Rapport
Session of 9 novembre 2021

Rapport 21-12. L’endométriose pelvienne : Maladie préoccupante des femmes jeunes

MOTS-CLÉS : recommandations, endométriose, diagnostic, qualité de vie, fertilité, prévention, complications, filières de soins, santé publique
Pelvic Endometriosis:a worrying disease of young women
KEY-WORDS : recommandations, endometriosis, diagnosis, quality of life, fertility, prevention, complications, care networks, public health

CREPIN G. (1,2), RUBOD C. (2,3), au nom de la Commission X (Reproduction et Développement)

Résumé

Depuis près de deux décennies, l’endométriose est devenue pour l’ensemble du corps médical et plus particulièrement pour les gynécologues-obstétriciens, une pathologie féminine préoccupante. Son pic d’incidence chez les jeunes femmes, son impact sur la fertilité et la grossesse, la sexualité, la vie conjugale, familiale ou professionnelle dépassent largement le cadre de la santé et concerne toute la société dans toutes ses composantes.

Maladie oestrogéno-dépendante, elle puise, en l’état actuel de nos connaissances et de nos moyens, l’essentiel du traitement médical dans l’association d’antalgiques de palier I ou II (parfois III avec une surveillance spécifique) et de traitements hormonaux anti-estrogènes parfaitement identifiés pour leur efficacité mais non adaptés à un souhait de procréation. Des stratégies de traitement de la douleur chronique axées sur l’amélioration de la qualité de vie, en particulier celles intégrant des prises en charge spécifiques en centre de la douleur, traitements comportementaux et physiques, sont privilégiées. Le recours à la chirurgie, orienté vers les cas complexes non résolus par les traitements médicaux ou liés aux récidives ou désir de grossesse, s’effectue selon un protocole multidisciplinaire (gynécologique, digestif, urologique …) dans lequel l’objectif est d’éradiquer la totalité des lésions sans pour autant altérer le potentiel de fertilité de ces patientes souvent nullipares et donc en privilégiant les voies mini-invasives et les techniques conservatrices pour limiter les complications et séquelles.

Les enjeux actuels, outre cette spécificité de la fertilité, concernent particulièrement l’accessibilité aux soins et la qualité de ceux-ci. Celles-ci vont de pair avec l’instauration d’un parcours de soins labellisé, la création de Centres Spécialisés, en mesure d’offrir toutes les solutions thérapeutiques adaptées validées ou innovantes, un suivi qualifié, et une stratégie déterminée dans la formation et la recherche fondamentale et clinique.

La nécessité  de connaitre l’incidence  précise de la maladie dans  l’ensemble de la population, de réunir toutes les conditions pour un diagnostic précoce (trop tardif à l’heure actuelle), d’assurer un suivi rigoureux à long terme ne peut trouver de réponse que dans une prise de conscience à tous les échelons de responsabilité locale, régionale et nationale.
Ce sont toutes ces questions que soulève ce rapport, et les réponses que propose l’Académie Nationale de Médecine dans ses recommandations.

Summary

For almost two decades, endometriosis has become a worrying female pathology for the medical profession as a whole, and more particularly for gynaecologists and obstetricians. Its peak incidence in young women, its impact on fertility and pregnancy, sexuality, marital, family or professional life goes far beyond the health field and concerns all of society in all its aspects.

As an estrogen-dependent disease, it draws, in the current state of our knowledge and means, the main part of the medical treatment from the association of level I or II analgesics (sometimes III with specific monitoring) and anti-estrogen hormonal drugs that are perfectly identified for their efficiency but are not adapted to a desired procreation. Chronic pain treatment strategies focused on improving quality of life, in particular those combining specific patient care in pain centers, behavioral and physical treatments, are preferred. Resort to surgery, reserved for complex cases that are not solved by medical treatments or coming from relapses or a desired pregnancy, is implemented according to a multidisciplinary protocol (gynaecological, digestive, urological, etc.) in which the goal is to eradicate all lesions without altering fertility in these patients, who are often nulliparous, and therefore by preferring minimally invasive and conservative techniques to restrict complications and sequelae.

The current issues, besides the specific problem of fertility, particularly consist of the access to care and its quality. They go hand in hand with the creation of an approved healthcare circuit and of specialized centers, able to offer all the adequate therapeutical solutions, approved or innovative, a qualified follow-up and a determined strategy in terms of training, fundamental and clinical research.

The necessity to assess the precise incidence of this illness among the whole population, to provide all the conditions for an early diagnosis (far too much delayed nowadays) and for a thorough follow-up on a long-term basis can only find an adequate response in a wake-up call at all the levels of responsibility, be it local, regional or national.

These are all the questions raised by this report, and these are all the answers given by the French National Academy of Medicine in its recommendations.

 

Accès sur le site Science Direct : https://doi.org/10.1016/j.banm.2021.12.009

Accès sur le site EM Consulte

 

Communiqué de presse : “L’endométriose pelvienne, Maladie fréquente des femmes jeunes”

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L’endométriose est devenue en quelques années une maladie fréquente qui représente pour l’Académie nationale de médecine un enjeu de Santé publique.

Pathologie touchant au moins 10% des femmes en âge de procréer, elle retentit, par ses symptômes, sur l’équilibre psychologique, sexuel et conjugal. Elle affecte durablement les conditions d’exercice professionnel ; elle constitue une cause d’infertilité ; sa prise en charge reste complexe et nécessite une approche multidisciplinaire.

Le délai moyen de 7 ans entre l’apparition des premiers symptômes et le diagnostic effectif reste en l’état actuel beaucoup trop long. Il rend nécessaire, outre une prise de conscience à tous les échelons de la société, des mesures radicales et drastiques pour apporter l’aide indispensable à une population féminine fragilisée.

Dans ce contexte, l’Académie nationale de médecine recommande :

  1. Une véritable stratégie d’information destinée au grand public, aux médias et réseaux associatifs
  2. Un vaste plan de formation
    Par l’enseignement au collège et au lycée (SVT)
    Par la formation initiale de tous les professionnels de santé (étudiants en médecine, sages-femmes, infirmières…)
    Par la formation continue des praticiens en exercice (DPC)
    Par la sensibilisation des spécialistes en imagerie
  3. Un parcours de soins spécifique, avec notamment
    La création de Centres régionaux de référence labellisés
    Le recensement des praticiens impliqués dans l’endométriose pour une prise une charge multidisciplinaire ciblée
    Une approche des patientes isolées leur permettant d’accéder précocement à un accompagnement médical
    Une collaboration avec les associations de patientes
  4. Une structuration nationale avec la création
    D’un Observatoire national de recherche de l’endométriose (ONRE)
    D’un Registre national de l’endométriose afin de mieux connaitre l’épidémiologie et les
    mécanismes de cette pathologie à expression multiple
  5. Décréter l’endométriose « Cause nationale » avec pour objectif essentiel de promouvoir la santé de la femme

 

 

 

 

1. Académie Nationale de Médecine
2. Université Lille Nord de France, Faculté de Médecine, F-59000 Lille, France
3. CHU Lille, Service de Chirurgie Gynécologique, F-59000 Lille, France

Bull Acad Natl Med 2022;206:159-66. Doi : 10.1016/j.banm.2021.12.009