Communication scientifique
Séance du 14 décembre 2010

La mise en place universelle de l’inactivation des agents pathogènes dans les produits sanguins labiles est une étape majeure de l’amélioration de la sécurité en transfusion

MOTS-CLÉS : erythrocytes. plaquettes. plasma sanguin.. transfusion sanguine
Universal implementation of pathogen inactivation in labile blood products is a mojor step towards transfusion safety
KEY-WORDS : blood platelets.. blood transfusion. erythrocytes

Jean-Pierre Cazenave*

Résumé

La transfusion des produits sanguins labiles, concentrés de globules rouges, concentrés de plaquettes et plasma, demeure une thérapeutique essentielle, efficace et vitale, en l’absence d’alternative thérapeutique. La transmission d’agents infectieux pathogènes par la transfusion du sang, des produits sanguins labiles et des médicaments dérivés du sang a toujours été redoutée à juste titre par les malades et les médecins. Le danger le plus grand serait de retarder la mise en place de l’inactivation des pathogènes pour les produits sanguins labiles, sous prétexte d’attendre la preuve absolue pour mettre en place un système parfait. La mise en place universelle de l’inactivation des pathogènes dans les produits sanguins labiles est une étape majeure et la clé de la sécurité infectieuse en transfusion.

Summary

Transfusion of labile blood products (red cell concentrates, platelet concentrates and plasma) is vital in the absence of alternatives. Patients and doctors have always feared infections transmitted by blood, blood components and blood-derived drugs. It is potentially dangerous to delay implementation of pathogen inactivation in labile blood products pending a perfect process. Universal implementation of pathogen inactivation in labile blood products is a major step towards transfusion safety.

INTRODUCTION

Les risques médicaux liés à la transfusion des produits sanguins labiles et des médicaments dérivés du sang ont toujours été redoutés par les malades transfusés et leurs médecins [1]. Parmi eux, les risques de transmission d’agents pathogènes infectieux aux receveurs et qui sont liés à la contamination des donneurs, des produits sanguins labiles qui en dérivent [concentrés de globules rouges, concentrés de plaquettes, plasma thérapeutique frais congelé] et des médicaments dérivés du sang préparés industriellement à partir de pools de centaines de dons. Ils ont provoqué dans un passé récent des tragédies humaines avec l’émergence des virus de l’hépatite B, de l’immunodéficience humaine et de l’hépatite C. Ces tragédies ont entraîné la mise en place de mesures (amélioration de la sélection médicale et des tests de dépistage, réduction de la fenêtre sérologique par la biologie moléculaire, déleucocytation systématique de tous produits sanguins labiles), qui ont renforcé la sécurité transfusionnelle. Il persiste néanmoins un risque variable de transmission d’une infection par transfusion. En France, ce risque résiduel est devenu très faible pour les virus pathogènes majeurs de l’hépatite B, de l’immunodéficience humaine et de l’hépatite C qui sont testés et il est inférieur de 1 pour 1 000 000 à 1 pour 8 000 000. Mais il persiste un risque pour des virus connus, mais non testés systématiquement (cytomégalovirus, parvovirus B19) ; des virus nouveaux émergents ; les bactéries, même avec dépistage ; le prion pathologique du nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. Ce risque varie avec la nature du produit sanguin labile administré et il est accru chez les malades immunodéficitaires.

Jusqu’à présent, la stratégie de prévention des maladies infectieuses transmises par transfusion était réactive et il s’écoulait un temps plus ou moins long entre la reconnaissance du risque et la mise en place de la parade. L’introduction du principe de précaution préconise qu’en face des situations d’incertitude scientifique, la possibilité d’un risque doit être pris en considération en l’absence de preuve du contraire et qu’il s’en suit la nécessité de prendre des mesures pour faire face à des risques potentiels graves. Ainsi, l’inactivation/réduction des pathogènes des produits sanguins labiles accompagne ce changement de paradigme en transfusion, où la prévention de la transmission des maladies infectieuses devient proactive au lieu d’être réactive [2, 3]. Au début, la mise en place de l’inactivation des pathogènes peut s’avérer coûteuse et complexe pour la préparation des produits sanguins labiles, mais ultérieurement efficace sur le plan financier, comme cela s’est avéré pour les médicaments dérivés du sang.

La conférence internationale de consensus de Toronto [4, 5], qui a discuté de la mise en place de l’inactivation des pathogènes des produits sanguins labiles, a conclu que la surveillance active ne peut pas prévoir le risque de transmission d’agents pathogènes émergents par transfusion et que ce type de risque implique une attitude proactive selon le principe de précaution. Les recommandations de la conférence concernant l’inactivation des pathogènes dans les produits sanguins labiles sont : — la mise en place de l’inactivation des pathogènes pour tous les produits sanguins labiles, — la mise en place de l’inactivation des pathogènes ne doit pas attendre qu’elle soit disponible pour tous les produits sanguins labiles (plaquettes, plasma, globules rouges), — l’inactivation des pathogènes doit être mise en place lorsque l’on dispose de méthodes sûres d’inactivation d’un large spectre d’agents pathogènes, — la transfusion des produits sanguins labiles ayant subi une inactivation des pathogènes doit être universelle pour tous les patients.

