Communication scientifique
Séance du 11 mars 2003

État et assurance maladie

MOTS-CLÉS : assurance maladie. politique gouvernementale.
State and health insurance
KEY-WORDS : insurance, health. public policy.

M. Lagrave

Résumé

Les relations entre l’État et l’assurance maladie traversent une crise institutionnelle et financière qui vient de conduire le Gouvernement à se prononcer en faveur d’une nouvelle gouvernance du système de santé et d’assurance maladie. La crise institutionnelle tient à la confusion des rôles respectifs de l’État et des partenaires sociaux. La démocratie sociale voulue par le plan français de 1945 et l’autonomie de gestion de la branche de l’assurance maladie instituée par les ordonnances de 1967 ont échoué. Le paritarisme de gestion (syndicats et MEDEF) a volé en éclats. L’État a dû intervenir par défaut. La crise financière est mise en lumière par l’évolution de l’ONDAM (objectif national des dépenses d’assurance maladie) qui figure dans la loi annuelle de financement de la sécurité sociale. La dérive des dépenses effectives par rapport à l’ONDAM voté est constante et s’aggrave. La problématique d’une réforme passe par le lien à établir entre la démocratie sociale à restaurer (les partenaires sociaux et conventionnels) et la démocratie politique (le Parlement et le Gouvernement) pour aboutir à une ‘‘ démocratie contractuelle ’’. Le Gouvernement a annoncé un ‘‘ ONDAM sincère et médicalisé ’’, ce qui suppose des outils établis en concertation. Le niveau régional pourrait devenir un échelon de régulation, avec un large conseil régional de santé. Enfin, une magistrature des comptes serait indispensable pour aller au-delà de l’aspect juridique et prendre en considération les retombées économiques de l’assurance maladie. Le rôle et les attributions de la commission des comptes de la sécurité sociale devraient être renforcés en ce sens.

Summary

The relationship between the State and the health insurance passes trough an institutional and financial crisis, leading the government to decide a new governance of the health care system and of the health insurance. The onset of the institutional crisis is the consequence of the confusion of the roles played by the State and the social partners. The social democracy installed by the french plan in 1945 and the autonomy of management of the health insurance established by the 1967 ordinances have failed. The administration parity (union and MEDEF) flew into pieces. The State had to step in by failing. The light is put on the financial crisis by the evolution of ONDAM (national objective of the health insurance expenses) wich appears in the yearly law financing social security. The adrift of the real expenses as compaired to the passed ONDAM bill is constant and worsening. The question of reform includes the link between social democracy to be restaured (social partners) and political democracy (Parliament and Government) to establish a contractual democracy. The Government made the announce of an ONDAM sincere and medically oriented, based on tools agreed upon by all parties. The region could become a regulating step involving a regional health coucil. An accounting magistrate would be needed to consider not only the legal aspect but to include economic fallouts of health insurance. The role and the missions of the social security accounting comittee should be reinforced.

INTRODUCTION

Les relations entre l’État et l’assurance maladie présentent un double intérêt.

D’abord, un intérêt conjoncturel. C’est un sujet d’actualité. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 se prononce pour une nouvelle gouvernance du système de santé et d’assurance maladie. Le Gouvernement a demandé à l’ensemble des partenaires d’établir un état des lieux partagé. Le groupe de travail, piloté par Madame Rolande Ruellan, ma collègue à la Cour, vient de déposer son rapport qui s’en tient à de simples constats, sans proposer de solutions. C’était sa mission. A partir de ces constats, le Gouvernement présentera des options de réforme qui feront l’objet d’une large concertation. Un projet de loi sera déposé avant l’été 2003.

Mais le thème a également une résonance plus profonde. Les relations entre l’État et l’assurance maladie traversent une crise institutionnelle qui se double d’une crise financière. Cette situation est significative des dangers auxquels est exposée la sécurité sociale dans son ensemble dont l’objet est de « débarrasser les travailleurs de l’incertitude du lendemain », selon les termes de l’ordonnance fondatrice du 4 octobre 1945.

Il s’agit donc d’exposer de mon point de vue les éléments de cette double crise avant de tenter une problématique de la réforme, telle qu’on peut l’envisager aujourd’hui.

