Communication scientifique
Session of 24 avril 2001

Nouvelle cartographie fonctionnelle cérébrale : études sur la plasticité du cerveau humain

MOTS-CLÉS : cartographie cérébrale. diagnostic par résonance magnétique, méthode. plasticité nerveuse.. tomoscintigraphie
Human brain plasticity and mechanisms of functional recovery
KEY-WORDS : brain mapping. magnetic resonance imaging, methods. neuronal plasticity.. tomography, emission-computed

R. SJ. Frackowiak

Résumé

En pratique clinique, il est courant d’observer une certaine récupération des fonctions cérébrales compromises par une lésion du cerveau. Les mécanismes qui sous-tendent ces phénomènes restent mal compris. Grâce à de nouvelles méthodes d’investigation, il est maintenant possible d’explorer les systèmes cérébraux macroscopiques, et de manière non invasive la structure et la fonction du cerveau humain. Le choix judicieux de populations pathologiques et de protocoles expérimentaux adéquats a permis de démontrer certains des mécanismes associés à la récupération clinique. Cet article présente les résultats d’observations qui suggèrent une réorganisation cérébrale. Au sein d’un système cérébral donné, cette réorganisation concerne non seulement les régions périlésionnelles, mais implique aussi une modification étendue des formules d’activation. En outre, cette réorganisation s’accompagne de modifications structurelles. La morphométrie informatisée, nouvelle technique d’analyse anatomique structurelle, a montré des modifications plastiques significatives, qui vont de l’hypertrophie relative de certaines régions cérébrales chez des sujets normaux à des atrophies à distance liées à l’atteinte des faisceaux afférents chez les patients. Ces travaux suggèrent de nouvelles perspectives thérapeutiques, dont certaines peuvent à leur tour être étudiées par les méthodes d’imagerie.

Summary

The non-invasive brain scanning techniques, introduced a quarter of a century ago, have become crucial for diagnosis in clinical neurology. They have also been used to investigate * Membre Associé de l’Académie nationale de médecine . Dean, Institute of Neurology, UCL. – Professor and Chairman Wellcome Department of Cognitive Neurology. Director, Leopold Muller Functional Imaging Laboratory 12, Queen Square. London WC1N 3BG (Grande-Bretagne). Tirés-à-part : Professeur Richard S.J. FRACKOWIAK, à l’adresse ci-dessus. Article reçu le 9 février 2001, accepté le 19 février 2001. brain function and have provided information about normal activity and pathogenesis. They have been used to investigate functional specialisation in the brain and how specialised areas communicate to generate complex integrated functions such as speech, memory, the emotions and so on. Brain plasticity is a generic term that has now come to be used to signify any changes in brain structure or function. The phenomenon is poorly understood, and yet clinical neurologists are aware that spontaneous recovery from brain lesions is not uncommon. An improved understanding of the mechanisms of recovery may generate new therapeutic strategies and indicate ways of modulating mechanisms that promote plastic compensation for loss of function. The main methods used to investigate these issues are positron emission tomography and magnetic resonance imaging (MRI). The techniques of functional brain mapping and computational morphometrics depend on high performance scanners and a validated set of analytic statistical procedures that generate reproducible data and meaningful inferences from them. The motor system presents a good paradigm to illustrate advances made by scanning towards an understanding of plasticity at the level of brain areas. The normal motor system is organised in a nested hierarchy. Recovery from paralysis caused by internal capsule strokes involves functional reorganisation manifesting as changed patterns of activity in the component brain areas of the normal motor system. The pattern of plastic modification depends in part on patterns of residual or disturbed connectivity after brain injury. Therapeutic manipulations in patients with Parkinson’s disease using deep brain stimulation, dopaminergic agents or fœtal mesencephalic transplantation provide a means to examine mechanisms underpinning plastic change. Other models of plastic change, such as normal visuospatial learning or re-establishing speech comprehension after cochlear implantation in the deaf illustrate how patterns of brain function adapt over time. Limitations of the scanning techniques and prospects for the future are discussed in relation to new developments in the neuroimaging field.

INTRODUCTION

Le cerveau humain adulte est un système complexe, dynamique, présentant d’importantes capacités d’adaptation dans les situations normales et pathologiques.

L’idée d’un cerveau statique, limité dans ses pouvoirs de récupération par ses constituants neuronaux incapables de régénération, a été radicalement révisée au cours de ces dernières années [1]. En effet, les neurobiologistes ont mis en évidence des signes probants de la persistance de la division de cellules souches pluripotentes dans le cerveau adulte. Au niveau cellulaire, ce fait complète les observations des neurologues qui sont témoins des remarquables pouvoirs de récupération du cerveau adulte lésé. Autrefois, des théories non vérifiables et sans fondement expliquant ce phénomène abondaient. Une amélioration était ainsi attribuée, inter alia , à une réorganisation des systèmes à l’échelon macroscopique, notamment par la prise en charge des fonctions déficitaires par le cortex homologue controlatéral. Il nous est possible aujourd’hui d’effectuer des mesures directes de la plasticité du cerveau humain. En conséquence, nous commençons à comprendre de façon plus précise la complexité de l’adaptabilité des systèmes cérébraux, ainsi qu’à explorer les mécanismes cellulaires pouvant être impliqués.

