Résumé
L’immunothérapie spécifique, aux allergènes ou désensibilisation des maladies allergiques, constitue un traitement étiologique des maladies allergiques respiratoires. Introduite en 1911, elle fut longuement et largement décriée jusqu’à ce que ses moyens et modalités aient été amé- liorés et son efficacité démontrée par des essais en double insu contre placebo, tant dans le traitement de la rhino-conjonctivite allergique que dans celui de l’asthme allergique. Ses indications sont précisées par des consensus et sa pratique respecte un certain nombre de règles. L’amélioration de la qualité des extraits allergéniques par leur standardisation, la meilleure compréhension des mécanismes d’action de cette thérapeutique, l’arrivée des voies d’administration en comprimés et la rationalisation de sa prescription, permettent de renforcer sa placedanslastratégieglobaledepriseenchargethérapeutiquedesallergiesrespiratoires.
Summary
Allergen-specific immunotherapy or desensitization represents an etiological treatment option for patients with allergic respiratory diseases. First introduced in 1911, it was widely disparaged until its mechanism of action was better understood and its efficacy on both allergic rhinoconjunctivitis and allergic asthma was demonstrated in double-blind placebocontrolled studies. Its indications are now widely agreed and practical rules have been established. Several factors have contributed to its increasing use in patients with respiratory allergies, including better-quality allergen extracts, better understanding of the mechanism of action, the introduction of oral tablet forms, and rationalization of prescriptions. Specific immunotherapy can benefit patients with severe allergic respiratory diseases in whom pharmacological treatment is ineffective or poorly accepted. Further well-designed and strictly conducted randomized trials in adults and children with allergic rhinitis and asthma are needed, using patient-important endpoints. More information is also needed on patient selection, the treatment duration, and dosing schedules . * Unité d’Exploration des Allergies, Maladies Respiratoires — Hôpital Arnaud de Villeneuve, CHU de Montpellier et Inserm U657, 34295 Montpellier Cedex 5 — France Tirés à part : Professeur Pascal Demoly, même adresse, et e-mail : pascal.demoly@inserm.fr Article reçu le 24 mars 2009, accepté le 11 mai 2009 L’immunothérapie spécifique (ITS) ou désensibilisation consiste à administrer des quantités répétées d’allergène à un sujet allergique, afin d’induire une tolérance clinique et immunologique vis-à-vis de cet allergène [1, 2]. Tandis que l’organisme tolère de façon active les allergènes, les maladies allergiques sont actuellement considérées comme une rupture de cette tolérance. Le principe de l’ITS est donc de revenir à un état normal de tolérance en forçant ce corps « déficiant » à tolérer cette source d’allergènes. Elle agit dans la durée en améliorant les symptômes dès les quatre premiers mois de traitement, a un effet maintenu après l’arrêt du traitement et peut empêcher la progression de la maladie allergique [1, 2]. Son mécanisme d’action est de mieux en mieux connu. On a longtemps tenté d’expliquer les effets de l’ITS sous-cutanée par la réduction de la production des IgE et l’augmentation de celle des IgG (agissant alors comme anticorps bloquants) ou de ses sous-classes [1, 2]. Les travaux les plus récents indiquent que le mécanisme prédominant réside dans une modification des réponses cellulaires T [3], que ce soit par un phénomène de déviation immunologique (stimulation des lymphocytes Th0/Th1), par anergie lymphocytaire T (diminution des Th2/Th0) ou plutôt induction de tolérance (apparition de lymphocytes T régulateurs). L’ITS réduit l’inflammation allergique spécifique de l’allergène. Par ailleurs, des actions non spécifiques sont de plus en plus mises en avant. Ainsi, non seulement la quantité d’allergène nécessaire à une réaction de l’organe ciblé est accrue, mais aussi le recrutement des cellules inflammatoires, leur degré d’activation et le taux de leurs médiateurs sont réduits (histamine, PGD2 et protéines cationiques de l’éosinophile notamment). Introduite en 1911 par Noon et Freeman pour traiter la « pollinose » ou rhinite allergique aux pollens [4], l’ITS reste le seul traitement étiologique des maladies allergiques. C’est donc une méthode de traitement séculaire, qui s’emploie actuellement à fournir des preuves de son efficacité selon la méthodologie des essais cliniques contrôlés en double aveugle contre placebo. Nous verrons que le développement clinique de ces thérapeutiques n’est pas simple. Les études disponibles, à petits effectifs, ont fait l’objet de méta-analyses qui ont montré une nette efficacité, particulièrement en ce qui concerne l’allergie aux graminées. Les essais cliniques récents utilisant la nouvelle forme galénique des comprimés sublinguaux répondent eux aux critères de la médecine basée sur les preuves. L’ITS améliore la qualité de vie des patients allergiques [1, 2], elle s’adresse aux patients les plus sévères ou refusant les traitements pharmacologiques dont elle devrait permettre une forte épargne de consommation. C’est le seul traitement dont l’effet persiste après l’arrêt (au bout de trois à cinq ans d’ITS) [1, 2], qui permet d’altérer le cours naturel de la rhinite pollinique, c’est-à-dire qui permet d’entraîner des rémissions de longue durée. Enfin, il est possible que l’ITS évite l’apparition de nouvelles sensibilisations et l’apparition d’un asthme. Plutôt que de rentrer d’emblée dans le détail de chacune des études cliniques avec leurs points forts et leurs points faibles, et de façon à ne pas perdre le lecteur, nous avons souhaité mettre en avant l’analyse qu’en font les experts des recommandations internationales et nationales en tout début d’article.
