Published 22 January 2008
Éloge

Gilles Crépin*

Éloge de Michel Verhaeghe (1914-2006)

Gilles CREPIN*

Monsieur le Président, Monsieur le Secrétaire perpétuel, Madame, Mes chers Collègues, Mesdames, Messieurs, Il n’est pas d’usage dans notre compagnie qu’un membre correspondant prononce l’éloge d’un membre titulaire. Je voudrais vous remercier, Monsieur le Président et vous, Monsieur le Secrétaire perpétuel, d’avoir accepté cette exception à la règle et de me permettre d’honorer aujourd’hui la mémoire de mon maître, Michel Verhaeghe.

Je le dois, je crois, non seulement à la qualité des liens d’école qui m’unissaient à celui qui a guidé ma carrière mais aussi — vous pouvez en témoigner, Madame, à l’affection qui s’était tissée entre nous au fil des années.

Le Professeur Michel Verhaeghe nous a quittés le 19 mars 2006, quelques jours après avoir célébré entouré des siens son 92e anniversaire. Avec lui disparaît une figure universitaire et médicale fidèle à sa ville natale, et à la tradition familiale et l’Académie * Membre correspondant de l’Académie nationale de médecine perd un membre qui l’a marquée de sa forte personnalité pendant trente-cinq ans, quatorze ans comme correspondant et vingt et un ans en tant que titulaire.

Michel Verhaeghe, fils du Docteur Etienne Verhaeghe, est né à Lille le 13 mars 1914.

Il est le troisième garçon d’une famille de six enfants dont les deux aînés connaîtront eux aussi un parcours médical d’exception. Dès le très jeune âge, il se montre des plus brillants, sait lire à l’âge de quatre ans, entre en sixième à neuf ans et obtient sans difficulté son bac philo à dix-sept ans. Son rêve d’adolescent est d’imiter Saint-Exupéry, Mermoz et Guillemet et… de devenir pilote d’avion. Il passe son brevet de pilote amateur et s’adonne ensuite au pilotage. Mais son ambition est d’entrer à l’École de l’Air. Pour cela, il décide de recommencer sa terminale et obtient son baccalauréat en mathématique élémentaire. Ainsi s’ouvrent à lui les portes des classes préparatoires aux grandes écoles, du lycée Faidherbe de Lille d’abord puis du Lycée Louis Le Grand de Paris où il effectue un passage remarqué. Mais l’Ecole de l’Air de Salon reporte de mois en mois son ouverture. Il se rend alors compte qu’une autre vocation l’attend dans la plus pure tradition médicale familiale.

Dans le livre qu’il a consacré à sa famille, Michel Verhaegue décrit méticuleusement ce qu’il intitule avec respect et modestie la descendance médicale du Docteur Alexandre Verhaeghe, son arrière grand-père, nommé Officier de Santé en 1831.

Puis c’est son grand-père qui exerce la médecine jusqu’en 1903, dans un quartier très populaire de Lille.

Son père pour qui il avait une réelle et légitime fascination se prépare à un avenir universitaire prometteur. Interne puis Chef de clinique, il poursuit une double formation médicale et chirurgicale. Mais la grande guerre éclate et ses espérances universitaires s’éloignent. A son retour dans la vie civile, il exerce à la fois comme médecin de famille et comme chirurgien… une carrière difficilement imaginable de nos jours.

Ses trois fils choisissent une carrière médicale. André, frère aîné de Michel, devient Professeur à la Faculté de Médecine de Lille où il crée la chaire de Rhumatologie.

Jacques, le cadet, fera carrière d’anesthésiste. Le fils de ce dernier n’est autre que notre collègue, Pierre Verhaeghe, Professeur de Chirurgie à l’Université d’Amiens et membre de l’Académie de Chirurgie.

La tradition familiale ne s’arrête pas là. Deux des cinq enfants de Michel Verhaeghe ont également embrassé la carrière médicale, l’un en radiologie, l’autre en gynécologie obstétrique, Yves un de mes fidèles élèves. Ses deux gendres sont chirurgiens, dont Jean-Christian Laurent sénologue reconnu.