Cet article décrit les résultats d’un programme de recherche clinique que j’ai commencé, il y a vingt ans. Cette recherche a été rendue possible grâce à l’invention des techniques de cartographie cérébrale non invasives en trois dimensions. Cette activité a débuté dans la discipline des rayons X, avec la tomodensitométrie (CT) qui a eu un impact immédiat sur les diagnostics en neurologie clinique [2]. Cependant, plus récemment, de plus amples informations sur les mécanismes du fonctionnement cérébral ont été obtenues grâce à deux techniques apparentées. La tomographie par émission de positrons (TEP) repose sur les méthodes classiques de marquage. Elle consiste en l’administration à l’homme de molécules marquées par un isotope radioactif, dont la distribution cérébrale en fonction du temps est alors enregistrée [3]. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est utilisée de deux façons principales. L’IRM structurelle fournit des informations sur les contrastes différentiels des tissus du cerveau et permet ainsi d’obtenir des images anatomiques d’une grande précision [4]. L’IRM fonctionnelle est utilisée pour suivre l’activité cérébrale et dépend des propriétés paramagnétiques différentielles de l’oxyhémoglobine et de la desoxy-hémoglobine. La composition relative de ces différents constituants sanguins change en fonction de l’activité locale du cerveau. Ainsi, des changements de signal dépendant du taux d’hémoglobine oxygéné sanguin (BOLD — blood oxygen level dependant signal) sont utilisés pour générer des cartographies fonctionnelles du cerveau (fMRI) [5].

La plasticité est un terme générique qui est utilisé aujourd’hui pour indiquer des changements dans la structure ou la fonction du cerveau. Le concept de changement de poids synaptique proposé par Hebb est un des exemples de mécanisme de plasticité de la physiologie moléculaire [6]. De nombreux processus biochimiques associés à la phosphorylation des protéines semblent intervenir de façon cruciale dans les mécanismes mnésiques [7]. Un changement macroscopique du volume de l’hippocampe du pinson est une caractéristique du cycle d’accouplement de ces oiseaux [8]. Dans le monde animal, il existe bien d’autres exemples de ce genre de manifestations de plasticité anatomique. Des modifications de la configuration et du nombre des boutons synaptiques ont aussi pu être observées [9]. En revanche, peu d’informations nous permettent de déterminer si les connexions fonctionnelles peuvent être modulées ou encore si la fonction d’aires cérébrales spécialisées peut subir des modifications plastiques. L’hypothèse selon laquelle de tels mécanismes existent peut être envisagée, ne serait-ce que parce que le cerveau est capable d’acquérir constamment de nouvelles informations, d’apprendre, de s’adapter, d’accumuler de nouvelles traces mnésiques de toutes sortes et de réagir aux agressions des attaques cérébrovasculaires, des traumatismes ou des hypoxies par un rétablissement de fonction.

Mon travail s’est centré sur la caractérisation des mécanismes de plasticité des systèmes chez les patients et les volontaires normaux en utilisant une combinaison de techniques de cartographie cérébrale [10]. J’utilise ici le mot système spécifiquement pour décrire les systèmes perceptifs, cognitifs et moteurs exprimés chez l’être humain. Les nouvelles techniques de neuro-imagerie ont dû être développées.

Beaucoup de progrès ont été faits quoi que, dans certains cas, ceux-ci aient parfois été ralentis par une utilisation inadéquate des outils. Des progrès considérables dans notre compréhension des mécanismes de la plasticité ont été réalisés et je tenterai de décrire, dans cet article, l’état des connaissances actuelles à partir de mon propre travail.

MÉTHODES

Les fondations conceptuelles de deux aspects méthodologiques doivent être considérées afin d’évaluer les résultats des études en neuroimagerie. D’une part, ce qui peut être obtenu est limité par les caractéristiques des scanners. La TEP donne des images quantitatives, à haute résolution, de la distribution des traceurs radioactifs dans le cerveau [11, 12]. Des cartes fonctionnelles sont obtenues lors de l’utilisation de traceurs du métabolisme énergétique tel l’oxygène (15O ) ou le glucose Fluor-18 2 fixé sur le désoxyglucose, qui est un analogue du glucose 18 — FDG) ou du débit sanguin cérébral local (H 15O). Le débit sanguin cérébral local (rCBF) et le méta2 bolisme du glucose (rCMRglu) sont des indicateurs indirects utiles de l’activité synaptique locale moyenne du cerveau [13, 14]. Les cartographies fonctionnelles qui en résultent permettent de dissocier des activités cérébrales séparées de 2 mm, malgré une résolution intrinsèque de l’ordre de 3 à 5 mm. Si l’ensemble du cerveau peut être examiné simultanément, seul un nombre limité de scans par sujet peut être effectué à l’aide de l’administration de marqueurs radioactifs. Cela limite sérieusement l’usage de cette méthode, en particulier lorsqu’il s’agit d’étudier une problé- matique qui dépend du temps, telle la plasticité. La TEP est aussi utilisée pour localiser et déterminer la distribution d’autres constituants du cerveau, telles que des populations cellulaires spécifiques. La 18F-Dopa permet de situer les cellules qui transforment ce précurseur en dopamine et la stockent dans des vésicules intracellulaires. Le signal radioactif obtenu est concentré dans les terminaisons neuronales du striatum , et peut être utilisé comme un indice de leur viabilité fonctionnelle [15].

