Communication scientifique
Session of 22 novembre 2005

Effets indésirables des médicaments chez les sujets âgés

MOTS-CLÉS : médicaments/effets indésirables. prévention accident.. sujet âgé
Adverse drug reactions in the elderly
KEY-WORDS : accident prevention.. aged. drugs/adverse effects

Jean Doucet, Patrice Queneau

Résumé

Les effets indésirables des médicaments (EIM) sont plus fréquents et plus graves après 65 ans. Leur symptomatologie est très variée, voire atypique. Les médicaments en cause sont principalement les médicaments cardio-vasculaires, les psychotropes, les anticoagulants et les anti-inflammatoires non stéroïdiens. A côté de facteurs favorisant inévitables en rapport avec les altérations associées au vieillissement, il existe d’autres circonstances dont la correction peut diminuer les EIM : ces facteurs évitables de iatrogénèse concernent certaines caractéristiques des médicaments ainsi que certains comportements du prescripteur et/ou du malade. Compte tenu de l’impact humain et économique de la iatrogénèse en gériatrie, il est urgent de mettre en œuvre une véritable politique de prévention axée à la fois sur le développement de l’évaluation des médicaments chez la personne âgée et sur la diffusion institutionnelle d’informations à tous les professionnels de santé, aux malades et à leurs entourages, mais aussi à tous les citoyens.

Summary

Adverse drug reactions (ADRs) are more frequent and more serious in elderly patients (>65 years). Signs and symptoms of ADRs are varied and sometimes atypical. The culprit drugs are mainly cardiovascular and psychotropic agents, anticoagulants, and nonsteroidal antiinflammatory drugs. Some risk factors for ADRs are inherently due to aging, while others can be corrected. These preventable risk factors are related both to drugs themselves and to the behavior of doctors and patients. Given the major human and economic costs of ADRs in the elderly, a proactive prevention policy is urgently needed. This will involve more specific drug evaluation in the elderly, and better information for healthcare professionals and patients alike.

EFFETS INDÉSIRABLES DES MÉDICAMENTS CHEZ LES SUJETS ÂGÉS

Introduction

Bon nombre de maladies rencontrées en gériatrie nécessitent un traitement médicamenteux. Or, toute prise médicamenteuse s’accompagne d’un risque d’effet indésirable. Les personnes âgées sont plus exposées aux effets indésirables médicamenteux (EIM) pour de multiples raisons, principalement les comorbidités, le rôle du vieillissement lui-même n’étant pas le paramètre majeur [1, 2]. Certains facteurs favorisant les EIM sont évitables, d’autres non : la iatrogénèse médicamenteuse en gériatrie est loin d’être systématiquement assimilable à une erreur médicale. Quoiqu’il en soit, l’important est de diminuer la prévalence et/ou la gravité des accidents médicamenteux à partir des informations disponibles.

La recherche porte sur l’épidémiologie, l’analyse des facteurs favorisants et plus récemment sur l’évaluation du caractère évitable ou non des accidents [1, 3-8]. Les travaux de l’APNET, déjà plusieurs fois rapportés aux tribunes des Académies nationales de médecine et de pharmacie, en témoignent [8, 9]. Mais il reste à développer la mise en œuvre de mesures préventives efficaces et à en déterminer l’impact.

SYNTHÈSE DES ÉTUDES SUR LA IATROGÉNÈSE MÉDICAMENTEUSE EN GÉRIATRIE

Fréquence et gravité des accidents médicamenteux

La iatrogénèse est ici fréquente, grave, à l’origine de pertes d’autonomie, mais aussi d’une mortalité non négligeable [3, 10-14].

Les EIM sont en moyenne deux fois plus fréquents après 65 ans [15-17]. Ils sont aussi plus graves : 20 % des effets indésirables conduisent à l’hospitalisation [8, 16]. Dix à 20 % des hospitalisations de personnes âgées seraient dues à un EIM [8, 14, 18]. Le cas des EIM induits par les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) illustre cette situation avec des accidents digestifs graves, près de trois fois plus fréquents, une insuffisance rénale aiguë trois à quatre fois plus fréquente et une décompensation cardiaque deux fois plus fréquente [2, 19-25].

La gravité des EIM est en bonne partie liée à la fragilité des malades : un simple malaise peut entraîner une chute avec fracture conduisant à une perte d’autonomie.

