Communication scientifique
Session of 13 février 2001

Problèmes techniques liés à la chaîne du froid

MOTS-CLÉS : froid.
Technical problems relating to the cold chain
KEY-WORDS : cold.

A. Gac

Résumé

Après avoir présenté l’état de développement de la chaîne française du froid, on montre l’intérêt économique de l’entreposage et des traitements frigorifiques. Compte tenu de la valeur de la réduction des pertes, le temps de retour des investissements peut être estimé aux environs de trois ans. Dans les années à venir, la conception des nouvelles installations évoluera. De brèves informations sur cette évolution sont fournies. Une des contraintes auxquelles sont confrontés les opérateurs, notamment les transporteurs, est la multiplicité des exigences réglementaires, avec pour conséquences des distorsions de concurrence. L’évolution de la chaîne du froid est aujourd’hui caractérisée par une démarche de régulation logistique complexe des flux de marchandises, au moyen d’un système informatique, afin de satisfaire, à un moindre coût, l’adéquation de la production à la distribution. Cette logistique est une stratégie pour gérer de l’aval vers l’amont les interfaces entre les divers opérateurs. Enfin, on indique les principales causes de ruptures de la chaîne du froid qui se situent au niveau de la vente au détail et de la consommation.

Summary

After having covered the current status of the cold chain in France, the author highlights the economic impact of refrigerated storage and processing involving refrigeration. Lose reduction is such that the return on investments is estimated as being roughly 3 years. In years to come, progress will be achieved in the field of plant design. Some information on design trends is provided. Operators in general, and carriers in particular, are faced with an increasingly complex regulatory framework leading to a competition imbalance. The current cold chain developmental trend is characterized by complex computer management of logistics : the flow of goods is modulated in order to meet the production to the distribution needs as cost effectively as possible. This logistic strategy enables management of downstream to upstream interfaces involving various operators. Finally, the author indicates the main causes of non-compliance with the cold chain, generally at retail and consumer levels.

INTRODUCTION

La chaîne du froid est un ensemble maillé d’équipements frigorifiques, fixes ou mobiles, connectés les uns aux autres de sorte que les denrées périssables sont maintenues en permanence, de leur production à leur utilisation, à une température définie, dans le but de favoriser leur commercialisation en prolongeant la période pendant laquelle sont préservées leurs propriétés hygiéniques et (ou) commerciales (nutritionnelles et organoleptiques).

Les équipements fixes sont, de l’amont vers l’aval, des entrepôts industriels, des entrepôts de grossistes et de marchés de gros, des plates-formes de distribution, des chambres froides et des meubles de vente et d’exposition dans les magasins de vente au détail et, enfin, des réfrigérateurs et congélateurs domestiques. Les équipements mobiles (engins routiers, caisses mobiles et conteneurs, wagons, cargos polythermes) sont constitués d’une enceinte isolée refroidie le plus souvent aujourd’hui par une machine frigorifique.

La chaîne française du froid est une des plus importantes et performantes au monde.

Ainsi, le volume des frigorifiques industriels, exprimé en litre par habitant, est de plus de 300, alors qu’aux États-Unis il est de l’ordre de 190 litres et d’une dizaine de litres dans les pays du tiers monde. Cet équipement se répartit approximativement en un tiers de locaux à basse température et deux tiers de chambres froides en réfrigération. D’autre part, le volume total de 20 millions de m3 est partagé à raison de un quart pour l’entreposage public [4], à 90 % en congélation, un quart pour les stations fruitières et légumières, toutes en réfrigération, et un demi pour les chambres froides annexées aux usines de l’agroalimentaire, la plupart en réfrigération.

En ce qui concerne les transports, la France dispose de plus de 70 000 véhicules, dont les deux tiers sont frigorifiques.

Si on met bout à bout les meubles de vente de produits surgelés, congelés et réfrigérés, la longueur totale serait de 3 200 km, dont 1 200 km pour les seuls appareils à basse température.

Enfin, plus de 99 % des foyers disposent d’au moins un appareil frigorifique domestique [16].