Plus près de nous, une des ultimes fiertés de Michel Verhaeghe a été de voir deux de ses petits fils accéder à l’internat de Lille, l’un en cardiologie et le dernier…en chirurgie perpétuant ainsi une tradition médicale qui débouche sur une sixième génération.

Mais revenons maintenant sur la carrière de Michel Verhaeghe. Son entrée en médecine s’effectue sur un mode plutôt original et à tout le moins inhabituel.

Lorsqu’il renonce à son avenir de pilote, il quitte le lycée Louis Le Grand au milieu de l’année universitaire pour s’inscrire à la Faculté des Sciences de Lille où quatre mois plus tard, il est reçu major au PCB, l’année préparatoire aux études médicales de l’époque.

Les étapes ultérieures se succèdent au rythme effréné d’un étudiant ambitieux, pressé et remarquablement doué :

— Major de la première année de médecine et major du concours d’externat, — Nommé interne en fin de troisième année de médecine, et d’emblée il est affecté en Chirurgie générale.

Nous sommes alors à la veille de la seconde guerre mondiale, particulièrement cruelle dans le Nord de la France. Dès le mois de mai 1940, le médecin auxiliaire Michel Verhaeghe se retrouve seul médecin et chirurgien à l’Hôpital de Cambrai où pendant dix jours il opère, assisté d’une seule infirmière, trente blessés par jour et exposé aux bombardements, sans eau ni gaz ni électricité. Cette période, « intense, dramatique et merveilleuse » selon ses propres termes qu’il affronte avec une abné- gation et un dévouement exceptionnels, lui vaudra de recevoir la Croix de Guerre de 1939-1945.

Réintégré à la vie civile, il va alors connaître plusieurs évènements aussi importants que déterminants.

En 1942, il épouse Yvonne Levêque, jeune fille d’une famille médicale proche qui sera la compagne de sa vie, « sa bonne amie » disait-il parfois, admirée jusqu’au dernier jour. Madame, vous m’avez confié avoir connu avec lui une vie sans ombre et sans querelle, une vie exaltante, illuminée et heureuse malgré les charges harassantes d’un mari très sollicité et accaparé par son métier. L’autre rencontre, bien différente mais tout aussi décisive est celle de son patron. En effet, dès 1944, il devient le premier chef de clinique du Professeur Emile Delannoy. Ces deux personnalités au tempérament toujours tranché et parfois excessif vont se côtoyer : d’un côté le maître, « seigneur » incontesté de la chirurgie lilloise, brillant et tout puissant, fabuleux et magnétique, à ses moments dominateur et ombrageux à dit de lui son dernier élève, le Professeur Charles Proye — de l’autre, l’élève respectueux, discipliné, admiratif, épris de rigueur mais au caractère entier et parfois rebelle, sans concession avec l’équité, le mérite et l’amour propre.

A l’issue de cette collaboration parfois tumultueuse, c’est d’un commun accord que se décide la carrière de Michel Verhaeghe :

— L’agrégation en Chirurgie générale, — La cancérologie pour la pratique chirurgicale.

Avec le concours d’agrégation en 1952 commence réellement sa carrière universitaire. Michel Verhaeghe devient pour de nombreuses générations d’étudiants de troisième et quatrième année, dont je fus, un maître écouté et recherché. Ses fonctions antérieures de moniteur au Laboratoire d’Anatomie puis d’Anatomie pathologique lui valent d’être rapidement reconnu comme le symbole d’un enseignement complet et intégré. Ses cours sont autant de questions idéales pour les candidats au concours d’internat tant il manifeste de qualités pédagogiques :

— Précis dans les termes, imagés de formules percutantes dont je ne résiste pas à citer deux exemples qui ne sont pas sans rappeler Mondor : « un train peut en cacher un autre » pour les métrorragies silencieuses du cancer de l’endomètre.

« Il est criminel de ne pas faire un toucher pelvien quand on examine un abdomen » .

Il met un point d’honneur à réécrire chaque année l’intégralité de ses cours.

En 1962, il conquiert de haute lutte la chaire de Technique et de Thérapeutique Chirurgicale. Il n’hésite pas à effectuer un véritable tour de France prolongé jusqu’à Alger pour rencontrer tous les membres du Comité Consultatif des Universités. Ses juges sont alors conquis par sa volonté de valoriser la chirurgie expérimentale à Lille comme en France, et par son engagement à rester fidèle à cette chaire sans briguer celle de Chirurgie Générale dévolue, selon le désir de son Maître Delannoy, à Georges Lagache qui restera son ami.