La mise en place universelle de l’inactivation des agents pathogènes dans les produits sanguins labiles est un objectif majeur, nécessaire et faisable pour améliorer la sécurité de la transfusion des produits sanguins labiles vis-à-vis des maladies infectieuses transmissibles et mettre les produits sanguins labiles au même niveau de sécurité que les médicaments dérivés du sang, qui ont tous subi une étape d’inactivation des pathogènes. L’Etablissement Français du Sang a mis en place, en France, une politique active d’introduction universelle de l’inactivation des pathogènes dans les produits sanguins labiles basée sur des critères techniques, microbiologiques, épidémiologiques et cliniques.

MÉTHODES D’INACTIVATION DES PATHOGÈNES

La sécurisation microbiologique par inactivation des pathogènes dans les produits thérapeutiques intraveineux administrés à l’homme et fabriqués par l’industrie pharmaceutique est utilisée depuis des décennies. Les solutions intraveineuses sont stériles et apyrogènes depuis les années 1950. Les solutions contenant des protéines sont difficiles à stériliser par des techniques simples comme la chaleur. L’albumine qui, dès sa production à partir du plasma, a pu être stérilisée par pasteurisation, n’a pas entraîné de complications infectieuses en plus de soixante ans d’utilisation. Les fractions plasmatiques purifiées (facteurs de la coagulation anti hémophiliques :

FVIII, FIX) subissent une ou plusieurs méthode d’inactivation des pathogènes depuis les années 1980. Depuis les années 1990, le plasma et le plasma frais congelé peuvent être inactivés par solvant-détergent ou par le bleu de méthylène. Toutes ces méthodes d’inactivation des pathogènes appliquées au plasma ou aux protéines purifiées à partir du plasma n’entraînent pas de modifications suffisantes des principes actifs qui les rendraient inefficaces sur le plan fonctionnel, immunogène ou toxique. Ces produits dérivés du plasma sont des médicaments dérivés du sang approuvés réglementairement par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé.

Il a fallu attendre les années 2000 pour pouvoir utiliser des techniques d’inactivation des pathogènes applicables aux produits sanguins labiles cellulaires qui permettent de conserver une survie et une fonction des plaquettes ou des globules rouges in vivo , compatibles avec une sécurité et une efficacité thérapeutique acceptables. Les concentrés de plaquettes peuvent subir une inactivation des pathogènes par au moins trois méthodes photochimiques utilisant les rayons ultraviolets, qui ont reçu un marquage de Conformité Européenne: — la technique UVC (Theraflex-UV®, Macopharma, France) ; — la technique riboflavine + UV larges (Mirasol PRT®, Caridian BCT, USA) ; — la technique amotosalen Hcl + UVA (Intercept® Blood System, Cerus Europe BV, Pays-Bas). Seule la technique Intercept® a été approuvée en France par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé pour les concentrés de plaquettes en 2005 et pour le plasma frais congelé en 2006. Dans les deux cas, les indications cliniques reconnues sont identiques à celles des produits, concentrés de plaquettes et plasma, non inactivés.

L’inactivation des pathogènes dans les concentrés de globules rouges s’avère plus difficile, mais possible par un procédé chimique utilisant un agent alkylant dégradable, le S-303 (Cerus, USA). Cette méthode est en cours de développement clinique [6, 7]. L’inactivation des pathogènes dans le sang total est loin d’être encore une réalité, malgré des essais préliminaires [7].

Les caractéristiques et les méthodes de préparation des produits sanguins labiles ayant subi une inactivation des pathogènes par l’une des trois techniques photochimiques utilisant les rayons ultraviolets ont été décrites et revues récemment [8-10].

CRITÈRES MICROBIOLOGIQUES DE L’INACTIVATION DES PATHOGÈNES

Toutes les techniques d’inactivation des pathogènes actuellement utilisées en France pour le plasma frais congelé et/ou les concentrés de plaquettes et qui ont été autorisées par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé inactivent, de façon variable selon la technique, un grand nombre d’agents microbiens : bactéries, virus, parasites [9, 10]. Mais toutes les techniques d’inactivation des pathogènes n’inactivent pas tous les agents pathogènes microbiens et pas avec la même efficacité de réduction du pouvoir infectieux. D’une manière générale, ces techniques d’inactivation des pathogènes ne sont pas ou sont peu efficaces sur les spores bactériennes, les virus non enveloppés et les prions pathologiques.

Le traitement solvant-détergent du plasma est efficace, mais il n’est pas applicable aux concentrés de plaquettes, car il lyse les cellules, et il n’est pas efficace contre les virus nus et le nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob.

Depuis son introduction en France en 1992, plus de 800 000 unités de plasma viro-atténué solvant-détergent de 200mL ont été transfusées, ce sont des produits sûrs et efficaces. Le plasma viro-atténué solvant-détergent est préparé à partir de pools de cent donneurs de plasma d’aphérèse, ce qui a permis de limiter, voire supprimer la survenue de complications pulmonaires aiguës liées à la transfusion de plasma.

Le bleu de méthylène est également efficace pour inactiver les virus enveloppés dans le plasma. Il ne pénètre pas les membranes cellulaires, donc il n’inactive pas les virus intracellulaires et les bactéries.