Base documentaire disponible
Recommandations internationales
Plusieurs directives sur l’ITS aux pneumallergènes ont été publiées [1, 2] ces derniè- res années par l’Organisation Mondiale de la Santé, l’European Academy of Allergy and Clinical Immunology, le Rapport de consensus international sur l’asthme, la Stratégie globale de traitement et de prévention de l’asthme, le Rapport de consensus international sur la rhinite, la British Society for Allergy and Clinical Immunology, l’American Academy of Allergy, Asthma and Immunology, l’American College of Allergy, Asthma and Immunology et la World Allergy Organization.
L’EMEA ( European Medicines Agency ) a émis des guides fin 2008, applicable au 1er janvier 2009, pour le développement des essais thérapeutiques d’ITS des maladies allergiques [5]. Elle reconnaît les particularités de l’ITS (Tableau 1).
Tableau 1. — Recommandations de l’EMEA pour les essais thérapeutiques d’ITS (d’après la référence [5]) • Les études de phase I classiques chez le sujet sain ne sont en général pas possibles. Déjà à ce stade précoce du développement des patients allergiques doivent être inclus.
• Les études pharmacocinétiques et pharmacodynamiques ne sont pas possibles non plus, du fait de la nature des produits, indétectables dans le sérum. Des tests biologiques spécifiques (réponse IgG, réponse lymphocytaire T) peuvent être réalisés au cours des essais. Pas toujours corrélés à la réponse clinique, ils ne se substituent pas à l’analyse de la réponse clinique.
• Les études de phase II sont parfaitement envisageables et un effet dose doit être recherché/démontré.
• Du fait de la variabilité des taux d’allergènes d’une année et d’un site à l’autre et du biais de mémorisation, la recherche d’un niveau symptomatique de base les saisons précédentes n’est pas possible. Seule une évaluation prospective du niveau des symptômes avant tirage au sort est possible, mais elle souffre de limites aussi.
• Pour les mêmes raisons associées à la variabilité inter-individuelle de la réponse clinique, les essais de non-infériorité ne sont pas envisageables : seuls des essais de supériorité en double aveugle contre placebo (ou tout autre comparateur) sont recevables. Le placebo doit si possible contenir de l’histamine pour maintenir le double aveugle ; il n’est pas éthique dans le traitement par ITS des anaphylaxies (aux venins d’hyménoptères par exemple).
• Les taux d’allergènes saisonniers doivent être documentés, au plus proche des patients. La saison (période pendant laquelle les symptômes seront évalués) doit être définie de façon précise.
• Les effets sont recherchés toujours à long terme (une saison pollinique ou période symptomatique minimum). L’analyse des effets prolongés et éventuellement rémanents (sur les symptômes ou la prévention de la survenue d’asthme ou de polysensibilisations) à l’arrêt de l’ITS se fait au mieux dans des essais séparés, sans analyse intermédiaire.
• Enfin le score utilisé doit prendre en compte les symptômes et les médicaments de secours dont l’utilisation impacte clairement sur l’intensité des symptômes. Un score combiné validé, non existant actuellement, est souhaité.*
* Pour se faire les laboratoires Stallergènes ont développé un score symptôme ajusté en fonction de la prise de traitement de secours Ce nouveau score a été mis au point via un groupe d’experts indépendants et a été validé par l’EMEA afin d’être appliqué en tant qu’objectif principal dans les études cliniques à venir de ce laboratoire.
Recommandations nationales
Toutes les recommandations nationales, que ce soient celles de la Société Française d’Oto-Rhino-Laryngologie et de Chirurgie de la Face et du Cou (sur la prise en charge des rhinites chroniques), celles de la Société de Pneumologie de Langue Française (sur la place de l’ITS dans l’asthme allergique) et celles à venir de la Société Française d’Allergologie (sur la prise en charge des rhinites allergiques) sont basées sur le document ARIA [2].
Ces rapports donnent des indications pour mieux comprendre l’usage de l’ITS.
Concernant la rhinite allergique, le récent document français [6] prend position (Tableau 2).
Tableau 2. — Recommandations de la SFA sur l’ITS (d’après la référence [6]) • L’ITS réduit l’inflammation induite spécifiquement par l’allergène visé en agissant de façon étiologique sur le système immunitaire (accord professionnel).
• La voie sous-cutanée est efficace mais non dénuée de risques (anaphylaxie, exacerbation d’asthme) (grade A).
• La voie sublinguale est efficace et beaucoup plus sûre (grade A).
• Seuls certains allergènes ont bénéficié des études permettant des recommandations (accord professionnel). Pour ces allergènes, l’ITS est efficace (grade A).
• Aucune ITS ne peut être démarrée en l’absence de diagnostic précis de sensibilisation allergénique et de poids de cette sensibilisation dans les symptômes du patient (accord professionnel).
• Il faut respecter les règles strictes de sécurité si la voie sous-cutanée est utilisée (accord professionnel). Tous les effets indésirables, y compris pour la voie sublinguale, doivent être rapportés (accord professionnel).
• Cette ITS doit être réévaluée après un an afin de juger de son efficacité, de sa tolérance et de la nécessité ou non de poursuivre le traitement (accord professionnel).
Niveaux de preuves de l’efficacité de l’ITS
Efficacité et sécurité de l’ITS sont régulièrement évaluées et il existe sept métaanalyses dans le domaine reprenant la totalité des publications de qualité méthodologique suffisante publiées ces vingt dernières années : deux avec l’ITS sous-cutanée [7, 8] et cinq [9-13] avec l’ITS sub-linguale. Le niveau de preuve retenu dans le document ARIA [2] est donc le plus élevé (Ia) mais l’hétérogénéité des études est grande (diverses sources et natures d’extraits allergéniques, divers modes d’évaluation, rhinite et/ou asthme, adultes vs enfants) et les effectifs de ces études sont souvent petits.