Le diagnostic peut être retardé parce que la symptomatologie d’appel est peu spécifique (chutes, confusion) ou lorsqu’il est difficile de distinguer l’EIM des
symptômes de la maladie responsable de la prescription : c’est le cas de la confusion du malade dément sous psychotrope. Il faut ajouter la possibilité ‘‘ d’autoaggravation ’’ de la iatrogénèse : la confusion non rattachée à un sevrage en benzodiazépines peut être traitée à tort avec un neuroleptique, lui-même à l’origine d’une chute. C’est pourquoi le diagnostic d’EIM doit être systématiquement évoqué devant des signes compatibles avec l’administration d’un médicament et inexpliqués par l’évolution de la maladie [1].

Signes d’appel et médicaments en cause

La symptomatologie est principalement cardio-vasculaire, neuro-psychique et digestive, en rapport avec les médicaments prescrits (principalement à visée cardiovasculaire au sens large et psychotropes) [26, 27]. En revanche, le point d’appel clinique est souvent peu évocateur, à type de malaises, chutes, troubles de l’équilibre, altération de l’état général, anorexie, troubles cognitifs ou de vigilance. Les chutes sont d’autant plus graves qu’elles exposent à des traumatismes (crâne, fémur) et/ou à une perte d’autonomie (syndrome post-chute).

Globalement, les classes médicamenteuses sont d’autant plus responsables d’EIM qu’elles sont fréquemment prescrites (médicaments cardio-vasculaires, psychotropes), hormis les anticoagulants et les AINS qui comportent une iatrogénèse accrue.

Sur le plan cardio-vasculaire, l’hypotension artérielle (orthostatique ou permanente) a pour origine plusieurs mécanismes en rapport avec des médicaments divers : bien entendu les anti-hypertenseurs, les dérivés nitrés, mais aussi les antidépresseurs, les neuroleptiques et les antalgiques opioïdes [28]. Les troubles du métabolisme hydroélectrolytique (déshydratation avec ou sans hyponatrémie) sont généralement liés aux diurétiques. Les diurétiques, IEC, corticoïdes et laxatifs génèrent des dyskalié- mies graves (cardiopathie sous-jacente). L’insuffisance rénale peut être liée à la déshydratation ou à la prescription d’AINS, d’IEC ou d’aminosides, leurs associations majorant ce risque et sa gravité. Les troubles du rythme et/ou de conduction cardiaque , souvent graves, sont en rapport avec une dyskaliémie ou avec la prescription de digitaliques, bêta-bloquants, anti-arythmiques, inhibiteurs des canaux calciques non dihydropyridiniques, lithium.

Les troubles neuro-psychiques constituent près du quart des signes d’appel parfois pseudo-démentiels [2]. Il peut s’agir de troubles de la vigilance, de troubles de l’équilibre ou de troubles mnésiques. La gravité des accidents des psychotropes est liée aux chutes et à la sédation excessive qui peut entraîner des pneumopathies d’inhalation.

Certaines de ces situations sont en rapport avec des anomalies hydro-électrolytiques (diurétiques). Dans d’autres cas, les principaux médicaments en cause sont les anxiolytiques, les antidépresseurs, les neuroleptiques, les antiparkinsoniens, les opioïdes, les anesthésiques mais aussi les anticholinergiques, les AINS, les corticoï- des, les quinolones. Bon nombre d’effets indésirables des psychotropes sont liés à des diagnostics insuffisamment étayés (dépression masquant une démence débutante…), à des indications excessives (prescriptions de somnifère devant des anoma-
lies du sommeil uniquement liées au vieillissement…), à des durées excessives de prescription, sans réévaluation de l’efficacité et/ou de la tolérance du traitement, et à des associations injustifiées de psychotropes (par exemple deux benzodiazépines) ou de psychotropes avec d’autres médicaments agissant sur le système nerveux central (anti-hypertenseurs centraux, antalgiques opioïdes…), sans oublier les ‘‘ neuroleptiques cachés ’’ (métoclopramide) [29].

Les risques d’accidents hémorragiques sont majorés par les traitements anticoagulants pour des raisons multiples incluant notamment les dénutritions, les chutes, les erreurs d’observance, certaines comorbidités et des associations médicamenteuses (notamment avec les AINS) [30]. Les accidents hémorragiques sont aussi plus graves car la tolérance des sujets âgés à la déglobulisation est moindre [2]. L’aspirine à petites doses et les autres antiagrégants plaquettaires exposent aussi à un risque accru d’accidents hémorragiques [31, 32].