L’IRM permet d’obtenir des images à la fois structurelles/anatomiques et fonctionnelles à haute résolution spatiale, et cela sans l’utilisation de marqueurs radioactifs [16]. Si les changements de signal BOLD dont l’IRMf dépend sont petits, ils peuvent être cependant détectés très sensiblement grâce au faible bruit inhérent au scanner RMN qui accompagne les mesures. L’un des inconvénients de l’IRMf repose sur l’impossibilité de calibrer de façon précise le signal en unités physiques. L’inconstance de ce signal de fond, non mesurable, est à l’origine des difficultés à obtenir des mesures séquentielles avec cette technique sur une durée prolongée (jours ou mois).

La résolution spatiale des cartes fonctionnelles est légèrement supérieure à celle de la TEP, et celle des images anatomiques très bonne, de l’ordre de 1-1.5 mm3 par voxel.

Le second aspect méthodologique qui nécessite d’être abordé est le cadre conceptuel qui sous-tend l’analyse des données en neuroimagerie. Au cours de ces dix dernières années, mon groupe (principalement K. Friston, J. Ashburner, J.B. Poline [Orsay],

A. Holmes, en collaboration avec K. Worsley [Montreal] a développé la méthode de cartographie statistique paramétrique (Statistical Parametric Mapping, SPM). Il s’agit d’un ensemble de programmes informatiques qui permettent de réaliser les étapes nécessaires de pré-traitement et d’analyse des images, de façon entièrement automatisée ainsi que reproductible [17, 21]. Des corrections liées au mouvement du sujet au cours de l’enregistrement et aux distorsions inhérentes aux scanners sont effectuées. Les images sont alors ré-alignées et normalisées dans un espace standard grâce à un algorithme itératif recherchant des paramètres de transformations rigides ou élastiques basés sur les estimations bayesiennes de distribution de matière grise et de matière blanche et du liquide céphalo-rachidien (LCR). Elles sont ensuite lissées. A ce stade, elles peuvent être moyennées et comparées ou fusionnées avec des images d’autres modalités, car toutes ces images ont été normalisées dans le même espace de référence stéréotaxique — habituellement l’espace de Talairach. L’analyse statistique de ces images, quelle que soit leur modalité, repose sur une régression linéaire basée sur le modèle linéaire généralisé. Chaque image (il peut y en avoir des centaines) se compose de plusieurs voxels, souvent plus ou moins de 105. Des comparaisons multiples (sur chaque voxel) sont réalisées lorsqu’une image ou une image moyenne est comparée à une autre. Une nouvelle analyse statistique, basée sur la théorie des champs stochastiques gaussiens a été développée afin de résoudre le problème de corrections pour comparaisons multiples. Cette analyse nous permet, à partir de seuils statistiques significatifs, d’émettre des inférences valides sur les données.

Chaque série de scans, qui représente une condition d’intérêt, peut être comparée à une autre série ou corrélée à une variable indépendante telle que l’âge, le sexe, la concentration d’un médicament, des symptômes, etc. Les expériences factorielles consistent à comparer des activations dans au moins deux contextes, afin d’estimer l’effet des autres variables dans les comparaisons simples. Ces projets sont d’une importance capitale car il est possible de les utiliser pour observer la façon dont les aires fonctionnelles spécialisées du cerveau s’adaptent lorsqu’elles sont endommagées, lorsque leur connectivité est altérée par une maladie, par une manipulation pharmacologique ou comportementale. Les résultats obtenus en TEP et en IRMf étant très similaires dans les études qui ont utilisé la méthode soustractive classique [22, 23], nous ne préciserons pas la technique employée dans la suite de cet article, sauf si cette information a une signification particulière dans notre argumentation.

SPM est aujourd’hui l’approche standard adoptée par la communauté scientifique en neuroimagerie. Elle est complètement validée, automatisée et donne des résultats reproductibles. Cette méthode représente une avancée majeure dans les techniques d’analyse par régions d’intérêt (ROI – Region of Interest), qui consistent à utiliser tous les voxels de l’ensemble des scans afin de déduire la distribution régionale des changements anatomiques et fonctionnels induits expérimentalement. La méthode appliquée aux images fonctionnelles est connue sous le nom de cartographie céré- brale fonctionnelle. Son application plus récente aux images structurelles est connue sous le nom de morphométrie informatisée [24].

RÉSULTATS

Les différents composants du système moteur normal

Le système moteur se compose de nombreuses aires corticales qui sous-tendent les diverses étapes impliquées dans la génération d’une action [25-28]. Plusieurs études sur ce sujet ont été conduites avec un certain nombre de collègues : R. Passingham, K.M. Stephan, M.P. Deiber (Lyon), M. Jueptner et J. Colebatch. Une intention d’action est associée à des activations du cortex préfrontal dorsolatéral et du cortex cingulaire antérieur, situé devant l’aire motrice supplémentaire (pSMA).

L’initiation d’une action ou l’attention motrice est associée à des activations localisées dans la pSMA, dans les régions postérieures préfrontales et dans le cortex pariétal du sillon intrapariétal. La formulation d’un concept moteur (simulation mentale d’une action) engage la SMA, les régions prémotrices, les aires primaires sensorielles et le cortex pariétal antérieur situé juste derrière le sillon central. L’exécution d’une action implique en plus de ces régions, les cortex primaires moteurs et sensoriels. La réalisation des séquences d’actions précisées dans l’espace et dans le temps est associée à des activations dans les noyaux gris centraux et le cervelet. Le système moteur présente en conséquence une organisation hiérarchique, dont les constituants se combinent afin de générer une action appropriée.