La riboflavine + UV a un large spectre d’action sur les bactéries, les virus et les parasites. Cette technique, qui a reçu le marquage Conformité Européenne, mais n’est pas approuvée par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé, est applicable au plasma et aux concentrés de plaquettes (plaquettes en suspension dans 100 % de plasma). Son efficacité sur les bactéries et le virus de l’hépatite B est moindre que celle de l’amotosalen + UVA [9, 10]. Elle inactive les lymphocytes T résiduels. Le premier essai clinique randomisé chez des malades thrombocytopéniques après chimiothérapie a démontré que les concentrés plaquettaires traités par la technique Mirasol PRT® étaient inférieurs aux concentrés plaquettaires non traités servant de contrôle, en termes d’augmentation de la concentration des plaquettes une heure après la transfusion [11]. Des études ulté- rieures seront nécessaires pour savoir si cette constatation s’accompagne ou non d’un risque accru de saignement.

La technique UVC d’inactivation des concentrés de plaquettes est efficace sur les bactéries et les virus, mais n’inhibe pas le virus de l’immunodéficience humaine libre ou intracellulaire [12].

La technique Intercept® est la seule technique d’inactivation des pathogènes approuvée par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé pour usage clinique en France. Elle inactive un large spectre d’agents pathogènes tels que les virus enveloppés et non enveloppés, les bactéries gram négatif, gram positif aérobiques et non aérobiques, les parasites, les spirochètes entraînant une réduction de l’infectivité de l’ordre de 5 à 6 log [9, 10]. Cette technique inactive également 10 avec la même efficacité les virus intracellulaires comme le virus de l’immunodéficience humaine, le virus lymphotrope T humain-1 et —2, le cytomégalovirus et le virus de l’hépatite B administré in vivo au chimpanzé. En outre, l’inactivation des lymphocytes T résiduels est supérieure à 5 log et la technique dégrade plus de 10 paires de base (1:83) que l’irradiation par rayonnement gamma (1:37 000). Elle prévient la réaction du greffon contre l’hôte chez les immunodéprimés et après greffe allogénique de cellules souches, ce qui permet de supprimer l’irradiation gamma des concentrés de plaquettes et du plasma inactivés.

DONNÉES ÉPIDÈMIOLOGIQUES ET INACTIVATION DES PATHOGÈNES

L’intervalle de temps qui sépare la reconnaissance d’un risque de maladie infectieuse et la mise en place d’un test de dépistage chez un donneur de sang peut varier de un à trente ans [2]. Ainsi, pendant un intervalle de trente ans, avant que l’on ait pu dépister le virus de l’hépatite B chez les donneurs de sang, plus de 200 000 receveurs sont morts d’une hépatite B. Cet intervalle de temps n’a été que de quinze ans pour le virus de l’hépatite C, mais néanmoins on a estimé qu’entre 1970 et 1990 aux USA, 4,8 millions d’hépatites C ont été transmises par transfusion provoquant 768 000 cas de cirrhose hépatique [13]. L’intervalle de temps va en diminuant, il n’a été que de un à quatre ans pour développer un test de dépistage du virus West Nile, mais il semble évident que l’industrie ne pourra pas suivre à temps et multiplier les mises au point de tests de dépistage pour chaque nouveau pathogène émergent et pouvant contaminer les donneurs de sang. Il est alors bon de se souvenir que les méthodes préventives d’inactivation des pathogènes sont la solution : l’albumine pasteurisée n’a transmis aucune infection aux receveurs en soixante ans d’utilisation, le traitement d’inactivation des pathogènes dans le plasma ou dans le FVIII par la technique solvant-détergent a arrêté net la transmission éventuelle du virus de l’immunodéficience humaine, du virus de l’hépatite B et du virus de l’hépatite C par la transfusion de ces produits.

Les modifications épidémiologiques mondiales et les voyages font craindre l’apparition de virus et de parasites non testés nouveaux, émergents ou ré-émergents [10, 14-16] : arbovirus (West Nile, Chikungunya, dengue), coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère, virus influenza H1N1 et H5N1, rétrovirus (spumavirus du singe, virus lymphotropes T humain —3 et —4, gammarétrovirus de la leucémie murine xénotrope ou XMRV [17]), virus humain du syndrome de Kaposi de type herpès-8 ou HHV-8 [18], fièvre Q [19] du à Coxiella burnetii , Trypanosoma cruzi (maladie de Chagas), Plasmodium falciparum (paludisme), Babesia microti,

Rickettsia, pour lesquels il n’existe pas de test de dépistage facilement utilisable à grande échelle en transfusion.

Les modifications du climat, les migrations des oiseaux et les voyages ont pour conséquence l’extension des zones d’habitat des moustiques vecteurs ( Aedes albopictus, Aedes aegypti ) des arbovirus dans le monde [20, 21] et la survenue de nouvelles épidémies dues au virus West Nile aux USA et pouvant causer des morts par transmission après transfusion [22] ; dues au Chikungunya à l’Ile de la Réunion et ayant entraîné l’arrêt des collectes de sang [23] ; enfin favorisant l’apparition de foyers épidémiques autochtones de Chikungunya et de dengue dans l’Italie du Nord [24].

MISE EN PLACE ET UTILISATION CLINIQUE EN FRANCE DE L’INACTIVATION DES AGENTS PATHOGÈNES EN TRANSFUSION

A l’heure actuelle, tous les médicaments dérivés du sang transfusés en France pour une affection aiguë ou chronique (hémophilie) ont subi une ou plusieurs étapes d’inactivation des pathogènes. Jamais la sécurité microbiologique n’a été aussi importante et aucun cas de transmission d’un agent pathogène microbiologique n’a été rapporté par le département d’hémovigilance de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé.