Les hypoglycémies sous insuline ou sulfamides hypoglycémiants sont volontiers atypiques et graves (symptomatologies volontiers neurologiques). En revanche, leur fréquence est mal évaluée [33]. Elles sont favorisées, d’une part par les altérations pharmacocinétiques et l’altération des mécanismes de contre-régulation, d’autre part par l’utilisation de produits de longue demi-vie d’élimination, la dénutrition, l’alimentation irrégulière, la surveillance insuffisante (en particulier lors d’un traitement oral) ou certaines associations médicamenteuses avec les sulfonylurées (AVK, AINS…) [34].

Les chutes iatrogènes proviennent de mécanismes divers en rapport avec l’administration de nombreux médicaments (antihypertenseurs, psychotropes…) : hypotension artérielle (globale ou orthostatique), troubles de la vigilance, anémie, hypoglycémie…[2, 35].

Les ulcérations gastro-duodénales sont principalement dues aux AINS. Les hépatites médicamenteuses et les autres signes digestifs sont peu évalués (interférences de pathologies associées).

Les symptômes anti-cholinergiques sont favorisés par la prise simultanée de plusieurs médicaments anticholinergiques. Ils sont provoqués par de nombreux médicaments de classes pharmacologiques variées (neuroleptiques, antidépresseurs imipraminiques…).

Les dysthyroïdies sont principalement liées à l’amiodarone Elles sont volontiers paucisymptomatiques et atypiques [36, 37].

L’incontinence urinaire peut être favorisée ou aggravée par la prescription de diuré- tiques ou de psychotropes.

Les accidents de sevrage médicamenteux concernent principalement les benzodiazé- pines (interruption par le malade lui-même ou à l’occasion d’une hospitalisation).

Les infections nosocomiales sont à la limite de la iatrogénèse médicamenteuse car elles sont souvent provoquées par des gestes invasifs (sondage vésical, sonde naso-
gastrique, injections parentérales…). Elles sont fréquentes et peuvent être aussi favorisées par une administration médicamenteuse : c’est le cas par exemple des pneumopathies d’inhalation favorisées par une sédation excessive au cours d’un traitement psychotrope ou opiacé [38].

La iatrogénèse médicamenteuse gériatrique n’est pas inéluctable : elle peut être prévenue, au moins partiellement

De nombreux facteurs, souvent associés, favorisent les EIM chez le sujet âgé. On considère que 30 à 60 % des effets indésirables seraient évitables en intervenant sur ces facteurs favorisants qui imposent des actions convergentes de la part des médecins, des pharmaciens, des autres soignants, mais aussi des malades et de leurs entourages [1, 4, 7, 8, 39-44].

Facteurs inévitables d’iatrogénèse

Certains facteurs inévitablement liés au vieillissement doivent être évidemment pris en compte lors de toute décision thérapeutique mais ils ne sont qu’inconstamment accessibles à des mesures de prévention :

— les modifications pharmacocinétiques à l’échelle individuelle (notamment modification de la distribution par diminution de la masse maigre et diminution de l’élimination rénale) ;

— les modifications des récepteurs à l’origine d’une sensibilité accrue aux antihypertenseurs, aux benzodiazépines, aux opioïdes…) ;

— l’altération de l’homéostasie ;

— le contexte polypathologique associant maladies chroniques et aiguës à des degrés divers ;

— le rôle aggravant d’une comorbidité aiguë qui n’est pas toujours rapidement contrôlable (déshydratation, décompensation cardiaque…) ; l’exemple de la canicule de l’été 2003 a été caractéristique…

Trois groupes de facteurs évitables, au moins partiellement — Facteurs évitables ‘‘ liés aux médicaments ’’

Nombreux sont les médicaments insuffisamment évalués chez les personnes âgées malgré les recommandations européennes [45]. Il est souvent très difficile d’extrapoler, en pratique médicale courante, les principes d’utilisation établis à partir de malades artificiellement sélectionnés au cours des essais thérapeutiques, les ‘‘ healthy young-old patients ’’ [2, 24, 46, 47]. Alors que la prévalence de la fibrillation auriculaire augmente avec l’âge, 20 % seulement des patients avaient plus de 75 ans au cours des cinq essais thérapeutiques principaux sur la warfarine en prévention des accidents vasculaires cérébraux ; de même, les personnes âgées ne constituaient
que 7 % des patients inclus dans la Stroke Prevention in Atrial Fibrillation Study [25]. Quatre-vingt trois essais thérapeutiques sur les AINS réalisés jusqu’en 1995, concernant 9600 malades, n’avaient inclus que 2,3 % malades âgés de plus de 65 ans et aucun malade de plus de 80 ans [48]. Récemment encore, près de 20 % des prescriptions inappropriées d’héparine de bas poids moléculaire à dose curative était liées à des résultats d’évaluation insuffisants chez le sujet âgé et chez l’insuffisant rénal [47].

