Résumé
La médecine des années qui viennent sera confrontée à un défi majeur : quelles stratégies proposer aux patients pour pallier les conséquences du dysfonctionnement des tissus dont la fonction se dégrade avec le vieillissement ou la maladie. Deux options : l’option médicament, et l’option « remplacement des cellules défaillantes ». Beaucoup a été dit et écrit sur les cellules souches qui suscitent depuis plusieurs années à la fois espoirs et questionnements, et souvent controverses ; espoir parce qu’elles ouvrent un champ radicalement nouveau en thérapeutique ; les médicaments classiques pallient les conséquences délétères du dysfonctionnement de l’organisme, alors que la thérapie cellulaire propose de restaurer la fonction tissulaire par la production de nouvelles cellules. Cette approche est donc totalement différente aussi de la transplantation de l’organe entier, qui ne bénéficie qu’à un nombre restreint de patients. Questions, car il n’y a pas une, mais toute une variété de cellules souches, identifiées à tous les âges de la vie, et qu’un seul terme pour désigner des entités aussi différentes est source de confusion et d’ambiguïté. Questions aussi parce que notre impatience accepte mal qu’on la mette en face de la réalité : si l’on veut faire des cellules souches un outil de progrès thérapeutiques majeurs, on ne pourra pas se dispenser d’années de recherche cognitive disséquant les mécanismes moléculaires qui gouvernent le statut multi- ou pluripotent d’une cellule. Questions encore, parce que plus une cellule souche est jeune, plus son potentiel est large, et plus elle a de chances d’être efficace longtemps, alors que l’utilisation des cellules souches embryonnaires (CSEh) est controversée pour des raisons éthiques. Cela fait surgir des interrogations et des controverses, sur la redondance ou l’équivalence de telle ou telle catégorie de cellules ; or il est essentiel pour le chercheur de pouvoir, dans le respect de la réflexion éthique de chacun et d’un encadrement réglementaire adapté, étudier toutes les cellules souches dans leur diversité — outils complémentaires et non concurrents. C’est indispensable si l’on veut espérer proposer à l’avenir au plus grand nombre de patients une solution thérapeutique adaptée, un espoir dont nul ne doute qu’il soit consensuel. Nous présenterons ici très schématiquement les trois types de cellules souches : les cellules souches embryonnaires pluripotentes, les cellules souches fœtales et adultes, et les cellules pluripotentes adultes issues de la reprogrammation de cellules somatiques. Seules les deux premières catégories ont une fonction physiologique dans l’organisme, responsables respectivement de la création de nos tissus et organes pour les premières, et du maintien de la fonctionnalité de ces tissus à l’âge adulte pour les secondes.
Summary
Medicine will be faced with a major challenge in coming years, namely how to treat for tissue dysfunction due to disease and aging. There are two basic options: drug therapy and cell therapy. Stem cells have been the subject of intense speculation and controversy for several years, as they open up radically new therapeutic possibilities. Classical drugs can only smoothen consequences of tissue dysfunction, whereas cell therapy has the potential to restore tissue function by providing fresh cells. Cell therapy is totally different from organ transplantation, which can only benefit a limited number of patients. The use of the generic term ‘‘ stem cells ’’ to designate a whole variety of cell types that are present throughout life, is a source of confusion and ambiguity. It will take years of cognitive research to unravel the molecular mechanisms that govern a stem cell’s multi- or totipotent status before we can fully exploit this therapeutic tool to the full. The younger a stem cell the greater its potential and, probably, the more durable its benefits, but the use of embryonic stem cells raises ethical issues. The redundancy or equivalence of different categories of cells is another source of controversy, yet researchers must be able to study stem cells in all their diversity, as complementary rather than competitive alternatives, in an acceptable ethical and regulatory environment. We briefly describe the three types of stem cells : pluripotent embryonic stem cells, fetal and adult stem cells, and pluripotent reprogrammed adult somatic cells. Only the former two categories have physiological functions: the first gives rise to tissues and organs, while the second maintains tissue function during adulthood.
Laure COULOMBEL *
Bull. Acad. Natle Méd., 2009, 193, no 3, 535-536, séance du 3 mars 2009