La base documentaire disponible est donc conséquente et sera sujet à ajustements au vue des résultats des nombreuses études ITS comprimés en cours. Ces études intéressent un grand nombre de patients et permettront de trancher les questions encore en suspens, non résolues du fait de l’hétérogénéité des études précédentes incluses dans les méta-analyses. En effet, plus de dix études de phase III concernant les allergènes les plus prévalents sont récemment publiées ou en cours. Elles s’inté- ressent aussi bien à l’efficacité sur les symptômes et la consommation de médica- ments d’appoint qu’aux données de sécurité, la satisfaction et la qualité de vie des patients, qu’à l’optimisation des protocoles (durée du traitement pré-saisonnier pour l’ITS aux pollens de graminées par exemple). Les grands effectifs permettent des analyses en sous-groupes, la durée répondra à la question de l’effet rémanent après arrêt du traitement. Ces études concernent actuellement les acariens, les pollens de graminées, les pollens de bouleau qui représentent 90 % des prescriptions d’ITS en Allemagne et 80 % en France. Elles permettront de préciser ces données pour la médecine basée sur les preuves, intégrant non seulement la preuve scientifique mais aussi les préférences du patient, l’expérience clinique et les conditions d’exercice du médecin.
Synthèse des données épidémiologiques
Asthmes et allergies sont parmi les maladies chroniques les plus fréquentes. La prévalence de ‘‘ l’asthme actuel ’’ (symptômes les douze mois précédents) a été estimée à 2,6 % chez les enfants, entre 2,6 et 6,6 % chez les adolescents et entre 2,9 et 4,6 % chez les adultes en France [14]. La moitié des asthmes de l’adulte sont allergiques et au moins deux tiers de ceux de l’enfant. Les allergies respiratoires concernent 23 % de la population générale en Europe [15]. Un sujet sur sept souffre de la forme clinique la plus répandue appelée rhinite aux pollens de graminées ou « rhume des foins ». Dans cette même étude, les auteurs ont démontré que 52 % des sujets testés avaient des IgE spécifiques aux pollens de graminées, 49 % aux acariens de la poussière de maison, 33 % aux pollens d’arbres, 27 % aux pollens d’herbacées, 26 % aux phanères d’animaux et 10 % aux moisissures. Plusieurs études démontrent clairement que la prévalence de la rhinite allergique double tous les huit à dix ans [2] ! L’OMS estime à quatre cent millions dans le monde le nombre de sujets souffrant de rhinite allergique sans asthme et deux cent millions avec asthme [2].
La plupart de ces patients ont des symptômes légers, n’altérant pas leur qualité de vie, ou des symptômes facilement contrôlables par les médicaments disponibles (par exemple anti-histaminiques et corticoïdes nasaux pour la rhinite allergique) dont ils sont souvent satisfaits [16]. Cependant, au moins 20 % des patients ne voient aucune ou peu d’amélioration avec ces traitements ou encore souhaitent une approche non symptomatique mais plus curative de leur maladie ; ces patients là peuvent alors bénéficier de l’ITS. Celle-ci ne leur est proposée que dans moins de 1 % des cas en France où elle concerne actuellement cent mille nouveaux patients par an soit trois cent mille patients sous ITS pour une année donnée (50 % avec des extraits d’acariens, 30 % de pollens de graminées, 5 % pour les pollens de bouleau et 2 % de pollens de cyprès).
L’impact socio-économique de la rhinite allergique doit prendre en compte sa morbidité et ses co-morbidités. La rhinite allergique ne tue pas bien sûr et n’amène pas aux urgences de l’hôpital, contrairement à l’asthme. Cependant, le nombre d’heures de travail perdues à cause de la rhinite allergique se chiffre en millions. Elle est source d’échecs scolaires [1, 2] en perturbant le sommeil réparateur [1, 2]. Les maladies associées à la rhinite allergique (asthme et sinusite) nécessitent souvent des traitements additionnels [2].
Standardisation des allergènes
La qualité des extraits d’ITS est essentielle à la fois pour le diagnostic et pour le traitement des maladies allergiques respiratoires. Seuls des extraits ayant une activité allergénique et une durée de conservation connues doivent être utilisés [1, 2]. Les extraits les plus courants utilisés en allergologie clinique sont désormais disponibles sous forme standardisée ou sont en cours de standardisation. Il est probable que des allergènes recombinants fourniront dans un proche avenir les étalons nécessaires à l’analyse des allergènes, et que de nouveaux produits de diagnostic et de traitement seront ainsi développés [2].
Les extraits allergéniques sont étiquetés [1, 2] en unités biologiques, sur la base de tests cutanés. Les méthodes ne sont pas les mêmes en Europe et aux États-Unis.
Chaque fabricant définit des unités et concentrations spécifiques, et on trouve tout un éventail de noms d’unités spécifiques, sans aucun lien entre eux, sur les étiquettes des produits commercialisés : UI (unité internationale), HEP (équivalent histamine pour les tests cutanés), AU (unité d’allergie), BAU (unité d’allergie biologique), BU (unité biologique), IR (indice de réactivité), TU (unités thérapeutiques)… Même lorsque la même méthodologie est utilisée (directives des pays nordiques par exemple), les extraits produits par différents laboratoires et portant les mêmes unités sur les étiquettes peuvent avoir une puissance différente en raison de différences dans la sensibilité de la population de patients choisie, du nombre relativement faible de patients testés et de différences méthodologiques [2].
La mesure des principaux allergènes en vue de leur standardisation est aujourd’hui un but réaliste et souhaitable [1, 2]. Les fabricants d’allergènes pourraient indiquer la teneur en allergènes majeurs représentatifs dans leurs produits en unités de masse (μg/ml), même si la comparaison entre les différents fabricants n’est pas encore possible en raison des différences dans les essais et les méthodes de mesure des allergènes majeurs [1, 2].