Les médicaments à marge thérapeutique étroite et/ou à longue demi-vie doivent être évités ou utilisés avec une adaptation posologique et une surveillance accrue. Les digitaliques et les aminosides, notamment, atteignent volontiers des taux plasmatiques toxiques chez les sujets âgés pour des posologies appropriées aux sujets plus jeunes [2].

Les interactions médicamenteuses sont responsables de 15 % à 20 % des EIM, alors que la diminution du nombre de médicaments diminue significativement les accidents [8, 18]. Ces interactions proviennent de l’administration de plusieurs médicaments dans un contexte polypathologique ou de prescriptions ‘‘ excessives ’’ par certains médecins et/ou de prises inappropriées de médicaments par certains malades (psychotropes…). Or, l’incidence des EIM augmente avec le nombre de médicaments prescrits [8, 9, 16]. Ces interactions médicamenteuses sont d’autant plus insidieuses qu’elles peuvent concerner deux médicaments appartenant à des classes pharmacologiques différentes : c’est le cas de la potentialisation d’effets anticholinergiques au cours de l’association d’antidépresseurs tricycliques et de neuroleptiques.

— Facteurs évitables liés au prescripteur lui-même

Il ne s’agit pas seulement de l’absence de prise en compte des contre-indications ou des précautions d’emploi des résumés de caractéristique des produits [8].

Le médecin ne doit pas sous-estimer certaines modifications physiologiques liées au vieillissement . Le calcul de la clairance de la créatinine (formule de Cockroft et

Gault) objective l’altération de la filtration glomérulaire qui atteint près de 50 % des sujets après 80 ans. Il est nécessaire d’évaluer les risques de mauvaise observance (isolement social, troubles cognitifs ou psychiatriques…). La découverte d’une hypotension orthostatique influe inévitablement sur la prescription d’un médicament anti-hypertenseur (objectif tensionnel éventuellement moins bas, posologie initiale plus réduite…).

Le prescripteur doit évidemment connaître la maladie qu’il traite, mais il doit également tenir compte des maladies associées et des traitements prescrits par d’autres médecins. Il est donc impératif d’harmoniser les prescriptions des différents prescripteurs : le carnet de santé constituait à cet égard un outil efficace !

La prise en charge de la personne âgée impose de hiérarchiser ses maladies en privilégiant le traitement de celles qui comportent un risque vital à court ou moyen terme et celles qui altèrent sa qualité de vie.

La dépression, l’anxiété, l’insomnie et l’agitation entraînent souvent des prescriptions de psychotropes injustifiées par leurs durées et/ou leurs associations [8, 29, 49].

Certains médecins ne connaissent pas toujours parfaitement les médicaments qu’ils prescrivent. 7 à 10 % des personnes âgées ambulatoires ou institutionnalisées ont trois médicaments à action anticholinergique, voire davantage [15]. Des études nord-américaines ont noté que près du quart des personnes âgées ambulatoires et 12 % des malades en institution recevaient un médicament considéré comme inapproprié, c’est-à-dire sans efficacité démontrée, à dose inadaptée ou pouvant être remplacé par un autre produit moins dangereux : il s’agissait notamment de benzodiazépines, d’antidépresseurs très anticholinergiques ou de médicaments inefficaces sur la démence [1, 50-52]. Il est fréquent de voir associer, chez des malades atteints de maladie d’Alzheimer, un médicament anticholinestérasique et un médicament anticholinergique [53, 54].

Chez les déments, les troubles du comportement sont souvent mal acceptés par l’entourage (familial ou soignant) et peuvent conduire à une prescription excessive de sédatifs, a fortiori ‘‘ à la demande ’’, sans possibilité d’évaluation de l’efficacité et/ou de la tolérance [16-55].

