Communication scientifique
Session of 24 avril 2001

Les certificats médicaux obligatoires de la première enfance : un outil épidémiologique méconnu

MOTS-CLÉS : centre protection maternelle et infantile. épidémiologie. médecine préventive. nourrisson.. nouveau-né
Compulsory medical certificates for young children : an epidemiological unrecognized tool
KEY-WORDS : epidemiology. infant, newborn. infant.. maternal-child health centers. preventive medicine

J. Sénécal, E. Bussière, M. Roussey, J. Morellec, G. Pédrono

Résumé

En 1970, une loi rendait obligatoire la délivrance de trois certificats médicaux, le premier établi dans les 8 premiers jours de vie, le second et le troisième, respectivement à 9 et à 24 mois. Trente ans plus tard, une enquête a été menée pour évaluer l’application et l’efficacité du système dans les 100 départements français. Tous les médecins chef de PMI ont répondu au questionnaire qui leur a été envoyé. Le nombre de naissances annuelles par département est en moyenne de 7 665 mais avec des extrêmes de 800 à 36 457. La couverture de la population concernée est très bonne pour le premier certificat et en augmentation : 88,8 % en 1992 et 94,9 % en 1998 ; elle est moins bonne et pratiquement stationnaire pour le CS9 (71,1 %) et le CS24 (66 %) avec des différences départementales notables. Les réponses aux items sont elles aussi variables selon le département mais en moyenne de 86 % (à rapporter aux 650 000 naissances annuelles). L’exploitation informatique des certificats a progressé depuis 10 ans mais 8 départements ont encore un dépouillement manuel. Malgré la décentralisation des services de PMI, les départements sont tenus d’envoyer annuellement au Ministère de la Santé 22 indicateurs médico-sociaux permettant ainsi de suivre l’évolution de la situation à l’échelon national et d’établir des comparaisons entre départements. Parallèlement, les certificats ont permis d’orienter les activités de PMI, souvent jusqu’à l’échelle du canton. Le premier s’est montré très utile pour l’étude des problèmes de périnatalité et le troisième pour l’évaluation de la couverture vaccinale. A titre d’exemple, quelques résultats sont donnés et commentés (qualification de l’examinateur, mortalité néonatale et catégories socio-économiques, âge de la mère, durée de la grossesse, poids de naissance, couverture vaccinale). Certes le système n’est pas parfait mais s’améliore grâce à une meilleure information du personnel médical et des familles. Des recherches seraient néanmoins utiles pour préciser les imperfections et y remédier. Dans l’avenir, il est probable que le système s’étendra à l’enregistrement des données recueillies à l’école maternelle (3-4 ans) puis à l’école élémentaire (5 ans).

Summary

The delivery of three medical certificates has been made compulsory in 1970, the first during the first eight days of life, the second and the third respectively at 9 and 24 months. Thirty years later a survey has been conducted to evaluate the application and the efficiency of the system in 100 french departments. All the medical directors of the departmental MCH service send back the questionnaire. The number of annual birth by department is of 7 665 (mean) with extremities of 800 to 36 457. The covering of the concerned population is very good for the first certificate and increasing from 88,8 % in 1992 to 94,9 % in 1998 ; it is less good and not increasing for the CS9 (71,1 %) and the CS24 (66 %). The answers to each

item are also variable according to the department but with an average of 86 % (to refer to 650 000 annual births). The computer treatment of the certificates is increasing since ten years but 8 departements are still using manual analysis. In spite of the decentralization of MCH service each department is obliged to send to the Ministry of Health, each year, the results of 22 indicators which makes it possible to follow up the evolution of the situation of young children at the national level and to establish comparaisons between departments.

Simultaneously the certificates allow to guide the MCH activities, often at the canton level.

The first certificate has been very useful for the study of perinatal problems and the third for the vaccination coverage. For example, some results are given and discussed (qualification of the examiner, neonatal mortality and socio-economical categories, mother âge, duration of pregnancy, birth weight, vaccination coverage…). Of course, the system is not perfect but is improving due to a better information of the medical personnel and of the families. It is still necessary to continue the research to underline the deficiencies and to correct them.

Probably, in the future, the system will be extended to the registration of data obtained at the maternal school (3-4 years old) and the elementary school (5-6 years old).

INTRODUCTION

La loi du 15 juillet 1970, complétée par deux décrets en 1973, prescrit la délivrance obligatoire de trois certificats de santé pour l’enfant ; le premier établi dans les 8 premiers jours de la vie (CS8), le 2ème et le 3ème respectivement au 9ème et 24ème mois (CS9 et CS24).

En juin 1974 nous avons présenté à l’Académie de médecine les premiers résultats obtenus en Bretagne par l’application de la loi.

Depuis 1976, le processus est étendu à l’ensemble des départements français et d’Outre-Mer.

Trente ans après la promulgation de la loi, il nous a paru intéressant de savoir comment ce processus a été appliqué dans les différents départements et dans quelle mesure il a atteint ses objectifs.

Nous rappellerons que ces objectifs sont de deux ordres. En premier, il s’agit de connaître la situation sanitaire et sociale des enfants de 0 à 2 ans, préalable nécessaire à une planification des équipements et à la formation du personnel adaptées aux besoins de cette population. Pour cela, les données peuvent être anonymes et même ne concerner qu’un échantillon de la population.

L’autre objectif est de surveiller plus particulièrement certains enfants à risque et de dépister tôt les affections invalidantes et les inadaptations afin d’instaurer un traitement d’autant plus efficace que précoce. Pour cela, les renseignements doivent être personnalisés.

L’application de la loi a posé de nombreux problèmes théoriques, pratiques et éthiques.

La forme et le contenu des certificats ont été longuement discutés dans de nombreuses commissions et les épreuves finales soumises à l’avis de l’Académie de médecine et au Conseil de l’Ordre des Médecins. Depuis, des modifications ont été apportées au contenu pour mieux formuler certains items ou en ajouter pour répondre à des problèmes nouveaux. La plus importante modification concerne le premier certificat qui a été remanié pour donner satisfaction aux gynécologues-obstétriciens en introduisant des données plus nombreuses concernant la grossesse et l’accouchement. Une autre modification a été d’assouplir l’obligation stricte de fournir les certificats à 9 et 24 mois en autorisant l’envoi à 10 et 25 mois, ce qui a compliqué l’évaluation des items concernant le développement de l’enfant.

