Résumé
La crête neurale céphalique des vertébrés est une structure embryonnaire transitoire, porteuse d’informations de développement, capable de produire nombre de tissus de la face et du crâne, en particulier le squelette cartilagineux et ostéo-membraneux, les méninges, les parois vasculaires du système carotidien externe et interne, les tendons des muscles, le derme et la graisse faciale. De plus, elle possède de façon contemporaine de sa formation, puis de sa migration, l’aptitude d’agir sur le système nerveux central d’où elle a émigré, système nerveux central qui, à son tour, exprime FGF8, facteur trophique et mitotique nécessaire au développement des cellules de la crête neurale dans la face. Les actions réciproques entre le système nerveux central et la crête neurale et le rôle morpho-génétique dans la face de la crête neurale constituent quand ils sont défaillants les fondements de la très riche pathologie malformative faciale humaine en association avec le cerveau et ses nerfs. : ce sont des délétions squelettiques, musculaires et conjonctives faisant correspondre à un territoire atteint de la face une partie précise du cerveau. La face est du point de vue développemental et pathologique un continent anatomique, repaire et marqueur, du système nerveux central.
Summary
The cephalic neural crest is a transient embryonic structure, carrying built-in developmental information capable of producing numerous tissus in the head, in particular cartilaginous and osteomenbranous skeleton, meninges, vascular wall of the carotid system, tendons, dermis, facial adipose tissus. After formation and migration it acts on the central nervous system at the level from which it migrates., The central nervous system responds with Fg f8 expression, a mitotic and trophic factor for the development of cephalic neural crest in the face. Defective interactions between neural crest and central nervous system and the morphogenetic role of the neural crest in the face are at the origin of the facial malformations associated with those of brain and nerves. Skeletal, muscular and soft tissue defects, affect a facial territory corresponding to a precise region of the forebrain. The face in development and in pathology is a reflection of the morphological state of the brain.
INTRODUCTION
Les malformations crânio-maxillo-faciales dont la fréquence est de 1/700 naissances constituent un domaine de la pathologie humaine d’une grande variété séméiologique[1]. Elles sont associées fréquemment à des malformations oculaires et cérébrales. [2-4] Depuis 1950 [5] les acquisitions scientifiques concernant la crête neurale (CN), puis celles obtenues grâce à la construction de chimères embryonnaires caille-poulet méthode élégante découverte et généralisée par Nicole Le Douarin à partir de 1968 [6] ne cessent d’apporter un éclairage renouvelé et utile à ce domaine de la pathologie humaine. La CN des vertébrés est une structure embryonnaire transitoire et pluripotente qui se forme à partir du feuillet ectoblastique. Elle envahit précocement l’embryon grâce à ses propriétés migratrices ce qui en fait un quatrième feuillet embryonnaire dynamique. Le néologisme « neurocristopathie » crée en 1974 par R.P. Bolande [7] décrit ce nouveau domaine de la pathologie humaine, originaire de cette structure constituée de tumeurs, dysplasies et malformations.
La crête neurale : formation et migration [6]
La CN est présente tout le long de l’axe dorsal de l’embryon. Elle est identifiée au moment où la plaque neurale, se ferme dorsalement en un tube par contact des deux bourrelets neuraux. Il s’en suit la formation des deux contingents cellulaires droit et gauche de cellules de crêtes neurales (CCN). Initialement stationnaires car épithé- liaux ils deviennent mésenchymateux et migrants. Les CCN envahissent, selon une direction dorso-ventrale l’embryon, en se divisant et migrant sous l’ectoderme dans la matrice extra cellulaire riche en protéoglycans et fibronectine du mésoderme para-axial déjà présent, d’abord latéralement au système nerveux, puis le long de l’intestin pour finir par se stabiliser, en formant de nombreuses structures organiques (tableau 1).
Les cellules de la crête neurale céphalique n’expriment pas de gène Hox
Quand on considère la destinée des CCN, deux territoires sont différentiables : l’un est facial et crânien constituant la tête et l’autre est cervical et corporel. Ces deux territoires paraissent différents dans leur contribution au développement embryonnaire et dans leur modalité d’expression génétique. [tableau 1].
TABLEAU 1. — Phénotypes produits par la crête neurale Alors que la partie cervico-corporelle de la CN envahit l’embryon et exprime les gènes Hox (Code Hox), dans la tête (la face et le crâne) les cellules de la crête neurale céphalique (CCNC) n’expriment pas de gène Hox. Aussi l’absence de code Hox au niveau de la partie la plus rostrale de la crête neurale n’est-elle pas étrangère à l’apparition et à la formation de la tête des vertébrés (squelette cartilagineux et membraneux, enveloppes et segment antérieur de l’œil) et à sa grande diversité au cours de l’évolution.
