Communication scientifique
Session of 12 mai 2009

Introduction

MOTS-CLÉS : . circulation placentaire. développement embryonnaire et foetal. placenta
KEY-WORDS : maternal-fetal exchange . placenta. placental circulation

Christian Nezelof *

INTRODUCTION

Christian NEZELOF *

Depuis déjà longtemps, les taxonomistes ont séparé dans la procréation :

— les ovipares, les êtres pondeurs d’œufs complets, abandonnés dans la nature, possédant les réserves nutritives nécessaires à la survie de leurs petits, — les vivipares, les êtres qui portent en eux dans une poche ou un organe spécialisé, l’utérus, pendant une période de temps limité, leur descendance, leur assurant un abri plus sûr et une alimentation régulée en permanence, laquelle sera relayée après la naissance par l’allaitement. Par définition, les mammifères sont des vivipares.

Cette distinction sous-entend que chez les vivipares, en particulier les primates, les relations fœto-maternelles passent par un organe intermédiaire régulateur, un médiateur , le placenta .

Etant à l’embryon et au fœtus ce qu’est la fusée porteuse au missile interplanétaire, le placenta est un organe indispensable au changement de monde et à l’installation d’une vie terrestre et aérienne. Dans les efforts de procréation assistée, on a pu jusqu’à présent remplacer les gamètes, mais ni l’utérus ni surtout le placenta n’ont trouvé leur substitut.

Comme beaucoup de structures embryonnaires (arcs branchiaux, pronephros, mesonephros etc.) le placenta est une structure provisoire, victime à la naissance de ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui, une apoptose. Celle-ci est gigantesque et symbolise en même temps la vie et la mort. De cette ambiguïté sont nées des croyances et des approches culturelles nombreuses et variées. Dévoré sur place par nombre d’animaux, accroché aux branches d’un banian en Extrême-Orient, enterré sous les pas d’une maison en Afrique du nord, dispersé entre les firmes de cosmé- tologie ou de pharmacologie ou simplement jeté à la poubelle, le placenta mérite un autre regard.

Tout proche de l’embryon dont il partage l’origine et possède le double (maternel et paternel) capital génétique, le placenta est l’écho d’un lointain passé, sachant encore partiellement utiliser des voies métaboliques anaérobiques et exprimer des molécules provirales présentes sur terre il y a plusieurs dizaines de millions d’années. Il est surtout l’intime compagnon de l’embryon ou du fœtus et le fidèle témoin de son état et de ses avatars. Sous cet angle ; il est à la fois le notaire et l’impresario de l’embryon, illustrant parfaitement le célèbre aphorisme de Geoffroy Saint-Hilaire : l’ontogenèse récapitule la phylogenèse.

Comme l’embryon, le placenta possède ses propres tissus. Ceux-ci sont originaux et ne réapparaissent que dans des conditions pathologiques, dans des tumeurs, les tératomes où leur présence (en particulier le trophoblaste) signe à tout coup la malignité.

Ces structures originales, personnelles au placenta hémochorial sont :

Une vascularisation lacunaire, Des vestiges vitellins, Un mésenchyme très primitif, le chorion , où des chercheurs ont récemment trouvé des cellules souches, Un tissu épithélial, nommé très judicieusement le trophoblaste , divisé en :

trophoblaste extravilleux , invasif, ancrant l’œuf à l’utérus et assurant l’ouverture ou la fermeture des artères nourricières et nouant avec elles des relations si intimes qu’elles facilitent les conflits ou les complicités immunitaires, — trophoblaste villeux , habillant les innombrables villosités choriales, qui vont « faire leur marché » dans le sang maternel C’est la barrière fœto-placentaire . Ce n’est pas un simple passe-plat. Elle n’est ni étanche ni passive. Elle est le siège d’une fine régulation, laquelle varie avec le terme de la grossesse. C’est ce sujet que Danièle Evain-Brion et moi avec le concours de Jean-Michel Foidart, Philippe le Bouteiller et Elisabeth Eléfan, proposons à votre attention ce soir.

 

<p>* Membre de l’Académie nationale de médecine</p>

Bull. Acad. Natle Méd., 2009, 193, no 5, 1015-1016, séance du 12 mai 2009