Dans la Pharmacopée européenne, les préparations d’allergènes pour l’ITS peuvent être [2] :
• des extraits non modifiés (extraits naturels) ;
• des extraits modifiés chimiquement ;
• des extraits modifiés par adsorption « dépôt » ;
• des extraits modifiés et adsorbés développés pour rendre l’ITS plus efficace et réduire le risque d’effets secondaires, • et des allergènes recombinants.
Les extraits allergéniques, pour autant que leur activité, leur composition et leur stabilité soient documentées, se répartiraient de la manière suivante :
• extraits provenant d’une seule matière première • mélanges d’extraits allergéniques apparentés et réagissant entre eux, tels que les extraits contre les pollens de graminées, les pollens d’arbres, les pollens d’ambroisie et les extraits contre les acariens, ou • mélanges d’autres extraits allergéniques, à condition que des données de stabilité [22] et d’efficacité clinique soient disponibles. Dans le cas des mélanges, la quantité relative de chaque composant du mélange doit être précisée.
La Société Française d’Allergologie, a établi un processus décisionnel permettant de définir une liste de pneumallergènes validée sur le plan clinique et pharmacologique répondant aux exigences du décret relatif à la préparation et la délivrance des allergènes préparés spécialement pour un seul individu (décrets no 2004-188 du 23 février 2004 et no 2005-1682 du 28 décembre 2005). Les sources d’allergènes ont été classées en trois groupes. Seul le groupe trois est accepté. Il liste quatre catégories de sources d’allergènes classées selon la qualité des études d’ITS publiées : 3a en cas d’absence de publication (trente-sept sources d’allergènes dont cobaye, rat, acarus siro et pollens de peuplier), 3b en cas de données insuffisantes (cheval, chien, blatte, moustique, latex, pollen d’armoise, de frêne, acarien
Lepidoglyphus destructor ), 3c si données partielles (chat, moisissure
Alternaria alternata, pollen de pariétaires de
Judée et officinale, de cyprès d’Italie et de l’Arizona, de seigle, d’olivier), 3d si bonne qualité des données (pollens de dactyle, flouve, ivraie, fléole, cynodon, pâturin, ambroisie à feuilles d’armoise, bouleau blanc, aulne glutineux, noisetier, acariens Dermatophagoides pteronyssinus et farinae) . Les extraits allergéniques concernés dans cette revue appartiennent aux groupes 3c et 3d.
Immunothérapie sous-cutanée
Efficacité
L’efficacité clinique de l’ITS sous-cutanée (ITSC) est bien établie pour la rhinite et l’asthme, et des méta-analyses de cette efficacité sur l’asthme [7] et la rhinite [8] sont disponibles.
L’ITSC soulève des problèmes d’efficacité et de tolérance contrastées suivant le dosage. A faible dose, elle est inefficace [1, 2] et les doses élevées d’extraits allergé- niques peuvent susciter un taux élevé et inacceptable de réactions systémiques [1, 2].
Des doses optimales ont donc été proposées pour l’utilisation d’extraits dosés en unités biologiques ou en allergènes majeurs [1]. La dose optimale, définie comme la dose d’extrait allergénique induisant un effet cliniquement adéquat chez la majorité des patients sans provoquer d’effets secondaires indésirables, est considérée comprise entre 5 et 20 μg d’allergène majeur par injection pour la plupart des extraits allergéniques [2].
Dans la rhinite allergique , l’efficacité clinique (en termes de réduction des symptômes et/ou du besoin en médicaments) a été confirmée [1, 2] avec les pollens de graminées, les pollens de bouleau, l’ambroisie, les pollens de pariétaire, les acariens et les poils de chat. On notera que trois de ces études ont clairement démontré que l’effet clinique était dépendant de la dose [2]. La qualité de vie des patients recevant une ITS est améliorée [1, 2]. Une méta-analyse Cochrane récente [8] a repris 51 de ces études publiées de 1984 à 2006 et impliquant 2871 patients. Un effet global statistiquement significatif a été retrouvé sur les symptômes de rhinite (15 études, 1063 patients, taille de l’effet : —0,73 [IC95 % : —0,97, —0,50]), les symptômes de conjonctivite (3 études, 345 patients, taille de l’effet : —1,80 [IC95 % : —3,28, —0,31]), la consommation médicamenteuse [13 études, 963 patients, taille de l’effet : —0,57 [IC95 % : —0,82, —0,33]), l’amélioration de la qualité de vie (5 études, 571 patients, taille de l’effet : —0,52 [IC95 % : —0,69, —0,34]).
Dans l’asthme allergique , l’efficacité de l’ITS a été démontrée dès 1995 [17] par une méta-analyse, réactualisée en 1999 [18] et 2003 [7]. La dernière mise à jour a recensé soixante-quinze études effectuées entre 1954 et 2001 (et vingt-trois nouvelles depuis la dernière méta-analyse) et incluant plus de 3 000 patients asthmatiques allergiques. Un effet global statistiquement significatif a été retrouvé sur les symptômes d’asthme (28 études, 1064 patients, taille de l’effet : taille de l’effet : —0,72 [IC95 % :
—0,99, —0,33]), la consommation médicamenteuse (quinze études, six cent-huit patients, taille de l’effet : —0,80 [—1,13, —0,48]), l’hyperréactivité bronchique spécifique (seize études, quatre cent-trente patients, taille de l’effet : 0,51 [0,41, 0,63]) et non spécifique (cinq études, cent vingt et un patients, taille de l’effet : 0,47 [0,31, 0,70]) mais pas sur la fonction respiratoire. Tous les six essais cliniques ayant utilisé des mélanges d’extraits allergéniques ont été négatifs. L’effet était significatif dans le sous-groupe des patients allergiques aux acariens (trente-six essais) et aux pollens (vingt essais concernant graminées, bouleau, ambroisie), mais pas pour les allergè- nes animaux (dix essais). La méta-analyse Cochrane sur l’effet de l’ITSC dans la rhinite allergique [8] a également analysé les effets sur les symptômes bronchiques à partir de cinq études et quatre cent vingt-neuf patients, et obtenu une taille de l’effet : —0,59 [—1,06, —0,11].