Actions réciproques entre CCNC et système nerveux central
Les CCNC qui n’expriment pas de gène Hox sont en interaction avec le système nerveux central en développement. Cette interaction a été mise en évidence par l’ablation bilatérale des CCNC [8] ce qui génère l’absence du massif facial ainsi qu’une malformation exencéphalique du mésencéphale et du prosencéphale coïncidant avec la perte bilatérale de l’expression de FGF8 dans la région correspondante des deux placodes olfactives. Il est possible d’éviter cette délétion conjointe de la face et du cerveau par la mise en place d’une source exogène de FGF8 [9, 10]. La réparation faciale s’élabore à partir d’un petit contingent de CCNC laissé en place qui migre du rhombencéphale en colonisant transversalement et ventralement le bourgeon nasofrontal et le premier arc branchial. Ces résultats suggèrent que les cellules de la crête neurale céphalique à destinée faciale exercent une signalisation de type paracrine localisée qui induit et maintient la production de FGF8 dans le
neuroépithélium prosencéphalique, production qui à son tour a une action prolifé- rative trophique et migrative sur les CCNC de ce niveau. Ces dernières envahissent alors les structures péri-oculaires, le bourgeon nasofrontal et la face. Les CCNC sont ainsi à l’origine d’un signal qui déclenche et maintient l’expression de FG F8 dans la partie antérieure de la plaque neurale et du bourrelet neural adjacent où sont localisées les deux placodes oflactives.
La crête neurale céphalique est responsable du bourgeonnement de la face et de sa construction squelettique
Les CCNC massées autour des deux placodes olfactives et celles qui colonisent les bourgeons maxillaires et mandibulaires se divisent activement et assurent le développement volumétrique de la face par les bourgeonnements faciaux expansifs péristomodéaux, en y exprimant de nombreux gènes. Initialement au nombre de cinq, ces bourgeons (un naso-frontal, deux maxillaires, deux mandibulaires) convergent et fusionnent par apoptose cellulaire ectodermique en délimitant les deux futures cavités nasales et buccales. Dans ces bourgeons se différencient les structures squelettiques ostéo-cartilagineuses nasales, maxillo-mandibulaires [14] et dentaires.
Les CCNC constituent un domaine d’équivalence
Dans le domaine dépourvu de gènes Hox, les CCNC ont l’aptitude de générer toutes les structures faciales, ce que ne semble pas pouvoir faire les cellules de la CN du domaine Hox exprimé. Les CCNC qui expriment les gènes Hox sont incapables de se substituer aux CCNC qui n’expriment pas ces gènes et de se différencier en squelette osseux, cartilagineux, en sclérotique et structure spécialisée du segment antérieur de l’œil [11].
Les CCNC ne paraissent pas disposer d’une autonomie de différenciation mais semblent bien influencées par leur environnement [13] ainsi que par des facteurs moléculaires produits de l’interaction entre elles-mêmes et le système nerveux central d’où elles ont émigré [10]. D’autre part, il est démontré que l’endoderme générateur de l’intestin le plus antérieur de l’embryon confère aux CCNC l’aptitude de se différencier en chondrocytes tout en signalisant la forme des pièces du futur squelette cartilagineux facial [12].
La tête est constituée de territoires encéphalo-faciaux
Alors que la face et le cerveau ont une communauté embryonnaire originelle à partir du feuillet ectoblastique, l’extrapolation des résultats récents des expériences chez l’embryon d’oiseau, démontrant les interactions moléculaires du développement entre les CCNC et le système nerveux, a en clinique humaine des applications : la face est constituée d’unités embryologiques autonomes dont chacune est liée originellement au segment cérébral d’où les CCNC sont issues :
— au bourgeon nasofrontal correspond le prosencéphale (télé-diencéphale), — aux bourgeons maxillaire et mandibulaire correspondent le mésencéphale et rhombencéphale antérieur.
Ces données embryologiques dynamiques permettent d‘analyser les malformations de la face et de leurs associations avec les malformations oculaires, cérébrales et nerveuses [15].