JUSTIFICATION MACROÉCONOMIQUE DE LA CHAÎNE DU FROID

La consommation française de denrées périssables, un peu supérieure à vingt millions de tonnes par an ou 360 kg par tête, était la suivante en 1994 :

Produits ultrafrais — produits laitiers 3 257 500 t (à +2/+4o C) — produits carnés 4 965 500 t — total 8 223 000 t Produits réfrigérés — fruits et légumes 9 609 000 t (à +7/+12° C) — produits sucrés 984 000 t — total 10 593 000 t Produits congelés — denrées surgelées 837 000 t (à ou < —18° C) — crèmes glacées 385 000 t — total 1 222 000 t Si la distribution des aliments périssables était faite sans couverture de froid, les pertes seraient augmentées de l’ordre de 30 %. Comme, d’après l’INSE, le coût annuel du panier de la ménagère est d’environ 10 000 francs (1 525 ) et comme tous les aliments, sauf les huiles et le sucre, doivent ou peuvent subir au moins un traitement par le froid entre la production et la consommation, le budget « alimentation » des ménages serait majoré de la valeur des pertes, soit d’environ 15 à 20 %.

Pour la communauté nationale, la dépense annuelle supplémentaire serait de l’ordre de 100 × 109 francs (15,25 × 109 ).

Par ailleurs, une estimation des investissements à consentir pour réaliser la chaîne du froid montre que le temps de retour serait inférieur à trois ans. Ce résultat, qui est remarquable, l’est en fait d’avantage si on tient compte des facteurs suivants [9, 15] :

— son équipement frigorifique permet à la France d’occuper la première place mondiale pour les exportations de denrées périssables et élaborées ;

— la sole cultivée libérée par la réduction des pertes est utilisée à d’autres productions. La France est la deuxième puissance exportatrice de produits agricoles ;

— les intoxications sont moindres grâce à une meilleure protection hygiénique des denrées ;

— des emplois sont créés pour l’exploitation des installations frigorifiques ;

— des activités industrielles et artisanales sont induites par la construction, l’installation et l’entretien des machines.

ENVIRONNEMENT SOCIO-ÉCONOMIQUE DU DÉVELOPPEMENT DE LA CHAÎNE DU FROID

Si depuis la naissance du froid artificiel, en 1876, date du premier transport intercontinental de viandes réfrigérées par Ch. Tellier, la chaîne du froid a relativement peu progressé jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, il n’en a pas été de même durant les quarante dernières années. Les changements résultent de progrès techniques. Ils s’inscrivent dans l’évolution sociale (généralisation du travail des femmes
hors du milieu familial, prise de conscience de la diététique, loisirs et sports, etc.) et ils ont bénéficié de la diffusion de l’information par la presse.

En ce qui concerne la technologie, les faits saillants sont :

— l’installation d’équipements frigorifiques spécialisés à la production (frigorifiques d’abattoir et viandes foraines, stations fruitières, laiteries, etc.) ;

— la création d’un parc important d’engins de transport à température dirigée ;

— la palettisation et la manutention mécanique des charges.

L’évolution sociale a favorisé ou a profité :

— de la généralisation de l’équipement des ménages en réfrigérateurs, — de l’apparition et du développement des grandes surfaces, dont la part de marché excède 60 % des achats de nourriture, — de la multiplication des préparations élaborées ou prêtes à l’emploi et des plats cuisinés surgelés ou réfrigérés, — de l’offre croissante de produits nouveaux. Les consommateurs ne demandent rien mais, devant la diversité de l’offre, sélectionnent ceux qui répondent à leurs besoins, différents selon les âges et les classes sociales, et qui ont un rapport qualité/prix attractif. Un bon exemple est le succès des surgelés, dont la croissance a été de plus de 10 % par an pendant plusieurs décennies, malgré les critiques dont ils sont l’objet encore maintenant, — du développement de la restauration hors foyer, — de l’extension des échanges commerciaux de denrées périssables à l’échelle de la planète, avec la disparition de la notion de saison, — de la prise de conscience par les consommateurs de la diététique et de la sécurité alimentaire ainsi que des concepts de traçabilité, de produits « bio », des OGM, de risques alimentaires, de nuisances environnementales et aussi de chaîne du froid.

