Communiqué
Session of 1 juillet 2008

Le dépistage de la surdité dans la période néonatale précoce

MOTS-CLÉS : dépistage néonatal.. surdité

François LEGENT *

L’Académie nationale de médecine (ANM) a pris connaissance de l’avis no 103 du Comité Consultatif Nationale d’Éthique pour les Sciences de la Vie et de la Santé intitulé « Éthique et surdité de l’enfant : éléments de réflexion à propos de l’information sur le dépistage systématique néonatal et la prise en charge des enfants sourds » [1]. Cet avis d’ordre sociétal vient après les avis médicaux du rapport de l’Académie nationale de médecine de novembre 2006 sur les Handicaps sensoriels de l’enfant [2], de l’Expertise Collective Inserm 2006 «

Déficits auditifs, recherches émergentes et applications chez l’enfant » [3], et du rapport de la Haute Autorité de Santé sur «

L’évaluation du dépistage néonatal systématique de la surdité permanente bilatérale » de janvier 2007 [4].

L’Académie nationale de médecine rappelle sa recommandation du dépistage généralisé des déficits sensoriels à la naissance. Elle constate une diversité des modalités de dépistage et de prise en charge des enfants suspects d’atteinte auditive. Cette diversité est liée à la pluralité des initiatives locales investies dans ce domaine depuis des décennies. Mais ces initiatives convergent toutes vers le même objectif, qui est une prise en charge diagnostique précoce avec le respect du choix des parents dans l’éducation de leur enfant.

Les expériences de dépistage de la surdité plusieurs semaines après la sortie de la maternité ayant montré des taux de « perdus de vue » proche de 50 % [5, 6], seul le dépistage à la maternité s’avère réaliste [7]. Un programme expérimental (en voie de publication) de dépistage néonatal de la surdité en maternité, financé par la CNAMTS, avec comme copilote la DGS, portant sur 155 328 nouveaux nés, a prouvé la faisabilité du dépistage néonatal de la surdité en maternité [8].

 

L’Académie nationale de médecine recommande qu’un dépistage généralisé de la surdité soit réalisé par une des deux méthodes reconnues, Oto Emissions Acoustiques ou Potentiels Evoqués Auditifs Automatisés, dans la maternité lors de la période néonatale précoce (entre 0 et 8 jours, soit au cours de l’hospitalisation originelle, soit lors d’une consultation dans ce délai de 8 jours en cas de sortie précoce de l’établissement) pourvu que soient remplies les trois conditions suivantes :

• une information systématique donnée aux parents pendant la période de grossesse sur le rôle de l’audition dans l’apprentissage du langage de l’enfant et la nécessité d’une vigilance soutenue sur l’état de l’audition pendant toute l’enfance ;

• une formation des acteurs du dépistage non seulement d’ordre technique mais aussi d’ordre psychologique concernant l’information à donner aux parents ;

• une parfaite articulation entre les responsables du dépistage fait à la maternité et les responsables de la prise en charge des enfants pouvant présenter un déficit auditif.

Ces trois conditions devront être régulièrement évaluées par une instance ad hoc.

L’Académie nationale de médecine insiste aussi sur la nécessité de la création d’un registre national des surdités de l’enfant apportant des données épidémiologiques sur les modalités de prise en charge et le suivi, outil indispensable à une politique de santé rationnelle concernant la déficience auditive de l’enfant.

BIBLIOGRAPHIE [1] Comité Consultatif National d’Ethique pour les Sciences de la Vie et de la Santé. Avis No 103 — Éthique et surdité de l’enfant : éléments de réflexion à propos de l’information sur le dépistage systématique néonatal et la prise en charge des enfants sourds. Décembre 2007.

[2] Académie nationale de médecine — Handicaps sensoriels de l’enfant. Rapport adopté le 7 novembre 2006, Bull. Acad. Natle Méd. , 2006, 190 , no 8, 1775-1790.

[3] Inserm- Expertise collective. Déficits auditifs, Recherches émergentes et applications chez l’enfant. Éditions Inserm 2006.

[4] Haute Autorité de Santé. Évaluation du dépistage néonatal systématique de la surdité permanente bilatérale. Janvier 2007.

[5] SCHMIDT P., LÉVÊQUE M., DANVIN J.B., LEROUX B., CHAYS A. — Dépistage auditif néonatal systématique en Région Champagne-Ardenne : à propos de 30 500 naissances en deux années d’expérience. Ann. Otolaryngol. Chir. Cervicofac., 2007 Sep., 124 (4) : 157-65.

[6] KOLSKI C., Le DRIANT B., LORENZO P., VANDROMME L., STRUNSKI V. — Early hearing screening : what is the best strategy ? Int. J. Pediatr. Otorhinolaryngol., 2007 Jul., 71 (7) :

1055-60.

[7] LÉVÊQUE M., SCHMIDT P., LEROUX B., LANGAGNE T., LABROUSSE M., CHAYS A. — Universal newborn hearing screening : a 27-month experience in the French region of ChampagneArdenne. Acta Paediatr ., 2007 Aug., 96 (8) : 1150-4.

[8] Document de la CNAMTS — Disponible depuis mai 2008 et en voie de publication.

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 1er juillet 2008, a adopté le texte de ce communiqué à l’unanimité.

 

* Membre de l’Académie nationale de médecine

 

Bull. Acad. Natle Méd., 2008, 192, no 6, 1233-1235, séance du 1er juillet 2008