À cette occasion, il reçoit le soutien de nombreuses personnalités, les Professeurs Gaudard d’Allaines, Sicard, Fontaine, Portmann, Jayle auxquels il témoignera toujours une indéfectible reconnaissance.

A 48 ans, il devient titulaire d’une chaire dont il fait rapidement modifier l’appellation officielle pour qu’elle devienne « Chaire de Chirurgie Expérimentale » et corresponde à deux de ses objectifs :

— Développer l’enseignement théorique de la chirurgie expérimentale.

— Permettre aux chirurgiens et aux chercheurs la mise au point de nouvelles procédures chirurgicales, en créant le laboratoire central et universitaire de chirurgie expérimentale à vocation pluridisciplinaire et polyvalente.

C’est ainsi que sont expérimentées à Lille les greffes et les transplantations rénales, pulmonaires et hépatiques. Plus tard, ce sont les premières tentatives de microchirurgie puis les premiers essais de cœlioscopie sur le porc avec stages d’entraînement et de perfectionnement pour les internes.

Cette activité inlassable savamment maîtrisée est reconnue en France, comme à l’étranger. Il est co-fondateur du Comité national pour le développement de la chirurgie expérimentale et de la Société Européenne de Chirurgie Expérimentale.

Malgré ses efforts, la chaire disparaîtra en 1983 à la fin de sa carrière universitaire par application de la loi Debré mais sa déception sera atténuée par le maintien de l’emploi en chirurgie générale et la pérennité du Laboratoire.

On ne peut tourner la page de la carrière universitaire sans évoquer l’attachement de Michel Verhaeghe au club Jean-Louis Faure dont il devient Président en 1977 et dont les membres chirurgiens en exercice ont en commun d’adhérer à l’esprit inculqué par son inspirateur, lui-même chirurgien, académicien, homme de Lettres et Poète dans sa conception du compagnonnage et de la formation permanente :

« L’art d’opérer ne s’enseigne que par l’exemple mais gardons-nous de l’enseignement d’un seul homme quelque grand qu’il puisse être. Allons partout prendre ce qu’il y a de bon » . « C’est un devoir pour nous tous. C’est une véritable obligation morale que de consacrer un peu de notre temps, même lorsque celui-ci est compté, à aller retremper aux sources nouvelles nos idées, nos procédés, nos méthodes opératoires » (L’Ame du chirurgien — 1935).

Chaque année se tient un forum où chacun peut faire part de ses innovations, de ses résultats ou de ses doutes. Pour Michel Verhaeghe c’est l’occasion d’y exposer ses avancées en cancérologie.

Son implication en cancérologie est précoce, totale et sans limite alliant une organisation scrupuleuse voire tatillonne, à une pratique chirurgicale exigeante, sans jamais méconnaître l’approche humaine, si délicate dans cette pathologie douloureuse.

Ses premiers contacts avec la réalité du cancer ont lieu dans le très vieil hôpital Saint-Sauveur, crée au début du XIIIe siècle et dont les locaux sont incroyablement vétustes. C’est ainsi que Michel Verhaeghe, admis comme chirurgien, devient l’un des principaux fondateurs en 1953 du Centre Oscar Lambret, centre de référence du cancer pour la région Nord-Pas-de-Calais.

— Il est nommé sous directeur jusqu’en 1966.

— Il est ponctuellement chargé du personnel. A titre anecdotique, la pénurie d’infirmières l’amène à se rendre à Saragosse en Espagne d’où il revient avec trente religieuses infirmières diplômées, une mère supérieure et même la pharmacienne du Centre, de quoi fonder une authentique communauté religieuse.