La formule d’activations cérébrales change lors de la répétition d’une action, et ce d’autant plus lorsque celle-ci devient automatique après un entraînement intensif [29]. Ces changements, dépendants du temps, sont des manifestations claires de la plasticité fonctionnelle. L’activité au sein du lobe pariétal droit et du cortex préfrontal dorsolatéral diminue nettement au cours de l’entraînement, tandis que l’activité au sein de la SMA augmente. Si une séquence apprise et automatique de mouvements des doigts est réalisée avec pour consigne de faire attention au doigt qui exécutera le prochain mouvement, les performances reflétées par le temps de réaction se détériorent, et la formule d’activations cérébrales s’inverse à nouveau [30, 31].

Ces résultats illustrent le concept d’un système distribué ou multi-localisé, constitué d’éléments fonctionnels spécialisés. Ils démontrent aussi qu’il est possible d’observer les corrélations physiologiques d’une activité mentale pure dans le domaine moteur.

Récupération motrice après un infarctus de la capsule interne

Avec F. Chollet (Toulouse) nous avons examiné les formules d’activations cérébrales associées à l’exécution de mouvements des doigts en réponse à des stimuli chez des sujets sains. Nous avons comparé ces formules à celles obtenues chez des patients ayant eu un infarctus isolé des ganglions de la base affectant, dans une certaine
mesure, la capsule interne [32]. Ces patients présentaient tous une paralysie du membre supérieur dont ils se sont remis cliniquement complètement à l’issue d’une période de temps variable (jours ou mois). Aucune de ces attaques ne correspondait à un accident ischémique transitoire. Un fonctionnement normal a été défini comme étant la capacité d’exécuter un mouvement du doigt en réponse à un stimulus aussi bien que les sujets sains. Les résultats furent étonnants. La réalisation de cette tâche motrice simple par des sujets volontaires est associée à des activations du cortex moteur controlatéral et des cortex adjacents prémoteurs et pariétaux, ainsi que du cervelet ipsilatéral. Chez les patients, les activations du réseau moteur étaient plus importantes et bilatérales dans les cortex moteurs, prémoteurs et pariétaux proches de la région de la main du cortex somatosensoriel. D’autre part, des activations supplémentaires ont été observées dans le lobule pariétal inférieur, le cortex préfrontal, l’insula , les ganglions de la base et les deux hémisphères cérébelleux. La formule d’activation était donc bilatérale et ressemblait à celle d’un mouvement nouveau plutôt qu’à celle d’un mouvement automatique.

La plasticité a aussi été démontrée chez des patients qui ont récupéré (leur motricité), en comparant leur activité cérébrale au repos à celle de sujets sains de même âge et de même sexe. Une augmentation focale de l’activité à l’état de repos a été trouvée dans les noyaux gris centraux et dans les régions prémotrices inférieures de l’hémisphère cérébral non-lésé. Ces régions sont intéressantes dans la mesure où elles contiennent des cellules qui répondent à une stimulation ipsilatérale et controlatérale et qui pourraient sous-tendre des représentations bilatérales des membres.

Ainsi, la présence d’une lésion engendre une réorganisation qui peut être étendue et multifocale. Un autre exemple de l’effet d’une lésion per se sur une activité au repos, est le phénomène de diaschisis cérébelleux croisé [33], qui se manifeste par une diminution de l’activité cérébelleuse controlatérale au repos à la suite d’un infarctus cortical. On suppose que cette manifestation est due à la perte des efférences corticales qui normalement croisent dans la protubérance avant d’atteindre l’hémisphère cérébelleux controlatéral. Nous avons récemment utilisé la nouvelle technique de morphométrie informatisée (voir ci-dessous) afin de montrer une atrophie concomitante de l’hémisphère cérébelleux, phénomène qui fut décrit dans les examens post mortem de cerveaux dans les années 1920. L’un des malades que nous avons étudiés nous fut envoyé par A. Danek de Munich, qui avait effectué une cartographie MR structurelle sur ce patient quelques mois après son infarctus capsulaire en utilisant une séquence spéciale d’enregistrement. Les coupes coronales indiquent de façon très claire une dégénération wallérienne des faisceaux corticospinaux, et permettent ainsi d’identifier l’origine corticale des fibres endommagées par la lésion de la capsule interne et de montrer une dégénération du faisceau pyramidal dans le tronc cérébral et dans la décussation bulbaire. Ce type de démonstration deviendra de plus en plus courant lorsque la nouvelle technique d’imagerie tridimensionnelle de diffusion (3-Dimensional diffusion Tensor Imaging (DTI), qui permet de cartographier les faisceaux de substance blanche, sera développée [35].

Nous avons, avec C. Weiller, étudié les corrélations anatomo-fonctionnelles dans les modèles de récupération, en réalisant des analyses individuelles chez chaque patient de leurs scans fonctionnels par rapport à leurs scans anatomiques [36, 37]. Il s’agissait de savoir si les infarctus avaient lésé le bras antérieur, le genou ou les parties antérieure ou postérieure du bras postérieur de la capsule interne. Ces distinctions semblent importantes puisque W. Fries a démontré, chez les primates non humains, que les fibres corticofuges de la SMA des cortex prémoteurs et moteurs sont disposées topographiquement dans la capsule interne selon un axe rostral-caudal [38]. Les patients, dont la lésion touche les efférences du cortex moteur, présentent une formule de récupération associée à une formule d’activations cérébrales qui comprend une augmentation importante centrée mais non confinée à la représentation de la main du cortex moteur primaire. Cette activation corticale, qui repré- sente en grande partie l’effet des fibres afférentes, s’étend selon un axe rostro-caudal au-delà des limites de la région de la main, aux cortex adjacents pariétaux et prémoteurs, ainsi qu’à la région du visage du cortex moteur primaire. Les patients présentant des lésions qui avaient endommagé le bras antérieur ou le genou de la capsule interne ne manifestaient, pour leur part, aucune hyperactivité du cortex moteur, mais une augmentation de l’étendue de l’activation dans les cortex prémoteur mésial ou dorsolatéral . Ces formules fascinantes d’adaptation différentielle dépendent clairement des formules spécifiques de perturbation des connections corticofuges normales des régions motrices du cortex cérébral.