La durée de l’ITS doit en général être de trois ans pour garantir son efficacité à long terme après son arrêt [1, 2].
Deux études ont montré que les extraits d’allergènes recombinants contre les pollens de graminées [19] et de bouleau [20] étaient efficaces sur les symptômes de rhinite.
De nouvelles formes d’immunothérapie sous-cutanée ultra-rapide utilisant le lipide A monophosphorylé ont récemment été testées [21]. Des extraits adjuvés aux séquences d’ADN CpG sont également à l’essai, mais il faudra davantage de données pour définir leur efficacité et leur innocuité [2].
Tolérance
L’ITSC est associée à un risque d’effets secondaires systémiques. Ce risque est accru chez l’asthmatique [1, 2]. De nombreuses études publiées récemment font encore état d’effets secondaires avec des extraits standardisés, des allergoïdes ou des allergènes recombinants [1, 2, 8]. La méta-analyse Cochrane sur l’effet de l’ITSC dans la rhinite allergique [8] a également analysé les effets secondaires à partir de trente-trois études et mille neuf cent-huit patients. Respectivement 8 % et 7 % des patients du groupe traité ont eu des réactions de grades II et III. Concernant les réactions de grade IV, 0,72 % des patients en ont souffert (soit trois patients dans le groupe traité vs 1 dans le groupe placebo) et l’adrénaline a été nécessaire pour 0,13 % des injections (19/14 085 dans le groupe traité vs 1/8 278 dans le groupe placebo).
Certains patients peuvent manifester des effets secondaires systémiques avec des injections contenant de 5 à 20 μg d’allergène(s) majeur(s) considérée comme optimale pour la plupart des extraits allergéniques [1, 2]. Des études de surveillance post-commercialisation sont nécessaires.
Les réactions systémiques se différencient en réactions immédiates (dans les trente minutes) et réactions différées (débutant plus de trente minutes après l’injection). Le groupe de travail de l’EAACI sur l’ITS, en collaboration avec l’AAAAI, retravaille sur la classification actuelle de ces réactions, classification basée sur la vitesse d’apparition et la sévérité des symptômes (Tableau 3).
Tableau 3. Classification des réactions systémiques induites par l’ITS (d’après la référence [2]) 0 : Aucun symptôme, ou aucun symptôme imputable à l’immunothérapie
I : Réactions systémiques bénignes
Symptômes : Urticaire localisée, rhinite ou asthme léger (baisse du débit de pointe < 20 % par rapport aux valeurs habituelles) II : Réactions systémiques modérées
Symptômes : Déclenchement lent (>15 min) d’une urticaire généralisée et/ou d’un asthme modéré (baisse du débit de pointe < 40 % par rapport aux valeurs habituelles) III : Réactions systémiques sévères (sans risque vital)
Symptômes : Survenue rapide (<15 min) d’une urticaire généralisée, d’un angiœdème ou d’un asthme sévère (baisse du débit de pointe > 40 % par rapport aux valeurs habituelles) IV : Choc anaphylactique
Symptômes : Réaction immédiate de prurit, rougeur, érythème, urticaire généralisée, stridor (angiœdème laryngé), asthme immédiat, hypotension, etc.
Il a été démontré qu’un prétraitement par anti-H1 par voie orale au cours de la phase d’induction réduisait la fréquence et la gravité des effets secondaires systémiques [2].
Indications
Les recommandations internationales [1, 2] proposent de recourir à la désensibilisation spécifique dans la pollinose lorsque celle-ci est sévère et/ou prolongée, qu’elle est mal contrôlée par le traitement pharmacologique adéquat ou que ce traitement est refusé par le patient ou entraîne des réactions secondaires importantes. Dans la rhinite persistante, la désensibilisation est surtout indiquée lorsqu’il existe un asthme léger ou modéré associé.
Un certain nombre de conditions préalables à la mise sous ITS doivent être remplies (Tableau 4).
Tableau 4. — Considérations pour la mise en place d’une immunothérapie (adapté selon les références [1, 2]) 1. Présence d’une maladie IgE médiée diagnostiquée :
Tests cutanés positifs et/ou présence d’IgE sériques spécifiques 2. Démonstration de l’intervention d’une sensibilité spécifique dans les symptômes :
Exposition aux allergènes déterminés par les tests d’allergie associée à l’apparition des symptômes Au besoin, test de provocation aux allergènes en question et aide récente des IgE recombinantes 3. Caractérisation d’autres facteurs déclenchants pouvant être impliqués dans les symptômes 4. Sévérité et durée des symptômes Symptômes subjectifs Paramètres objectifs, par ex. absentéisme au travail ou scolaire Fonction respiratoire (essentielle chez les asthmatiques) : exclusion des patients atteints d’asthme sévère Surveillance de la fonction respiratoire 5. Réponse des symptômes à la pharmacothérapie 6. Disponibilité d’extraits standardisés ou de bonne qualité 7. Contre-indications Traitement par les β-bloquants Autre maladie immunologique Observance impossible (des injections ou de la surveillance pendant trente minutes après chaque injection) Début d’une immunothérapie avec des pneumallergènes pendant une grossesse connue 8. Facteurs socio-économiques : Coût Activité professionnelle du candidat 9. Preuves objectives d’efficacité de l’immunothérapie à l’allergène sélectionné (disponibilité d’études contrôlées randomisées) Les indications de l’immunothérapie sous-cutanée n’ont pas changé par rapport à celles publiées en 1998 [1] et 2008 [2] (Tableau 5). Les indications et contreindications de l’ITS sont les mêmes pour les enfants de plus de cinq ans que pour les adultes [1, 2].