Nous n’insisterons pas sur les réactions d’opposition de certains personnels de santé et de certains groupes de population ; ceci est du passé et le système est maintenant bien accepté d’autant plus, qu’ayant été soumis à l’avis de la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés), celle-ci a demandé que le principe de confidentialité soit strictement respecté. C’est ainsi que nous avons dû renoncer à utiliser, à la naissance, le numéro d’identification de français qu’attribue l’INSEE à chaque individu et qui d’ailleurs est utilisé plus tard par la Sécurité Sociale et l’Éducation nationale pour les étudiants. La CNIL a exigé que la partie médicale du certificat ne puisse être rattachée à la partie administrative donnant l’identité du sujet ; elle a demandé également la suppression du fichier d’enfants à risque, à surveiller prioritairement, la destruction des certificats lorsque l’enfant atteint l’âge de 6 ans ; toutes mesures qui n’ont pas facilité la réalisation du deuxième objectif concernant la surveillance de l’enfant. Cependant, dès 1983, une délibération de la CNIL, tenant compte des missions des services de PMI, autorisait certains projets personnalisés placés sous la responsabilité stricte du médecin chef de PMI qui dispose du code et d’un mot de passe pour le traitement informatique. En 1995, la création d’un Comité Consultatif sur le traitement de l’information en matière de
recherche dans le domaine de la santé (décret 95-682) venait confirmer cet assouplissement du principe de confidentialité pour les recherches épidémiologiques.

La politique de décentralisation a conduit à transférer les activités de PMI de l’État aux départements laissant à ceux-ci une certaine liberté d’application. Nous verrons ainsi que chaque département a pu choisir son système de dépouillement informatique.

Cependant les départements sont tenus de retourner à la Direction de la Recherche, des Études et de l’Évaluation et des Statistiques (DREES) du ministère un questionnaire concernant les 22 items les plus importants des trois certificats. Ceci permet, à partir de données départementales, d’obtenir des données nationales dont on peut suivre, comme nous allons le voir, l’évolution année par année.

MÉTHODOLOGIE DE L’ENQUÊTE

Une lettre et un questionnaire ont été envoyés aux médecins responsables de PMI des 100 départements de France et d’Outre-Mer. Ce questionnaire, volontairement bref, comportait dix questions fermées et deux questions ouvertes. Les questions fermées concernaient le nombre de naissances dans le département pour l’année 1998, le nombre d’avis de grossesse, d’avis de naissance et de certificats du 8ème jour reçus et leur exploitation éventuelle, le dépouillement manuel ou informatisé (et dans ce cas demandait de préciser les logiciels utilisés), le personnel traitant les certificats (secrétaire, médecin, informaticien, épidémiologiste, autres). Les derniè- res questions étaient d’indiquer s’il y avait un retour de l’information aux maternités, pédiatres ou médecins généralistes avec la production d’un document récapitulatif et, enfin, le degré de satisfaction du fonctionnement du système. Les deux questions ouvertes concernaient les activités entreprises à partir des certificats en dehors des données transmises au Ministère, les critiques et suggestions faites à ce système.

Ce questionnaire a d’abord été testé auprès de quatre médecins de PMI.

RÉSULTATS

Après un rappel écrit et, dans quelques cas, un rappel téléphonique, nous avons obtenu une réponse des 100 départements contactés.

Les départements ont été classés en fonction de leur nombre de naissances annuelles.

Cette variable nous semblait devoir être prise en compte pour interpréter les résultats. En effet, l’organisation du service de PMI ne sera pas la même selon que le département compte 30 000 ou 1 000 naissances annuelles.

La moyenne générale est de 7 665 naissances par an mais avec des écarts importants allant de 800, 1 000, 1 331 pour les départements les plus faibles à 36 457, 30 457 et 22 844 pour les plus forts.

FIG. 1. — Répartition du nombre de naissances par département en 1998.

Un des buts de notre enquête était de connaître la méthode de dépouillement des certificats adoptée par les départements et la qualité et le nombre des personnes employées à cette tâche.

Dès 1972, un traitement informatique des 2 200 000 certificats attendus a paru nécessaire et un logiciel a été mis au point en Bretagne par l’Institut de la Mère et de l’Enfant.

Ce logiciel a été repris par le service informatique du Ministère de la Santé (DOMI) pour devenir, après quelques retouches (pas toujours heureuses), le système GAMIN (Gestion Automatisée de Médecine Infantile). Ce logiciel a dû être abandonné, nous l’avons vu, sur l’avis de la CNIL et dans le cadre des lois de décentralisation, les départements n’ont pu disposer d’une proposition d’un logiciel commun.

D’après les réponses reçues, 8 départements effectuent encore un dépouillement manuel (8 %), ils étaient 29 % (15 sur 52) lors d’une enquête effectuée en 1992. La progression est donc certaine. La liaison avec le nombre de naissances du département n’est statistiquement pas valable bien que dans l’ensemble le dépouillement manuel se retrouve dans les départements à faible taux de naissances.

Dans 25 cas la réponse était douteuse, indiquant « manuel » mais avec un logiciel ;

nous les avons incluses dans les informatisés.

Le rattachement des services de PMI au département fait que ces derniers ont adopté des solutions différentes.

Soixante départements ont un service informatique indépendant avec un logiciel propre, 23 autres utilisent le service informatique du département avec le plus souvent des logiciels spécifiques achetés à une société. Dans 14 départements, le service de PMI a établi des relations avec l’Observatoire Régional de la Santé.

À notre connaissance, 9 sociétés se partagent actuellement le marché, d’ailleurs de façon très inégale puisque l’une d’entre elles équipe 52 départements alors que les autres ne couvrent que 5 à 8 départements, voire moins ; certains départements ont leur propre logiciel.

Par les dossiers déposés à la CNIL, nous savons que les premiers programmes ont été avalisés par cette institution à partir de 1986. La CNIL classe les informations recueillies en 17 catégories dont, en fait, 5 seulement sont utilisées dans le traitement des certificats : A (identité), C (situation familiale), M (santé), G (vie professionnelle), N (habitude de vie et de comportement). Ce classement des données permet de sélectionner celles à communiquer en fonction de la qualité du receveur. En effet, ces données peuvent être transmises soit au personnel médico-social (service de PMI, médecin traitant, maternité, ORS), soit à un personnel administratif (Conseil Général, Caisses d’Allocations Familiales, DDAS, DRASS, DREES).