Cartographie des pertes de fonction

Il est rarement reconnu que l’imagerie fonctionnelle chez les patients présentant des pertes de fonctions manque souvent de donner des résultats interprétables. En effet, que représente l’image d’une fonction absente et que signifie-t-elle ? C’est pour cette raison majeure que j’ai adopté la stratégie de ne cartographier que les patients qui ont récupéré leurs fonctions motrices, afin d’avoir la possibilité de comparer les sujets contrôles et les patients au cours de la réalisation d’une même tâche, selon les mêmes critères. Dans de telles circonstances, nous apprenons énormément [39]. Par exemple, il est possible d’examiner comment une fonction récupérée peut subsister.

Il semble que l’utilisation de voies alternatives ou la combinaison d’aires fonctionnelles pourrait aboutir à une restitution de la fonction. Ces aires cérébrales ne sont aucunement recrutées au hasard, mais sont les composantes du système fonctionnant normalement, ici le système moteur au sein duquel un certain degré de redondance fonctionnelle existe. En d’autres termes, un même comportement peut être exprimé par différentes combinaisons d’associations entre les régions cérébrales dont certaines sont nécessaires à l’expression du comportement, tandis que d’autres sont simplement suffisantes. Deuxièmement, il est possible de moduler expérimentalement les contextes au cours desquels une fonction est exprimée afin d’examiner la contribution respective des différentes aires cérébrales dans des situations diffé- rentes.

Avec ma collègue C. Price, nous avons récemment approfondi cette question pour le langage [40]. Deux patients furent étudiés, l’un est porteur d’une lésion du lobe frontal s’étendant à la région de Broca, l’autre présente une lésion de la région temporale antérieure et moyenne. Ces deux patients, qui étaient très sévèrement aphasiques, ont cependant récupéré suffisamment pour exécuter des tâches de lecture, de répétition et de sémantique et des tâches de contrôle à partir de stimulations visuelles et auditives. La morphométrie informatisée a été utilisée afin de définir l’étendue des infarctus et de délimiter de façon précise les régions qui ne présentaient que des pertes neuronales partielles. Les îlots de tissu résiduel ont été localisés et une quantification de l’étendue de l’implication de la substance blanche sous-corticale dans l’infarctus a été réalisée. Le même comportement a été observé chez ces deux patients présentant cependant des formules d’activations différentes.

Cette observation semble indiquer clairement qu’il existe, au sein du système sous-tendant le langage, une certaine redondance. De plus, une même région du cortex temporal inférieur, non affectée par les lésions, a été trouvée activée diffé- remment chez les deux patients au cours de deux tâches différentes. D’une part, lors d’une tâche sémantique qui dépend de la connectivite pariéto-temporale, une activation de cette région temporale antérieure a été observée uniquement chez le patient porteur d’une lésion frontale. D’autre part, au cours d’une tâche de lecture, cette même région temporale n’a pas été retrouvée chez le patient porteur d’une lésion frontale, tandis que l’autre patient présentait une activation normale de cette région cérébrale. Nous avons nommé cette activation dépendante du contexte au sein d’une aire cérébrale non-lésée une diaschisis dynamique (dynamic diaschisis). Cet exemple, qui repose sur l’observation classique d’une double dissociation, illustre parfaitement le fait que l’activité d’une aire cérébrale dépend de sa connectivité. Ce fait a des implications dans les interprétations des syndromes après lésions focales.

Il existe d’autres modèles intéressants de plasticité et de récupération qui ont été récemment développés. Nous avons étudié avec A.L. Giraud (Lyon) l’effet de transplantations cochléaires chez des patients sourds. Ce modèle est intéressant du fait que les patients recevant ce traitement ne présentent pas d’amélioration immé- diate après l’opération [41]. En effet, une rééducation intensive, souvent d’une durée d’un an, est nécessaire avant que la parole puisse être comprise. L’appareil cochléaire auditif normal est remplacé par 15 à 20 électrodes seulement ; en consé- quence, l’échantillonnage de l’environnement auditif est faible. Cette situation est intéressante, car les sujets développent, après un certain temps, un comportement complexe, à savoir la capacité de reconnaître un sens aux sons de la parole. Ainsi, des comparaisons avant et après la rééducation avec des formules d’activations obtenues chez des sujets sains entendants permettent de décrire les changements cérébraux résultant de la rééducation. Dans les premiers temps de cette rééducation, les régions préfrontales sont activées, mais aucune activation n’est détectée dans le sillon temporal supérieur et les régions avoisinantes. Après un certain temps, la formule d’activation ressemble étroitement à celle qui est détectée chez les volontaires sains. Ce modèle est aujourd’hui disponible pour tester différentes stratégies de
rééducation ou pour évaluer les effets des thérapies sur l’amélioration ou l’accélération de la récupération. De façon encore plus intéressante, ce modèle pourrait permettre de suivre de façon séquentielle la récupération de la fonction afin de déterminer les seuils d’activation soutenant une récupération comportementale.