LA CRISE INSTITUTIONNELLE ET FINANCIÈRE 1 — Sur le plan institutionnel, les rôles de l’État et de l’assurance maladie sont devenus trop imbriqués. Cette situation a entraîné une confusion des responsabilités.

Cette opacité n’est pas l’effet du hasard, mais bien le fruit de l’histoire. Les définitions elles-mêmes sont devenues floues et nécessitent une clarification.

L’État, ce n’est pas la seule administration, ce ne sont pas les bureaux, comme le soulignait le président Pierre Laroque. C’est le Parlement et le Gouvernement garants de l’intérêt général. L’État a une fonction régalienne dans la politique de santé publique.

L’assurance maladie, c’est le domaine des partenaires sociaux qui en sont les gestionnaires. Elle ne se confond pas avec la santé publique, mais elle en est l’un des instruments. Elle correspond en effet à la garantie socialisée.

Cette répartition des pouvoirs devrait être claire mais elle s’est obscurcie au fil de l’histoire depuis 1945, avec deux étapes, ou deux pulsions, qui se traduisent toutes deux par des imperfections qui ont engendré un climat de méfiance.

La première pulsion pour l’assurance maladie, c’est le plan français de sécurité sociale établi par Pierre Laroque en 1945. L’objectif était de confier le pilotage aux partenaires sociaux, représentants des assurés par la voie de l’élection.

Pierre Laroque voulait instituer une démocratie sociale, préfiguration d’un nouvel ordre social. Ce fut une espérance déçue, comme le confiait le père fondateur. C’était, à ses yeux, le grand regret de son entreprise.

On sait que les ordonnances de 1967 ont fait éclater la sécurité sociale en trois branches, l’assurance maladie, l’assurance vieillesse et les prestations familiales, coiffées chacune par une caisse nationale. La préoccupation de l’époque était de mettre sous surveillance l’assurance maladie, dont les dépenses progressaient plus rapidement que le PIB, comme l’avaient mis en évidence les commissions du 5e plan. L’ouverture de nos frontières sur le marché commun obligeait à considérer l’assurance maladie comme une garantie sociale, sans doute, mais aussi comme une charge pour l’économie. Le rapport Piketty du CNPF insistait sur ce point. Les conseils d’administration devinrent paritaires, composés pour moitié des représentants des syndicats de salariés et pour moitié des entreprises. La parité reflétait la double nature de la sécurité sociale, garantie et charge. Or, les syndicats étaient majoritaires à l’origine. L’élection fut supprimée au profit de la désignation. Bref, la démocratie sociale originelle avait disparu et le rétablissement des élections en 1982, d’ailleurs sans lendemain, n’a en rien changé la donne.

En fait, les ordonnances de 1967 qui voulaient consacrer une gestion autonome de chaque branche, l’État se tenant à distance, ont abouti à l’inverse. Les partenaires sociaux n’ont pas été en mesure de prendre ensemble la responsabilité de la gestion, pas plus que de l’équilibre financier qui était attendu.

L’administration s’est introduite, par défaut, pour gérer le système et est allée au-delà du rôle de gardien juridique qu’on voulait lui assigner.

La crise était inévitable. Elle a abouti à la décision récente du MEDEF de ne plus siéger dans les conseils d’administration. Le paritarisme a volé en éclats, au grand dam des syndicats de salariés, y compris la CGT qui avait pourtant toujours pris ses distances à l’égard des ordonnances Jeanneney de 1967.

2 — L’impasse dans laquelle s’est engagée la démocratie sociale a conduit progressivement à la démocratie politique et au glissement de la gestion vers le financement. Ce ne fut pas sans mal que le Parlement réussit à s’introduire dans le jeu, du fait de l’hostilité des partenaires sociaux. Plusieurs tentatives avortèrent : l’amendement Fontanet, en 1968, qui préconisait la présentation d’un rapport au Parlement sur l’évolution des dépenses de l’année précédente.

L’amendement est resté lettre morte. En 1980, l’amendement Chinaud-Labbe prévoyait que le Parlement se prononcerait chaque année sur l’effort social de la nation par un vote. Il n’eut pas plus de succès. Enfin, en 1987, la proposition de la loi organique d’Ornano, pourtant anodine puisqu’elle se limitait au vote sur l’évolution des régimes de sécurité sociale, souleva un tollé chez les syndicats. Adoptée par le Parlement, elle fut déclarée inconstitutionnelle et invalidée.