Tous les logiciels permettent non seulement d’établir les statistiques départementales envoyées au ministère mais également d’établir des données locales allant même jusqu’à la circonscription ou à la commune, permettant d’orienter des activités prioritaires à l’intérieur même du département. Ces logiciels sont sans cesse en évolution, tant pour faciliter le fonctionnement du système (saisie du certificat par scanner diminuant le travail de secrétariat (ITESOFT) que pour étendre et améliorer l’exploitation. Par exemple, l’enregistrement des avis de naissance permet à 66 départements de recenser les CS8 manquants. Certains, moins nombreux (34) enregistrent également les avis de grossesse avec même parfois une interface avec le système AUDIPOG utilisé dans certaines maternités. Les avis de décès devraient également être enregistrés pour éviter de convoquer un enfant décédé mais le sont rarement. Les logiciels permettent de suivre les enfants en comparant anonymement les trois certificats. Enfin, trois départements enregistrent les résultats de l’examen effectué à l’école maternelle.

Établir le coût exact de cette informatisation est difficile, dépendant de la société informatique contactée, des programmes complémentaires demandés, du nombre de naissances. L’achat du logiciel peut varier, allant de 122 euros (800 FF Epi Info) à 30 490 euros (200 000 FG, GCAM) avec une moyenne de 12 200 euros (80 à 90 000 FF).

A titre d’exemple, nous donnerons les chiffres d’un département moyen (10 000 naissances par an) : logiciel : 15 626 euros (102 500 francs), installation : 1 829 euros (12 000 francs HT), formation du personnel : 3 659 euros (24 000 francs HT), maintenance annuelle : 4 269 euros (280 00 francs TTC).

La saisie automatique des documents revient à 27 440 euros (180 000 F TTC) pour un département ayant moins de 10 000 naissances.

Le personnel

Nous avons essayé de préciser le personnel affecté dans chaque département au traitement des certificats. Les réponses à notre questionnaire sur ce sujet étaient difficiles à fournir et sont difficiles à interpréter.

Nous rappelons que les trois certificats de santé, inclus dans le carnet de santé remis à la mère lors de la déclaration de naissance, doivent être remplis et signés par le médecin examinateur qui les adresse au service de PMI grâce à une enveloppe T (dispensée de timbrage).

Au service central de PMI, ce sont les secrétaires, le plus souvent, qui colligent les certificats, effectuent la saisie et parfois une relance, pour les réponses importantes manquantes ou manifestement erronées. Elles effectuent également un tri en fonction d’une grille de risques sensiblement la même dans chaque département. Le médecin chef de PMI confirme le tri qu’il effectue parfois lui-même et le certificat est envoyé au médecin de PMI du secteur à qui il appartient de prendre les décisions nécessaires en s’appuyant sur les sages-femmes, les puéricultrices, les assistantes sociales de son secteur. Plus rarement, le certificat est envoyé directement au médecin de secteur.

Il est difficile de déterminer le temps que chaque personnel consacre au traitement des certificats, souvent d’ailleurs à temps partiel, ce qui peut être nécessaire pour assurer la permanence de l’exploitation. Ce personnel est naturellement variable selon le nombre de certificats à traiter, c’est-à-dire le nombre de naissances, mais, dans notre enquête, nous retirons la notion qu’il faudrait prévoir une secrétaire équivalent temps plein pour 3 000 certificats à traiter par an. À côté des secrétaires, le médecin chef de PMI est le responsable du fonctionnement du service et y consacre, de ce fait, une partie de son temps (ou délègue cette tâche à un médecin de PMI). À ce personnel de base s’ajoute parfois un médecin de PMI ou un médecin épidémiologiste (11 départements), le plus souvent à temps partiel, un informaticien (7 départements), des étudiants en santé publique (2 départements). Par ailleurs, le fonctionnement informatique peut bénéficier de l’aide du service statistique du département (23 départements), des ORS (14 départements) et des sociétés commercialisant les logiciels. La présence d’épidémiologistes et de statisticiens facilite l’établissement des statistiques et permet des enquêtes ponctuelles.

Dans leur grande majorité, les départements se plaignent du manque de personnel limitant leurs possibilités d’exploitation. Ainsi, certains n’exploitent que le premier certificat ou seulement une partie des certificats.

L’efficacité est essentiellement liée à la disponibilité d’un médecin, de préférence pédiatre et/ou épidémiologiste.

Résultats tirés de l’exploitation des certificats

Le premier point à vérifier pour apprécier les résultats est celui de la couverture de la population. Il se calcule par le nombre de certificats reçus par rapport au nombre d’enfants nés vivants (CS8) ou encore en vie (CS9 et CS24).

Dans notre enquête, nous avons comparé les chiffres de notre questionnaire à ceux plus officiels publiés par la DREES. Les différences sont minimes et, de plus, les chiffres de la DREES étant publiés annuellement, ce sont eux que nous avons retenus puisqu’ils permettent de suivre l’évolution des indicateurs sur plusieurs années.

TABLEAU 1. — Taux de réception (évolution) Taux de 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 réception moyen

CS8 88,8 93,9 96,4 93,4 91,9 93,2 94,4 CS9 72,9 74,9 74 71,4 72,6 71,1 CS24 68,3 – – – – – 66 Le taux de couverture est bon pour le CS8 : 94,4 % en moyenne nationale, un peu moins bon pour le CS9 (71 %) et le CS24 (66 %). La comparaison des chiffres de 1991 à ceux de 1998 montre que le pourcentage de réception du CS8 s’est amélioré, passant de 88,8 % à 94,4 %, celui du CS9 est pratiquement stationnaire (72,9 à 71,1 %), celui du CS24 également (68 % à 66 %).

Il existe d’assez fortes inégalités départementales. Pour le CS8, 69 départements ont un taux de couverture de 95 % et plus, 6 atteignant 100 et même 5 dépassant 100 %, 17 ont un taux de 90 à 94 %, 6 de 85 à 89 %, 8 un taux inférieur à 85 (67, 64, 74 %).

Ces variations sont indépendantes du nombre des naissances.

Pour les 9 départements ayant un taux de réception faible (inférieur à 85 %), on pourrait penser que la non informatisation du traitement est en cause. En effet, les dépouillements manuels longs et fastidieux sont source d’erreurs mais seulement deux départements sur les 9 ne sont pas informatisés. Il y a donc d’autres raisons à ce dysfonctionnement et, en particulier, le manque de personnel et l’absence de motivation du personnel médical.