Tout ‘‘ renouvellement d’ordonnance ’’ ou toute introduction d’un nouveau médicament, doit s’accompagner d’une ré-évaluation du traitement antérieur en termes d’efficacité, de tolérance et/ou d’interférence avec une pathologie nouvelle. Le médecin hésite souvent à ‘‘ dé-prescrire ’’ un médicament, en particulier lorsque celui-ci a été introduit par un autre prescripteur [56]. Il a tendance à relâcher la surveillance de médicaments, jusqu’à présent bien tolérés (psychotropes…). Or, le risque d’accident est d’autant plus important que les médicaments sont prescrits depuis plusieurs années et non surveillés [56].

— Facteurs évitables en rapport avec le comportement du malade : importance d’une éducation thérapeutique appropriée

Les erreurs d’observance des traitements touchent 60 % des personnes âgées, notamment celles atteintes de troubles cognitifs et/ou vivant dans un isolement social [57].

Les erreurs d’administration concernent plus spécifiquement les psychotropes et les médicaments inhalés, indépendamment de toute altération cognitive sous-jacente [16].

Quant à l’automédication , sa prévalence est mal connue mais semble importante.

Elle concerne notamment les AINS, les laxatifs et les hypnotiques avec leurs risques spécifiques [8, 16, 58].

L’information et l’éducation du malade et de son entourage diminueraient ces erreurs de comportement : 8 à 45 % des personnes âgées ne connaissent pas les indications précises de leurs médicaments [8, 16].

DIFFICULTÉS RENCONTRÉES POUR ÉVALUER ET/OU PRÉVENIR LA IATROGENESE

Limites de l’évaluation épidémiologique

Les résultats des enquêtes diffèrent selon le site de l’étude (domicile, hôpital ou institution), les modalités de recueil des informations, les classes médicamenteuses ou les EIM et le degré d’imputabilité retenu.

La prévalence et/ou la gravité d’un EIM chez le sujet âgé sont souvent sous-estimées :

c’est le cas des malades atteints de troubles cognitifs ou lorsqu’un symptôme est confondu avec le vieillissement normal ; c’est le cas aussi des accidents n’évoquant pas d’emblée la responsabilité de certains médicaments (exemple de l’hypotension artérielle avec un alpha-bloquant dit ‘‘ uro-sélectif ’’). Ailleurs, la prévalence et/ou la gravité des accidents sont surestimées : par exemple, la moindre tolérance à l’hypoglycémie ou à l’anémie en majore l’expression clinique [2].

L’imputabilité médicamenteuse est souvent mise en défaut par la disparition partielle des signes à l’arrêt du médicament responsable (notamment au cours des syndromes confusionnels survenant chez des malades déments) et par les fréquentes interactions médicamenteuses [18].

Quant au surcoût généré par la iatrogénèse , il est très difficile à apprécier en raison de l’interférence de la polypathologie constante chez les sujets âgés. Il est pourtant indiscutable et probablement majeur si l’on considère le nombre d’hospitalisations en rapport avec un EIM [8, 9, 59].

La nécessité d’un consensus sur les critères d’évitabilité

La responsabilité des nombreux facteurs favorisants évitables est diversement appréciée car il est impossible de prendre en compte l’ensemble des attitudes exposant aux EIM [7, 8]. Il existe des critères ‘‘ techniques ’’ (prescription d’un médicament contre-indiqué) et des critères comportementaux (automédication).

D’autre part, ne sont pas considérés habituellement les dysfonctionnements de l’organisation des soins, soulignés notamment par Georges David [8, 60, 61].

La liste des prescriptions médicamenteuses dites ‘‘ inappropriées ’’ de Beers n’est pas transposable dans tous les pays en raison d’habitudes de prescription différentes.

Cette liste devrait entre autres inclure un volet concernant les posologies et les durées inappropriées de traitements [62].

Des études interventionnelles peu nombreuses

Chez la personne âgée, un EIM résulte souvent d’une association de facteurs évitables et inévitables : une action préventive ne sera alors que partiellement efficace [7].

Les études interventionnelles publiées portent surtout sur l’impact de mesures visant à diminuer les prescriptions inappropriées ou mauvaises, inconstamment sur les EIM [47]. D’autre part, l’efficacité de ces mesures s’estompe avec le temps car elles n’induisent pas de modifications durables de comportement chez les prescripteurs et les patients.

Pourtant, certaines études menées en institution gériatrique ont montré que la diminution des prescriptions de médicaments inappropriés (psychotropes…) diminuait significativement les EIM sans altérer, bien au contraire, la qualité de vie des malades [41].