Ce laborieux cheminement aboutit à la loi du 25 juillet 1994 qui constitue le premier pas en avant. La loi prévoit que le gouvernement présentera chaque année un rapport, à la fois rétrospectif et prévisionnel, sur les régimes obligatoires de sécurité sociale. Ce rapport comportera des annexes comptables et le rapport de la Cour des comptes sur l’analyse des comptes. Mais l’ensemble des documents donne lieu à un débat non sanctionné par un vote du Parlement.

L’achèvement de cette évolution est marqué par la loi du 22 juillet 1996 qui crée la loi de financement de la sécurité sociale. Ce n’est pas la réplique de la loi de finances de l’État. Elle est plus prudente. Elle fixe seulement des objectifs de dépenses et détermine des ressources en regard. Mais il ne s’agit pas de se prononcer sur un équilibre financier entre des objectifs et des ressources. On pouvait néanmoins imaginer que les échecs de la démocratie sociale en matière de gestion pourraient s’effacer devant une tentative de verrouillage financier par le Parlement.

Pour l’assurance maladie, l’objectif de dépenses de l’assurance maladie, l’ONDAM , devait être l’instrument de cette remise en ordre. Il est divisé en deux sous-enveloppes, celle de l’hôpital et du médicament, à répartir par l’État, celle des soins de ville qui est l’affaire des caisses nationales d’assurance maladie et des partenaires conventionnels de santé. Mais la portée de l’ONDAM est appréciée d’une manière divergente par les partenaires sociaux.

Il serait opposable selon le MEDEF, mais indicatif selon les partenaires sociaux. Surtout, sauf en 1997, l’ONDAM a été systématiquement dépassé au cours des dernières années. La loi de financement pour 2003 a été conduite pour la première fois à réviser l’ONDAM de 2002. Le chiffre retenu pour 2003 est de 123,5 milliards d’euros, pour un ‘‘ budget ’’ global de la sécurité sociale de 330 milliards d’euros. A titre de comparaison, le budget de l’État est nettement inférieur (272 milliards d’euros). On peut donc dire que l’assurance maladie représente près de la moitié du budget de l’État.

On voit que l’ONDAM est entaché d’incertitudes. Il exprime surtout, en 2003, la volonté de maintenir le déficit de l’assurance maladie un peu en dessous de 7 milliards d’euros, soit 45 milliards de francs.

Mais cette crise financière peut recevoir une explication exogène. Les critères de Maestricht imposent des contraintes à nos finances publiques prises dans leur totalité : État, collectivités territoriales, sécurité sociale et hôpitaux. Les objectifs de dépenses de la loi de financement, et singulièrement l’ONDAM, jouent le rôle de variable d’ajustement dans le calcul. La signification de l’ONDAM est détournée. La coloration financière l’emporte sur la nature sanitaire.

PROBLÉMATIQUE D’UNE RÉFORME

Ce qu’il faut écarter Ce qu’il faut accorder Ce qu’il faudrait ajouter Les projets de banalisation de l’assurance

La mise en concurrence des caisses avec les assureurs privés

Cette formule revient à écarter à la fois la démocratie sociale et la démocratie politique. Elle le ferait sans profit. La concurrence ne pourrait porter que sur les charges de gestion administrative. On ne conçoit pas que les prestations y soient soumises. Or la gestion administrative de la branche maladie du régime général ne représente que 3 ou 4 % de la masse financière totale. Le coût de gestion des assurances complémentaires est sensiblement plus élevé.

Une autre évolution proposée consisterait à supprimer la démocratie sociale

Un rapport intitulé ‘‘ Santé 2010 » du Plan, en 1993, évoquait l’épuisement des acteurs collectifs ’’ et la création ‘‘ d’agences régionales de santé ou siégeraient les représentants élus des assurés et des professionnels de santé ’’. En 1991, une ancienne ministre rappelait qu’elle avait proposé en 1977 la suppression de la gestion paritaire pour la remplacer par des caisses régionales gérées par des administrateurs élus sur des listes politique, syndicales et associatives. Ce serait substituer une pseudo démocratie politique à la démocratie sociale. Un périodique titrait d’une façon évocatrice ‘‘ Faut-il brûler la CNAM ’’ ?