ÉVOLUTION LOGISTIQUE PRÉVISIBLE DE LA CHAÎNE DU FROID

De ce qui précède on peut penser que les facteurs suivants influeront sur l’évolution de la logistique de la commercialisation des denrées périssables :

— les progrès faits dans le domaine de la sélection de produits agricoles plus résistants aux contraintes du milieu environnant et mieux adaptés aux conditions de la commercialisation moderne ainsi que la généralisation d’emballages et de conditionnements spécifiques à chaque type de denrée, permettant de réduire les besoins de froid, devraient prolonger la durée de la mise en marché et réduire les coûts de la distribution ;

— pour les nouveaux produits périssables, la chaîne du froid devra satisfaire leurs exigences spécifiques ainsi que cela a été le cas pour les salades préparées en usine, qui doivent être maintenues entre 0 et + 2° C [2] ;

— quel sera le développement du commerce des denrées périssables par Internet ?

L’une des raisons du succès des grandes surfaces a été la liberté totale de choix offerte aux consommateurs. En sera-t-il de même pour le commerce électronique par Internet ?

Ces quelques considérations conduiront la chaîne logistique du froid à évoluer durant les prochaines années.

Jusque vers les années 1970, la chaîne du froid avait pratiquement pour unique objet d’assurer au moindre coût, au moment et en quantités correspondant aux besoins, le déplacement des denrées périssables depuis les lieux de production vers les lieux de consommation ou de transformation [5, 6].

Aujourd’hui, il s’agit, au moyen d’un système informatique et de communication, d’une démarche de régulation logistique complexe des apports de marchandises de sorte à satisfaire, en flux tendu (pas de stock en magasin de détail) et à un moindre coût, l’adéquation de la production à la consommation ou à la transformation. En d’autres termes, cette logistique est une véritable stratégie de gestion de l’aval vers l’amont des interfaces entre les divers opérateurs qui deviennent des prestataires de service. Compte tenu des ventes constatées, les détaillants répercutent leurs besoins vers les intermédiaires (transporteurs, grossistes, etc.) et les producteurs. Le maillon terminal de la vente pilote les flux de marchandises, ce qui implique, pour chacun des opérateurs, une capacité technique ou compétence, une capacité financière, une capacité sociale et une capacité commerciale. S’il y a surproduction, l’excédent est détruit ou congelé.

Il faut également prendre en considération la notion d’échelle et d’influence de certains opérateurs par rapport aux autres. Il est évident que les centrales d’achat des grandes sociétés de distribution, à un moindre degré les usines de production des industries agroalimentaires et, dans certaines circonstances, les consommateurs (OGM, vache folle) tendent à imposer leurs conditions techniques et financières aux autres opérateurs, notamment aux producteurs agricoles et aux transporteurs, ce qui peut être cause de déstabilisation socio-économique. Par exemple, vers les années 1995, les prix de revient d’exploitation d’engins de 40 tonnes étaient de près de 6,5 F/km (1 ). Il arrive que des transporteurs en difficulté financière soient obligés d’accepter des contrats à des conditions sensiblement inférieures des distributeurs, ce qui engendre des situations malsaines de concurrence. Il en est de même pour le secteur agricole, confronté à une concurrence parfois sauvage.

Pour l’avenir, la commercialisation des denrées périssables évoluera vers un système global européen par intégration des logistiques nationales. Aussi, le développement de la chaîne du froid s’inscrira dans un schéma logistique global, ce qui suppose une organisation économique en réseau coopératif.

PERSPECTIVES D’ÉVOLUTION DES ÉQUIPEMENTS FRIGORIFIQUES

Tous les opérateurs de la chaîne du froid sont soumis à des contraintes de rentabilité financière et à de nombreuses réglementations de diverses natures, plus ou moins strictes et certaines arbitraires voire contradictoires. Il faut prendre conscience que dans tous les domaines de l’emploi du froid, et notamment dans celui de l’agroalimentaire, les préoccupations actuelles sont très marquées en matière de protection de l’environnement et d’économie d’énergie.

