Résumé
L’histoire des femmes chirurgiens est indissociable de deux combats : celui des femmes médecins, et à ce sujet les manuels de l’inquisition sont formels : « toute personne du sexe féminin qui se mêle de traiter les malades est réputée sorcière » ; mais aussi le combat des chirurgiens qui s’est déroulé au Moyen-âge entre les médecins lettrés dépendant de l’Université et les chirurgiens considérés comme manuels. Leur histoire remonte à l’antiquité. Il y a eu une importante régression au Moyen-Âge car la chirurgie était interdite aux femmes, à moins qu’elles ne reprennent la pratique de leur mari décédé ou qu’un jury compétent ne les en juge aptes. Une régression s’installe ensuite pendant 8 siècles car les femmes ne pouvaient entrer à l’Université. Le XIXe siècle sera celui de la conquête. Les femmes persistent, quitte à se mettre en danger comme se déguiser en hommes pour pratiquer, ou s’illustrer sur les champs de bataille. Elles devront gagner le droit à l’externat, à l’internat puis au clinicat. Certains de nos collègues ont lutté courageusement avec elles, d’autres ont agi contre elles de manière active, violente et sexiste. Le XXe siècle sera un long parcours pour acquérir le professorat et les postes de responsabilité. Jusqu’aux années 70 peu de femmes deviennent chirurgiens. J’ai commencé mes études cette année clôturée par les évènements de 1968, 30 % des étudiants étaient des femmes. Très peu voulaient devenir chirurgiennes. Mon rang de classement à l’internat de 1973 m’a ouvert cette possibilité et j’ai été la première femme interne dans les services. Mes maîtres faisaient peu de différences avec mes collègues masculins vis-à-vis desquels je m’imposais d’être irréprochable. Un peu grâce à eux, j’ai beaucoup travaillé avec une excellente formation qui m’a permis de gravir les échelons jusqu’à souhaiter devenir professeur et surtout créer un service de novo. Ce fut alors des années très difficiles, plus soutenue par mes collègues chirurgiens que par les autorités hospitalières et/ou universitaires médicales. Mon parcours en chirurgie viscérale pédiatrique m’a aidée car je connaissais le modèle « normal » de fonctionnement. Il a fallu 17 ans pour arriver à la même situation que les autres services de chirurgie et ne rencontrer que les mêmes problèmes qu’eux. Actuellement la proportion des chirurgiennes dépasse 50 %. Il reste un point d’interrogation sur l’égalité devant les postes universitaires ou ceux à responsabilité.
Summary
The history of women surgeons is inseparable from 2 struggles: that of women doctors, and on this subject the Inquisition manuals are formal: “any person of the female sex who meddles in treating the sick is reputed to be a “witch”; but also the struggle of the surgeons which took place in the Middle Ages between the literate doctors who depended on the University and the surgeons who were considered to be manual. Their history dates back to antiquity. There was an important regression in the Middle Ages because surgery was forbidden to women, unless they took over the practice of their deceased husbands or a competent jury judged them fit. A regression followed for 8 centuries because women could not enter the University. The 19th century will be the one of conquest. Women persisted, even if it meant putting themselves in danger, such as disguising themselves as men to practice, or illustrating themselves on the battlefield. They had to win the right to externship, internship and then to the clinic. Some of our colleagues fought courageously with them, others acted against them in an active, violent and sexist way. The 20th century will be a long way to acquire the professorship and positions of responsibility. Until the 70s few women became surgeons. I started my studies in the year that ended with the events of 1968, 30% of the students were women. Very few wanted to become surgeons. My ranking at the 1973 internship opened this possibility and I was the first woman intern in the department. My teachers made little difference to my male colleagues towards whom I made a point to be irreproachable. A little thanks to them, I worked a lot with an excellent training that allowed me to climb the ladder until I wished to become a professor and above all to create a de novo service. These were very difficult years, more supported by my surgical colleagues than by the hospital and/or university medical authorities. My background in pediatric visceral surgery helped me because I knew the “normal” model of operation. It took 17 years to get to the same situation as other surgical departments and only encounter the same problems as them. Currently the proportion of female surgeons is over 50%. There is still a question mark over the equality in front of the academic positions or those with responsibility.
Accès sur le site Science Direct : https://doi.org/10.1016/j.banm.2021.05.019 (Correspondance)
Accès sur le site EM Consulte (Correspondance)
(b) UFR de Médecine, Université de Paris, Paris, France
Bull Acad Natl Med 2021;205:954-61. Doi : 10.1016/j.banm.2021.05.019