Communication scientifique
Séance du 22 juin 2004

Le syndrome de surentraînement

MOTS-CLÉS : éducation physique et entraînement physique. endurance physique. fatigue/complications. hormones/physiologie. immunite.. métabolisme
Overtraining syndrome
KEY-WORDS : fatigue/complications. hormones/physiology. immunity.. metabolism. physical education and training. physical endurance

Charles-Yannick Guezennec *

Résumé

De nombreux travaux ont montré que l’augmentation de la charge de travail physique peut aboutir à un syndrome de surentraînement, qui se caractérise par une diminution de la capacité de travail physique et des troubles du comportement. Cet état de surentraînement a pour origine un déséquilibre de la balance énergétique entre les apports alimentaires et la dépense liée au travail musculaire. Il est facilité par des contraintes supplémentaires liées au perturbations du rythme veille sommeil, et au stress psychologique. Ces différents facteurs agissent ensemble pour modifier le statut hormonal, les principaux axes hormonaux sensibles aux facteurs du surentraînement sont les hormones gonadiques, l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, le système des monoamines. La réponse hormonale est la cause et non la conséquence du surentraînement. Les perturbations métaboliques et neurochimiques sont responsables de modifications importantes de certain neuromédiateurs centraux tel que les monoamines cérébrales, la sérotonine. Les différentes expérimentations ayant pour but de vérifier les mécanismes du surentraînement indiquent que les modifications des neuromédiateurs sont en grande partie responsables des modifications comportementales.

Summary

Numerous studies have shown that enhanced physical load can result in an overtraining syndrome, with a decreased capacity for physical exercise and behavioral disturbances. Overtraining is caused by an imbalance between energy intake and output, and is facilitated by chronobiological and psychological stress. These factors are responsible for hormonal changes such as a decrease in gonadal steroids or in the hypothalamo-pituitary-adrenal axis. These metabolic and hormonal influences are lead to change in brain neuromediator activity, such as reduced monamine and increased serotonin levels. Experimental data indicate that these neuromediator changes are responsible more for behavioral changes than for decreased physical performance.

INTRODUCTION

L’augmentation considérable de l’entraînement physique dans les activités sportives de compétition à partir des années 1970 a permis d’isoler un syndrome de surentraî- nement. Ce syndrome est d’une expression complexe mais sa définition repose sur un point essentiel qui est une dégradation des performances physiques malgré la poursuite de l’entraînement [1]. Le but principal de l’entraînement physique est d’améliorer les performances mais lorsque l’entraînement devient trop intense ou que des modifications du mode de vie du sportif se produisent on peut assister à une diminution des performances physiques.

Dés les débuts de l’analyse du syndrome de surentraînement deux concepts se sont opposés pour expliquer les mécanismes. En premier lieu on peut citer un concept métabolique pour lequel la cause du surentraînement serait une baisse initiale des réserves énergétiques du sujet [2], responsable ultérieurement de modifications neuroendocriniennes et comportementales. L’autre concept propose que le point de départ serait la conséquence de la réponse hormonale à l’excès de travail musculaire qui entraînerait secondairement l’insuffisance métabolique. La validation de l’un ou de l’autre de ces concepts présente une importance sur la plan des moyens à mettre en œuvre pour prévenir ou guérir le surentraînement.