En ce qui concerne les produits sanguins labiles, la mise en place et l’utilisation de l’inactivation des pathogènes progresse grâce à une politique active de l’Etablissement Français du Sang et des tutelles ministérielles.

Depuis 2010, tout le plasma thérapeutique d’aphérèse est inactivé par l’une des trois techniques suivantes: solvant-détergent depuis 1992 et qui représente environ 50 % de la totalité produite, bleu de méthylène et amotosalen [25] depuis 2007.

La stratégie de mise en place progressive de l’inactivation des pathogènes pour les concentrés de plaquettes s’est faite selon les recommandations de la Conférence de Toronto [4, 5] afin de pouvoir tester, dans des conditions de routine, la faisabilité de l’utilisation universelle de l’inactivation des pathogènes. Au cours de la dernière décade, un des centres régionaux de l’Etablissement Français du Sang, l’Etablissement Français du Sang-Alsace a acquis de l’expérience dans les techniques d’inactivation des pathogènes des concentrés de plaquettes et du plasma. Le Président de l’Etablissement Français du Sang a décidé que ce centre devait jouer le rôle de centre pilote pour la mise en place de l’inactivation des pathogènes en testant les nouvelles techniques, en fournissant les ressources et l’assistance aux autres régions pour la mettre en place et en étant une région convertie à l’utilisation clinique universelle des concentrés de plaquettes et du plasma ayant été traités par une méthode d’inactivation des pathogènes. La technique amotosalen+UVA (Intercept®) a été retenue pour inactiver les concentrés de plaquettes provenant d’aphérèse ou de mélange de couches leucoplaquettaires issues de sang total. Les conséquences de l’inactivation des concentrés de plaquettes par Intercept® sur la recirculation des plaquettes sont modérées et ne modifient pas les performances cliniques hémostatiques du produit.

Après marquage à l’Indium111 et cinq jours de stockage, la récupération des concentrés de plaquettes Intercept® était inférieure de 7,8 % par rapport au contrôle et leur survie de 4,8 jours contre six jours pour le contrôle [26]. Plusieurs essais cliniques de phase 3 ont montré que la récupération des plaquettes après transfusion, mesurée par l’augmentation à une heure de la concentration des plaquettes en fonction de la surface corporelle (en anglais CCI ou Corrected Count Increment) était diminuée de 12 % [27, 28] à 30 % [29, 30] pour des concentrés plaquettaires conservés jusqu’à cinq jours. Dans ces conditions, les performances cliniques hémostatiques n’étaient pas modifiées [27, 29]. A l’heure actuelle, la production des concentrés de plaquettes Intercept® est implantée totalement dans quatre établissements régionaux et totalement pour le plasma Intercept® dans six établissements régionaux et au Centre de Transfusion des Armées.

Depuis 2006, Intercept® a été mis en place en Alsace, d’abord comme site pilote, puis comme une région totalement convertie à l’inactivation des pathogènes. Cette phase a été précédée de trois essais cliniques de phase 3 [27-30], qui ont montré que la technique Intercept® était cliniquement sûre et efficace en termes d’augmentation des concentrations plaquettaires et d’hémostase après transfusion à des malades d’oncohématologie ayant une thrombopénie centrale secondaire à une chimiothé- rapie ou à une greffe de cellules souches hématopoïétiques. Le site pilote de l’Etablissement Français du Sang a participé à la mise en place des concentrés de plaquettes Intercept® à l’Etablissement Français du Sang-Ile de la Réunion au cours de l’épidémie de Chikungunya en 2006 [23] et en 2007, à l’Etablissement Français du Sang-Martinique et à l’Etablissement Français du Sang-Guadeloupe-Guyane au cours d’une épidémie de dengue et à cause d’une prévalence élevée de Trypanosoma crusi (maladie de Chagas) .