Les taux de réception supérieurs à 100 % sont aberrants et peuvent s’expliquer par l’existence de « doublons », un certificat étant transmis par la maternité et un deuxième émanant du service dans lequel l’enfant a été transféré. La plupart des logiciels permettent d’éliminer ces doublons. Plus vraisemblablement, ces chiffres peuvent s’expliquer par la méthode employée pour le calcul du taux, suivant que le nombre de certificats reçus est rapporté au nombre de naissances enregistrées (déclaration au lieu de naissance) ou à celui des naissances domiciliées (rapporté au domicile de la famille).

FIG. 2. — Répartition des pourcentages de réception des CS8 de 1991 à 1998 (chiffres de la DRESS) FIG. 3. — Répartition du pourcentage de réception des CS9 de 1991 à 1998 (chiffres de la DRESS) FIG. 4. — Répartition du pourcentage de réception des CS24 de 1991 à 1998 (chiffres de la DRESS)

Partir des naissances enregistrées permet d’étudier plus facilement l’activité des maternités. En revanche, il est plus exact, pour le recueil épidémiologique et le suivi de l’enfant, de partir des naissances domiciliées. Ceci nécessite un tri immédiat et le renvoi du certificat à la DASS du domicile. Le nombre de certificats à renvoyer est variable selon les départements. En contrepartie, il faut réintroduire dans les statistiques du département les enfants domiciliés dans le département mais nés dans un autre. Par exemple en 1998, dans le département du Finistère, pour 10 254 certificats enregistrés, 199 enfants habitant le Finistère étaient nés dans un autre département, mais 523 nés dans le Finistère habitaient un autre département.

Ce système de retrait et d’ajout est probablement un facteur d’erreurs.

Les chiffres obtenus peuvent être comparés aux chiffres très officiels donnés par l’INSEE mais avec un délai de plusieurs mois.

Soixante-six départements enregistrent les avis de naissances, ce qui devrait leur permettre de comparer le nombre des naissances à celui des certificats reçus.

Cependant, lors d’une enquête effectuée dans le département d’Ille-et-Vilaine, nous avons trouvé que, dans 17 circonscriptions, le nombre d’avis de naissance était supérieur à celui des certificats reçus, mais que c’était le contraire dans 4 circonscriptions. C’est donc une situation complexe.

L’absence de certificat doit être étudiée. Pour le CS8, on peut incriminer le décès de l’enfant (d’où l’intérêt pour le service de PMI d’en être informé), le transfert du nouveau-né dans un service de néonatologie, des adresses différentes apparaissant dans les documents.

Pour les certificats des 9ème et 24ème mois, la cause de l’absence du certificat est très souvent le déménagement des familles, mais parfois il s’agit d’une négligence de la famille ou du médecin (on retrouve le certificat dans le carnet de santé rempli mais non envoyé). Il peut également s’agir d’une rupture de stock des certificats ou des enveloppes T (dispensées de timbrage).

Pour éviter les manques, le décret de 1973, précisant la loi de 1970, demandait la suppression des allocations familiales en cas d’absence d’un certificat. Cette disposition n’a jamais été appliquée car elle aurait entraîné une modification importante du calcul des allocations qui se fait en fonction du nombre d’enfants dans la famille et surtout, elle risquait de pénaliser les familles déjà défavorisées. Par ailleurs, l’allocation pour jeune enfant (APJE), dont le versement peut être suspendu en cas d’attestation non fournie, est versée en fonction des revenus des familles ; ceci exclut bon nombre d’entre elles du dispositif.

Les services de PMI sont insuffisamment équipés pour effectuer des relances ou des recherches nécessaires bien qu’ a priori la non réception d’un certificat puisse être considérée comme un signe d’alarme.

La rédaction

Le remplissage des certificats est bon mais variable selon les départements. Il atteint 99 % pour les 10 principaux items du 1er certificat dans plusieurs départements, mais la moyenne générale est plus faible allant de 74 à 86 % (Tableau 2).

TABLEAU 2. — Réponses aux items (%) 1992 1998

Qualification de l’examinateur 71 Age de la mère 60 74 Age gestationnel 64 82 Césarienne 81 84 Poids de naissance 79 82 Transfert 79 86 Allaitement maternel 79 85 Fente labio-palatine 79 86 Il est intéressant de noter que, pour tous ces items , le taux de remplissage est en augmentation de 1992 à 1998.

La valeur du renseignement obtenu a été discutée. Toute collecte de données effectuée par de nombreux agents comporte forcément des erreurs. Pour certains items , tels le poids, la taille, le périmètre crânien à la naissance, l’erreur, si elle existe, est aléatoire, non systématique et négligeable vu l’importance de l’échantillon (650 837 en 1998). Pour le 2e et le 3e certificats, le pourcentage d’enfants vaccinés est minoré par le fait qu’une non réponse est considérée comme vaccination non faite.

Dans certains départements, le premier certificat est contrôlé dès sa réception et une relance est faite auprès des maternités pour compléter les données manquantes ou corriger des données manifestement fausses. Bien que l’existence d’une fente palatine ait été un des items retenus à l’échelon national, il est probable que les anomalies peuvent ne pas être mentionnées, soit que le diagnostic ne soit pas fait ou soit douteux, soit que le médecin ne désire pas informer immédiatement la famille ou même, ce qui est devenu rare, refuse systématiquement de donner ce renseignement.

Malgré ces réserves, lorsqu’on compare les résultats tirés des certificats à ceux obtenus par les enquêtes de l’INSERM sur échantillon, on s’aperçoit que les résultats sont concordants et parfois, lorsqu’il s’agit d’affections rares, en faveur des certificats.

Il est certain qu’une bonne information des médecins et du personnel paramédical montrant l’intérêt des certificats, améliore la fiabilité des réponses. L’intention des médecins, ces dernières années, de participer à des enquêtes épidémiologiques, ne peut qu’améliorer le système.

La fiabilité des données dépend en partie de la qualification de l’examinateur.

Celle-ci est donnée dans le Tableau 3.

TABLEAU 3. — Qualification de l’examinateur 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1er certificat

Pédiatres 93 93,3 93,7 95,2 – – – CS8

Généralistes 4,8 4.6 4.5 4.0 2ème certificat

Pédiatres 48,5 49,8 48,1 47,2 46,6 49,2 48,5 CS9

Généralistes 50,7 49,7 50,8 52,2 50,3 49,9 51,0 3ème certificat

Pédiatres 41,2 40,9 41,5 39,6 40,8 42,3 39,7 CS24

Généralistes 58,3 58,4 57,9 59,9 58,5 57,3 59,8 Le premier certificat est (ou était) rempli à la maternité avant la sortie de la mère au 8ème ou 10ème jour (d’où le sigle CS8) et l’examen pratiqué dans de bonnes conditions par le pédiatre de maternité dans plus de 95 % des cas. L ’item « qualification de l’examinateur » dans le premier certificat n’est plus demandé par la DREES mais il faudra peut-être le rétablir étant donné la sortie de plus en plus précoce des mères.

