Séance dédiée à la prédisposition et à la résistance génétiques aux maladies infectieuses
Présentation
Jean-Yves LE GALL Depuis les années 80, le développement de la génétique moléculaire a donné une assise rationnelle et scientifique à la notion empirique de terrain, maintenant considéré comme un ensemble complexe de déterminants à expression tantôt monogénique tantôt multigénique. Deux domaines sont ainsi aujourd’hui bien documentés : celui de la sensibilité individuelle aux médicaments ou pharmacogénétique et celui des sensibilités ou des résistances aux différents agents infectieux (virus, bactéries ou parasites).
Les inégalités des individus vis-à-vis des agressions par des organismes étrangers ont été constatées de longue date ; c’est ainsi que les grandes épidémies qui ont ravagé les populations, en particulier au moyen âge, laissaient des survivants sans doute réfractaires à l’infestation par le pathogène en cause ou au développement d’une forme mortelle de cette infection. Le génome de nos contemporains est le résultat d’une longue évolution et au moins pour une part d’adaptation aux conditions du milieu et de ses pathogènes. Certaines mutations peuvent cependant apparaître paradoxales car elles combinent un effet bénéfique ou protecteur et donc en définitif un avantage sélectif, et par ailleurs un effet pathologique. L’exemple le plus anciennement connu est celui de l’hémoglobine S dont la répartition géographique recouvre la carte de l’infestation paludéenne : les individus porteurs de l’allèle HbS sont en général protégés contre les formes graves, mortelles du paludisme. Un deuxième exemple celui de la délétion CCR5-Δ32 ; la protéine CCR5 est un récepteur des chimiokines et la délétion de 32 paires de bases dans le promoteur de son gène a pour conséquence d’empêcher son expression à la surface membranaire, ce récepteur étant indispensable au virus du Sida pour pénétrer dans les cellules et les infester.
Dans les populations de l’hémisphère Nord 1 % des sujets est homozygote pour cette délétion et donc naturellement protégé contre l’infection par le VIH ; ces individus ne présentent aucun trouble particulier mais seraient plus exposés au risque d’encéphalite mortelle provoquée par des flavivirus transmis par des moustiques. A l’inverse il existe des individus qui succombent à des formes foudroyantes d’infection par des agents pathogènes qui, dans l’immense majorité des cas, ne provoquent pas de maladies aussi sévères. L’exemple classique est celui des BCGites généralisées après vaccination par le BCG avec une fréquence d’environ un cas par million de sujets vaccinés. De la même façon une vulnérabilité particulière à Neisseria meningitidis s’observe chez les sujets déficients en composants du complément.
Bull. Acad. Natle Méd., 2010, 194, no 6, 913-914, séance du 8 juin 2010