Malformations naso-frontales
Le cerveau prosencéphalique (tele-diencéphale) et les structures naso-frontoprémaxillaires forment une unité embryonnaire originelle. La pathologie humaine est très riche de tableaux cliniques associant malformations faciales médianes et cérébrales antérieures. Elles s’expriment par des hypoplasies squelettiques nasales, ethmoïdiennes, et prémaxillaires associées à un cortège d’anomalies cérébrales que sont les holoprosencéphalies lobaires semilobaires et pseudolobaires, c’est-à-dire les arhinencéphalies. Elles sont rencontrées majoritairement chez les fœtus atteints de Trisomie 13 ou de Trisomie [15-19]. Ces malformations sont aujourd’hui diagnostiquées par échographies anténatales et les fœtus qui en sont atteints font l’objet parfois d’interruption médicale de grossesse. L’annulation de la fonction du gène Sonic Hedgehog chez la souris entraîne une agénésie nasale avec cyclopie et holoprosencéphalie, phénocopie des trisomies précédentes [20]. D’autres anomalies faciales représentées par des hypoplasies nasales, ou des fentes labio-maxillaires bilatérales s’associant à des micro ou anophtalmies, comportent également des malformations prosencéphaliques avec déficit endocriniens hypothalamo-hypophysaires [19].
Dans une étude systématique du cerveau de trois cents nourrissons malformés de la face obtenue par imagerie scannérologique des malformations prosencéphaliques ont été mises en évidence dans 13 % des cas [15].
Malformations maxillo-mandibulaires
Elles constituent le groupe des dysostoses mandibulo-faciales connues en pathologie humaine sous le nom de syndrome de Goldenhar, de Franchescetti et otomandibulaire. Elles comportent des hypoplasies du squelette facial latéral et mandibulaire, du pavillon d’oreille et des muscles masticateurs.
Ces syndromes présentent parfois des paralysies totales ou partielles du nerf facial et une extension atteignant les muscles oculo moteurs dépendant pour leur innervation des troisième quatrième et sixième paires des nerfs crâniens et dont les moto-neurones sont situés plus rostralement par rapport au précédent.
Le syndrome de Goldenhar comporte des malformations externes des paupières du pavillon de l’oreille, un dermoïde situé sur la partie externe de la conjonctive et des fibrochondromes jugaux et pré-auriculaires [1].
Le syndrome de Franceschetti ou Treacher Collins présente des agénésies du squelette facial latéral, affectant l’os malaire, l’arcade zygomatique, le tympanal, le condyle et les branches montantes mandibulaires, ainsi que des hypoplasies des muscles masticateurs [1].
Le syndrome oto-mandibulaire ou syndrome du premier arc comporte une agénésie partielle ou totale de l’hémi-mandibule, du marteau, de l’enclume et une hypoplasie plus ou moins importante du pavillon de l’oreille. Dans cette malformation sont absents le conduit auditif et la caisse du tympan [1].
Une étude systématique réalisée par imagerie cérébrale chez vingt-deux enfants qui présentaient à la naissance des malformations apparentes du premier arc branchial, de ses dérivés et du bourgeon maxillaire, objective dans 36 % des cas, des malformations du tronc cérébral dans sa partie rostrale et dans 68 % des cas, des anomalies des nerfs correspondants. Les anomalies du tronc cérébral consistaient en des malformations de la fosse postérieure et de la protubérance annulaire, des méga grands citernes et des kystes dermoïdes du cervelet. Les anomalies nerveuses consistaient en des paralysies du nerf trijumeau, du nerf facial, et du nerf moteur oculaire externe. Il faut ajouter que dans ce groupe des nourrissons malformés, 18 % des enfants présentaient des microphtalmies témoignant de la défaillance de la crête neurale, du même niveau lors de la génèse de la sclérotique, de la choroïde, et du segment antérieur de l’œil ainsi que des paralysies oculo-motrices [15].
CONCLUSION
La segmentation originelle de la face imposée par la CN qui émigre du cerveau, permet d’établir une grille de lecture et d’analyse clinique des malformations céphaliques. Les tissus conjonctifs du massif facial, en tant que dérivés des CCNC sont des marqueurs de la neurulation, étape embryonnaire au cours de laquelle se constituent le système nerveux central et les nerfs sensori-moteurs qui lui sont associés. Toute anomalie quantitative ou qualitative de l’expression phénotypique des dérivés des CC NC dans un territoire facial donné, s’exprimant par une malformation dans un bourgeon facial constitue un signe prédictif d’une anomalie du segment cérébral et du ou des nerfs correspondants. L’examen neurologique du nourrisson atteint de malformation faciale même mineure est indispensable. Son résultat permet de guider les explorations non invasives en imagerie tomodensitométrique ou par résonnance magnétique nucléaire.