Le protocole de Montréal et ses amendements ont banni l’emploi des fluides frigorigènes halogénés chlorés, destructeurs de la couche d’ozone, qui étaient utilisés dans les machines frigorifiques et dans les isolations.

L’engagement des États tend à limiter les rejets de CO et des gaz à effet de serre [12].

2 Les réglementations actuelles et probables contribueront à réorienter la conception des équipements, à modifier les procédés de production et de distribution de froid ainsi qu’à adapter la logistique, en ce qui a trait à l’organisation des transports à température dirigée, aujourd’hui fortement axés sur l’utilisation de la route [13, 18].

Par exemple, la configuration actuelle, en ligne, des entrepôts n’est pas la plus favorable. On pourrait imaginer que les frigorifiques industriels du futur seraient construits sur une base carrée, avec un espace central pour la distribution des lots dans les différentes chambres froides et avec la salle des machines au-dessus de cet espace, ce qui réduirait considérablement les risques de fuite de fluide [14].

UN EXEMPLE DE RIGIDITÉ RÉGLEMENTAIRE — LES TRANSPORTS À TEMPÉRATURE DIRIGÉE

Le transport à température dirigée des produits périssables est principalement assuré par des véhicules routiers, malgré leurs inconvénients (saturation du trafic, pollution, nuisance sonore). Il représente de 5 à 10 % des tonnages totaux qui, en France, sont de 70 kg par jour et par habitant. D’autre part, l’organisation des circuits commerciaux alourdit le coût de la distribution. En moyenne, il est déplacé en engin frigorifique plus d’une tonne par habitant et par an pour une consommation annuelle de 360 kg [8].

Les transports de denrées périssables pour compte propre régressent au profit d’entreprises prestataires de service car ces transports sont sans doute parmi les plus techniques et aussi parmi ceux devant satisfaire le plus d’exigences, celles relatives à la sécurité des déplacements sur les routes et celles concernant le contrôle de la température et le maintien en bon état, en particulier hygiénique, des denrées prises en charge.

La libre circulation des marchandises depuis l’ouverture du marché unique et l’apparition du cabotage engendrent un contexte concurrentiel fort qui pousse les
opérateurs à optimiser un outil pour le rendre modulable en fonction des besoins de leurs clients [17].

Comme il n’existe pas de directive régissant les conditions techniques de transport des denrées périssables, la réglementation à appliquer est celle du pays où circulent les engins, ce qui fait qu’un transporteur européen doit respecter seize réglementations, quinze textes nationaux et, hors des limites de l’Union, l’accord ATP (Accord relatif aux transports internationaux de denrées périssables et aux engins spéciaux à utiliser pour ces transports) [1]. Un transporteur de l’Europe de l’Est circulant dans l’Union, n’a à satisfaire que l’ATP. Pour palier cet imbroglio réglementaire, tous les pays de l’Union Européenne étant parties à l’ATP, les professionnels demandent qu’une directive cadre reprenne les spécifications des annexes techniques de l’ATP.

C’est là, pour les prochaines années, une condition essentielle au développement des transports dans des conditions de concurrence loyale.

D’autre part, la directive 93/43/CEE relative à l’hygiène alimentaire, qui renforce celle sur l’enregistrement de la température pour les denrées congelées ou surgelées, impose à tous les opérateurs d’organiser la prévention des dangers de pollution que les denrées périssables ou non pourraient encourir [3]. Cette directive a conduit les transporteurs français à rédiger et à diffuser un guide de « bonnes pratiques hygié- niques dans les transports sous température dirigée » [7].

A côté des réglementations spécifiques aux transports des denrées périssables, il existe d’autres obligations particulièrement contraignantes comme les interdictions de circulation certains jours, différentes d’un pays à l’autre, les attentes anormalement longues à certaines frontières de l’Europe de l’Est (jusqu’à 48 heures), la longueur maximale fixée par une directive des semi-remorques rendant difficile la mise en place d’un groupe frigorifique performant et peu bruyant, ou encore le poids total en charge qui n’est pas majoré pour tenir compte de la présence de la machine frigorifique, de l’isolation, des parois mobiles, etc.