L’insuffisance d’évaluation des nouveaux médicaments en gériatrie

Aujourd’hui encore, les informations résultant d’essais thérapeutiques avant la mise sur le marché de médicaments d’utilisation non exclusivement gériatrique, menés chez les malades après 75 ans (voire après 70 ans seulement), sont inconstantes [63].

Or l’extrapolation aux malades âgés de résultats d’essais thérapeutiques, méthodologiquement indiscutables mais menés sur des cohortes plus jeunes, est périlleuse.

Parmi les multiples raisons expliquant cette situation, citons : — l’exclusion de fait des sujets âgés (maladies associées et/ou médicaments impossibles à arrêter transitoirement) ou l’inclusion uniquement de malades de moins de 70 ans, moins enclins à développer des EIM ; — la réticence des promoteurs (risques accrus d’EIM, évènements intercurrents, retards d’inclusions…) ; — l’inadaptation de certains tests (déficit sensoriel) ; — l’analyse a posteriori de résultats par sous-groupes d’âge aboutissant à des informations incomplètes (posologies inadaptées, comorbidités non prises en compte, sorties d’essais fréquentes et non documentées…) ; — sans oublier la difficulté souvent majeure d’obtention du consentement éclairé, pas seulement en cas de troubles cognitifs…

VERS UNE POLITIQUE DE PRÉVENTION EFFICACE ?

La prévention de la iatrogénèse médicamenteuse du sujet âgé doit devenir un objectif majeur et permanent de santé publique. Les réserves et limites méthodologiques précitées ne doivent pas la retarder. On dispose désormais d’informations suffisantes pour définir et assurer une politique de prévention.

Politique globale de prévention de la iatrogénèse médicamenteuse

Cette politique de prévention doit être à la fois institutionnelle, collective et individuelle, afin de toucher simultanément tous les acteurs : conseiller au médecin de corriger les prescriptions inappropriées de psychotropes sans informer simultané- ment le public expose à une moindre efficacité [64].

La démarche de prévention doit induire à la fois des modifications techniques et des modifications de comportement. Il est important d’informer rapidement le prescrip-
teur (nouvelle contre-indication d’un médicament…) et le patient (nouveau risque).

Il est tout aussi important de modifier certains comportements à risque (surveillance insuffisante des traitements, automédication, efficacité sur-estimée et risques sousestimés) [65].

A ce sujet, le développement actuel de l’évaluation gérontologique standardisée devrait être l’occasion d’adjoindre une évaluation systématique du bien-fondé et des risques des traitements suivis par les malades, parfois depuis de nombreuses années :

combien de médicaments anticoagulants pourraient être interrompus lorsque la situation cognitive devient précaire et que surviennent des chutes ? Combien de prescriptions d’amiodarone pourraient être interrompues chez des patients lorsqu’une fibrillation auriculaire est définitive ?

Développement indispensable de l’évaluation des médicaments en gériatrie

L’évaluation préalable de l’efficacité et de la tolérance des nouvelles thérapeutiques destinées aux malades âgés devient de plus en plus incontournable en raison du vieillissement de la population [63].

Sur le plan réglementaire européen, l’European Agency for the Evaluation of Medicinal Products (EMEA) a établi en 1995 des recommandations précisant les modalités d’évaluation des nouveaux médicaments chez les personnes âgées : leur respect est théoriquement indispensable à la constitution de dossiers pour l’autorisation de mise sur le marché (AMM) [45]. Les principales recommandations sont les suivantes : — les médicaments traitant des pathologies spécifiques de la vieillesse (démence…) et ceux fréquemment utilisés en gériatrie (antihypertenseurs, antalgiques, anticoagulants …) doivent être plus particulièrement évalués chez les sujets âgés ; — des études pharmacocinétiques spécifiques doivent être entreprises notamment par rapport à l’élimination rénale et/ou hépatique, ainsi que des études d’interactions avec des médicaments fréquemment associés en pratique ou en cas de marge thérapeutique étroite ; — des études pharmacodynamiques spécifiques doivent être entreprises pour les médicaments agissant sur le système nerveux central (psychotropes), ou si la comparaison des résultats obtenus entre les sous-groupes ‘‘ jeunes ’’ et ‘‘ âgés ’’ montre des différences indépendantes des modifications pharmacocinétiques ; — les études de phases II et III doivent inclure des sujets de plus de 65 ans et éviter les limites supérieures d’âge : évaluer le médicament après 75 ans en fonction de la population-cible ultérieure, inclure un nombre minimum de 100 malades en phase II (voire en phase III) pour des maladies non exclusivement gériatriques, ne pas exclure automatiquement les sujets avec maladie concomitante et mener des études spécifiques quant au retentissement du médicament sur les fonctions cognitives.