REMERCIEMENTS
Je remercie chaleureusement Madame le Professeur Nicole LE DOUARIN avec qui j’ai travaillé durant vingt-cinq ans de 1980 à 2005 dans le laboratoire de l’Institut d’Embryologie cellulaire et moléculaire du CNRS et du Collège de France de Nogent sur Marne, ainsi que le Docteur Sophie CREUZET pour sa collaboration.
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Nature, 1996, 383 , 407-413.
DISCUSSION
M. André GOFFINET
Connaît-on un rôle de l’acide hyalorunique ou de l’hyaluronidase dans la migration des cellules de la crête neurale ?
L’acide hyaluronique, molécule extra-cellulaire est déterminante pour la migration des cellules de la crête neurale. La hyaluronidase génère un arrêt de cette migration.
M. Jacques BATTIN
La notion que la face est le prédicat du cerveau a été très utile en syndromologie malformative et en endocronologie infantile. En effet l’absence d’une dent ou une simple hypoplasie de l’émail chez un enfant de petite taille conduit à rechercher et à traiter un déficit en hormone de croissance montrant l’implication du diencéphale dans les neurochristopathies qui pré- sentent un spectre malformatif très large.
La réalité embryologique et développementale de la crête neurale, son rôle direct dans le développement de la face et indirect dans le développement du système nerveux central, la richesse et la diversité des phénotypes produits permettent grâce au visible de la séméiologie clinique faciale de rechercher l’invisible, telles que les anomalies du système nerveux central. Dans cette optique, nombre d’anomalies morphologiques faciales, même mineures peuvent constituer autant de signes prédicatifs d’anomalies morphologiques et fonctionnelles cachées : les anomalies de l’émail dentaire, c’est-à-dire de la morphogénèse de la dent associées au déficit en hormone de croissance avec agénésie de l’adéno-hypophyse et interruption de la tige en sont un exemple.
M. Jacques BAZEX
Quels seraient les liens entre les anomalies du développement et la carcinogénèse (exemple de la noevomatose basocellulaire) ?
La grande diversité des phénotypes cellulaires produits par la crête neurale (cellules nerveuses, osseuses, neurones bipolaires et multipolaires, cellules à calcitonine, cellules adrenergiques des médullo-surrénales, pigmentaires, cartilagineuses), illustre que de nombreux tableaux pathologiques établis grâce à la combinatoire des divers phénotypes produits soient observés. La neurofibromatose, ou maladie de Recklinghausen et le syndrome de Gorlin en sont les exemples les plus démonstratifs car pouvant associer tumeurs bénignes, tumeurs malignes, dysplasies, malformations, anomalies secrétoires, illustrant ainsi que la crête neurale puisse être génératrice dans le même registre de tumeurs malignes et des malformations. Dans cette optique, les liens entre anomalies du développement et carcinogénèse sont très étroits et constituent un domaine de recherche très prometteur.
M. Denys PELLERIN
Les travaux de Madame Le Douarin à Gérard Couly ont permis de rapporter à la migration des cellules de la crête neurale l’ensemble des anomalies morphologiques de la face et du cou jusqu’alors regroupées dans divers cadres syndromiques, mais également observées souvent isolées et relativement banales (fente labiale, syndrome du deuxième axe, pathologie throïdienne, etc.) et qui ne sont heureusement pas associées à une anomalie cérébrale. Ce fait conduit à souligner les problèmes éthiques qui peuvent surgir lors de la découverte prénatale de l’anomalie. Une assimilation trop hâtive ne risque-t-elle pas de conduire à une interruption médicale de grossesse alors qu’il s’agit en fait d’une anomalie relativement mineure et parfaitement curable par un geste chirurgical approprié ?
Chez le fœtus humain la mise en évidence par échographie d’une malformation faciale a un intérêt prédicatif majeur : l’échographiste va devoir vérifier le reste des constituants de la tête : cerveau, yeux, capsule otique et canaux semi-circulaires. Dans la très grande majorité des anomalies faciales, il n’existe pas d’anomalie cérébrale et nerveuse associée.
Mais dans 5 % des observations aujourd’hui, il existe des anomalies cérébrales morphologiques mêmes mineures.
* Chirurgie maxillo-faciale, stomatologie et chirurgie plastique. Hôpital Necker-Enfants-Malades 75015 Paris et Muséum National d’Histoire Naturelle. PARIS USM 501 CNRS UMR 5166. Tirés à part : Professeur Gérard COULY, même adresse.
Bull. Acad. Natle Méd., 2006, 190, no 9, 1935-1943, séance du 5 décembre 2006