L’examen pratiqué au 3ème jour de vie perd beaucoup de sa valeur ; il ne permet plus de juger la reprise du poids de naissance, la cicatrisation du cordon, la mise en route de l’allaitement et l’évolution d’un ictère éventuel. On peut alors, pour maintenir un délai entre la naissance et l’examen, demander à la mère de revenir à la maternité pour que l’enfant bénéficie, comme précédemment, d’un examen effectué dans de bonnes conditions. C’est, à notre avis, la meilleure solution. Sinon l’examen sera pratiqué en ville par un pédiatre ou un généraliste, mais on risque aussi de voir cet examen non pratiqué.

Pour le certificat du 9ème mois, l’examen est pratiqué à 48,5 % par un pédiatre et à 51 % par un généraliste. Cette proportion s’accentue pour l’examen du 24ème mois, 40 % contre 60 %.

L’augmentation du nombre des pédiatres entre 1960 et 1980 laissait espérer qu’à moyen terme, tous les enfants pourraient être examinés par un pédiatre. La suppression des CES et le numerus clausus des internes font que le nombre de pédiatres en formation ne suffira pas à remplacer les départs. Nous avons attiré l’attention des autorités sur ce point, demandant d’ailleurs, parallèlement à l’augmentation du nombre des pédiatres, une meilleure formation pédiatrique des médecins généralistes. En effet, pour être efficaces, les examens du 9ème et du 24ème mois nécessitent du temps et une bonne connaissance du développement de l’enfant pour dépister les anomalies, en particulier visuelles et auditives, dès leur début et les corriger tôt.

Les résultats de l’exploitation des certificats devraient être communiqués aux producteurs pour leur en montrer l’intérêt et améliorer les réponses. Dans notre enquête, 42 % des départements informent systématiquement les maternités, les
pédiatres, les médecins mais 32 % ne font aucun retour, 26 % effectuent un retour partiel. Dans certains départements, des plaquettes faisant état des résultats obtenus dans le département et les comparant à ceux de la France sont éditées chaque année ce qui peut, de plus, favoriser les demandes de personnel et de crédits auprès du Conseil Général.

Efficacité

Dans ce chapitre, nous entendons donner quelques résultats tirés de l’exploitation des certificats. Pour le premier certificat, nous commencerons par un des premiers résultats obtenus qui montre comment les données sociales recueillies peuvent orienter efficacement l’activité des services. Le Tableau 4 donne le taux de mortalité néonatale par catégories socioprofessionnelles. Ce taux était trois fois plus élevé dans les catégories défavorisées que dans les catégories aisées et moyennes. Ceci a conduit le service de PMI, dans le cadre du plan périnatalité, à renforcer son action auprès de ce groupe de population, abaissant en 5 ans ce taux de 26,7 ‰ à 8,9 ‰.

On peut remarquer que nous avions isolé une catégorie « agriculteur » qui, dans le département d’Ille-et-Vilaine, représente 10 % de la population. À notre grande surprise, nous avons dû constater que le taux de mortalité néonatale dans ce groupe était meilleur que dans celui des catégories aisées. Nous pensons pouvoir rattacher ces bons résultats, qui se sont confirmés les années suivantes, à la qualité de l’action préventive menée par le médecin chef de la Mutualité sociale agricole.

TABLEAU 4. — Mortalité néonatale précoce et catégorie socio-professionnelle (CSP) % dans la

CSP

Taux de mortalité néonatale précoce (‰) population 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 8,95 13,1 8,5 4,5 6,8 5,1 7,0 4,0 4,0 Aisée Moyenne 76,71 7,09 8,0 7,5 6,8 7,8 6,3 5,2 6,3 Défavorisée 4,25 22,5 23,3 26,7 14,3 14,3 17,8 13,6 8,9 Agriculteur 10,09 5,1 6,1 5,6 5,1 2,7 3,5 5,4 4,4 INSEE – Taux

Ille-et-Vilaine 8,8 9,6 8,9 7,5 7,9 6,8 5,7 5,3 • France entière 9,1 8,3 7,8 7,3 6,4 5,8 5,2 4,8 Un document de travail publié par la DREES en décembre 2000 donne, pour les principaux indicateurs de santé, leur taux et leur évolution de 1991 à 1998 en France.

Ce travail est établi à partir des données que chaque département doit envoyer au Ministère soit 11 items pour CS8, 7 pour le CS9 et 4 pour le CS24. Nous ne pouvons ici en reprendre que quelques-uns en montrant leur intérêt pour les questions de santé publique.

L’âge de la mère

L’âge de la mère est donné dans le Tableau 5.

TABLEAU 5. — Âge de la mère (‰) 1986 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 < 18 ans*

8,0 5,8 5,8 5,5 5,2 5,2 5,7 5,4 ≥ 38 ans**

27,6 44,1 44,7 45,6 47,7 47,5 51,4 52,8 * 10 ‰ dans 8 départements — 62 ‰ en Guyane.

**88,6 ‰ à Paris – 21,8 ‰ dans l’Allier — > 60 ‰ dans 16 départements.

La proportion des mères de moins de 18 ans diminue régulièrement de 1986 (8 %) à 1992 (5,8 ‰) et, depuis, se maintient à ce chiffre. Mais ce taux est particulièrement élevé, supérieur à 10 ‰ dans 8 départements et très élevé dans les DOM (62 ‰ en Guyane).

Simultanément, on observe une augmentation continue de l’âge des femmes à la maternité ; le pourcentage des grossesses à 38 ans et plus passe de 27,6 ‰ à 52,8 ‰.

Ici aussi, on note de grandes différences départementales (88,8 ‰ à Paris, 21,8 ‰ dans l’Allier, supérieure à 60 ‰ dans 16 départements). Cet âge plus élevé des mères implique une surveillance plus importante de la grossesse en raison de la morbidité accrue pour la mère et du risque pour l’enfant d’aberrations chromosomiques et de prématurité.

