Communication scientifique
Séance du 2 mars 2010

Présentation

Jean-Pierre Olié *

 

Séance dédiée à la psychiatrie

Présentation

Jean-Pierre OLIÉ *

Nous sommes reconnaissants à l’Académie nationale de médecine de consacrer cette session à la psychiatrie, et je remercie particulièrement le Professeur Jean Cambier de m’avoir associé à cette initiative.

Derrière les symptômes comportementaux, qui constituent souvent le motif de demande d’aide auprès du psychiatre, se cache la douleur psychique que beaucoup d’arguments permettent de rapprocher de la douleur physique.

À la condition d’interroger les patients, cette douleur se dévoile « Psychache » et « pain » partagent les mêmes substrats physiologiques et coexistent souvent au niveau physiopathologique. La douleur psychique caractéristique des pathologies dépressives n’est jamais mieux soulagée que par les morphiniques dont on sait aussi la place parmi les antalgiques. Beaucoup de travaux ont tenté de démêler les liens entre douleur psychique ou douleur physique et pathologies psychiatriques telles que schizophrénies, dépressions, crise suicidaire, pathologies addictives. Certains résultats indiquent que les malades mentaux ont une perturbation de la sensiblité aux agents nociceptifs.

L’avenir est assurément vers la recherche de méthodologies permettant d’évaluer spécifiquement la douleur psychique qui n’est pas nécessairement corrélée à la douleur physique à un instant donné chez un malade donné.

À côté des chimiothérapies psychotropes, des psychothérapies, les techniques de stimulation cérébrale occupent une place de plus en plus importante dans le traitement des grands syndromes psychiatriques. La stimulation électrique réalisée par l’électrochoc ou ECT (électro convulsivothérapie) reste très utile pour soulager les états dépressifs graves non répondeurs aux médications anti-dépressives. L’ECT est aussi utile pour traiter certains états psychotiques résistants aux médicaments anti psychotiques. A l’initiative d’Henri Lôo, la pratique d’une stimulation mensuelle ou ECT de maintenance a été ré-introduite en France comme ailleurs dans le monde pour stabiliser des états psychopathologiques chroniques ou trop rapidement récidivants.

 

La stimulation magnétique transcrânienne est un autre mode de traitement de certains états dépressifs ou encore des hallucinations.

La stimulation cérébrale profonde telle que pratiquée pour le traitement de certaines maladies neurologiques a apporté la preuve de son efficacité dans le traitement de troubles obsessionnels compulsifs gravement invalidants et non répondeurs aux autres thérapeutiques ainsi que dans le traitement de troubles dépressifs graves résistants aux antidrépresseurs. Cette thérapeutique est aussi une ouverture pour une meilleure compréhension de la physiopathologie des affections psychiatriques.

Les médicaments antipsychotiques les plus utilisés aujourd’hui n’ont plus les mêmes effets indésirables que les premiers neuroleptiques. Ces antipsychotiques de nouvelle génération ont montré la même « efficacité que les neuroleptiques classiques sur les symptômes psychotiques mais il importe désormais de mieux évaluer leurs avantages dans la vraie vie. En particulier permettent-ils une meilleure qualité de vie ?

Facilitent-ils la mise en œuvre des capacités cognitives du patient, en un mot sa réinsertion ? L’ambition thérapeutique est désormais d’aller au-delà d’une simple levée des symptômes avec l’objectif d’aider le patient vers davantage d’autonomie.

Cette ambition impose de nouvelles modalités d’évaluation de ces thérapeutiques, bien au-delà du simple essai randomisé versus placebo avec mesure quantitative d’une liste de symptômes.

Enfin une session de l’Académie nationale de médecine dédiée à la psychiatrie ne peut ignorer la place majeure des psychothérapies. Ces techniques thérapeutiques ont beaucoup évolué et la question de l’évaluation de leur niveau d’efficacité est désormais ouverte. Le domaine des troubles dépressifs est un champ d’application privilégié des thérapies cognitivo-comportementales. Beaucoup d’études ont apporté la preuve de leur efficacité. Reste à voir les conditions d’application de telles stratégies de traitement.

Je remercie Raphaël Gaillard, Bruno Millet, Bruno Falissard, Christine MirabelSaron d’avoir accepté de présenter successivement ces quatre thèmes de grande actualité. Ils illustrent l’ampleur des avancées de notre spécialité. Ils disent aussi combien de progrès sont désormais possibles pour une psychiatrie du futur capable de participer aux avancées des neurosciences tout en conservant sa spécificité de médecine particulièrement ouverte vers les sciences humaines.

 

<p>* Membre correspondant de l’Académie nationale de médecine, e mail : jpolie@club-internet.fr</p>

Bull. Acad. Natle Méd., 2010, 194, no 3, 565-566, séance du 2 mars 2010