Composante métabolique

Les travaux de Costill [3] ont montré que la répétition d’exercices physiques intenses plusieurs jours de suite, diminuait les concentrations en glycogène musculaire dans les muscles, sans que la période de récupération entre chaque séance d’entraînement puisse permettre une resynthèse totale de ce substrat. La comparaison de différents sportifs montrait que seuls les sujets incapables de maintenir leurs réserves glycogé- niques présentaient des manifestations de surentraînement, cette constatation confirme donc l’existence d’une relation entre la baisse des stocks énergétiques et le surentraînement. Cette diminution du glycogène musculaire réduit la disponibilité des substrats glucidiques utilisables pendant l’exercice physique. C’est un des facteurs classiques de la fatigue pendant l’exercice physique. Par ailleurs, le métabolisme énergétique est modifié. Il est bien établi qu’une diminution de la disponibilité en substrats glucidiques stimule l’utilisation des substrats lipidiques et protéiques afin de les remplacer progressivement. Chacune de ces voies métaboliques est susceptible, lorsqu’elle est très sollicitée, de mettre en jeu des mécanismes respon-
sables de la fatigue. La relation entre fatigue et métabolisme protéique est celle qui a été le plus étudiée [4]. Elle repose sur l’existence d’un lien entre le métabolisme des acides aminés utilisés comme substrats énergétiques et la disponibilité de certains neuromédiateurs centraux impliqués dans la fatigue. Le neuromédiateur qui a été désigné comme le pivot central de la fatigue est la sérotonine cérébrale [5]. L’augmentation de la synthèse de sérotonine cérébrale sous l’effet d’entraînement intense est la conséquence de la stimulation de l’utilisation des substrats protéiques. Lors de l’exercice prolongé on observe une incorporation des acides aminés branchés (Leucine, Isoleucine, Valine) dans les processus oxydatifs. Par des mécanismes biochimiques complexes, il en résulte une augmentation de la production de tryptophane au niveau hépatique et une amélioration de son passage à travers la barrière hématoencéphalique. Le tryptophane étant le précurseur direct de la synthèse de sérotonine, ces deux actions conduisent à une augmentation importante de la synthèse de sérotonine cérébrale [5]. Nous pouvons souligner l’action de ce neuromédiateur sur les mécanismes de la prise alimentaire, il est bien démontré que la sérotonine est fortement impliquée dans la régulation de l’appétit. L’augmentation du tonus sérotoninergique exerce un effet anorexigène et anxiogène. L’autre voie métabolique de remplacement des substrats glucidiques est l’utilisation des lipides [6]. Cette transition métabolique est susceptible de diminuer la capacité de travail musculaire maximale. Ce phénomène est lié à un moins bon rendement de la métabolisation des lipides comparés aux substrats glucidiques, ceci est bien illustré par une diminution du rendement énergétique lors d’une épreuve de longue distance à partir du moment ou les lipides deviennent les carburants principaux [6]. L’autre mécanisme est encore hypothétique et n’a été soulevé que très récemment, il repose sur les effets de l’exercice musculaire sur une hormone synthétisée et libérée par les adipocytes, la leptine [7]. Cette hormone joue un rôle fondamental sur la régulation entre le métabolisme périphérique des lipides et les mécanismes cérébraux de la prise alimentaire. Dans la mesure où l’exercice physique prolongé et la répétition de cet exercice sur plusieurs jours produisent une stimulation de la lipolyse, on a formulé l’hypothèse que l’entraînement intense pouvait s’accompagner d’une baisse de la leptine circulante et ainsi interagir avec des mécanismes centraux de la fatigue. Les résultats de plusieurs études sur les effets de périodes d’entraînements sportifs de durée et d’intensité variable sur la leptine sont assez contradictoires et pour la majorité indiquent de très faibles variations de leptine sous l’effet de l’entraînement, mais une étude récente menée lors de la réalisation exercice militaire épuisant réalisé pendant plusieurs jours montre une diminution d’environ 60 % des taux de leptine à l’arrivée [8]. Cette observation souligne donc qu’il faut plusieurs jours de travail musculaire intense pour faire baisser de façon importante les taux de leptine. Les mouvements de la leptine peuvent être utilisés comme un marqueur de l’état des réserves énergétiques et traduit un déséquilibre entre les apports et les dépenses énergétiques.

Composante endocrinienne

De nombreux résultats obtenus sur l’homme ou l’animal concordent pour indiquer une baisse de la concentration de testostérone plasmatique chez l’homme sous l’effet de l’entraînement intense [9] ; chez la femme l’augmentation de la quantité de travail musculaire est aussi associée à une modification du statut des stéroïdes sexuels qui se traduit le plus souvent par une diminution de la production de progestérone dans la deuxième phase du cycle et une phase lutéale courte. La question est de savoir si ces modifications hormonales sont spécifiques du surentraînement comme cela a été proposé initialement. Actuellement la multiplications de données sur le statut hormonal des sportifs met bien en évidence le fait que tout sportif qui s’entraîne intensivement présente une diminution des stéroïdes sexuels sans pour autant présenter un syndrome de surentraînement. En dehors de la composante purement énergétique de l’exercice physique, il faut aussi prendre en compte la composante psychologique. Cette action de la composante psychologique est soutenue par des résultats anciens [10] qui ont montré que les conditions psychologiques particulières rencontrées lors d’un conflit militaire, dans ce cas précis il s’agissait de la guerre de Corée, produisaient une hypotestostéronémie. Au total, ce phénomène endocrinien semble résulter de la combinaison de contraintes physiologiques et psychologiques.