Cependant, un travail américain récent fait remarquer que les grossesses à cet âge peuvent avoir néanmoins quelques avantages. Il semble que la mère s’occupe mieux de l’enfant et surtout que la maternité perturbe moins le déroulement d’une carrière déjà assurée. C’est une solution, parmi d’autres, au problème délicat posé aux jeunes femmes qui ont des difficultés à concilier vie professionnelle et vie familiale en l’absence d’une vraie politique familiale.

L’âge gestationnel

Il est intéressant à connaître pour décider des mesures à prendre contre la prématurité et définir les équipements nécessaires de prise en charge et de réanimation de ces nouveau-nés.

TABLEAU 6. — Age gestationnel (‰) 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 < 37 sem.

49,1 48,3 50 49,4 51 52 53,7 Dont moins de 16,8 16,6 17 17,4 18 17,9 19,2 35 sem.

Dont moins de 7,6 7,6 7,9 8,1 8 ,1 8,4 9,4 33 sem.

Le poids de l’enfant à la naissance complète les données précédentes

C’est un bon indicateur de santé d’autant que maintenant, dans le groupe des nouveau-nés pesant moins de 2 500 g, on distingue trois catégories : de 2 000 à moins de 2 500 g, de 1 000 à moins de 2 000 g, et moins de 1 000 g.

TABLEAU 7. — Poids de l’enfant (‰) 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998

Moins de 1000 g 0,9 1 1 1,2 1,3 1,5 1,6 Entre 1000*

14,3 14 14,8 14,2 14,4 15,3 16,2 et moins de 2000g Entre 2000 et 42,5 42,5 43 42,4 42,6 44,8 45,4 moins de 2500 g * 24 départements < 40 ‰) et dans 11 > 50 ‰ Les moins de 1 000 grammes sont peu nombreux mais leur nombre est en augmentation (1 045) témoignant des progrès réalisés dans la prise en charge, d’ailleurs assez coûteuse, de ces cas. Les différences entre les départements existent mais ne sont pas significatives.

Pour la catégorie 2 000-2 500 g, dans 7 départements, le taux est inférieur à 40 ‰ et dans 11, supérieur à 50 ‰. Pour la catégorie 1 000 à 1 999, dans 24 départements le taux est inférieur à 14 ‰ et dans 11, supérieur à 20 ‰.

Le dernier tableau montre les renseignements que l’on peut encore tirer du 1er certificat : césariennes, transferts à la naissance, allaitement maternel, fentes labiopalatines.

TABLEAU 8. — (‰) 1992 1996

Césarienne 13,5 15,6 Transfert à la naissance 5,6 6,1 Allaitement maternel 44,5 48,3 Fente labio-palatine 0,7 0,6 Les certificats du 9ème mois donne des indications :

— sur le nombre d’enfants hospitalisés pendant les premiers mois de vie en dehors de la période néonatale : 5 % ;

— le nombre d’enfants présentant une aberration chromosomique (autre que Trisomie 21) qui passe de 0,7 % en 1993 à 0,3 % en 1998. Cette diminution étant probablement liée au dépistage prénatal ;

— le nombre d’enfants atteints de mucoviscidose, 0,2 ‰, chiffres conformes à ceux obtenus par l’association de lutte contre cette maladie.

On peut déjà apprécier la couverture vaccinale, mais il est plus intéressant de noter cette couverture à 24 mois.

TABLEAU 9. — Couverture vaccinale (taux en %) 1992-1998 1992 1998

Diphtérie – Tétanos — 3 injections 95,5 97,3 — + rappel 86,1 87,6 Coqueluche — 3 injections 93,7 96,4 — + rappel 84,2 86,7 Polio — 3 injections 94,7 97,2 — + rappel 85,5 87,4 76,8 81,1 BCG ROR (rougeole-oreillons-rubéole) 75,5 82,5 La couverture est très bonne et meilleure pour les vaccinations anciennes : DTC poliomyélite que pour les vaccinations plus récentes : rougeole-oreillons-rubéole dont le taux progresse cependant très sensiblement. Ces taux, comme nous l’avons dit, sont en fait minorés, mais peuvent être réajustés à la suite de l’examen pratiqué à l’école maternelle.

Parallèlement aux données transmises au ministère, les certificats de santé permettent aux départements de recueillir des données épidémiologiques permettant de définir les objectifs prioritaires locaux orientant les activités très souvent à l’échelon non seulement du département mais de la circonscription et de la commune.

La connaissance de problèmes spécifiques à la région peut en effet conduire à des enquêtes ponctuelles. C’est ainsi que nous avons conduit une enquête sur la dysplasie de la hanche dans le département d’Ille-et-Vilaine, dont le résultat a été de diminuer le taux traditionnellement élevé de cette affection en Bretagne et a conduit à supprimer la radiographie systématique du bassin à la naissance.

Le développement de la politique périnatale a conduit certains départements désirant plus de renseignements sur cette période, à ajouter un feuillet supplémentaire au premier certificat (Côtes d’Armor), voire à créer un nouveau modèle de certificat (Seine-Saint-Denis). Ceci est une preuve supplémentaire de l’intérêt des certificats, mais il faut réaliser que toute modification du contenu entraîne un réajustement du système informatique et que l’augmentation du nombre des items rend plus difficile le remplissage complet et nécessite des moyens supplémentaires pour l’exploitation.

Il est bon que de tels essais soient entrepris mais il ne faut pas confondre activités de routine et activités de recherche. Il faut donc attendre que les items nouveaux aient fait la preuve de leur utilité pour les proposer à l’échelon national.

Parmi les questions qu’étudient ou souhaitent étudier les départements, le plus souvent sont mentionnés l’allaitement et le mode de garde des enfants. Ainsi, plusieurs départements (la Somme, le Finistère, les Côtes d’Armor), constatant un taux bas d’allaitement dans le département, ont entrepris une action de promotion de l’allaitement au sein par circonscription, qui a permis d’en augmenter le taux.

CONCLUSION

Une première conclusion nous est donnée par les réponses à la question posée aux médecins de PMI : « Êtes-vous satisfait du système des certificats de santé » oui oui mais non — quarante-quatre ont répondu qu’ils étaient satisfaits du système, certains insistant même sur l’important outil épidémiologique qu’il constitue ;

— quarante-deux ont répondu « oui mais » signalant des imperfections du système et/ou suggérant des modifications ;

— onze, en revanche, ne voient pas l’intérêt des certificats. Parmi ces 11 départements, 5 ont un faible nombre de naissances, 4 un taux de couverture du CS8 inférieur à 80 % et un seul retourne les informations aux producteurs.