Sans attendre une mise en application plus conséquente de l’ensemble des recommandations de l’EMEA, il serait tout à fait possible dès à présent de prendre systématiquement des mesures contributives dès l’élaboration des essais thérapeutiques concernant les médicaments non exclusivement gériatriques : — en définis-
sant a priori quels médicaments relèvent d’études spécifiquement gériatriques ; — en proposant une méthodologie adaptée et réaliste (pour des essais prospectifs randomisés en phase II ou III) avec un nombre précis de malades pour chaque catégorie d’âges après 70 ans, des critères d’exclusion réduits et des critères d’évaluation adaptés, sans contrainte excessive pour le malade ; en prévoyant a priori une analyse du sous-groupe de sujets très âgés (plus de 85 ans) qui inciterait éventuellement à développer une étude complémentaire.

Quoiqu’il en soit, l’amélioration indispensable de l’évaluation pré-AMM ne dispensera jamais d’une évaluation complémentaire en situation réelle de prescription après mise sur le marché [63].

Autres démarches actuelles de prévention

En 1995 ont été publiées les recommandations de l’Agence Nationale pour le Développement de l’Evaluation Médicale (ANDEM) sur ‘‘ les prescriptions médicamenteuses chez les personnes âgées polypathologiques ’’ [66]. Plus récemment, plusieurs démarches et recommandations ont été publiées, ou sont sous presse, sur les prescriptions médicamenteuses chez les personnes âgées : il s’agit, notamment des recommandations de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (AFSSAPS) et de la Haute Autorité de Santé (HAS) [67-70].

Citons aussi les initiatives d’associations de représentants des professions de santé, d’associations de malades et d’autre part de l’industrie française du médicament (groupe ‘‘ Santé en Action ’’) destinées à délivrer aux malades et à tous les professionnels de santé une éducation thérapeutique adaptée et convergente pour prévenir la iatrogénèse chez la personne âgée [71].

CONCLUSION

La iatrogénèse médicamenteuse de la personne âgée est donc fréquente, grave et, dans bon nombre de cas, évitable. Nous avons vu qu’elle ne doit pas pour autant être systématiquement assimilée à une erreur médicale, compte tenu des difficultés majeures qu’il y a à manier la prescription des médicaments chez des personnes âgées, fréquemment atteintes par plusieurs maladies, tout particulièrement lorsque leur situation somatique, cognitive et psychique est fluctuante.

Trois étapes doivent être distinguées lors de la prise en charge thérapeutique d’un malade âgé polypathologique et polymédicamenté :

— avant de prescrire : prendre la décision thérapeutique personnalisée à chaque malade, au terme de la recherche attentive d’un ‘‘ accord mutuel librement consenti ’’, gage de meilleure observance d’un traitement dont les objectifs sont bien compris [72].

— lors de la prescription : discerner la meilleure attitude en fonction des maladies que l’on choisit de traiter et des risques auxquels on expose le malade.

— après la prescription : évaluer régulièrement l’efficacité et la tolérance du traitement, sans hésiter à ‘‘ dé-prescrire ’’ en cas de pathologie intercurrente modifiant les priorités de prise en charge. Cette évaluation thérapeutique doit s’appuyer sur les informations obtenues de l’ensemble des personnes intervenant auprès du malade (infirmières, pharmacien, kinésithérapeute, dentiste, auxiliaire de vie, famille…).

Enfin, pour compenser l’impossibilité d’obtenir un ‘‘ risque zéro ’’, il faut développer systématiquement un ‘‘ réflexe iatrogène ’’ afin de dépister précocement certains

EIM et diminuer ainsi leur gravité.

Prévenir la iatrogénèse de la personne âgée constitue le modèle même d’une démarche éthique faisant converger les intérêts humains, médico-scientifiques et économiques. C’est pourquoi il est impératif et urgent de mettre en œuvre une véritable politique axée à la fois sur le développement de l’évaluation des médicaments chez les personnes âgées et sur la diffusion institutionnelle d’informations à tous les professionnels de santé, aux malades, à leurs entourages, mais aussi à tous les citoyens au moyen d’un vaste programme pédagogique.

