Communiqué
Session of 14 octobre 2008

La vaccination contre l’hépatite B en France : maintien des recommandations et renforcement de la couverture vaccinale,

Pierre BÉGUÉ* et la sous-commission « Vaccinations »

De nouvelles interrogations sur la relation entre la vaccination contre l’hépatite B et la sclérose en plaques (SEP) sont nées récemment à la suite de la médiatisation des résultats d’une troisième étude cas-témoins de la cohorte neuro-pédiatrique KIDSEP par l’équipe de neurologie pédiatrique de l’hôpital de Bicêtre (Paris). Le nouveau travail de cette équipe étudie l’influence de la vaccination contre l’hépatite B sur la survenue d’un nouvel épisode aigu démyélinisant (EAD) du système nerveux central chez tous les enfants ayant présenté un EAD entre janvier 1994 et décembre 2003 (premier épisode ou SEP confirmée) ; ces enfants sont appariés à des enfants témoins. Cette étude à grande échelle, soutenue par les instances de santé publique, a été conduite avec une méthodologie rigoureuse [1]. Sur la totalité des cas les auteurs concluent à l’absence de lien entre la vaccination et la survenue d’EAD. Mais en analysant des sous-groupes ils constatent une relation statistiquement significative de la probabilité de survenue d’un EAD (OR= 1,74) dans un sous-groupe d’enfants ayant un calendrier vaccinal bien respecté et vaccinés par le vaccin Engérix B® plus de trois ans auparavant. Après l’annonce de ces résultats dans la presse avant publication, la Commission nationale de la pharmacovigilance et le Haut Conseil de santé publique (HCSP) ont été réunis.

Ils ont conclu, comme les auteurs, que le résultat principal et majeur de cette étude ne faisait pas apparaître de lien entre la vaccination contre l’hépatite B et le risque de SEP et que cette analyse statistique complémentaire d’un sousgroupe présentait les caractéristiques d’un résultat fortuit [2, 3]. Par conséquent le HCSP maintient les recommandations actuelles de vaccination. Le Comité de la sécurité vaccinale de l’OMS (GACVS) a formulé les mêmes critiques sur cette analyse de résultats de sous-groupes pour lesquels les auteurs euxmêmes font des réserves dans leur article [4].

 

L’Académie nationale de médecine regrette que des résultats partiels d’une étude, d’interprétation critiquable, aient jeté à nouveau le doute sur un vaccin du fait d’une médiatisation hâtive. L’Académie de médecine insiste de nouveau sur la gravité de l’hépatite B, qui conduit à l’hépatite chronique dans 2 à 10 % des cas avec un risque d’évolution vers la cirrhose ou le cancer du foie. Or, la persistance d’une couverture vaccinale faible en France, chez les nourrissons (moins de 30 %) comme chez les pré-adolescents (40 %) fait craindre que le poids de la maladie et de ses complications ne s’aggrave dans les années à venir. L’InVS estime que chez les enfants vaccinés entre 1994 et 2007 environ 20 000 nouvelles infections, 8 000 hépatites aiguës, 800 infections chroniques et 40 hépatites fulminantes ont été évitées, grâce à la couverture vaccinale élevée des adolescents entre 1994 et 1997 [2], devenue insuffisante actuellement.

L’Académie nationale de médecine soutient pleinement, comme elle l’a fait récemment [5], les recommandations du HCSP pour le renforcement de la couverture vaccinale de l’hépatite B, compte tenu des risques futurs probables pour la population que fait courir l’insuffisance actuelle de cette prévention.

BIBLIOGRAPHIE [1] MIKAELOFF Y., CARIDAGE G., SUISSSA S., TARDIEU M. — Hepatitis B vaccine and the risk of CNS inflammatory demyelination in childhood . Neurology, 2008. rapid PDF ; epub 8 octobre 2008.

[2] Haut Conseil de la santé publique. Avis relatif à la vaccination contre l’hépatite B. 2 octobre 2008. Avis du HCSP. www.hcsp.fr [3] Anonyme : Vaccination contre le virus de l’hépatite B : résumé des débats de la Commission nationale de pharmacovigilance du 30 septembre 2008. presse@afssaps.

sante.fr .

[4] Global Advisory Committee on Vaccine Safety: response to the paper (in press) by Y. Mikaeloff and colleagues in Neurology entitled ‘‘ Hepatitis B vaccine and the risk of CNS inflammatory demyelination in childhood ’’, October 2008. http://www.who.int/ vaccine_safety/topics/hepatitisb/multiple_sclerosis/oct_2008/en/index.html [5] BÉGUÉ P., GIRARD M., FROTTIER J., DENIS F. et la sous-commission « vaccination ». — Sur la vaccination contre l’hépatite B en France. Bull. Acad. Ntle Méd ., 2008, 192 , 433-5.

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 14 octobre 2008, a adopté le texte de ce communiqué moins une (1) abstention.

* Membre de l’Académie nationale de médecine

 

Bull. Acad. Natle Méd., 2008, 192, no 7, 1495-1496, séance du 14 octobre 2008