Au Centre Oscar Lambret, Michel Verhaeghe est avant tout le chef du Département de Chirurgie. Il y exerce avec une autorité naturelle, ferme et convaincante et le souci permanent de transmettre son savoir-faire aux juniors sans jamais tricher avec la vérité. Sa contribution en cancérologie a été considérable dans les pathologies les plus diverses, des tumeurs osseuses aux tumeurs de la parotide en passant par les cancers digestifs. Mais son domaine de prédilection sera la cancérologie gynécologique qu’il explore sous tous ses aspects. Son apport vraiment marquant concerne le diagnostic et le traitement du cancer du sein. Il est en France avec Redon l’un des promoteurs de la chirurgie conservatrice par mastectomie partielle. Ses travaux, sujet de publications en congrès, dans les sociétés savantes françaises et étrangères de renom, ainsi qu’à l’Académie nationale de Chirurgie et l’Académie nationale de médecine font toujours autorité en France comme à l’étranger. Cela lui vaudra d’être distingué aux Etats-Unis en 1977 par la nomination au titre de « Fellow of the American College of Surgery ».

Mais le trait dominant du cancérologue est avant tout son attitude vis-à-vis des malades. Son exigence à l’égard de lui-même comme de ceux qui l’entourent au quotidien ont pu laisser à penser à certains, je cite, « qu’il était à la fois un peu obsessionnel dans ses pensées et dans les tous les actes y compris chirurgicaux ». Pour l’avoir bien connu et bénéficié de son enseignement, je voudrais nuancer ce jugement. Son obsession est celle de la rigueur, en tout, dans la ponctualité, dans l’application des protocoles, dans ses scrupules à offrir aux opérés le meilleur de l’équipe. C’est aussi celle de l’honnêteté intellectuelle et morale dans la présentation de ses propres résultats.

Son obsession, son ambition permanente sont marquées par le souci scrupuleux de gagner la confiance des patientes. Il en parle en des termes éloquents au 79e congrès de l’Association Française de Chirurgie qu’il préside aux côtés d’un président d’honneur qu’il admire, le Professeur Jean Bernard : « On ne conçoit pas une confiance qui ne serait pas la manifestation, peut être inconsciente, d’une certaine espérance sinon d’un espoir » .

Cette volonté de ne pas abandonner les malades ira jusqu’à poursuivre pendant dix ans la surveillance de ses dernières opérées. Dans l’appartement de la rue Solférino à Lille, où il s’est retiré pour la retraite, il ouvre une consultation autorisée par le Conseil de l’Ordre et bien sûr gratuite.

Dernière facette de la personnalité de Michel Verhaeghe, l’univers académique occupe dans sa vie une place privilégiée. Il est nommé titulaire à l’Académie nationale de chirurgie en 1976. Il y présente douze lectures.

Mais c’est son admission à l’Académie nationale de médecine qu’il vit comme une réelle consécration. Correspondant en 1971, il est élu titulaire le 15 janvier 1985 dans la VIIIe section, réservée aux membres non résidents de province succédant à un autre lillois Claude Huriez.

Michel Verhaeghe y impose rapidement sa personnalité, exigeante, rigoureuse, respectueuse des bonnes manières, apôtre de ce que Malraux appelle « l’expérience de la conscience » avant d’émettre un jugement.

Tous ceux qui l’ont approché ont encore en mémoire la place qu’il occupe chaque semaine au fond de cet hémicycle et garde le souvenir de sa personnalité courtoise et raffinée. Il est particulièrement heureux de siéger aux côtés de confrères gynécologues dont il apprécie l’élégance voire la complicité : le Professeur Emile Hervet, le Professeur Pierre Magnin, puis le Président Claude Sureau et le Professeur Roger Henrion.

Michel Verhaeghe participe naturellement aux commissions de chirurgie et de cancérologie. Ses réflexions et ses interventions, toujours frappées du bon sens, se font avec autorité et conviction mais aussi parfois avec une véhémence incisive quant il s’agit de s’opposer aux idées reçues, voire aux idées tout court quand elles ne sont pas les siennes. Onze lectures durant sont mandat ont définitivement scellé son statut d’expert avisé et incontournable en cancérologie.

Mais son rôle à l’Académie de médecine, aussi pertinent soit-il dans le domaine scientifique, ne s’arrête pas là.