Parmi les difficultés signalées, la première est certainement le manque de temps, le manque de personnel entraînant une sous-exploitation du système. Le traitement
des certificats constitue en effet une surcharge de travail pour les services de PMI, surcharge qui n’est pas assez bien perçue par l’administration.

La deuxième remarque est le manque d’exhaustivité, en particulier pour les CS9 et CS24 et le défaut ou les erreurs de remplissage. Ces défauts ne peuvent être corrigés que par une meilleure participation des médecins et des familles bien informées. Le désir des médecins de participer aux enquêtes épidémiologiques devrait faciliter cette évolution. Il serait d’ailleurs indiqué de leur accorder une rémunération spéciale pour cet acte de médecine préventive.

Le projet voté en 1970 était ambitieux mais, trente ans plus tard, on constate qu’il a été réalisé en partie. L’objectif d’être un outil épidémiologique a été atteint. En revanche, le système s’est montré moins performant pour le suivi des enfants, domaine dans lequel il a été suppléé par les activités d’associations créées pour le dépistage et le suivi de certaines maladies : phénylcétonurie, hypothyroïdie, hyperplasie congénitale des surrénales, drépanocytose, mucoviscidose, cancer.

Ce système des certificats a eu l’avantage de renforcer les relations entre les maternités, les services hospitaliers de pédiatrie, les médecins de ville (pédiatres et géné- ralistes) et le service de PMI conduisant, dans de nombreux départements, à la création de véritables réseaux.

On peut regretter que le système soit encore trop souvent méconnu, non médiatisé et surtout qu’il n’ait fait l’objet que de quelques recherches opérationnelles sporadiques. Il serait intéressant d’officialiser certaines recherches par exemple sur les causes de non réception, les techniques d’examens, le suivi du dépistage et le rôle des CAMSP (Centre d’Action Médico-sociale Précoce), … On peut penser qu’il se développera dans l’avenir avec l’enregistrement d’une part des données recueillies pendant la grossesse et l’accouchement, et, de l’autre, l’enregistrement des données de l’examen effectué à l’école maternelle, à 3 ou 4 ans, puis de l’examen d’entrée à l’école élémentaire, à 5-6 ans, comme ceci a été réalisé dans d’autres pays voisins (Espagne et Allemagne) et s’amorce dans certains départements français.

RÉFÉRENCES [1] BAROT D., BERGER F., KOHLER. — Penser globalement, agir localement. La place des certificats de santé. Groupe PMI, DDASS Somme, 1995.

[2] BREART G., MAZAUBRIN C., ANCEL P.Y. — Étude Epipage, DASS Paris, 1997.

[3] BUSSIÈRE E. — Principaux indicateurs issus des certificats de santé. DRESS, 2000.

[4] CHOQUET M., LEDOUX S. (INSERM U I). — La valeur pronostic des indicateurs de risques précoces. Étude longitudinale des enfants à risque à 3 ans – 1984. Arch. Fr. Pediatr., 1985, 42 , 511-6.

[5] DRESS (Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques). — Les indicateurs de santé issus des certificats de santé. Ministère de l’emploi et de la solidarité, 2000, no 17, p. 47.

[6] Haut Comité de la Santé Publique. Santé des enfants, santé des jeunes. Rapport à la commission nationale de Santé (1997) et au Parlement (Juin 1997).

[7] KNOX E.G., MAHON M.F. — Évaluation of « infant at risk » registers. Arch disease of childhood , 1970, 45 , 243, 634-39.

[8] MAYER C. — Le certificat de santé du 8ème jour. Quelle utilité ? Module du département de Santé Publique — Rennes, 1992.

[9] MAYER C. — Quelle est l’exploitation du certificat de santé du 8ème jour par les services de Protection Maternelle et Infantile. Tentative pour évaluer les coûts de l’exploitation statistique.

Mémoire Economie de la santé. Département de Santé Publique de Rennes, 1993, 10 p.

[10] RUMEAU-ROUQUETTE C., MAZAUBRIN C., RABARISON Y. — Naître en France : 10 ans d’évolution. INSERM, 1984.

[11] ORS. — Base de données des indicateurs de santé. Fédération Nationale des ORS. Paris, 1998.

[12] ORS Limousin. Docteurs Ochoa, Trocme. — Guide d’encodage des certificats de santé du 8ème jour. 1995, 18 p. – Le certificat du 8ème jour. 1997, 60 p. – Le certificat de santé du 8ème jour :

outil d’information et d’action. DRASS Limousin, 1998.

[13] ORS Nord-Pas de Calais. Tillard B., Vittrand C., Fourmentraux M. Schmitt M.O. — Périnatalité. 1990, 40 p. Le premier certificat de santé, 1995, 35 p.

[14] ORS Poitou Charente. Chaubaud F., Gaudet. — Analyse des certificats de santé du 8ème jour en Charente, 1994-1995.

[15] ORS Languedoc Roussillon. — Enquête de validation du certificat de santé à la naissance à l’échelon régional, 1990, 54 p. — Guide méthodologique sur les indicateurs. 1995, 75 p. — Première analyse sur les indicateurs de développement de l’enfant en Europe, 1996, 126 p.

[16] ORS Basse Normandie. Collignon A., Burnous L. — Santé mère-enfant, Calvados, Manche Orne, 1997-1998, 23 p.

[17] SÉNÉCAL J., DUFOUR Y., HENRION R., NIVELON J.L., WILLARD D. — Les examens systématiques du nouveau-né et le premier certificat obligatoire. Table ronde – Monaco II, 1972, 503-25.

[18] SÉNÉCAL J. — Les nouveaux examens systématiques chez l’enfant : résultats Bretagne. Bull.

Acad. Natle Méd., 1974, 158 , no 6, 429-436.

[19] SÉNÉCAL J., ROUSSEY M. — Carnets et certificats de santé.

Concours Médical , 1978, 47 , 89-95.

[20] SÉNÉCAL J., DELAHAYE M., MORELLEC J., DEFAWE G., ROUSSEY M., LE MAREC B. — Résultats tirés du premier certificat de santé de 1978 à 1979 en Ille et Vilaine. J. Gyn. Obst. Biol. Repr ., 1981, 10 , 641-650.

[21] SÉNÉCAL J., ROUSSEY M., MORELLEC J., MEYER C. — Les certificats de santé, vingt ans d’application. Concours Médical, 1993, 115-23.