Cependant cette baisse de la production de stéroïdes d’origine centrale ne semble pas strictement spécifique du surentraînement mais plutôt un index du niveau des contraintes associées physiques et psychologiques. De façon plus spécifique le surentraînement semble avoir deux conséquences hormonales bien établies qui sont d’une part une diminution de la sensibilité de l’axe hypothalamo-hypophysaire et une diminution de la production de catécholamines. L’ensemble des fonctions antéhypophysaires est modifié par le surentraînement. Barron et coll [11], en utilisant un choc hypoglycémique induit par l’insuline, ont montré une diminution très nette de la réponse de la GH et de l’ACTH chez des sujets cliniquement surentraînés.

Cette action à l’étage hypothalamo-hypophysaire souligne le fait que l’ensemble de l’axe corticotrope est influencé par l’entraînement physique avec une diminution de la sensibilité surrénalienne aux stimulations centrales ainsi que cela a été démontré par Duclos et Coll [12] après 12 semaines d’entraînement intensif. Ces données suggèrent que l’entraînement pourrait modifier de façon permanente la sensibilité de la réponse au corticotropin releasing factor (CRF), Ce phénomène est confirmé par des études sur un modèle animal qui montrent une augmentation du CRF hypothalamique en réponse à un entraînement épuisant et avec un taux d’ACTH identique à celui d’animaux entraînés modérément [13]. Ces observations confirment une diminution de la sensibilité de l’axe hypothalamo hypophysaire. On peut émettre l’hypothèse que ce phénomène est une adaptation à la réponse hormonale des exercices prolongés. En effet l’exercice musculaire s’accompagne d’une élévation permanente des taux de cortisol plasmatique lors de l’exposition prolongée et répétée à cette action hormonale. Dans le cas des entraînements intensifs on peut aboutir à une désensibilisation de la boucle de régulation entre la production de
cortisol et le feed-back hypothalamo-hypophysaire. Par ailleurs il est maintenant bien établi que les modulations de l’axe corticotrope interagissent sur le métabolisme de la leptine. On peut donc formuler l’hypothèse que la diminution de la sensibilité de l’axe hypothalamo-hypophysaire lors du surentraînement pourrait jouer un rôle sur la baisse des concentrations circulantes de leptine ou vice-versa. Un autre phénomène illustre bien le mécanisme de désensibilisation qui peut survenir lors d’entraînement excessifs, il s’agit de la diminution du tonus adrénergique qui a été mise en évidence de façon directe par Lehman et coll [14] qui ont observé une diminution de l’excrétion urinaire des catécholamines chez des sujets surentraînés.

De façon indirecte cette inhibition du tonus sympathique a été objectivée par des études utilisant l’analyse de la variabilité de la fréquence cardiaque. Cette méthode permet de mesurer la balance entre le tonus ortho et parasympathique par le recueil de la variabilité au repos de la fréquence cardiaque. Des résultats obtenus à la fin d’exercices militaires épuisants mettent en évidence une inhibition du tonus orthosympathique et une augmentation de l’activité sympathique [15]. On peut faire la même hypothèse que pour l’axe surrénalien, des exercices physiques prolongés et répétées plusieurs jours de suite exposent les sujets qui y sont soumis à des taux élevés de catécholamines pendant longtemps, ce phénomène peut conduire à une désensibilisation des terminaisons nerveuses sympathiques et de la médullosurrénale par un phénomène de down-régulation bien connu pour d’autres situations d’hypersécrétion de catécholamines. Les observations très documentées de l’action du surentraînement sur les axes endocriniens soulèvent une question sur les liens de causalité entre les mécanismes métaboliques et endocriniens. La réponse hormonale initiale à un exercice intense commence à désensibiliser les systèmes de régulation par un mécanisme de down-régulation mais ce phénomène reste rapidement réversible à l’arrêt de l’exercice. Si l’on surajoute un déséquilibre de la balance énergétique ou une perturbation psychologique on va pérenniser cette désensibilisation des axes hormonaux.

Conséquences comportementales et sur le système nerveux central

Les modifications métaboliques et hormonales qui viennent d’être décrites sont en parties responsables de modifications neurochimiques. L’observation clinique de troubles du comportement dans les états de fatigue intense a permis de formuler l’hypothèse d’un lien fonctionnel entre ces deux évènements. Une revue de question récente [16] propose un tableau des troubles comportementaux observés chez les sujets cliniquement surentraînés et répondant au critère principal qui est une diminution des performances malgré un maintien ou une augmentation de la quantité d’entraînement. Ces auteurs en se basant sur les manifestations physiologiques du système neurovégétatif décrit dans la littérature et au regard des manifestations psychologiques isolent deux groupes de manifestations. Un premier groupe de manifestations est décrit sous le terme de fatigue orthosympathique il apparaît précocement au début du surentraînement. Il est composé de troubles du sommeil à type de difficultés d’endormissement et de réveil précoce, d’anxiété, d’irritabilité et
d’hyperactivité, d’une réduction des apports alimentaires, et il est accompagné d’une élévation de la fréquence cardiaque de repos, d’une réduction de la variabilité de la fréquence cardiaque de repos et d’une augmentation du niveau tensionnel. Ce syndrome est rare et il se manifeste plus volontiers dans les sports de type anaérobie.