De plus, la réglementation sociale est de plus en plus contraignante, notamment en France. Pour limiter l’effet de serre et améliorer la sécurité, il est envisagé d’imposer le ferroutage à l’échelon européen, ce qui modifiera profondément les conditions de transport de masse.

Mais, en dehors de ces contraintes, les entreprises de l’Europe occidentale se trouvent en situation de concurrence défavorisées par rapport à celles de l’Europe centrale et orientale. En effet, si le contexte réglementaire présent est maintenu pendant encore quelques années, des sociétés étrangères à l’Union, soumises à une réglementation plus laxiste, exploitant des véhicules de performances médiocres avec des personnels sous-payés et offrant des prix de service anormalement faibles, se substitueront en grande partie aux entreprises de l’Europe de l’ouest, tant pour les transports internationaux que pour des transports intracommunautaires et locaux.

Cette évolution risque d’avoir de graves conséquences socio-économiques et, de plus, d’être responsable d’accidents de la route. On pourrait la comparer à celle de la marine marchande. L’évolution de celle-ci s’est traduite, en une vingtaine d’années,
par la prolifération des pavillons de complaisance, par la réduction drastique des flottes occidentales et par des catastrophes maritimes de plus en plus fréquentes.

Ainsi, avec près de 400 navires en 1982 et 210 en 1998, la France est passée du 5e au 28e rang mondial.

Aussi, des actions répétées de sensibilisation devront être effectuées auprès des gouvernements, de la Commission Européenne et des Nations Unies, pour que les règlements soient coordonnés, qu’ils soient strictement contrôlés afin d’améliorer la qualité des services, de réduire les nuisances et la pollution et de favoriser l’établissement d’un climat de concurrence loyale.

LES RISQUES DE RUPTURE DE LA CHAÎNE DU FROID

La chaîne du froid est, aujourd’hui, d’une fiabilité remarquable, mais elle ne peut être totalement sûre. Les ruptures peuvent être accidentelles, telles une panne de machine ou une fuite de fluide, voire répétitives, cause d’ignorance ou de négligence.

La fréquence des risques de rupture par ignorance et négligence est la plus grande aux stades des transports, de la distribution, de la vente au détail et de la consommation.

Les transports de masse

Pour ces transports, sans ouverture de porte, en engins agréés ATP, les risques sont limités. On dispose, en cas de panne, d’un délai suffisant pour prendre des mesures conservatoires, même pour des denrées réfrigérées, en raison de l’inertie thermique du chargement et du faible coefficient de transfert de chaleur des parois de la caisse.

En revanche, si les engins ne sont pas performants, si la distribution de l’air est hétérogène ou si les conditions de transport sont inadéquates, il y a risque de réchauffement et perte de tout ou partie de la cargaison.

Les livraisons

Lors des livraisons, l’air de la caisse est renouvelé à chaque ouverture de porte et, par temps chaud, il n’est pas possible de maintenir la température intérieure. Aussi est-il nécessaire de minimiser le temps des ouvertures et de limiter la durée des tournées.

En outre, il est bon de doubler la porte par un rideau en lames de plastique souple.

La vente au détail

L’exposition à la vente est une phase sensible [10, 11].

Pour les meubles ouverts horizontaux à ouverture vers le haut, les paquets situés au centre de la couche supérieure sont inévitablement plus chauds que l’air refroidi passant à leur surface, en raison des échanges radiatifs avec le plafond, ces échanges étant grands par rapport à ceux par convection et conduction. L’écart de tempéra-
ture entre le produit le plus chaud et l’air peut atteindre 7 à 8° C. Ce réchauffement est spécialement néfaste pour les denrées animales réfrigérées ; la température du paquet le plus chaud peut être de +10° C quand l’air est injecté à 0° C et est repris à +4° C.

Le phénomène est semblable pour les meubles verticaux ou à étagères, malgré les deux ou trois rideaux d’air soufflé destinés à isoler les paquets exposés du milieu ambiant.

Les principaux remèdes consistent à emballer les produits dans une pellicule réflectrice de l’infrarouge lointain, c’est-à-dire un film d’aluminium et non du papier blanc, si cela est commercialement possible, et à réaliser un milieu réflecteur de l’infrarouge.