La démocratie contractuelle

En réalité, les deux formes de démocratie sont légitimes, mais elles sont juxtaposées, parfois conflictuelles . Il faut les accorder par une nouvelle initiative : « la démocratie contractuelle ».

Les orientations apparaissent plus clairement au niveau national qu’au plan régional.

Au niveau national

Les germes d’une ’’nouvelle gouvernance ’’ figurent dans le rapport du Gouvernement annexé à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.

Le Gouvernement se prononce pour un « ONDAM sincère et médicalement justifié » , ce qui revenait à avouer qu’il ne l’était pas jusqu’ici, comme l’avaient dénoncé les parlementaires, l’ensemble des acteurs, professionnels de santé, syndicats et la Cour des comptes. L’ONDAM serait désormais fondé sur l’analyse de l’évolution des soins . Des outils établis en concertation, comme le coût par pathologie , devraient être développés.

Dans la même optique, le groupe de travail présidé par Madame Ruellan, constate les ambiguïtés relatives à la conception du ‘‘ panier de soins ’’. Il y a deux catégories : le panier de soins autorisés, sur le plan de la santé publique, et le panier de soins pris en charge par l’assurance maladie. La responsabilité de fixer le panier de soins est ainsi partagée entre l’État (nomenclature des actes, tarifs opposables du TIPS et prix administré des médicaments) et les parties conventionnelles qui fixent la valeur des lettres-clés. Or, une enveloppe ‘‘ soins de ville ’’ a été ménagée au sein de l’ONDAM. Les deux responsables doivent donc harmoniser leur action pour œuvrer conjointement au respect de cette enveloppe.

Surtout, le Gouvernement s’engage à signer avec les partenaires sociaux des « conventions d’objectifs et de gestion » pluriannuelles qui porteront non seulement sur la gestion administrative mais aussi sur la régulation des prestations.

Au niveau régional

Les difficultés sont plus grandes, au moins dans l’immédiat.

Les agences régionales de l’hospitalisation sont une tentative intéressante de réunir dans un même organisme les caisses d’assurance maladie et les directions régionales et départementales des affaires sanitaires et sociales. L’État, de tuteur, devient partenaire. Sans doute les ARH éprouvent-elles du mal à s’imposer parce qu’elles heurtent les catégories juridiques classiques, mais elles sont dans le sens de l’histoire, celui de la santé contractuelle et non plus administrée.

Il faut aller au-delà dans la connaissance des besoins au niveau de la région qui pourrait être un échelon de régulation . Or, il n’existe pas de comptes régionaux de l’assurance maladie, comme le déplorait Jean Marmot, quant il était secrétaire général de la commission des comptes.

Il ne s’agit évidemment pas de promouvoir 26 politiques de santé qui briseraient d’ailleurs l’assurance maladie unitaire. Un budget régional de santé n’aurait pas de sens. En revanche, une fonction consultative pourrait être dévolue à des conseils régionaux de santé, avec la participation des partenaires conventionnels, des services
déconcentrés de l’État, mais aussi des élus locaux. Il serait dangereux d’aller plus loin en termes de régionalisation.

Pour une magistrature des comptes

Enfin, il manque un élément important dans les fonctions que devrait assumer l’État. Il n’existe pas de magistrature des comptes .

La Cour des comptes a une fonction délimitée par la loi : elle doit donner son avis chaque année sur l’exécution de la loi de financement de l’année précédente. Elle juge les comptes des établissements publics (caisses nationales et ARH) mais les hôpitaux relèvent de la compétence de chambres régionales des comptes. Il n’y a pas unité de vues.

En fait, on pourrait transposer la suggestion que M. Bloch-Lainé faisait il y a plus de vingt ans pour la réforme de l’entreprise.

Il faudrait une magistrature qui dise le vrai et non le droit .

La commission des comptes de la sécurité sociale, ranimée en 1986 après une longue léthargie aurait pu jouer ce rôle. L’État et les partenaires sociaux et conventionnels en sont membres. Mais la commission ne dit pas les comptes qui sont du ressort de la seule administration. Elle se borne à les commenter.