Études séquentielles de récupération – manipulation thérapeutique

Il s’est avéré particulièrement difficile d’étudier des patients en cours de récupération avec l’IRMf. La protection des sujets à l’exposition aux radiations ne permet pas de réaliser en TEP des expériences similaires sur une certaine durée. La TEP présentait l’avantage d’une quantification du signal, qui permet la normalisation de l’activité de base sur l’ensemble des scans dans le temps ; ce qui n’est pas possible avec l’IRMf (cf. méthodes). Nous nous sommes récemment penchés sur ce problème fondamental. En considérant chaque paire de scans (mouvement et repos) comme une étude différente, il semblerait possible de déterminer si des changements apparaissent au cours du temps dans le contraste obtenu pour chaque paire [42]. Cette approche semble prometteuse et nous la poursuivons. Il s’agit de réaliser des scans séquentiels au cours du temps à partir de la deuxième semaine après l’infarctus et ce pendant quelques mois. Des données comportementales sont acquises simultané- ment afin d’évaluer si des changements régionaux dans le temps sont corrélés avec des paramètres cliniques de la fonction, mesurés indépendamment.

Une autre approche des études séquentielles consiste en l’utilisation de produits pharmaceutiques afin de modifier le contexte neurochimique dans lequel une tâche est effectuée. Dans le système moteur, nous avons montré que les anomalies associées à la maladie de Parkinson (PD) peuvent être modifiées sur le plan fonctionnel et comportemental par manipulation du système. Les malades PD sont de façon caractéristique incapables de générer des actions spontanées ou volontaires. Aucune activation n’est détectée au sein de la SMA et des cortex préfrontaux postérieur et cingulaire antérieur lorsque ces patients doivent générer des mouvements volontaires au hasard par rapport à la génération de ces mêmes mouvements dans un ordre fixe. Le même résultat est obtenu immédiatement après injection d’apomorphine. Cependant, quelques temps après cette injection, une amélioration comportementale apparaît, associée à l’activation des aires cérébrales identiques à celles observées chez les sujets sains [43].

Au cours d’études réalisées chez des patients PD porteurs d’électrodes profondes de stimulation implantées dans le noyau sous-thalamique ou le pallidum interne, nous avons montré avec le professeur Limousin (Grenoble) qu’une induction de plasticité intense, dans le sens d’une modulation de la connectivité inter-régionale, est à la base d’une récupération symptomatique [44]. Chez ces patients, la fréquence de stimulation des électrodes peut être réglée de façon non-invasive grâce à un système de contrôle transcutané. De façon générale une stimulation de 50Hz est effective du point de vue thérapeutique. Un seuil thérapeutique pour une force de stimulation donnée peut être déterminé individuellement. Les patients avaient pour consigne
d’exécuter des mouvements de la main de façon régulière, contrôlée, dans deux contextes différents. Dans le premier, le stimulateur était réglé à une fréquence en dessous du seuil, et dans le second au-dessus du seuil. La comparaison des différences entre les tâches motrices et la condition de repos permet d’identifier des régions du cerveau dans lesquelles il y a une activation spécifique due à la stimulation effective (interaction entre la tâche et la thérapie). Il est intéressant de noter que les interactions thérapeutiquement effectives se situent dans la partie médiale du lobe frontal, région similaire à celle qui fut identifiée pendant l’expérience pharmacologique. Avec M.P. Deiber et ses collègues à Lyon et Grenoble, nous avons montré que des effets d’interaction de stimulation cérébrale profonde dans le cervelet se manifestent sous la forme de désactivations associées à une suppression du tremblement [45]. Ces résultats sont cohérents avec une inversion du dysfonctionnement des boucles cortico-sous-corticales par inhibition du noyau sous-thalamique ou du pallidum externe afin d’accroître de façon effective le courant excitateur dans les projections thalamo-corticales vers les régions frontales [46]. Dans ce cas, les régions frontales sont similaires à celles qui sont identifiées au cours d’une intention d’action ou d’une initiation de l’action, qui sont des aspects du désordre moteur dont les patients PD se plaignent [47].

Un exemple plus direct de changement plastique dans le cerveau nous est donné par les expériences que j’ai effectuées en collaboration avec A. Bjorklund, O. Lindvall et leur groupe d’avant-garde de Lund. Nous avons démontré, pour la première fois, FIG. 1. Coupes transversales d’IRM à hauteur des noyaux gris centraux démontrant la captation de la 18-F Dopa dans le putamen et le noyau caudé. La captation est très diminuée du côté droit.

Elle est augmentée de façon importante, à gauche, au site d’une greffe de tissu mésencéphalique fœtal. Ce patient a été étudié 34 mois après la chirurgie et son état clinique s’est remarquablement amélioré. La captation du traceur reflète la viabilité et la fonctionnalité du tissu transplanté.

(Avec la permission de G.V. Sawle).

que des cellules fœtales mésencéphaliques transplantées dans le striatum de patients PD sont viables et fonctionnelles (Fig. 1). La TEP et le traceur 18F-dopa ont été utilisés [48-52]. Le traceur s’est concentré dans la zone transplantée, sous la forme de 18F-dopamine, et les patients ont manifesté une amélioration progressive des symptômes. Mes anciens collègues ont récemment réalisé une étude de contrôle au cours de laquelle ils ont répété des stimulations profondes cérébrales associées au paradigme d’injection d’apomorphine. La transplantation était le facteur de manipulation expérimentale du contexte. Ces auteurs ont clairement montré qu’une transplantation réussie et une amélioration des symptômes sont de nouveau associées à une augmentation de l’activité au sein du cortex frontal mésial et dorsolatéral [53].