Un deuxième groupe de manifestations plus fréquentes est observé majoritairement dans les sports d’endurance, il est désigné sous le terme de fatigue parasympathique, il est composé d’une sensation de fatigue intense, d’un état dépressif, d’un ralentissement des activités spontanées, de difficulté de réveil matinal, et de troubles du comportement alimentaires variables : soit boulimie soit anorexie, il s’accompagne d’une baisse de la fréquence cardiaque de repos, d’une augmentation de la variabilité de la fréquence cardiaque et d’une baisse de la tension artérielle avec une diminution de la réactivité du baroréflexe. La poursuite de l’entraînement, lorsque ce deuxième groupe de manifestations s’est installé, conduit à des syndromes dépressifs sévères, durables et nécessitant un traitement antidépresseur [16]. L’examen des cas cliniques observés de dépression induites par un entraînement excessif indique que certains sujets présentaient une tendance dépressive préalable au surentraînement, d’autre pas. Ce point laisse ouverte la discussion sur le rôle déclenchant de la structure psychologique préalable. La coexistence de troubles comportementaux et d’une diminution de la commande nerveuse a conduit à postuler l’existence d’une responsabilité de mécanismes neurochimiques dans le déterminisme de la fatigue centrale. Des études descriptives [17] de l’évolution des neuromédiateurs centraux sous l’effet de l’exercice musculaire ont permis de formuler des hypothèses sur leur action possible sur la fatigue dans la mesure ou différents neuromédiateurs sont directement responsables de la neurotransmission dans les structures cérébrales de la motricité. Deux axes neurochimiques principaux servent de support aux hypothèses reliant l’entraînement intense et la fatigue, il s’agit du système monoaminergique et de l’axe sérotoninergique. A l’arrêt d’un exercice épuisant sur un modèle animal, on observe une diminution de la concentration du tissu cérébral en noradrénaline, qui semble résulter d’une accélération de son turn-over. Ce phénomène est analogue à ce qui est observé lors d’un stress psychologique aigu qui réalise une déplétion des réserves en catécholamines cérébrales ; dans ce cas les conséquences se situent au niveau des comportements et seraient responsables d’équivalents mineurs des états dépressifs [18]. Par ailleurs il a été émis l’idée que la disponibilité en leur précurseur immédiat la tyrosine pourrait devenir un facteur limitant lors de la réalisation d’un exercice prolongé et surtout lors d’une période prolongée d’entraînement intense. Le rôle de la sérotonine cérébrale sur la fatigue a été suspecté à partir des premiers résultats de Chaouloff et coll. [5] qui ont mis en évidence une augmentation de la sérotonine cérébrale sous l’effet d’un exercice prolongé ou d’un entraînement intense de plusieurs semaines. Par ailleurs, de nombreux travaux dans le domaine des comportements avaient bien mis en évidence le rôle de la sérotonine sur le sommeil, la prise alimentaire, les états dépressifs ou anxieux, et la locomotion spontanée. A titre d’exemple, on peut détailler ce point en indiquant que la baisse de sérotonine cérébrale joue un rôle sur les mécanismes favorisant un état dépressif, alors que son augmentation serait génératrice d’anxiété.

Afin de mettre en évidence le rôle de ce neuromédiateur, des études pharmacologiques ont été conduites. Les résultats obtenus sur des modèles animaux confirment l’hypothèse d’une action de l’augmentation de sérotonine sur la fatigue alors que les données obtenues sur l’homme sont beaucoup plus contradictoires [17] Ainsi que le montrent les résultats exposés, la sérotonine n’est pas le seul neuromé- diateur modifié par l’exercice. La neurochimie nous apprend que les comportements sont le plus souvent influencés par des balances entre les évolutions de différents neuromédiateurs. C’est donc une erreur de vouloir relier exclusivement la fatigue avec les mouvements de la sérotonine cérébrale. Lors du surentraînement on a pu mettre en évidence une diminution de la commande nerveuse de la motricité, cette action pourrait en théorie dépendre d’une diminution du GABA cérébral, ce neuromédiateur agit sur la motricité en facilitant les fonctions des noyaux gris de la base sur la régulation de la motricité. La carence du système GABAergique joue un rôle sur la pathogénie d’affections de la motricité comme la maladie de Parkinson ou la chorée de Huntington. Ceci prouve que ce neuromédiateur peut agir sur la régulation fine de la motricité, en conséquence sa diminution lors d’effort prolongé peut majorer les perturbations motrices de la fatigue [19].