L’expérience transfusionnelle d’utilisation universelle de l’inactivation des pathogè- nes par Intercept® en Alsace, une région de près de deux millions d’habitants, porte sur trois ans et demi, au cours desquelles 55 104 concentrés de plaquettes Intercept® (34 982 concentrés de plaquettes de mélange de couches leucoplaquettaires et 20 122 concentrés de plaquettes d’aphérèse) ont été transfusés. La mise en place technique et opérationnelle de l’inactivation des pathogènes n’a pas entraîné de modifications majeures de l’organisation et du personnel (un technicien supplémentaire) du laboratoire de préparation des produits sanguins labiles. Elle a permis d’améliorer la standardisation et la qualité des produits sanguins labiles. Afin d’évaluer l’impact de l’utilisation de l’emploi de solutions additives et d’Intercept®, nous avons fait une revue rétrospective de l’utilisation des concentrés de plaquettes, des concentrés de globules rouges et des événements aigus indésirables chez le receveur et qui sont à déclaration obligatoire auprès de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé, au cours de trois périodes différentes d’environ un an, de janvier 2003 à août 2007 [31, 32]. Les concentrés de plaquettes des deux premières périodes n’étaient pas inactivés (période 1 : concentrés de plaquettes dans 100 % de plasma et période 2 : concentrés de plaquettes en solution additive et 35 % de plasma) ; les concentrés de plaquettes de la troisième période étaient inactivés par Intercept® en solution additive avec 35 % de plasma. Chaque période comprenait 1 600 à 2 000 patients sans exclusions, de 63 ans d’âge moyen et répartis en oncohématologie (55 %), chirurgie cardiaque (7 %) et médecine et chirurgie générales (38 %). Ils ont reçu entre 9 000 et 13 000 concentrés de plaquettes Intercept® et 17 000 et 23 000 concentrés de globules rouges. Les résultats de l’hémovigilance ont montré une diminution d’environ 40 % des événements aigus indésirables chez le receveur, essentiellement à type de fièvre, frissons, allergies, pour les périodes 2 et 3. Cet effet bénéfique est en grande partie dû à l’utilisation de la solution additive de remplacement du plasma dans les concentrés de plaquettes Intercept®. L’inactivation des pathogènes a permis de supprimer la recherche du cytomégalovirus et de l’irradiation γ des concentrés de plaquettes Intercept® destinés aux malades pédiatriques, immunodéficitaires ou greffés/transplantés sans observer d’infection à cytomé- galovirus ou de réaction de greffon contre hôte. Aucun effet toxique n’a été relevé après trois ans d’utilisation parfois chronique et s’étendant sur plus d’un an, parfois chez le jeune enfant ou chez des sujets fragiles ou âgés. La dose totale moyenne de concentrés de plaquettes Intercept® [période 3] nécessaire était de 27,0 × 1011 plaquettes / patient et identique à celle des concentrés de plaquettes conventionnels non inactivés [période 1 = 26,9 × 1011 plaquettes / patient ; période 2 = 24,9 × 1011 plaquettes/patient]. Ainsi, durant cette période d’un an, il n’a pas été observé d’augmentation de l’utilisation des concentrés de plaquettes inactivés par Intercept® par rapport aux deux périodes précédentes d’un an où des concentrés de plaquettes conventionnels en plasma ou en solution additive et n’ayant pas été inactivés ont été transfusés. Cette efficacité hémostatique est obtenue avec des doses totales de plaquettes transfusées identiques dans les trois groupes. De plus, il n’y a pas d’augmentation significative du nombre de concentrés de globules rouges transfusés dans ces trois groupes au cours de périodes d’un an. Ces conclusions demeurent valables dans les trois sous-groupes des patients thrombopéniques d’oncohématologie et présentant un risque hémorragique plus élevé. Il n’y pas d’impact de l’utilisation des concentrés de plaquettes Intercept® sur la dose totale de plaquettes et de concentrés de globules rouges transfusés par rapport aux pratiques antérieures utilisant des concentrés de plaquettes non inactivés. Ces résultats favorables sur la sécurité [33] et l’efficacité des concentrés de plaquettes Intercept® ont également été rapportés par le Centre de Mongodinne en Belgique [34] Enfin, la qualité hémostatique des concentrés de plaquettes Intercept® lors d’intervention chirurgicales majeures chez des malades atteints de maladie de Glanzmann, une thrombopathie héréditaire sévère, y compris en présence d’anticorps antiplaquettaires, est la meilleure [35].

CONCLUSIONS

La transmission d’agents infectieux pathogènes par la transfusion du sang, des produits sanguins labiles et médicaments dérivés du sang a toujours été redoutée à juste titre par les malades et les médecins. Malgré toutes les précautions et la mise en place de mesures médicales et biologiques de sélection, la survenue inopinée de pathogènes nouveaux, émergents ou ré-émergents a entraîné des catastrophes médicales par contamination mortelle des receveurs de produits sanguins labiles ou de médicaments dérivés du sang, comme les hémophiles. La modification des populations des donneurs et des receveurs (consécutive aux modifications mondiales liées aux migrations des populations par la guerre, la famine ou les voyages et aux changements du climat qui entraînent des modifications de la répartition des animaux vecteurs, oiseaux, arthropodes et donc de la répartition des agents pathogènes microbiens) laisse toujours possible, voire certaine à terme, la survenue d’une nouvelle catastrophe infectieuse. Les dernières années ont confirmé cette possibilité avec l’émergence de nouveaux risques de transmission de pathogènes infectieux par la transfusion [16] : virus du Chikungunya à l’Ile de la Réunion, en Inde, en Italie ;

virus West Nile aux USA ; dengue aux Antilles, à Puerto-Rico et au sud des USA et en Asie du sud est ; maladie de Chagas en Amérique du sud, en Martinique et Guadeloupe et en Espagne.

Le danger le plus grand serait de retarder la mise en place de l’inactivation des pathogènes pour les produits sanguins labiles, sous prétexte d’attendre la preuve absolue pour mettre en place un système parfait. L’inactivation des pathogènes est la seule intervention préventive qui puisse régler en totalité ou en partie la stérilité et l’innocuité des produits transfusés en inactivant les agents pathogènes connus et inconnus. Historiquement, tous les médicaments dérivés du sang qui ont subi une méthode d’inactivation des pathogènes n’ont jamais transmis d’infection, comme l’albumine ou ont arrêté le cycle infernal de transmission d’une infection comme les facteurs de coagulation, le plasma, les immunoglobulines à partir du moment où l’inactivation des pathogènes a été mise en place. Cette mise en place de l’inactivation des pathogènes s’est faite au fur et à mesure des découvertes et des possibilités techniques. Il doit en aller de même pour l’inactivation des pathogènes des produits sanguins labiles. C’est chose faite pour le plasma en France et dans de nombreux pays, notamment en Europe.