Les circonstances ont voulu que les héritières de deux éminents universitaires lillois sollicitent ses conseils pour l’attribution d’un legs. Il les guide dans cette démarche et veille à la réalisation de leur projet. C’est d’abord la veuve du Professeur Emile Delannoy, qui exécutant la volonté de son prestigieux mari fait don à l’Académie de deux appartements l’un situé à Paris Rue de Montalembert et l’autre sur la Croisette à Cannes. Le testament stipule encore « tout le reste de sa fortune, obligations, argent liquide et pièces d’or ». Ainsi est crée le prix Emile Delannoy-Robbe doté chaque année de trente-huit mille euros et destiné à récompenser des travaux de chirurgie expérimentale ou clinique. La veuve du Professeur Breton, pédiatre à Lille et collègue du Professeur Gernez-Rieux, ancien président de l’Académie Nationale de Médecine en fait de même. Souhaitant faire un don pour le cancer, maladie dont elle a été victime, elle est rapidement convaincue par Michel Verhaeghe de préférer l’Académie Nationale de Médecine aux autres associations en renom. Son legs en 1985 permet de doter chaque année le prix Gallet et Breton de trente-mille quatre cents euros pour aider à des progrès en cancérologie.

L’Académie perpétue ainsi l’intérêt porté par Michel Verhaeghe à ses deux disciplines fétiches : la chirurgie expérimentale et la cancérologie.

Cette personnalité altruiste de Michel Verhaeghe n’a cessé de se manifester tout au long de sa carrière et dans les domaines les plus divers. Elle trouve sans nul doute son inspiration, sa force et sa sagesse dans ses origines familiales, son éducation chré- tienne et dans sa passion marquée mais discrète et peu connue pour la philosophie, la littérature et la poésie. Ses préférences vont à Alain, à Prévert dont il récite un nombre impressionnant de vers, à Emile Verhaehen, à Jean Bernard dont il a gardé tous les livres dédicacés et aussi au père de Mowgli, Rudyard Kipling. Il a d’ailleurs affiché dans son bureau le célèbre poème « Pour être un homme », et dont ces vers symbolisent à merveille l’aspiration de Michel Verhaeghe à la sagesse :

« Si tu sais méditer, observer et connaître Sans jamais devenir sceptique ou destructeur Rêver, mais sans laissser ton rêve être ton maître Penser sans n’être qu’un penseur…

Alors… Tu seras un homme, mon fils » (in : Tu seras un homme, mon fils. Traduction d’André Maurois — 1918)

La Nation a reconnu tous ses mérites en le nommant chevalier de la Légion d’honneur en 1973, officier de l’Ordre national du Mérite en 1977, commandeur de l’Ordre des Palmes académiques en 1979.

À l’Académie nationale de médecine, il accède à l’Eméritat le 28 février 2006, quelques semaines avant de nous quitter.

On ne peut douter, au vu de cet étonnant parcours, que la très forte personnalité de Michel Verhaeghe ne lui ait assuré pleinement les moyens de ses ambitions. Il se plaisait à répéter que sa réussite n’aurait pu s’accomplir sans son épouse Madame Verhaeghe qui lui apporta sérénité dans les moments difficiles et apaisement dans les combats perdus auprès des malades. Toujours à ses côtés, elle a mené avec succès l’éducation de leurs cinq enfants qui, à leur tour, apporteront à leur couple l’immense joie d’une famille de quinze petits-enfants et de dix-sept arrière-petits-enfants. Au cours des dernières années, vous avez su, Madame, par votre présence, par votre affection, l’aider à surmonter l’épreuve difficile de la maladie, préserver sa lucidité pour rester le guide avisé et écouté de la famille, et entretenir un humour dont il ne s’est jamais départi. Jusqu’à son dernier souffle, vous l’avez accompagné avec un dévouement et un courage admirables.

A vous Madame, à vous ses enfants et ses amis, soyez persuadés que l’hommage que rend ce jour l’Académie nationale de médecine à l’un de ses meilleurs serviteurs laissera vivace le souvenir d’un homme de talent, fier de ses origines et de ses convictions, ferme dans ses opinions, modeste dans ses succès, celui d’un honnête homme qui aurait pu partager la très belle pensée de Jean-Louis Faure :

« La vie de chirurgien est une belle vie…et quand vient l’heure de la mort…il lui suffit d’entendre la voix de sa conscience murmurer à son âme apaisée qu’il a fait en ce monde plus de bien que de mal ».