La reconstitution cellulaire résulte d’une correction du déficit neurochimique dans les structures profondes cérébrales, qui engendre une restitution de la fonction des aires corticales associée à une amélioration comportementale.

Des stratégies similaires peuvent être utilisées pour étudier des activations dépendantes d’un état pharmacologique ou pour déterminer de façon plus détaillée les effets de la pharmacothérapie. Avec mon collègue R. Dolan, nous nous sommes intéressés au déficit de réalisation d’actions spontanées dans une autre catégorie de diagnostic, celle de la schizophrénie négative [54]. Notre prédiction était la suivante : si les déficits psychomoteurs sont dus à un dysfonctionnement des régions frontales mésiales et dorsolatérales, il devrait être possible d’observer des effets similaires à ceux que nous avons détectés chez les patients PD par stimulation des structures profondes, par injection d’apomorphine ou encore lors de la transplantation de tissu fœtal, en manipulant le système dopaminergique chez les patients schizophréniques. Les résultats confirment cette hypothèse, mais ils nous ont permis, de plus, de mieux comprendre la façon dont la dopamine exerce ses effets en modulant les connections fonctionnelles entre régions cérébrales éloignées. Chez les sujets volontaires sains, l’exécution d’une action volontaire comparée à une action imposée est associée à des activations localisées dans les cortex préfrontal dorsolatéral et cingulaire antérieur, et une désactivation relative dans les régions postcentrales qui sont modalité-spécifiques. Par modalité-spécifique, j’entends le cortex temporal pour les tâches linguistiques, l’aire appropriée du cortex moteur pour les mouvements des doigts, etc. Chez les patients présentant un déficit psychomoteur, signe principal d’une schizophrénie négative, cette formule cérébrale est inversée.

Les résultats montrent non seulement un hypofonctionnement des même aires cérébrales que chez les patients parkinsoniens, qui présentent aussi une certaine diminution de motricité, mais indiquent aussi que le cortex cingulaire antérieur et les aires post-centrales sont fonctionnellement liés par des changements d’activité spécifiques et réciproques. Une manipulation pharmacologique du système dopaminergique provoque une normalisation des formules d’activations, caractérisée par une augmentation d’activité dans le cortex cingulaire antérieur jusqu’à un niveau normal, et par une atténuation équivalente de l’activité dans les aires post-centrales et modalité-spécifiques [47].

CONCLUSION

Ces exemples de plasticité aiguë et chronique convergent pour soutenir l’idée de la nature dynamique des interactions fonctionnelles dans le cerveau adulte normal.

Les changements aigus causés par des agents thérapeutiques, des stimulations psychologiques et par les manipulations comportementales (apprentissage et entraî- nement) peuvent être assez transitoires. Néanmoins, des changements importants dans les formules d’activations qui persistent et permettent la récupération ou l’apprentissage de nouvelles fonctions, sont aussi fréquemment observés [55-56]. De tels changements de l’activité cérébrale sont sous contrôle de neurotransmetteurs, ce qui nous donne l’espoir que nous pourrons, en augmentant nos connaissances sur les modes d’action des neuromodulateurs et des neurotransmetteurs et sur les bases physiologiques du trouble du comportement, élaborer une gestion efficace des maladies chroniques par une approche symptomatique.

Les progrès récents des techniques de cartographie fonctionnelle cérébrale tels l’IRMf événementielle sont très prometteurs [57]. Ils permettront une caractérisaFIG. 2. — Ces images illustrent des modifications significatives de l’activité de l’hippocampe droit lors d’un apprentissage visuospatial, en coupe coronale (en bas, à gauche) ou sagittale (en bas, à droite). En haut à gauche est présenté un aspect de la ville virtuelle que les sujets avaient à explorer durant le scan. En haut à droite, on démontre la relation linéaire qui lie la précision de la navigation (ordonnée) au débit sanguin régional ajusté de l’hippocampe droit (abscisse). La corrélation est particulièrement remarquable compte tenu du faible nombre de sujets.

( Avec la permission de E. Maguire).

tion d’événements encore plus éphémères et une meilleure description des changements dépendant du temps de l’activité cérébrale. Le développement récent de la morphométrie informatisée, qui est encore à l’état embryonnaire, paraît aussi particulièrement prometteur [58]. Cette technique permet de détecter des changements de la substance blanche locale et du volume du LCR ainsi que des concentrations de substance grise dans des conditions diverses [59-61]. Des changements subtils associés à l’apprentissage ont été démontrés chez un autre modèle, celui des chauffeurs de taxi londoniens. Ces professionnels passent trois ans à apprendre à se retrouver dans Londres. Ils sont donc particulièrement intéressants pour étudier le développement des mémoires visuospatiales. Ma collègue E. Maguire et moi-même avons mis en évidence, au cours d’expériences en neuro-imagerie, une activation des structures hippocampiques droites liée au niveau d’entraînement qui est corrélée à la précision avec laquelle les sujets réalisent une tâche d’apprentissage visuospatial [62] (Fig. 2). Dans une étude morphométrique, nous avons montré qu’il existait un changement relatif dans la forme et la taille de l’hippocampe chez les chauffeurs de taxi par rapport à celui de sujets contrôles de même âge. Ce changement volumétrique est corrélé au nombre d’années passées dans la profession. Cette découverte est d’importance car elle met en évidence, pour la première fois, un phénomène de plasticité anatomique au cours de la vie dans le cerveau humain adulte [63]. Ce résultat réalise d’une certaine manière « le rêve de Broca », qui repose sur une corrélation précise entre une structure désorganisée et une fonction anormale chez les patients au cours de la vie. Nous avons aujourd’hui les outils permettant de réaliser des mesures anatomiques précises et de les corréler avec les cartographies fonctionnelles du cerveau. Ces données peuvent être ensuite associées à des estimations indépendantes de fonction clinique au cours de la récupération.