Une évolution pourrait se faire jour, si l’on allait au-delà de la conception purement juridique des comptes. Ceux-ci se limitent au fonctionnement de l’assurance maladie. Les investissements ne sont pas étudiés. Or, ils sont considérables en matière hospitalière et dans l’industrie pharmaceutique, par exemple. D’une manière géné- rale, les aspects économiques de l’assurance maladie ne sont pas pris en considération. C’est une lacune, car on se prive de l’étude des retombées en termes d’emploi, en termes industriels, en termes de recherche, de formation et de prévention des risques.

Cet élargissement du champ des comptes nécessiterait la concertation entre les services de l’État, en particulier la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (la DREES) au ministère de la santé, les professionnels de santé et les partenaires sociaux. Il y a là un espoir et même une nécessité de rencontre entre les acteurs sociaux pour juger du rôle de l’assurance maladie sous tous ses aspects.

CONCLUSION

Ces considérations montrent la complexité et le nombre de questions à résoudre.

Sans doute conviendrait-il de doubler la loi de programmation quinquennale de santé publique annoncée pour ce printemps d’une démarche du même ordre pour l’assurance maladie. La clarification du rôle de chaque acteur y gagnerait. Encore
faut-il ancrer cette évolution dans le moyen terme, même si l’on commence tout de suite l’effort de transparence, comme s’y est engagé le Gouvernement. On ne peut pas nier que les dépenses de santé continueront à croître plus vite que la richesse nationale, ce qui est le cas de tous les pays développés. Il s’agit de déterminer, en regard, les conditions de la garantie socialisée pour une même période de cinq ans.

DISCUSSION

M. Maurice GUÉNIOT

Vous avez très justement insisté sur le fait que les dépenses de l’assistance maladie ne comportaient pas de dépenses d’investissement. On peut envisager tout de même une solution à la lumière d’exemples étrangers, notamment celui de la Suisse, pays très voisin du nôtre au point de vue structures sanitaires et soins médicaux. Mais, en Suisse, les Conseils d’administration des Hôpitaux qui existent également et sont aussi présidés par le maire sont impliqués de plus près dans la gestion. En effet, les recettes des Hôpitaux sont assurées en partie par l’État, en partie par le canton et en partie par les communes. Les Conseils d’administration sont donc impliqués dans le financement puisqu’ils font partie des responsables payeurs. Ceci peut faciliter des investissements importants, notamment en matériel.

Alors que le gouvernement préconise une décentralisation, pensez-vous que les mises au point d’un tel système pourraient se faire en France sans bouleversement de la législation et de la réglementation ?

Dans la forte poussée actuelle en faveur de la décentralisation, on pourrait envisager, en effet, une responsabilisation des collectivités locales dans les investissements et le fonctionnement des hôpitaux publics. La situation actuelle n’est pas satisfaisante : les maires président les conseils d’administration, mais les communes ne participent pas aux dépenses hospitalières. Leur contribution, avec un transfert de ressources à leur profit, pourrait aider, en particulier, à une meilleure rationalisation de la planification hospitalière dont les Agences Régionales d’hospitalisation ont seules la charge sur le plan local.

M. Gabriel BLANCHER

Ne sera-t-il pas indispensable, en définitive, de déterminer la part du produit national brut susceptible d’être consacrée à l’assurance maladie ? Et qui, dans notre pays, fixera cette part ?

La première précaution serait de distinguer les dépenses de santé des dépenses de l’assurance maladie. Rien ne s’opposerait à déterminer que les dépenses d’assurance maladie devraient progresser comme le Produit Intérieur Brut. M. Raymond Barre, quand il était Premier ministre, s’était prononcé en ce sens. La décision appartiendrait au Parlement qui vote la loi de financement de la sécurité sociale. Dans l’optique de la régulation des dépenses, il serait également opportun d’instaurer une politique cyclique de l’assurance maladie, de manière à alimenter des réserves en période de croissance économique pour les utiliser en période de dégradation de la conjoncture.


* Conseiller Maître à la Cour des comptes — 13, rue Cambon — 75100 Paris 01 SP. Tirés-à-part : Monsieur Michel Lagrave, à l’adresse ci-dessus. Article reçu le 13 février 2003, accepté le 11 mars 2003.

Bull. Acad. Natle Méd., 2003, 187, n° 3, 569-576, séance du 11 mars 2003