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DISCUSSION

M. Claude DREUX

Les essais chez les personnes ‘‘ âgées ’’ ou ‘‘ très âgées ’’ sont-ils pertinents ? En effet, les accidents médicamenteux chez ces personnes proviennent d’une accumulation variable d’insuffisance d’éliminations rénales, hépatiques, respiratoires, etc. Peut-on définir une population âgée homogène ?

Les essais thérapeutiques chez les personnes âgées sont pertinents et indispensables, mais ils doivent être adaptés. L’extrapolation aux personnes âgées d’informations obtenues chez des malades plus jeunes, insuffisants rénaux ou insuffisants cardiaques, ne suffit pas : les personnes âgées cumulent ces modifications à des degrés variables d’un individu à l’autre. Malgré l’hétérogénéité de cette population et les difficultés des essais thérapeutiques, l’évaluation des nouveaux médicaments doit permettre d’obtenir un minimum d’informations indispensable à leur mise sur le marché avec des conditions de sécurité acceptables. Mais elle devrait être systématiquement complétée par une évaluation, notamment de la tolérance, après mise sur le marché, dans les conditions d’utilisation quotidienne.

M. Roger NORDMANN

Les sujets âgés ne représentent pas un groupe homogène et les accidents médicamenteux surviennent particulièrement en cas d’altération de l’élimination rénale. Il paraît nécessaire, pour la prescription, de disposer d’une information sur la fonction rénale du patient. Dans son excellent exposé, Jean Doucet a cité le chiffre de 30ml/mn pour la clairance de la créatinine destiné à attirer une attention particulière lorsque sa valeur est inférieure.

Malheureusement, le prescripteur ne dispose généralement pas de la mesure de cette clairance mais, par contre, du coefficient de Cockroft calculé à partir de la créatininémie. Peut-on considérer ce coefficient comme une indication d’intérêt beaucoup plus important que la valeur de la créatinémie pour guider le prescripteur en présence d’un patient âgé ?

Votre question concerne à la fois la pratique de la détermination de la clairance de la créatininémie et la fiabilité du coefficient de Cockroft. Depuis quelques années, les laboratoires biologiques associent de plus en plus souvent le calcul de la clairance de la créatinine au résultat de la créatininémie. D’autre part il existe des réglettes facilitant ce calcul au lit du malade. En ce qui concerne le coefficient de Cockroft, il n’a pas été initialement validé avec un nombre suffisant de personnes de plus de 75, voire 80 ans et il s’avère moins précis que d’autres méthodes de calcul. Mais il est plus facilement utilisable en pratique. Le point important n’est pas que le prescripteur non spécialiste sache précisément si le malade a une clairance de la créatinine un peu supérieure ou un peu inférieure à 30 ml/mn ; c’est qu’il sache que le malade qu’il soigne a une altération de la filtration glomérulaire qu’il va devoir prendre en compte et surveiller.

M. Jean-Luc de GENNES

Dans les maillons du système humain des prescriptions et d’administration, le maillon ‘‘ infirmière ’’ n’est pas toujours en cause et se trouve très fréquemment remplacé par un ou plusieurs membres de la famille, spécialement chez les sujets âgés soignés à leur domicile. Le problème devient particulièrement aigu chez les patients âgés et leur entourage familial administrateur, également âgé, avec un risque des troubles de la mémoire dangereux aussi bien de la part du patient que de son entourage prescripteur. En ce cas, il faut essayer de rechercher et de proposer des solutions positives. La préparation, dès la veille, ou la matinée, de sachets transparents incluant le médicament à prendre, avec étiquetage sur chaque sachet, du nom du médicament, et de l’heure de prise, notamment pour les prises multiples fractionnées dans la journée ne serait-elle pas une solution ?

Il est effectivement important de développer toutes les possibilités techniques permettant de diminuer le risque fréquent d’erreur d’administration des médicaments en fonction des situations familiales, sociales et géographiques de chaque malade.


* Thérapeutique — Médecine gériatrique, CHU de Rouen. ** Membre de l’Académie nationale de médecine. *** Association pédagogique nationale pour l’enseignement de la thérapeutique (APNET). Tirés à part : Professeur Jean DOUCET, Service de Médecine Interne Gériatrique, CHU de Rouen, 76031 Rouen cedex. Article reçu et accepté le 14 novembre 2005.

Bull. Acad. Natle Méd., 2005, 189, no 8, 1693-1709, séance du 22 novembre 2005