Les techniques d’inactivation des pathogènes des concentrés de plaquettes se développent, l’une d’elles utilisant un procédé photochimique, Intercept®, a été autorisée par les autorités réglementaires et se met progressivement en place en France après une étude pilote régionale de faisabilité en routine. L’extension devra se faire région après région en tenant compte de la complexité logistique des régions plus grandes.

Il est souhaitable de l’étendre à tout le pays et de ne pas toujours attendre la venue d’éventuelles autorisations pour d’éventuelles nouvelles méthodes. D’autres pays suivent la même voie et l’inactivation des pathogènes des concentrés de plaquettes par cette méthode se déploie nationalement en Belgique, en Suisse, au Koweït, au Portugal, en partie en Espagne et dans le Bade-Wurtemberg en Allemagne.

La mise en place universelle de l’inactivation des pathogènes dans les produits sanguins labiles est une étape majeure et clé de la sécurité infectieuse en transfusion.

Cette étape finale est en vue. Déjà les médicaments dérivés du sang, le plasma thérapeutique et les concentrés de plaquettes sont ou peuvent être inactivés, réduisant considérablement le risque de transmission d’une infection. L’espoir d’inactiver les concentrés de globules rouges, qui représentent près des trois quarts des transfusions de produits sanguins labiles, est en vue et l’Etablissement Français du Sang y contribue en travaillant en partenariat avec l’industrie. Alors, la sécurité infectieuse apportée par l’inactivation des pathogènes sera considérablement amé- liorée en transfusion pour le présent et pour l’avenir inconnu et devra selon les souhaits de l’Organisation Mondiale de la Santé s’étendre à tous les pays.

REMERCIEMENTS

Je remercie mes collaborateurs de l’Etablissement Français du Sang-Alsace et de l’UMR_S949 INSERM-Université de Strasbourg et mes collègues des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg de leur aide constante et indispensable au cours de ces années. Je remercie Madame Claudine Helbourg pour son aide éditoriale.

BIBLIOGRAPHIE [1] Alter H.J., Klein H.G. — The hazards of blood transfusion in historical perspective.

Blood , 2008, 112 , 2617-2626.

[2] Alter H.J. — Pathogen reduction: a precautionary principle paradigm.

Transfus. Med. Rev. , 2008, 22 , 97-102.

[3] Klein H.G., Glynn S.A., Ness P.M., Blajchman M.A. — Research opportunities for pathogen reduction/inactivation of blood components: summary of an NHLBI workshop. Transfusion , 2009, 49 , 1262-1268.

[4] Klein H.G., Anderson D., Bernardi M.-J., Carey W., Hoch J.S., Robitaille N., Sivilotti M.L.A., Smaill F. — Pathogen inactivation: making decisions about new technologies — Preliminary report of a consensus conference. Vox Sang , 2007, 93 , 179-182.

[5] Webert K.E., Cserti C.M., Hannon J., Lin Y., Pavenski K., Pendergrast J.M., Blajchman M.A. — Proceedings of a consensus conference: pathogen inactivation — Making decisions about new technologies. Transfus. Med. Rev. , 2008, 22 , 1-34.

[6] Benjamin R.J., McCullough J., Mintz P.D., Snyder E., Sponitz W.D., Rizzo R.J., Wages D., Lin J.-S., Wood L., Corash L., Conlan M.G. — Therapeutic efficacy and safety of red blood cells treated with a chemical process (S-303) for pathogen inactivation : a phase III clinical trial in cardiac surgery patients. Transfusion , 2005, 45 , 1739-1749.

[7] Mufti N.A., Erickson A.C., North A.K., Hanson D., Sawyer L., Corash L.M., Lin L. — Treatment of whole blood (WB) and red blood cells (RBC) with S-303 inactivates pathogens and retains in vitro quality of stored RBC. Biologicals, 2010 , 38 , 14-19.

[8] Cazenave J.-P. — Inactivation des agents pathogènes dans les produits sanguins labiles :

sécurité transfusionnelle et impact économique. Bull. Acad. Natle Méd. , 2006, 190 , 169- 188.

[9] Naegelen C., Isola H., Dernis D., Maurel J.P., Tardivel R., Bois S., Vignoli C., Cazenave J.-P. — Evolution of techniques for preparation of labile blood products (LBP): pathogen inactivation in LBP. Transfus. Clin. Biol , 2009, 16 , 179-189.

[10] Stramer S.L., Hollinger E.B., Katz L.M., Kleinmann S., Metzel P.S., Gregory K.R., Dodd R.Y. — Emerging infectious disease agents and their potential threat to transfusion safety. Transfusion , 2009, 49 Suppl 2 , 1S-29S.

[11] The mirasol clinical evaluation study group. — A randomized controlled clinical trial evaluating the performance and safety of platelets treated with MIRASOL pathogen reduction technology. Transfusion, 2010, DOI: 10.1111/j.1537-2995.2010.02694.x [12] Mohr H., Steil L., Gravemann U., Thiele T., Hammer E., Greinacher A., Müller T.H., Völker U. — A novel approach to pathogen reduction in platelet concentrates using short-wave ultraviolet light. Transfusion , 2009, 49 , 2612-24.

[13] Alter H.J., Houghton M. — Hepatitis C virus and eliminating post-transfusion hepatitis.

Nature Med.,. 2000, 6 , 12-16.