Tableau 5. — Indications de l’immunothérapie sous-cutanée (d’après la référence [2]) Patients présentant des symptômes induits principalement par l’exposition aux allergènes Patients ayant une saison prolongée ou présentant des symptômes induits par des saisons polliniques successives Patients souffrant de rhinite et d’atteintes des voies respiratoires inférieures pendant le pic d’exposition aux allergènes Patients chez lesquels les antihistaminiques et les glucocorticoïdes locaux à dose modérée ne suffisent pas à bien contrôler les symptômes Patients qui ne souhaitent pas suivre une pharmacothérapie constante ou de longue durée Patients chez lesquels la pharmacothérapie induit des effets indésirables
Les médecins, infirmières et personnels de santé doivent être formés notamment sur la surveillance et le traitement d’urgence des réactions anaphylactiques systémiques.
Une réserve d’adrénaline doit être facilement disponible.
L’évaluation économique de l’ITS par rapport au traitement symptomatique de la rhinite allergique a été modélisée en Allemagne et en France [22, 23]. L’ITS s’est avérée plus économique grâce à ses effets à long terme.
Histoire naturelle de la maladie allergique
L’ITSC modifie le cours naturel de la maladie allergique [1, 2]. Son efficacité persiste au long cours après l’arrêt du traitement [24]. Chez les enfants monosensibilisés, elle peut empêcher le développement de nouvelles sensibilisations [25] et l’apparition de l’asthme chez les patients souffrant de rhinite dans une étude ouverte avec dix ans de suivi après arrêt de l’ITS [26]. Une étude rétrospective chez l’adulte porteur de rhinite allergique va également dans le même sens [27].
Immunothérapie sublinguale
L’immunothérapie sublinguale (ITSL) est actuellement commercialisée dans de nombreux pays : Europe, Argentine, Brésil, pays du Golfe Persique et Afrique du Sud. La plupart des extraits sont standardisés par des méthodes biologiques ou immunologiques, et les taux du ou des allergènes majeurs par microgramme sont indiqués. L’administration peut se faire sous forme de gouttes ou de comprimés. Les deux comprimés de pollens de graminées ont obtenu une Autorisation de Mise sur le Marché en Europe.
Efficacité
Dans la rhinite allergique, l’efficacité de l’ITSL a été démontrée par trois métaanalyses [9, 10, 12]. La première [9] a recensé vingt-deux études publiées entre 1990 et 2002 et incluant 979 patients. Un effet global statistiquement significatif a été retrouvé sur les symptômes (vingt et une études, 959 patients, taille de l’effet : —0,42 [IC95 % : —0,69, —0,15]) et la consommation médicamenteuse (dix-sept études, 803 patients, taille de l’effet : —0,43 [—0,63, —0,23]). Cet effet n’a pas été retrouvé dans le sous-groupe des cinq études pédiatriques. Une récente actualisation par le même groupe de la Cochrane Collaboration a inclus trente-neuf études publiées de 1990 à 2006 et 2 746 patients [12]. Elle confirme les résultats de la première étude avec un intervalle de confiance plus étroit : —0,43 [taille de l’effet, IC95 % : —0,57, —0,28] sur les symptômes et —0,41 [taille de l’effet, IC95 % : —0,55, —0,28] sur la consommation médicamenteuse. Le nombre suffisant cette fois-ci d’études a permis l’analyse en sous groupes démontrant cet effet aussi bien dans la rhinite allergique saisonnière que perannuelle et quelle que soit la durée du traitement ; cependant, les durées de traitement d’au moins un an ont donné des résultats supérieurs (-0,70 [taille de l’effet, IC95 % : —1,19, —0,21] sur les symptômes et —0,44 [taille de l’effet, IC95 % :
—0,84, —0,04]). Une méta-analyse s’est spécifiquement intéressée aux études pédiatriques [10]. Dix études en double aveugle contre placebo, publiées entre 1990 et 2004, et 484 enfants ont été inclus. Cette méta-analyse a démontré un effet statisti- quement significatif à la fois sur les symptômes (taille de l’effet : —0,56 [IC95 % :
—1,01, —0,10]) et la consommation médicamenteuse (—0,76 [—1,46, —0,06]). Les études d’une durée de traitement d’au moins dix-huit mois étaient plus efficaces.
L’arrivée sur le marché des comprimés d’ITSL change complètement la donne. Les grandes études de phase III publiées et en cours pour asseoir leurs efficacité et sécurité devraient permettre de lever l’hétérogénéité retrouvée dans les études avec l’ITSL en gouttes. Avec un protocole quasi identique (en ce qui concernent les critères d’inclusion, le début du traitement quatre mois avant la saison pollinique supposée et une durée de traitement d’un an), des études cliniques pivots portant sur plus de 1 200 patients chez l’adulte [28-30] et sur plus de 500 patients chez l’enfant [31, 32], ont démontré de façon convaincante que l’ITSL avec des comprimés était efficace dans le traitement de l’allergie aux pollens de graminées (Tableau 6). La qualité de vie des patients sous ITSL est apparue améliorée [30, 33]. La taille de ces études permet des analyses en sous groupes montrant par exemple que l’effet est identique chez les patients mono et polysensibilisés, et entre ceux avec ou sans asthme associé [34]. D’autres études à grands effectifs de confirmation, d’optimisation des protocoles et d’analyse des effets rémanents de l’ITSL comprimés aux pollens de graminées sont en cours. A la lumière de ces études, il est inté- ressant de noter qu’une faible dose (25 000 SQ-T, 100 IR équivalent de 5-7 μg d’allergène Phl p. 5 par jour) est inefficace et qu’il faut une dose quotidienne d’environ 15-25 μg d’allergène majeur Phl p 5 pour obtenir un résultat. Une dose plus élevée (de 33-40 μg d’allergène majeur Phl p 5 par jour) n’a pas été plus efficace dans une étude [30].