Lorsque nous comprendrons comment le cerveau humain récupère, observation non rare après traumatisme crânien ou accident cérébrovasculaire dans les services de neurologie, nous nous trouverons en tant que cliniciens dans une position plus sûre pour manipuler les mécanismes appropriés de façon à permettre une meilleure récupération. Cette entreprise nécessite d’établir des liens entre les différents niveaux de compréhension des systèmes cérébraux, en partant de la neuropsychologie et la neuro-imagerie moderne jusqu’aux progrès extraordinaires des sciences moléculaires et pharmacologiques. Nous vivons vraiment des temps très excitants pour la neurologie.

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DISCUSSION

M. Claude-Henri CHOUARD

Que pensez-vous de l’intérêt de la magnéto-encéphalographie pour contribuer à l’étude de la plasticité cérébrale ?

La magnéto-encéphalographie nous apporte des données avec une bonne résolution dans le temps. Les signaux ne sont pas dispersés ni atténués par les tissus crâniens, mais la technique reste sensible uniquement aux neurones corticaux parallèles à la surface du cerveau. De plus, comme avec l’électroencéphalographie, la détermination de l’origine des signaux détectés n’est qu’approximative. La tendance est d’associer l’EEG et MEG pour augmenter la sensibilité de cette méthodologie. Nous espérons pouvoir incorporer les données avec celles de l’IRMf pour compléter notre connaissance de l’anatomie fonctionnelle du cerveau.

M. René MORNEX

Avez-vous observé et étudié des situations de conflit dans les processus d’adaptation neuronale. Par exemple, après une lésion unilatérale, une récupération motrice étalée sur plusieurs années doit correspondre à l’identification de nouveaux réseaux. Que se passe-t-il lorsque la récupération anatomique du côté lésé permet de retrouver la voie « normale » pour l’activité considérée ?

L’adaptation fonctionnelle après lésion semble être un processus dynamique. Ce processus se limite au système fonctionnel lésé, et ne le dépasse pas. Chaque système fonctionnel, moteur ou perceptif, est composé de plusieurs régions chacune avec une spécialisation. La fonction est normalement soutenue par ce réseau auquel les activités des régions sont corrélées. Nous constatons qu’un réseau comporte les régions suffisantes et nécessaires. Une lésion peut donc être compensée par une modification d’activations dans les éléments non lésés avec changement des corrélations entre ces éléments. Ces réorganisations sont fluides et capables de modification dans le temps en fonction des récupérations anatomiques dans les régions critiques ou autres.

M. Maurice TUBIANA

Comment expliquer que la consommation de glucose dans le cerveau soit très différente chez deux pianistes jouant le même morceau de musique, l’un amateur dans une zone très limitée du cerveau, l’autre virtuose dans cette même région, mais aussi dans de vastes autres zones du cerveau ?

Un expert se différencie d’un amateur dans plusieurs domaines. Expertise motrice, interprétation musicale, effet émotionnel, etc. La différence dans la cartographie fonctionnelle reflète toutes ces différences perceptives, émotives et motrices, il ne faut donc pas être surpris par cette grande différence. La difficulté des expériences en imagerie fonctionnelle est précisément de bien contrôler tous les effets psychomoteurs de telle façon que la seule différence entre une carte fonctionnelle et la carte témoin soit due au processus ciblé par l’expérimentateur.

M. Jean-Claude GAUTIER

La cartographie est-elle, dès à présent, suffisamment précise pour laisser espérer une renaissance des recherches anatomiques sur le cerveau ? Vos méthodes permettent-elles d’individualiser les aires inhibitrices corticales ?

Les résultats de la cartographie par imagerie des tenseurs de diffusion sont préliminaires mais laissent espérer que la discipline d’anatomie humaine va renaître. La différence sera que l’anatomie structurelle et fonctionnelle seront étudiées ensemble et in vivo . Avec les appareils de haute performance et puissance magnétique, je pense que votre espoir sera tout à fait réalisable. Quant aux aires inhibitrices, il faut se souvenir que l’inhibition est un processus actif qui consomme de l’énergie. Donc l’effet d’inhibition ne se fera sentir qu’en aval de la synapse inhibée dans les aires de projection des neurones inhibés.

M. Gabriel BLANCHER

Compte tenu des résultats de cette nouvelle cartographie fonctionnelle, peut-on encore parler de localisation cérébrale ?

Il y a deux grandes idées sur lesquelles reposent les théories modernes du fonctionnement du cerveau. L’une est la ségrégation des fonctions en aires spécialisées, l’autre est l’intégration des fonctions due aux interactions entre les aires spécialisées. On peut certainement parler de localisation, mais toujours dans le contexte d’élaboration de fonctions complexes par intégration.

Bull. Acad. Natle Méd., 2001, 185, no 4, 707-726, séance du 24 avril 2001