Pour les appareils horizontaux, il s’agit de surmonter l’ouverture d’un baldaquin de forme appropriée en aluminium pur (non anodisé). Le gain de température est d’environ 3° C avec l’emballage et du même ordre de grandeur pour le baldaquin.

De plus, il convient de recouvrir l’ouverture d’un couvercle, si possible réflecteur, pendant les périodes de non vente. Pour les meubles à étagères, il faut les placer face à face et il serait bon d’installer un faux plafond en aluminium au-dessus de l’allée.

Les meubles verticaux fermés sont peu sensibles aux échanges radiatifs mais nettement aux transferts d’air lors de l’ouverture de la porte. Aussi, faut-il réaliser des portes de faible hauteur, les munir de joints étanches et minimiser la durée des ouvertures par un dispositif de rappel automatique. Cependant, en fin de journée de forte vente, le samedi notamment, la température des quelques paquets restant remonte de plusieurs degrés C, ce qui a peu de conséquences, ces meubles étant utilisés pour la vente des produits congelés ou surgelés. Pour limiter le réchauffement, il est bon de les maintenir correctement remplis.

Les meubles horizontaux fermés sont les plus sûrs mais ils sont considérés comme étant « moins vendeurs ». Ils sont adoptés par les magasins spécialisés pour produits surgelés.

Enfin, quel que soit le type de meuble d’exposition, il est bon de climatiser le magasin, de n’utiliser que des lampes froides, d’éviter les emplacements à fort courant d’air (près des portes) et la proximité des fenêtres.

Enfin, il est très important que les personnels sachent qu’il ne faut jamais surcharger les meubles et qu’il faut minimiser la durée des séjours en milieu chaud (déchargement des engins et réapprovisionnement des meubles). Un principe à respecter est « premier entré, premier sorti ».

La consommation

Le dernier maillon à risques de la chaîne du froid est celui de la consommation. Les risques peuvent être dus à une interruption de la chaîne de froid ou à une conservation anormalement prolongée des produits en réfrigérateur. Ils sont d’autant plus réels qu’aucun contrôle officiel ne peut être effectué.

Le seul véritable remède est de diffuser une information correcte concernant le choix et l’utilisation des réfrigérateurs et des congélateurs domestiques.

CONCLUSION

Toute technique, qui n’est pas financièrement rentable, est rapidement abandonnée.

Or, grâce au froid, les industries de l’agroalimentaire, en mettant sur le marché à des prix compétitifs des produits de plus en plus variés et élaborés, tendent à se substituer à la cuisine familiale. De ce point de vue, elles peuvent être assimilées à des industries de service de sorte que la chaîne alimentaire devient un outil « sur mesure » apte à satisfaire les multiples exigences des producteurs, des industriels et des commerces, ce qui implique une diversification des services logistiques à assurer en particulier par les professionnels du froid.

Les contraintes imposées pour la protection de l’environnement, tant planétaire que local, imposeront des modifications importantes dans la conception et la construction de machines très compactes, économes en énergie, peu bruyantes. La conception de ces équipements plus performants et leur exploitation moins coûteuse feront de plus en plus appel à l’informatique et aux systèmes modernes de télécommunication. Cependant, il demeure bien des inconnues concernant les fluides frigorigènes et les mousses isolantes, en particulier.

Devant la multiplication des réglementations nationales, européennes et internationales (il y a, en dehors des directives, 52 accords internationaux des Nations Unies pour les seuls transports de marchandises), les professionnels devront participer beaucoup plus activement qu’aujourd’hui à l’élaboration des textes, de sorte à ne pas être enfermés dans des « impasses techniques » ou se trouver en situation de concurrence déloyale.

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* Directeur honoraire de l’Institut International du Froid, Membre de l’Académie d’Agriculture de France. Tirés-à-part : Professeur André GAC, 65 bld Excelmans — 75016 Paris. Article reçu le 12 janvier 2001, accepté le 15 janvier 2001.

Bull. Acad. Natle Méd., 2001, 185, no 2, 275-285, séance du 13 février 2001