Dans l’asthme allergique , vingt-cinq études publiées de 1991 à 2005 portant sur 1 706 patients ont été incluses dans une méta-analyse de l’ITSL [11]. Il est apparu que l’ITSL réduisait significativement la sévérité de l’asthme si l’on analysait toutes les compositions de paramètres par résultats catégorisés, a fortiori si on fusionnait l’ensemble des symptômes allergiques respiratoires hauts et bas (taille de l’effet :
—1,18 [IC95 % : —1,93, —0,43]). L’effet sur l’asthme lui-même n’était pas statistiquement significatif, à la fois sur les symptômes (taille de l’effet : —0,38 [IC95 % : —0,79, 0,03]) et la consommation médicamenteuse (taille de l’effet : —0,91 [IC95 % : —1,94, 0,12]). La méthodologie de cette étude est remise en question. Une récente métaanalyse s’est focalisée sur l’asthme allergique de l’enfant âgé de trois à dix-huit ans [13]. Neuf études publiées entre 1990 et mai 2006 ont été incluses et concernaient 441 patients. L’effet était significatif à la fois sur les symptômes d’asthme (taille de l’effet : —1,14 [IC95 % : —2,10, —0,18]) et la consommation médicamenteuse pour asthme (taille de l’effet : —1,63 [IC95 % : —2,83, —0,44]). Là encore l’hétérogénéïté entre les études est importante et nous attendons les résultats des grandes études en cours avec des comprimés d’ITSL (d’extraits d’acariens). L’effet sur les symptômes d’asthme saisonnier aux pollens de graminées a été analysé dans l’étude pédiatrique sus-citée [31] : une réduction de 64 % par rapport au groupe placebo a été observée.
d’air ence 3 29 28 30 31 32 Référ ains/m gr 30 2 de médic plus 3 3 -28 -53 -63 -65 -49 par (médiane) Réduction définie aminées gr 2 de 3 -34 -37 -28 -39 pollinique Sympt (médiane) pollens saison la aux y) 3 3 -16 -28 (mo -31 -28 Réduction pendant comprimés 1 bo) 3 symptômes d’ITSL place y 2,93 4,14 4,93 4,29 4,51 les ots v Symptômes ici pi (mo 1 études montrés 3 SLIT) y Sont andes 2,47 2,85 3,58 3,36 3,25 .
gr Symptômes (mo des études autorités ts les les y) par selon Résulta Age (mo 36,5 34,5 29,1 10,1 10,9 le — b 6.
aria d’AMM v ableau façon dossier T de le Dose 300IR 300IR 75000SQ-T 75000SQ-T 75000SQ-T ;
dans définie bo est r e vus place été au ont bo pollinique pport r a ff r es patients chi e 153/150 316/318 155/156 126/127 131/135 saison par La % Ces Nbr
ITSL/place Adultes
Tolérance
La bonne tolérance de l’ITSL a été démontrée chez l’adulte et l’enfant par plusieurs publications [2, 35], leur méta-analyse [9-13] et par les données de surveillance post-commercialisation [36].
Des effets secondaires locaux ont été décrits au cours des essais cliniques chez 60-85 % des patients, notamment des démangeaisons et un gonflement des lèvres et du plancher de la bouche, de courte durée (quatre à dix jours). Ces effets ne sont pas toujours plus fréquents dans les études à haute dose : 5 000 versus 25 000 SQ-T par jour [29] mais pas davantage entre 25 et 75 000 SQ-T par jour [29] ou 100 versus 300 et même 500 IR par jour [30]. En règle générale, ils ne sont pas sévères, ne nécessitent pas de traitement médicamenteux ni de modification de la dose, et disparaissent souvent au cours du traitement.
Dans quelques essais cliniques, des réactions systémiques telles que de l’urticaire ou de l’asthme ont été observées, avec toujours une résolution spontanée. Ces réactions peuvent dépendre de la dose et de l’allergène [2]. Quatre cas cliniques de réaction anaphylactique consécutive à une ITSL ont été publiés [2]. Cependant, l’un concernait un cas d’immunothérapie au latex, l’autre un extrait multiallergénique mal défini et un troisième un surdosage manifeste.
Dans la mesure où l’ITSL est administrée au patient à domicile, il importe de prendre les précautions suivantes [2] :
• donner au patient (ou aux parents dans le cas d’enfants) des instructions écrites claires et simples [37] sur la conduite à tenir en cas de réaction indésirable, et • conserver les comprimés ou gouttes d’allergènes en lieu sûr, hors de portée des enfants.
Indications
L’ITSL est efficace sur la rhinite et l’asthme induits par les pollens (bouleau, cyprès, graminées, olivier, pariétaire) et par les acariens. Le Tableau 7 donne les indications de l’ITSL.
