests doit être également évaluée. Enfin pour les cancers du col de l’utérus où le dépistage par frottis cervical a largement démontré son efficacité, il reste à convaincre les 40 % de femmes non participantes. Dans ce but il faut mettre en place des mesures adaptées : élargissement des habilitations à prélever (infirmières…), utilisation des tests HPV, remboursement du reste à charge… Par ailleurs grâce à l’existence d’un vaccin efficace ce cancer pourrait être éradiqué. Malheureusement actuellement plus de 70 % des jeunes filles françaises ne sont pas vaccinées ; il est capital d’augmenter la couverture vaccinale en luttant contre les lobbies anti-vaccin, en vaccinant les garçons (éviction de porteurs de virus et prévention des cancers buccaux et oropharyngés), et en intégrant l’information sur les virus HPV dans le programme d’éducation sanitaire à l’école.
Summary
Cancer screening is a public health intervention aiming to reduce mortality from various cancer sites. The program must identify within an apparently healthy population, and using an accurate test, the individuals with a high probability of pre-clinical lesions and possibility to be cured. Such a program should, at the very least, be able to demonstrate an overall benefit to the targeted population and a minimum of risk that some individuals may be disadvantaged by the program. Nowadays, there is a large body of evidence regarding the effectiveness of screening for breast, colorectal and cervical cancers only. The balance between expected benefit and potential harm needs to be carefully and regularly evaluated to rapidly set up the necessary adjustments. A strict organisation is necessary to insure this evaluation which has also to be regularly performed because results may change with time due to new medical knowledge and epidemiological changes. Considering breast cancer screening, only participation to the national organized screening program (NOSP) is prescribed between 50 and 74 years old; the present participation rate (50%) has to be boosted to reach at least 70%. The individual screening (out of NOSP) whatever the age, not justified by an existing genetic risk or a symptom, is not recommended. Research works dealing with a better identification of the population to be targeted by screening must be supported. To be efficient the age-period elected for screening colorectal cancer (50–70) has to be changed to 55–75 years old for men and 60–80 for women. The participation rate has to be dramatically increased (at least doubled) by various measures of management and economical engagement (enlargement of sampling habilitations for nurses… use of HPV tests. Finally, the cervical cancer screening by cervical smear is presently the most efficient, but 40% of French women (and more than 70% of young women) are still not participating. Various strategies can be used to increase the participation of non-compliant populations: enlarge the authorization to perform the smear test (nurses…), use of the HPV tests, reimbursement of the whole procedure… Furthermore the HPV vaccination coverage is very low in France (<30%); it is of the utmost importance to deal with this issue in fighting the anti-vaccination lobbies, in vaccinating boys as well as girls, and in introducing the information on HPV virus in the health education program at school.
Accès sur le site Science Direct : https://doi.org/10.1016/j.banm.2019.10.005
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Bull Acad Natl Med. 2019;203,641-52. Doi : 10.1016/j.banm.2019.10.005