[14] Zappa A., Amendola A., Romano L., Zanetti A. — Emerging and re-emerging viruses in the era of globalisation. Blood Transfus, 2009 , 7, 167-171.

[15] Heneine W., Kuehnert M.J. — Preserving blood safety against emerging retroviruses.

Trans- fusion, 2006, 46, 1276-1278.

[16] Pozzetto B., Berthelot P. — Virus émergents et ré-émergents et nouveaux risqué nosocomiaux. Hygiènes, 2008, 16, 1-11.

[17] Centre de collaboration national des maladies infectieuses du Canada (CCNMI). — XMRV : virus en quête d’une maladie ou nouveau virus qui cause le cancer de la prostate et/ou le syndrome de fatigue chronique? Papier Mauve , 2010, 15 , 1-7.

[18] Katz L.M., Dodd R.Y. — Human herpesvirus-8: what (not) to do redux ?

Transfusion , 2010, 50, 959-962.

[19] Forland F., Jansen A., De Carvalho Gomes H., Nokleby H., Escriva A-B., Coulombier B., Giesecke J. — Risk assessement on Q fever. European Centre for Disease Prevention and Control , 2010, DOI: 10.2900/28860 [20] Charrel R.N., De Lamballerie X., Raoult D. — Chikungunya outbreaks — the globalization of vectorborne diseases. N. Engl. J. Med. , 2007, 22, 356, 769-71.

[21] Petersen L.R., Busch M. P. — Transfusion-transmitted arboviruses.

Vox Sang., 2010, 98,495- 503.

[22] Gallian P., De Lamballerie X., De Micco P., Andreu G. — Le virus West Nile : généralités et implications en transfusion sanguine. Transfus. Clin. Biol. , 2005, 12, 11-7.

[23] Rasongles P., Angelini-Tibert M.F., Simon P., Currie C., Isola H., Kientz D., Slaedts M., Jacquet M., Sundin D., Lin L., Corash L., Cazenave J.P. — Transfusion of platelet components prepared with photochemical pathogen inactivation treatment during a Chikungunya virus epidemic in Ile de La Reunion. Transfusion , 2009, 49 , 1083-1091.

[24] Liumbruno G.M., Calteri D., Petropulacos K., Mattivi A., Po C., Macini P., Tomasini I., Zucchelli P., Silvestri A.R., Sambri V., Pupella S., Catalano L., Piccinini V., Calizzani G., Grazzini G. — The Chikungunya epidemic in Italy and its repercussion on the blood system. Blood Transfus. , 2008, 6 , 199-210.

[25] Cazenave J.P., Waller C., Kientz D., Mendel I., Lin L., Jacquet M., Propst M., Liu W., Corash L., Sundin D., Defoin L., Messe N., Osselaer J.C. — An active hemovigilance program characterizing the safety profile of 7483 transfusions with plasma components prepared with amotosalen and UVA photochemical treatment. Transfusion , 2010, 50 , 1210- 1219.

[26] Snyder E., Raife T., Lin L., Cimino G., Metzel P., Rheinschmidt M., Baril L., Davis K., Buchholtz D.H., Corash L., Conlan M.G. — Recovery and life span of 111indiumradiolabeled platelets treated with pathogen inactivation with amotosalen HCl (S-59) and ultraviolet A light. Transfusion, 2004, 44 , 1732-40.

[27] Van Rhenen D., Gulliksson H., Cazenave J.P., Pamphilon D., Ljungman P., Kluter H., Vermeij H., Kappers-Klunne M., De Greef G., Laforet M., Lioure B., Davis K., Marblie S., Mayaudon V., Flament J., Conlan M., Lin L., Metzel P., Buchholz D., Corash L. — Transfusion of pooled buffy coat platelet components prepared with photochemical pathogen inactivation treatment : the euroSPRITE trial. Blood , 2003, 101 , 2426-233.

[28] Janetzko K., Cazenave J.P., Kluter H., Kientz D., Michel M., Beris P., Lioure B., Hastka J., Marblie S., Mayaudon V., Lin L., Lin L.S., Conlan M.G., Flament J. — Therapeutic efficacy and safety of photochemically treated aphaeresis platelets processed with an optimized integrated set. Transfusion , 2005, 45 , 1443-1452.

[29] McCullough J., Vesole D.H., Benjamin R.J., Slichter S.J., Pineda A., Snyder E., Stadtmauer E.A., Lopez-Plaza I., Coutre S., Strauss R.G., Goodnough L.T., Fridey J.L., Raife T., Cable R., Murphy S., Howard F., Davis K., Lin J.S., Metzel P., Corash L., Koutsoukos A., Lin L., Buchholz D.H., Conlan M.G. — Therapeutic efficacy and safety of platelets treated with a photochemical process for pathogen inactivation: the SPRINT Trial.

Blood , 2004, 104 , 1534-1541.

[30] Murphy S., Snyder E., Cable R., Slichter S.J., Strauss R.G., McCullough J., Lin J.S., Corash L., Conlan M.G., Sprint Study Group. — Platelet dose consistency and its effect on the number of platelet transfusions for support of thrombocytopenia: analysis of the SPRINT trial of platelets photochemically treated with amotosalen HCl and ultraviolet A light.

Transfusion , 2006, 46 , 4624-4633.