Tableau 7. — Indications de l’immunothérapie sublinguale (d’après référence [2]) L’immunothérapie sublinguale spécifique à forte dose peut être indiquée dans les cas suivants :
• Patients précisément sélectionnés souffrant de rhinite, de conjonctivite et/ou d’asthme causés par une allergie aux pollens ou aux acariens • Patients insuffisamment contrôlés par la pharmacothérapie conventionnelle • Patients ayant manifesté des réactions systémiques lors d’une immunothérapie spécifique par injections • Patients ayant des problèmes d’observance pour l’immunothérapie par injections, ou refusant les injections
Confrontation des immunothérapies sublinguale et sous-cutanée
Les études comparant les deux modes d’administration sont rares [2]. Seules deux études étaient en double aveugle et placebo mais une seule avec double placébo ( double dummy ) [38] menée chez des patients atteints de rhinoconjonctivite causée par les pollens de bouleau. Dans cette étude, une différence significative a été mise en évidence entre les deux groupes actifs et le groupe placebo, en termes d’importance des symptômes et de prise de médicaments, mais le nombre de sujets étudiés ne permettait pas de détecter une éventuelle différence entre les deux groupes actifs.
Les doses cumulées d’allergène utilisées en ITSL dans ces différentes études s’échelonnaient entre quatre vingt-six et deux cent dix-neuf fois [38] celles utilisées en ITSC. A la lumière des grandes études ITSL comprimés il est maintenant démontré que des doses cumulées 17 [28] à 27 [29] fois la dose utilisée en ITSC sont efficaces.
Histoire naturelle de la maladie allergique
L’ITSL peut aussi avoir un effet sur le cours naturel de la maladie [2], démontré par la présence d’un effet rémanent à l’arrêt de l’ITSL [39, 40], la prévention d’un asthme chez le rhinitique [41] et le frein au développement de nouvelles sensibilisations [42], mais des travaux supplémentaires sont nécessaires pour confirmer ces données.
Deux grandes études ITSL comprimés pollens de graminées sont en cours afin de ré- pondre de façon certaine à la question de l’effet rémanent après arrêt du traitement.
CONCLUSION
Les résultats récents des grandes études d’ITSL comprimé vont au delà des études et méta-analyses d’études antérieures. Ces résultats renforcent la notion selon laquelle l’ITS doit faire partie de l’arsenal thérapeutique de prise en charge des maladies allergiques respiratoires. Un positionnement explicite de l’ITS, certainement pour les patients rhinitiques les plus sévères, mal contrôlés par les traitements pharmacologiques, et dont l’asthme est soit absent soit léger à modéré doit être trouvé. 300 000 patients sont concernés actuellement en France avec 100 000 nouveaux patients par an. Un positionnement étroit de l’ITS sur un besoin thérapeutique non adressé par les traitements symptomatiques devrait permettre de mieux aborder la notion de coût.
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DISCUSSION
M. Christian NEZELOF
Avez-vous observé des modifications des taux circulants de T.Régulateur ?
L’apparition de lymphocytes T régulateurs, principalement CD4+CD25+ a en effet été démontrée et est considérée comme le mécanisme principal d’action de l’immunothérapie spécifique.
M. Claude DREUX
Pensez-vous que l’éducation thérapeutique permettant une amélioration de l’observance, est d’un grand intérêt dans l’immunothérapie spécifique aux allergènes appliqués aux rhinites allergiques, à l’asthme ?
L’éducation est un élément clé de la prise en charge thérapeutique de toutes les maladies chroniques. Rhinite et asthme allergiques sont parmi les maladies chroniques les plus fréquentes et l’observance thérapeutique n’est pas meilleure ici que pour d’autres maladies chroniques. Ainsi, lorsqu’un traitement sophistiqué comme une immunothérapie spécifique est proposé, il doit être particulièrement expliqué et les outils de l’éducation thérapeutique sont les bienvenus.
M. Pierre DELAVEAU
Vous êtes-vous préoccupé de plusieurs plantes dont la Pariétaire, l’Olivier et l’Ambroisie, particulièrement étudiées dans la région lyonnaise ?
Plusieurs études en double aveugle contre placébo ont bien montré l’efficacité de l’immunothérapie spécifique chez des patients souffrant de rhinite allergique aux pollens de Pariétaire, d’Olivier et d’Ambroisie, pollens extrêmement invalidants dans plusieurs régions d’Europe.
M. Jean-Pierre NICOLAS
L’immunothérapie spécifique présente-t-elle des effets secondaires et des facteurs de risque ? Si tel est le cas, quelles recommandations préconisez-vous ?
La voie sous-cutanée est source d’anaphylaxie et d’asthme, parfaitement contrôlables lorsque les indications, non indications et précautions d’emploi sont respectées. L’immunothérapie spécifique par voie sublinguale est nettement moins génératrice de tels effets secondaires systémiques, et notamment aucun choc anaphylactique n’a été décrit dans les études cliniques et les études post-AMM. Il convient cependant de maintenir la vigilance pharmacologique habituelle a fortiori si cette thérapeutique se répand.
M. Bernard PESSAC
Que sait-on du processing moléculaire des allergènes administrés par voie sublinguale ?
Les cellules dendritiques buccales expriment le récepteur de forte affinité aux IgE et sont parfaitement capables de prendre en charge les allergènes déposés et de les présenter aux lymphocytes T régionaux.
M. Claude MOLINA
Que pensez-vous de l’immunothérapie multi-allergénique (avec deux ou trois allergènes distincts), comme de nombreux allergologues la pratiquent ? Dans la prise en charge globale du traitement des maladies allergiques, que pensez-vous de la polémique concernant les mesures d’éviction (contre la poussière et les acariens par exemple, dont l’efficacité et l’utilité sont mises en doute) ?
Les études n’ont pas démontré l’efficacité d’une telle association thérapeutique, pourtant répandue. Cependant, aucune étude n’a vraiment cherché à répondre correctement à cette question. Les doubles allergies aux pollens d’arbre et de graminées sont par exemple fréquentes et à défaut d’avoir démontré correctement l’efficacité d’une double immunothérapie, certaines ont démontré l’absence d’effets secondaires surajoutés.
Bull. Acad. Natle Méd., 2009, 193, no 5, 1127-1145, séance du 26 mai 2009