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Session of 6 mars 2012

Conclusion

Pierre Bégué *

 

CONCLUSION

Pierre BÉGUÉ *

Rassemblés sous le terme « vaccins humains, vaccins animaux même combat » les quatre exposés de cette séance originale ont couvert les aspects modernes de la vaccinologie : progrès dans la création de nouveaux vaccins, en particulier grâce au génie génétique, réponses de prévention face à des infections émergentes sévères et problèmes nouveaux posés dans l’application des recommandations vaccinales.

Emmanuel Grimprel a décrit dans le premier exposé deux vaccins nouveaux et originaux. La vaccination méningocoque B était impossible jusqu’à ces dernières années. Deux étapes ont été récemment franchies, la première grâce à des vaccins protéiques « vésiculaires » très spécifiques mais efficaces sur des souches très virulentes de méningocoque B ayant sévi en Norvège, en Nouvelle Zélande et en France en Seine maritime. La seconde est la recherche de protéines plus universelles permettant de protéger contre des souches très variées, ce qui a pu être réalisé par des méthodes biochimiques puis génétiques (vaccinologie reverse). Plusieurs vaccins recombinants sont en cours d’essai de phase 3, faisant entrevoir une protection contre la majorité d’infections invasives à méningocoques B, avec une extension possible à d’autres sérotypes. La vaccination des enfants contre la grippe pose également des problèmes d’administration et d’efficacité. Ils semblent en partie résolus grâce à un vaccin grippe d’administration nasale, efficace mais seulement pour les enfants à partir de deux ans.

Au cours de l’exposé suivant Stéphan Zientara a montré comment la vaccination animale pouvait répondre à l’émergence récente d’infections virales graves. Une importante épidémie de fièvre catarrhale ovine s’est développée en Europe en 2006 et deux vaccins inactivés disponibles dès 2008 ont pu parvenir à juguler cette redoutable épizootie en 2011 (zéro cas). Autre infection émergente la redoutable infection à arbovirus West Nile a largement essaimé du Nil vers la majorité des continents dont l’Amérique du Nord en 1999. Son extension a pu être enrayée par deux vaccins dès 2002 chez le cheval, aux Etats-Unis.

Paul-Pierre Pastoret a su, grâce à son expérience internationale, nous donner la vision globale de la vaccinologie animale. Les vaccins vétérinaires représentent 26 % du marché des médicaments vétérinaires. En effet les vaccins sont d’une très grande variété car ils sont spécifiques à la fois selon les maladies et selon les espèces.

 

Contrairement aux vaccins chez l’homme leur choix dépend aussi des contraintes économiques, certaines espèces dites mineures étant privées de vaccins. Les vaccins vétérinaires ont connu en 2011 un succès important par l’éradication de la peste porcine qui est donc la deuxième maladie infectieuse éradiquée sur la terre après la variole. L’innovation est très présente et variée en matière de vaccins vétérinaires, connaissant des solutions souvent originales : vaccination contre la rage par appâts, vaccination du poulet in ovo, et récemment vaccins DIVA qui permettent de différencier les animaux infectés des animaux vaccinés, grâce à un test sérologique adjoint et pour certaines maladies comme la fièvre aphteuse.

Malgré tous ces progrès vaccinaux remarquables l’application n’est pas toujours évidente lorsqu’un refus vaccinal se développe, essentiellement pour les vaccinations humaines mais parfois aussi en médecine vétérinaire (fièvre catarrhale ovine). Nous avons montré dans le dernier exposé que le refus vaccinal en Occident emprunte plusieurs visages, qu’il faut bien connaître pour y répondre le mieux possible. Ces refus aboutissent à des retards ou des oublis de vaccination, sinon à des refus complets, dont la conséquence finale est l’insuffisance de la couverture vaccinale. Il en résulte la persistance de maladies : poliomyélite en Afrique ou rougeole en Europe. L’analyse des publications de plus en plus nombreuses sur ce sujet montre que les mesures de santé publique telles que gratuité des vaccins, obligation ou recommandation, adaptation du calendrier vaccinal, sont à adapter à chaque pays mais ne donnent pas de solution parfaite. En fait, les solutions préconisées sont aussi variées que les causes, à savoir l’instauration d’une information plus pertinente et moderne des personnes sur le rapport bénéfice-risque des vaccins , la révision de la formation universitaire pour les médecins et les soignants en vaccinologie, le renforcement de l’enseignement des sciences à l’école. L’influence grandissante d’Internet justifie une réflexion nationale et internationale pour lutter contre la nuisance actuelle des informations non scientifiques et erronées.

 

<p>* Membre de l’Académie nationale de médecine.</p>

Bull. Acad. Natle Méd., 2012, 196, no 3, 619-620, séance du 6 mars 2012