[31] Cazenave J.P., Waller C., Mendel I., Kientz D., Kandel G., Raidot J.P., Wiesel M.L., Isola H. — Clinical experience with pathogen inactivation of platelet components for transfusion support. In: Scharf R.E. ed. Progress and Challenges in Transfusion Medicine, Hemostasis and Hemotherapy. State of Art 2008. Karger: Baden Baden, Germany. 2008, pp 248-263.

[32] Cazenave J.P., Isola H., Waller C., Mendel I., Kientz D., Laforet M., Raidot J.P., Kandel G., Wiesel M.L., Corash L. — Use of additive solutions and pathogen inactivation treatment of platelet components in a regional blood center: impact on patient outcomes and component utilization during a 3 year period. Transfusion, 2011, 51 , 622-629.

[33] Osselaer J.C., Cazenave J.P., Lambermont M., Garraud O., Hidajat M., Barbolla L., Tardivel R., Defoin L., Waller C., Mendel I., Raidot J.P., Kandel G., De Meuter R., Fabrigli P., Dehenau D., Arroyo J.L., Padron F., Gouezec H., Corral M., Jacquet M., Sundin D., Lin L., Corash L. — An active haemovigilance programme characterizing the safety profile of 7437 platelet transfusions prepared with amotosalen photochemical treatment.

Vox Sang, 2008, 94 , 315-323.

[34] Osselaer J.C., Doyen C., Defoin L., Debry C., Goffaux M., Messe N., Van Hooydonk M., Bosly A., Lin J.S., Lin L., Corash L. — Universal adoption of pathogen inactivation of platelet components: impact on platelet and red blood cell component use. Transfusion, 2009, 49 , 1412-1422.

[35] Cazenave J.P., Wiesel M.L., Mendel I., Faradji A., Mangin S., Perricard B., Kientz D. — Intensive and successful transfusion of pathogen inactivated Intercept® platelet concentrates for major gynecological and obstetrical surgery in Glanzmann thrombasthenia type 1 with the Gypsy mutation. Vox Sang , 2008, 95(suppl.1) , 306.

DISCUSSION

M. Jacques CAEN

Pourquoi cette différence entre les dix-sept régions de France et d’Outre Mer ? Pourquoi tous n’utilisent-ils pas Intercept ? Pourquoi la France ne suit-elle pas toutes les indications utilisées en Belgique ?

Je vous rappelle que le procédé Intercept a subi un développement de type « pharmaceutique » avec des essais cliniques avant d’être autorisé en France par l’Afssaps. Il a pu être déployé dans les établissements régionaux de transfusion des départements d’Outre Mer pour assurer la sécurité des transfusions de plaquettes en période d’épidémie, Chikungunya à la Réunion et dengue aux Antilles. Parallèlement, la Région Alsace a mis en place l’inactivation des plaquettes et du plasma, afin de tester la faisabilité de la technique, grandeur réelle, d’utilisation en routine et en étudiant l’efficacité et la sécurité transfusionnelles. Après plus de cinq années d’utilisation chez tous les malades de la région, les déclarations d’incidents faites dans le cadre de l’hémovigilance nationale ont montré une réduction des événements indésirables et l’absence d’incidents bactériens chez les receveurs de concentrés plaquettaires. Alors que tout le plasma thérapeutique transfusé en France a subi une méthode d’inactivation, ce n’est pas le cas des concentrés plaquettaires. La décision d’étendre le procédé Intercept pour les plaquettes à d’autres régions n’a pas été encore prise par l’Etablissement Français du Sang, alors que le produit sanguin est approuvé, utilisé et figure à la nomenclature officielle avec un prix fixé par le Ministère de la Santé. Prix, qui en l’occurrence est le même que celui des concentrés plaquettaires conventionnels non traités. L’inactivation permet de ne pas supporter un coût supplémentaire lié à la recherche d’anticorps anti-cytomégalovirus ou à l’irradiation des plaquettes, qui ne sont plus nécessaires. Il ne semble pas rationnel de ne pas utiliser une technique qui existe et a été éprouvée par un suivi important et documenté après sa mise en application (plus de cent cinquante mille produits inactivés par Intercept pendant plus de cinq ans). Il semblerait plus judicieux d’étendre l’inactivation des plaquettes, région après région, en commençant par celles où les risques épidémiologiques sont plus importants (arbovirus autochtones, moustiques du pourtour méditerranéen ; grande métropole parisienne) et de ne pas attendre d’être dans une situation d’urgence. Il y a certainement aussi des réticences humaines au changement, des priorités autres pour certains et enfin un coût significatif. Manifestement dans ce domaine la Belgique a franchi le pas après promulgation d’un décret royal. La Suisse vient d’en faire autant a la suite d’incidents bactériens mortels et d’autres pays européens s’y mettent progressivement.

<p>* Membre correspondant de l’Académie nationale de médecine. Etablissement Français du SangAlsace, UMR_S949 INSERM-Université de Strasbourg, Strasbourg, France. EFS-Alsace, BP 36, 10 rue Spielmann, 67065 Strasbourg cedex ; e-mail : jeanpierre.cazenave@efs-alsace.fr Tirés-à-part : Professeur Jean-Pierre Cazenave, à l’adresse ci-dessus. Article reçu le 8 mars2010, accepté le 29 mars 2010</p>

Bull. Acad. Natle Méd., 2010, 194, no 9, 1707-1720, séance du 14 décembre 2010