Synthèse et applications pratiques

L’exposé des connaissances recueillies sur les effets de l’entraînement intense et de l’apparition de signes de surentraînement au niveau métabolique, neuroendocrinien, comportemental et immunitaire, amène à se poser la question des relations de cause à effet entre ces différents acteurs de la fatigue. L’analyse des conditions de survenues du surentraînement fait surgir une notion qui est celle de contraintes multiples balancées. Trois contraintes principales semblent concourir pour aboutir au surentraînement : le déficit énergétique, le stress psychologique, les perturbations des rythmes veille-sommeil. En faisant varier la part respective de chacun de ces facteurs on peut obtenir le même résultat. Pour l’illustrer on peut dire que l’on pourra obtenir un surentraînement, pour un sujet donné, en augmentant de façon très importante la charge de travail physique en conservant par ailleurs des conditions de vie optimum. Pour le même sujet le seuil de travail physique, faisant courir un risque de surentraînement, sera significativement abaissé si l’on réduit l’apport alimentaire, la durée du sommeil, ou que la contrainte psychologique augmente. Les intégrateurs communs de ces contraintes étant probablement la réponse endocrinienne et les modulations des neuromédiateurs centraux. On peut émettre l’hypothèse de voie finale commune d’action sur des structures cérébrales comptabilisant le poids de chacun des facteurs et répondant de façon uniforme au niveau des comportements.

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DISCUSSION

M. Roger NORDMANN

Au sujet de la pratique du sport extrême et des mécanismes du syndrome de surentraî- nement, Charles-Yannick Guezennec n’a pas évoqué le rôle éventuel d’un stress oxydant. Cependant, chez le rat du moins, l’exercice musculaire forcé conduit (au niveau de la chaîne respiratoire mitochondriale notamment) à une hyperproduction de radicaux superoxydes et hydroxydes aboutissant à un stress oxydant par débordement des défenses antioxydantes. Un tel mécanisme n’est-il pas également en cause chez l’homme lors de la pratique de sports extrêmes ?

De nombreux arguments indirects laissent à penser que l’augmentation considérable du métabolisme lors de l’exercice physique est responsable d’une production accrue de radicaux libres. Cependant, la mise en évidence directe de ce phénomène se heurte à une difficulté méthodologique liée aux méthodes utilisables en physiologie chez l’homme sain. Ces méthodes reposent sur la quantification des métabolites radicalaires au niveau circulant ou respiratoire, les plus utilisés sont le dosage du MDA plasmatiques ou pentanes dans les gaz expirés. Les résultats obtenus sont contradictoires et auraient tendance à montrer une absence d’élévation chez les athlètes entraînés. Cette constatation amène deux commentaires : en premier lieu l’augmentation de la peroxydation se produit essentiellement au niveau membranaire par conséquent l’évaluation au niveau sanguin serait un mauvais indicateur d’un phénomène local. En second lieu l’entraînement physique augmenterait la capacité antioxydante et permettrait de capter les radicaux libres avant leur apparition plasmatique. Ce point est confirmé par des expérimentations animales qui montrent au niveau des membranes musculaires une élévation de la capacité antioxydante sous l’effet de l’entraînement et une diminution après une période d’inactivité. Dans ce dernier cas, la reprise de l’entraînement s’accompagne d’une production accrue de radicaux libres. Les applications pratiques de ces données sont, d’une part le fait qu’il ne semble pas utiles de complémenter de façon importante l’alimentation des sportifs en nutriments ayant des propriétés antioxydantes, d’autre part le fait que la production accrue de radicaux libres puisse être impliquée dans les douleurs musculaires d’une reprise d’activité physique après une période d’arrêt.


* Institut de Médecine Aérospatiale du Service de Santé des Armées Brétigny sur Orge 91223 BP 73 Tel : 01 69 23 77 55 Email : cyguezennec@aol.com Tirés à part : Professeur Charles-Yannick GUEZENNEC. Article reçu le 10 mai 2004, accepté le 17 mai 2004.

Bull. Acad. Natle Méd., 2004, 188, no 6, 923-931, séance du 22 juin 2004