[22] SESI. Service de statistiques, des études et des systèmes d’information. — Exploitation des questionnaires départementaux sur la santé de la mère et de l’enfant. Ministère des Affaires Sociales, 1991.

[23] SESI. Service de statistiques, des études et des systèmes d’information. — Principaux indicateurs issus des certificats de santé de 1992 à 1993. Ministère de la Santé Publique, 1995, no 230.

[24] World health organization. — The risk approach in health care . Public Health Papers , 1986, no 76.

DISCUSSION

M. Michel ARTHUIS

Je remarque que la couverture sociale est bonne pour le 1er certificat. En revanche, elle est tout de même décevante pour les 2ème et 3ème certificats. Pourquoi ? Quel est le rôle de la CNIL ? Quel est celui des parents ? Peut-on améliorer les liens entre la PMI et la médecine scolaire ?

Le premier certificat a bénéficié de la politique périnatale entreprise à la même époque et l’a servie. Certains départements ont même développé le 1er certificat soit en y ajoutant un feuillet supplémentaire (Côtes d’Armor), soit en créant un nouveau certificat (Seine Saint-Denis). En revanche, les 2ème et 3ème certificats sont moins utilisés et surtout leur taux de couverture ne progresse pas. Ils ont été moins exploités en partie à cause des contraintes imposées au traitement des certificats par la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés). Par ailleurs, la création d’associations ayant pour but de suivre les enfants atteints d’une maladie à la naissance (hypothyroïdie, phénylcétonurie, mucoviscidose, hyperplasie congénitale des surrénales….) a focalisé l’intérêt sur cette catégorie d’enfants ; de même que la création de registres pour le cancer ou les malformations. Le rôle de la CNIL est à juste titre très important mais, au début de son fonctionnement, les avis de cette commission ont été très sévères : interdiction absolue de pouvoir relier la partie médicale du certificat à la partie administrative donnant l’identité de l’enfant, limitant ainsi les possibilités de suivre l’enfant. Nous avons dû renoncer à l’utilisation du numéro de français que nous donnait l’INSEE, la fiche d’enfants à risque, donc à surveillance particulière, a été supprimée. Tous les certificats devaient être détruits au bout de 2 ans, délai porté par la suite à 6 ans. Cependant dès 1983 la CNIL, se référant aux activités officielles du service de PMI, a autorisé certains programmes à la condition qu’ils soient strictement placés sous l’autorité et la responsabilité du médecin chef de PMI qui seul possède le code et une clé d’accès. Tous les programmes de traitement des certificats d’un département doivent être soumis à la CNIL par le président du Conseil Général. Plus récemment, en 1995, un comité consultatif sur l’informatisation des recherches en santé a été créé et doit donner son avis sur l’intérêt du programme et les précautions prises pour sauvegarder le respect de l’individu. Il semble qu’actuellement il soit devenu possible de suivre les enfants ayant présenté des troubles à la naissance :

prématurés, hypotrophiques, enfants réanimés, enfants présentant une anomalie… Nous venons de soumettre à l’avis de la CNIL un projet d’étude sur l’obésité chez l’enfant. La première partie consisterait à comparer, grâce aux certificats, la masse corporelle à la naissance, 9 et 24 mois puis à 4 ans (école maternelle) et à 6 ans (école élémentaire) :

recherche anonyme. En revanche, la deuxième partie concernerait l’étude des enfants suspectés d’obésité et nécessiterait de connaître l’identité de l’enfant. Par ailleurs, la CNIL demande toujours que les données soient détruites dès que l’enfant atteint 6 ans.

Ce point est en contradiction avec l’intérêt de suivre les enfants comme le préconisent les circulaires sur l’activité de médecine scolaire. Concernant l’action auprès des parents nous pouvons affirmer que le système Carnet de santé – Certificats de santé est maintenant bien accepté par les familles qu’il faut continuer à informer en commençant dès la première consultation prénatale. La liaison PMI – Médecine Scolaire est toujours un problème et nous sommes loin d’avoir réalisé le service unifié de l’enfance préconisé par M. Bloc-Laisné dans son rapport de 1961. Actuellement le médecin de PMI doit
transmettre au médecin scolaire un « dossier de liaison ». Comme je l’indiquais dans ma conclusion, il faut prévoir le recueil informatique des données de l’examen de l’enfant de 4 ans en maternelle. C’est l’occasion d’établir un 4ème certificat tenant compte des avis des médecins de PMI et des médecins scolaires qui faciliterait les liaisons. C’est un travail que nous avons entrepris en Bretagne.

M. Gabriel BLANCHER

Avez-vous noté des cas où les résultats obtenus grâce à ces certificats médicaux obligatoires ont orienté le choix des équipements de santé ?

Je n’ai pu, étant donné le temps imparti à la présentation, développer cet aspect du problème qui intéresse le plus les médecins. J’ai donné quelques exemples mais il est possible d’évoquer d’autres aspects. Il est certain qu’une meilleure connaissance des problèmes de périnatalité a conduit à améliorer le fonctionnement des services : amélioration des consultations périnatales avec visite à domicile des sages-femmes, hiérarchisation des maternités en fonction de leurs possibilités de réanimation, connaissance du nombre d’enfants transférés et cause de ces transferts… Pour les deux autres certificats se pose encore la question des tests à utiliser au cours des examens et de leur pratique (personnel, équipement, lieu). Un fait m’a paru important ces dernières années, c’est la possibilité d’orienter les activités de PMI, si nécessaire, sur un canton, une commune.

C’est ainsi que plusieurs départements pensent pallier, par exemple, l’insuffisance des consultations prénatales ou au faible taux d’allaitement maternel en fonction d’une situation très localisée. Nous avons donné les résultats tirés des certificats concernant la couverture vaccinale des enfants français. Cette possibilité a retenu l’attention de l’Institut de Veille Sanitaire qui vient d’organiser un séminaire sur ce sujet.


* Institut de la Mère et de l’Enfant ** DREES *** Médecin de PMI **** Biostatisticienne. Tirés-à-part : Professeur Jean SÉNÉCAL — Institut de la Mère et de l’Enfant — Annexe Pédiatrique, Hôpital Sud — BP 56129 - 35056 Rennes cedex 2. Article reçu le 26 février 2001, accepté le 19 mars 2001.

Bull. Acad. Natle Méd., 2001, 185, no 4, 727-747, séance du 24 avril 2001